• « Des risques sanitaires inconsidérés » : l’opposition gronde contre le projet de méga-piscine de surf en Gironde
    https://www.lefigaro.fr/bordeaux/des-risques-sanitaires-inconsideres-l-opposition-gronde-contre-le-projet-de


    Ce projet de « surfpark » est situé à seulement 50 kilomètres de l’océan. OLIVIER MORIN / AFP

    Par Jean Cittone

    Plusieurs associations contestent le permis de construire du « surfpark » de Canéjan, mettant en avant un gaspillage d’eau potable, l’exposition éventuelle des visiteurs à des bactéries et à des substances polluantes.

    Le Figaro Bordeaux

    Le chantier semble prendre l’eau de toute part. En Gironde, un projet de méga-piscine à vagues, qui permettrait de faire du surf dans un milieu aquatique contrôlé à Canéjan, à quelques dizaines de kilomètres de l’océan, est contesté. Dans le cadre d’un recours contentieux contre le permis de construire de ce « surfpark », les principaux opposants ont déposé le 10 janvier un mémoire en réplique, affirmant notamment que la consommation d’eau potable serait dix fois plus élevée que ce qui était annoncé.

    « Selon le discours des promoteurs, un surfpark n’aurait pas besoin d’eau », raille Rémy Petit, du collectif Canéjan en transition, un des trois organismes à l’origine de ce recours, avec la Surfrider Foundation et de la SEPANSO Gironde, laquelle fédère plusieurs associations locales de protection de l’environnement. « Un moyen simple de trancher ce débat serait de disposer de données de compteurs des surfparks existants. » La technologie envisagée pour faire fonctionner cette méga-piscine à vagues (Wavegarden) est en effet déjà utilisée dans plusieurs surfparks, comme au Royaume-Uni et en Suisse.

    Dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, après de nombreuses attaques dont une pétition réunissant déjà plus de 60.000 signatures, les porteurs du projet affirment en effet qu’un surfpark a besoin d’eau « seulement à son remplissage » et qu’il n’y aurait pas besoin de changer l’eau des bassins, car « elle se purifie d’elle-même ». Une affirmation depuis remise en question. Denis Loustau, chercheur en écologie physique et directeur de recherche à l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), a réalisé un bilan hydrique du projet de surfpark à Canéjan. Selon plusieurs estimations réalisées à partir de ce rapport, le surfpark ne serait pas autonome en eau, même sous les hypothèses les plus favorables, et sa consommation en eau potable pourrait représenter « 41 à 55% de la consommation de la ville de Canéjan », fustigent les associations.

    À lire aussiLa quasi-totalité des événements climatiques extrêmes de 2023 ont été causés par le réchauffement climatique
    « Leur modèle économique n’est pas soutenable »

    Pour Édouard Algayon, ancien participant de l’émission télévisée « Star Academy » et l’un des surfeurs à l’origine de cette idée, « ce projet est loin d’être anti-environnement et anti-écologique », car il prévoit l’installation de panneaux solaires et la récupération d’eau de pluie. Le surfpark permettrait en outre « d’avoir un centre de formation de haut niveau pour entraîner nos athlètes ». Un argument partagé par Jean-Luc Arassus, président de la Fédération européenne de surf, pour qui « il nous faut absolument des équipements sportifs de ce type-là pour arriver à être performants ».

    Mais les critiques ne s’arrêtent pas là. « Selon les promoteurs, l’effet oxygénant des vagues suffirait à maintenir la qualité de l’eau sur la baignade, sans vidanger, en faisant des économies sur notre santé », déplore Vanessa Balci, de la Surfrider Foundation, pour qui la récupération des eaux de pluie envisagée pour alimenter les bassins soulève « des problématiques sanitaires graves », avec la prolifération éventuelle de nombreux agents pathogènes.

    En plus d’avoir du plomb dans l’aile, le surfpark de Canéjan en aurait également dans le sol, aux côtés de polluants chimiques comme le chrome, le cuivre, le nickel, le zinc et des restes d’hydrocarbures. Installée sur le site de l’ancienne usine de Solectron, qui fabriquait des cartes électroniques jusque dans les années 2000, la méga-piscine pourrait exposer les visiteurs à des restes de polluants. « Une butte d’observation pour le grand bassin est prévue, en utilisant les terres excavées », explique Florence Bougault de la SEPANSO Gironde. Selon elle, « c’est clairement une mise en danger des visiteurs ». Le terrain fait en effet partie des sites et sols pollués répertoriés par le portail Géorisques du gouvernement, qui notait en 2009 « une pollution des sols par des hydrocarbures », « un impact par les métaux dans le réceptacle des eaux pluviales » et « un léger impact sur les eaux souterraines ».

    Pour Rémy Petit, ce projet doit donc être « condamné », car « les risques sanitaires sont inconsidérés ». Selon lui, « on n’a jamais vu une telle accumulation de risques pris au niveau sanitaire ». Avant le site de Canéjan, neuf projets de surfpark ont d’ailleurs été envisagés puis abandonnés, sans parvenir à obtenir un permis de construire. L’examen de ce recours par le tribunal administratif, bien qu’il ne suspende pas la possibilité des travaux, pourrait avoir comme conséquence « une fuite des investisseurs », espèrent les opposants. « Ces complexes ne survivent que grâce à des activités annexes, leur modèle économique n’est pas du tout soutenable », ajoute Vanessa Balci.

    À lire aussiD’où viennent les « larmes de sirène » qui polluent les côtes du Sud-Ouest ?

