• Me Nicolas De Sa-Pallix : « Tous les afghans sont en danger ! » - Actu-Juridique
    https://www.actu-juridique.fr/etrangers/me-nicolas-de-sa-pallix-tous-les-afghans-sont-en-danger

    La situation actuelle en Afghanistan mobilise les avocats français. Mardi 17 août le Conseil national des barreaux a déclaré dans un communiqué https://www.cnb.avocat.fr/fr/actualites/afghanistan-les-avocats-mobilises-pour-un-droit-dasile-immediat-et-entier : « Le consensus international, qui considère que le peuple afghan est aujourd’hui en danger, doit entrainer en France l’application la plus absolue du principe de l’#asile, qui est constitutif de notre État de droit ». Et pour cause ! Dans deux décisions prononcées en novembre 2020, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a durci les conditions d’attribution du #droit_d’asile aux afghans. Nicolas De Sa-Pallix , avocat au barreau de Paris, nous explique les enjeux attachés à cette jurisprudence.

    Actu-Juridique : De très nombreux afghans tentent de fuir leur pays depuis que les talibans sont entrés dans Kaboul. Comment la France traite-elle habituellement les demandeurs d’asile en provenance d’Afghanistan ?

    Nicolas De Sa-Pallix : Jusqu’au mois de novembre dernier, la CNDA appliquait ce que dans notre jargon de spécialiste nous appelons la « #Jurisprudence Kaboul », un régime qui était relativement favorable à ces demandeurs d’asile. Il faut savoir qu’il existe deux protections différentes, soit le statut de #réfugié défini par la Convention de Genève qui est attribué aux personnes qui invoquent un risque personnel de persécution en raison de leur race ou ethnie, leur nationalité, leur religion ou encore leur appartenance à un groupe social. Soit une #protection_subsidiaire attribuée dans trois cas : risque de peine de mort ou d’une exécution, risque de tortures ou de peines ou de traitement inhumain ou dégradant, et, pour un civil, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une violence qui peut s’étendre à des personnes sans considération de leur situation personnelle et résultant d’une situation de conflit armé interne ou international. L’Afghanistan entrait dans cette troisième catégorie, elle-même graduée en fonction du niveau de violence. Ce pays était au niveau trois : violence aveugle d’une intensité exceptionnelle. En pratique cela signifie que les ressortissants de ce pays n’avaient qu’à prouver leur nationalité sans invoquer de risque spécifique les concernant pour obtenir une protection. En particulier parce que Kaboul était le seul aéroport international, donc le passage obligé pour tous les afghans revenant dans leur pays, et que la ville était considérée comme particulièrement risquée. L’#OFPRA (Office français de protection des réfugiés et apatrides) discutait parfois cette contrainte en invoquant l’existence d’autres aéroports, mais on obtenait gain de cause devant la #CNDA. Tout a changé en novembre dernier, ce qui inquiète les spécialistes du droit des étrangers et du droit d’asile sur le traitement susceptible d’être réservé aux futurs réfugiés.

    Actu-Juridique : Que s’est-il passé qui soit susceptible de remettre en cause la protection offerte aux réfugiés afghans ?

    NDSP : La CNDA a rendu au mois de novembre 2020 deux décisions en grande formation, l’équivalent de l’assemblée plénière devant la Cour de cassation, sur le cas de deux afghans qui demandaient une protection. La Cour, rompant avec la « jurisprudence Kaboul » a rejeté leurs demandes en invoquant le fait que toutes les provinces n’étaient pas sujettes au même niveau de violence et qu’on observait par ailleurs à Kaboul une diminution en 2019 de 16% du nombre de morts et de blessés par rapport à 2018. On parle quand même de 261 morts et 1302 blessés ! Elle précise même que la ville est devenue un refuge. En réalité, elle est surtout l’endroit où s’installent tous ceux qui ne savent plus où aller. Donc la Cour ne considère plus l’Afghanistan comme un pays où le seul fait de séjourner expose à un risque, mais raisonne désormais par région, et ne considère plus que le simple fait d’être présent à Kaboul constitue un risque justifiant l’octroi d’une protection subsidiaire.

