• Travail en prison : la servitude organisée | Le Club de Mediapart
    https://blogs.mediapart.fr/observatoire-international-des-prisons-section-francaise/blog/070218/travail-en-prison-la-servitude-organisee

    Travailler en tant que détenu, c’est faire un bond en arrière, avant même l’avènement du salariat. Tout a des « relents du XIXe siècle » (1). Sans contrat, les détenus sont privés de tous les droits afférents. Ou presque. Pas d’indemnité en cas de chômage technique, d’arrêt maladie ou d’accident du travail. Pas d’encadrement ferme de la durée du travail, pas de jour de repos garanti, ni de revenu minimum respecté. Pas de médecine du travail. Tout droit d’expression collective ou de représentation syndicale leur est aussi dénié. Être travailleur détenu, c’est se trouver dans une dissymétrie totale de la relation de travail, éprouver l’arbitraire, l’incertitude et le nondroit. Malgré tout, le travail reste très prisé chez les personnes détenues, d’autant plus que les postes se font rares. Pour le sociologue Fabrice Guilbaud, « si les détenus souhaitent tant travailler, quand bien même il s’agit de "sales boulots", dans des conditions de "surexploitation" (dont ils sont conscients), c’est qu’ils vivent un drame social, une expérience sociale extrême, à savoir l’enfermement » (2). Et, dans le travail, ils trouvent des ressources pour résister aux conditions de détention (lire l’encadré). Une situation qui donne la mesure des privations et de la pauvreté en détention.

    #prison #incarcération #taule #travail #exploitation

  • Parcoursup: le dernier combat par Pascal Maillard
    https://blogs.mediapart.fr/pascal-maillard/blog/070218/parcoursup-le-dernier-combat

    Le combat contre la sélection à l’entrée de l’université est peut-être le dernier avant la rupture définitive des frêles digues qui nous protègent encore de la lame de fond de la défonctionnarisation et de la libéralisation totale de l’éducation. Contre Parcoursup et son monde : 10 thèses pour rester lucide et résister à la politique de Macron.

    8. Mener le combat contre la sélection, c’est défendre la justice sociale, la démocratie et le libre accès au savoir. C’est aussi refuser que les compétences se substituent partout aux connaissances, c’est refuser que les formations soient calibrées en fonction des besoins du patronat, vieux rêve de la droite que Macron-Vidal vont exaucer. C’est défendre le principe que la connaissance n’est pas une marchandise, que l’accès au savoir est un droit humain fondamental et qu’à cette fin, l’Université publique doit être soutenue et doit rester ouverte à tous les bacheliers. C’est essentiel pour l’égalité des chances, pour le progrès social, mais c’est aussi fondamental pour l’université elle-même dont les fondements ont été évidés par dix années de réformes néolibérales et les valeurs à peu près réduites à néant. Selon Sophie Orange et Romuald Bodin, dans un article important qu’on peut lire ICI, "APB et Parcoursup partagent le fait d’être des outils pensés par et pour les milieux sociaux les plus favorisés et risquent donc de produire la désorientation des moins favorisés là où il était censé la réduire".

    9. Dans une importante « Recommandation concernant la science et les chercheurs scientifiques » la Conférence générale de l’UNESCO réunie à Paris au mois novembre 2017, liait étroitement la valeur de la recherche à celle des scientifiques eux-mêmes, dont l’accomplissement des tâches exige « des qualités d’intégrité et de maturité intellectuelle, alliant d’éminentes qualités intellectuelles et le respect des principes éthiques ». Aussi l’UNESCO recommande-t-elle ceci aux États membres :

    « faire en sorte que tous leurs ressortissants, sans distinction de race, de couleur, d’ascendance, de sexe, de genre, d’orientation sexuelle, d’âge, de langue natale, de religion, d’opinion politique ou de toute autre opinion, d’origine nationale, ethnique ou sociale, de condition économique ou sociale de naissance, ou de handicap, jouissent des mêmes possibilités d’acquérir une éducation et une formation initiales leur offrant les qualifications nécessaires aux carrières dans la recherche et le développement, et que tous ceux qui ont acquis cette aptitude jouissent de la même possibilité d’accès aux emplois existants dans la recherche scientifique. »

    Ce que les universitaires ne mesurent pas encore, c’est que derrière l’accès à l’université pour les bacheliers se joue aussi l’accès à l’emploi scientifique et le statut même des fonctionnaires, le statut des enseignants-chercheurs que Pécresse n’avait pas réussi à casser en 2009 et que Macron entend remettre en cause. Quand les universitaires se rendront compte de ce qui se joue là, ce sera trop tard.

    10. Parcoursup n’est pas qu’un dispositif technocratique. Cette plateforme porte en elle un modèle de société. Ce modèle - qui est celui de la compétition, de la concurrence et de la sélection – est mortifère pour toute civilisation.