    La Fédération française de surf réticente

    Politiquement, ce chantier ne semble pas non plus bénéficier de soutiens probants. Interrogé par les lecteurs de Sud Ouest en décembre, le ministre de la Transition écologique Christophe Béchu a expliqué « comprendre que le projet heurte les populations de proximité au vu de son caractère anachronique, en particulier ses besoins hydriques, alors que nous vivons les premières conséquences du dérèglement climatique ». Le ministre rappelle que « l’eau est impactée dès maintenant », ce qui doit « nous conduire à plus de sobriété », et à interroger « chaque projet sur sa soutenabilité ».

    Quelques jours auparavant, le 29 novembre, quatre parlementaires de différentes obédiences (MoDem, EELV et LFI) ont envoyé un courrier à l’ex-ministre de la Santé, Aurélien Rousseau, lui demandant d’appliquer une norme expérimentale AFNOR pour les piscines de surf, qui permettrait de les classer comme des lieux de « baignade artificielle en milieu fermé », et non simplement en « activité nautique », laquelle permet de déroger à certaines normes obligatoires pour les baignades artificielles. Ils rappellent notamment le décès survenu après une intoxication mortelle à l’amibe dans une piscine de surf aux États-Unis en 2018. Pour ces parlementaires, la volonté des porteurs de projet de « remplir les bassins en partie avec l’eau de pluie issue des toitures de bâtiments industriels voisins, plus instable et pouvant être contaminée, devrait conduire à redoubler de prudence ».

    À lire aussiSurf aux JO 2024 : la fédération internationale approuve la suspension des travaux à Teahupo’o

    Le 8 janvier, les associations de protection de l’environnement ont également reçu un appui inopiné de la part de la Fédération française de surf (FFSURF). Le président de la fédération, Jacques Lajuncomme, a rappelé dans une lettre que « les vagues artificielles sont un équipement sportif qui peut trouver sa place dans le développement de la pratique du surf par des publics éloignés de celle-ci », pour des raisons géographiques ou physiques (personnes en situation de handicap), mais en précisant que ces équipements devraient respecter la norme expérimentale pour les piscines de surf et faire preuve de transparence sur leur consommation d’eau.

    « Aujourd’hui les chiffres annoncés par les promoteurs et par leurs opposants sont très éloignés, des compteurs ne sont pas installés sur les parks de même nature en fonctionnement. » Des éléments qui ne permettent pas à la FFSURF « de se faire une opinion sur la réalité de la consommation d’eau prévisionnelle de l’académie de la glisse de Canéjan ». « Par conséquent nous sommes dans l’incapacité, malgré les annonces initiales à date, de soutenir le projet », conclut Jacques Lajuncomme. Une goutte d’eau supplémentaire dans la liste des entraves à ce projet, qui pourrait commencer à faire déborder le vase.

    • Un projet de surf-park à Canéjan critiqué pour son impact sur l’eau - Rue89Bordeaux
      https://rue89bordeaux.com/2023/06/un-projet-de-surf-park-a-canejan-critique-pour-son-impact-sur-leau

      5 juin 2023

      [...]

      Le collectif Canéjan en Transition et plusieurs associations de défense de l’environnement ont lancé une pétition contre le projet de l’Académie de la glisse. Cette méga-piscine à vagues de 13 000 m3 serait située sur la zone d’activité du Courneau, site de l’ancienne usine IBM. Les associations dénoncent un projet équivalent à 59 piscines olympiques, « aberrant à l’heure où la préservation des ressources et de la biodiversité sont au centre des préoccupations ».

      [..]

      Ses deux bassins d’une superficie totale de 13000 m2, et contenant 20 000 m3 d’eau, pourront accueillir entre 200 et 300 surfeurs par jour. La méga-piscine serait située dans la zone d’activité du Courneau, site de l’ancienne usine IBM qui appartient à la famille Algayon depuis 2010.

      S’il se réalise, ce projet serait une première en France puisque six autres propositions similaires ont déjà été rejetées, en raison de risques pour l’environnement (Magescq, Lacanau, Saint-Jean-de-Luz, Sevran, Saint-Père-en-Retz, Castets et Bordeaux).

      Passionné de surf, Édouard Algayon parle de ce projet comme d’une réponse à « un besoin personnel et sociétal », au vu de l’importante communauté de surfeurs à Bordeaux :

      « Personnellement, je suis à 1h30 de l’océan en voiture, donc c’est compliqué d’aller surfer quand je veux. Ensuite, les spots sont de plus en plus bondés. Je me suis aussi dit que ce type de technologie pourrait servir à ceux qui souhaitent s’initier ou même aux personnes en situation de handicap. Sans courants ou baïne et bien encadrée, la pratique sera moins dangereuse qu’en milieu naturel pour eux. »

      [...]

      Contacté, le maire de Canéjan, Bernard Garrigou (Parti socialiste), campe sur ses positions et voit le projet d’un bon œil :

      « Vous ne voulez pas apprendre le surf ? Si vous aviez la possibilité d’en faire une heure sur Bordeaux sans aller jusqu’à l’océan, vous feriez l’économie du déplacement et donc, un gain de CO2. »

      Alice Gapail

    • Ah mais il y avait eu le même cas de figure en Loire-Atlantique :

      Sept ans après être sorti des cartons par la société Nouvelle vague, basée à Nantes, où en est le projet de surf park de Saint-Père en Retz, en Loire-Atlantique ? Projet clivant de vague artificielle qui divise la population, les élus, jusqu’aux surfeurs eux-mêmes.

      https://actu.fr/pays-de-la-loire/saint-pere-en-retz_44187/surf-park-en-loire-atlantique-le-projet-de-vague-artificielle-est-il-abandonne_

      https://www.openstreetmap.org/relation/93961