  • Projet de loi de programmation pour la justice : points bloquants relevés à l’AG des 16 & 17 mars 2018 | Conseil national des barreaux
    https://www.cnb.avocat.fr/fr/actualites/projet-de-loi-de-programmation-pour-la-justice-points-bloquants-releves-l

    Le CNB dénonce :

    Un texte attentatoire aux droits et libertés individuelles
    La facilitation des interceptions des communications électroniques et de la géolocalisation et l’extension des techniques spéciales d’enquête de sonorisation, de captation d‘images et des données, etc. alors même qu’après d’âpres débats, avait été adoptée la loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 relative au renseignement pour en restreindre le champ d’application à la criminalité organisée et au terrorisme sous le contrôle du JLD
    Un texte qui répond aux seules demandes des forces de police et du parquet, sans garanties des droits de la défense
    L’extension de l’enquête sous pseudonyme qui ne peut garantir l’exercice des droits de la défense
    Les modifications apportées au régime de la GAV en rendant facultative la présentation au PR pour la première prolongation, ce qui revient de fait à étendre la GAV de droit commun de 24h supplémentaires ; en prolongeant le délai de présentation de la personne déférée à la suite d’une GAV à 24h, sans être en mesure de justifier l’atteinte disproportionnée ainsi portée à la liberté de la personne concernée.
    Le développement du recours à la visioconférence en la rendant possible pour l’interrogatoire de première comparution sans l’accord de la personne.

    Un texte qui limite drastiquement les droits de la victime
    En portant de 3 à 6 mois le délai du PR pour répondre à une plainte simple, en exigeant un recours hiérarchique devant le PG en cas de classement sans suite et autorisant le juge d’instruction à refuser la plainte avec constitution de partie civile lorsque la citation directe est possible.
    Un texte qui tend à initier une véritable révolution sans concertation par la mise en place du tribunal criminel départemental, et qui aboutit à une extension de la correctionnalisation pour tous les crimes qui fait primer la gestion des flux et l’approche budgétaire sur la qualité du procès d’assises (diminution de l’oralité au détriment des droits de la défense).
    Une déjudiciarisation qui aboutit à une véritable privatisation de la justice, en faisant primer une réduction de moyens qui aboutit à une justice sans juge, sans avocat et sans justiciable :
    En envisageant la participation au service public de la justice de plateforme proposant une résolution des litiges sur le fondement d’un traitement algorithmique ;
    En prévoyant le règlement des petits litiges par voie dématérialisée, sans audience même si une partie le demande ;
    En confiant aux directeurs de CAF le traitement des litiges portant sur la modification du montant d’une contribution à l’entretien et à l’éducation des enfants ;
    En supprimant, en matière de divorce, la possibilité pour les époux d’être entendus dès le début de l’instance alors même qu’à ce stade, un dialogue entre le magistrat et les époux assistés de leurs avocats, est une nécessité reconnue de tous.
    La création de déserts judiciaires par la spécialisation et le regroupement des juridictions qui n’apportent aucune garantie en matière de qualité de la justice ni en matière de réduction des coûts (avec au contraire une augmentation des coûts de défense, et donc du budget de l’aide juridictionnelle, induits par l’allongement des déplacements des avocats).

    Le CNB demande à être associé à la rédaction des décrets et ordonnances qui doivent, selon les termes du projet de loi :

    Mettre en œuvre la substitution du tribunal de grande instance au tribunal de grande instance et au tribunal d’instance ;
    Définir le socle de compétence des nouvelles juridictions ;
    Adapter les dispositions régissant nos professions judiciaires et juridiques à cette nouvelle architecture judiciaire ;
    Réformer la procédure en matière civile notamment ;
    Fixer le montant en deçà duquel le litige sera traité dans le cadre d’une procédure dématérialisée.