• Les femmes étaient-elles exploitées par les hommes dans les sociétés sans richesses ?
    http://cdarmangeat.blogspot.fr/2014/10/les-femmes-etaient-elles-exploitees-par.html#more

    Je ne reviendrai pas ici sur l’existence d’une domination des hommes sur les femmes dans ces sociétés, sous des formes et à des degrés divers, qui me semble se situer hors de tout doute raisonnable – je me permets de renvoyer le lecteur sceptique vers les éléments rassemblés dans mes bouquins ou dans plusieurs billets de ce blog. En revanche, j’avais jusque là laissé en friche la question de l’exploitation, c’est-à-dire des éventuelles dimensions économiques de cette domination. Il va de soi que dans les sociétés à richesses (en tout cas, dans nombre d’entre elles), les femmes sont non seulement dominées, mais aussi exploitées : dans l’Afrique lignagère, en Papouasie, l’homme important l’est par son statut, mais aussi par les biens matériels que le travail de ses dépendants (dont, en premier lieu, ses épouses) met à sa disposition. Et le plus souvent, l’existence conjointe de la polygynie et du prix de la fiancée induit une « spirale de la puissance » : plus un homme est riche, plus il peut payer pour accumuler des épouses, et plus il obtient d’épouses, plus il devient riche. La question se pose très différemment dans les sociétés sans richesses, ne serait-ce que parce que cette spirale ne peut pas se mettre en place : on ne peut pas convertir les richesses en épouses – en revanche, rien n’indique a priori s’il est possible de convertir les épouses sinon en richesses, du moins en avantages matériels.

    #genres #anthropologie

  • « Le genre crée le sexe »... Vraiment ?
    http://cdarmangeat.blogspot.fr/2014/09/le-genre-cree-le-sexe-vraiment.html#more

    En suivant la logique de P. Touraille, ce serait aussi un acte de croyance que de parler de feuillus et d’épineux, puisqu’il n’existerait, en réalité, que des arbres munis de feuilles et d’autres d’épines. Ce serait un acte de croyance de parler de vertébrés et d’invertébrés puisque dans la réalité, il n’existe que des êtres vivants pourvus ou dépourvus de vertèbres. En matière sociale, c’est la même chose : on ne saurait sans faire acte d’idéologie parler de plombiers et d’universitaires, puisque dans la réalité, il n’existe que des individus dont certains ont comme activité de réparer les fuites et d’autres d’expliquer la réalité (ou de l’obscurcir, selon les cas). Quant au premier chapitre du Manifeste communiste, intitulé « bourgeois et prolétaires », il accomplit incontestablement un acte de croyance, puisque comme on le sait, il n’existe en réalité nuls bourgeois et prolétaires, mais simplement des êtres humains dont certains qui se font exploiter et d’autres qui vivent de cette exploitation.

    #genre #féminisme

    • Oui belle définition ici

      Le programme féministe consiste à militer pour la fin de cette assignation ; ce qu’on désigne habituellement par la formule consacrée, mais impropre, d’égalité des sexes et qu’il serait plus exact d’appeler disparition des genres.

      @rastapopoulos : je me sens sur la même ligne que l’auteur (cf nos débats sur la controversée Nancy Huston) et je crois qu’il explique parfaitement mon point de vue ici, car je suis mal à l’aise avec ce que j’observe dans bcp de travaux de féministes radicales, à savoir ce qui me semble être une réécriture de l’histoire de l’humanité et une négation de notre héritage « biologique » :

      Arrive alors une certaine critique féministe dite radicale, qui explique que cette manière de voir les choses fait encore beaucoup trop de concessions à l’idéologie dominante, en admettant comme naturel ce qui ne l’est pas. Loin d’être une donnée de la biologie, le sexe lui-même serait socialement construit. C’est parce que la société hiérarchise les genres qu’elle classifierait les individus en sexes, une classification qui n’aurait donc aucune réalité propre, indépendante de l’esprit humain – et, plus précisément, des valeurs sociales.

      Ensuite dans ce texte, moi ce qui me gêne c’est justement le fait d’invoquer le « bon sens » à tout bout de champs (cf http://seenthis.net/messages/289812)... Même si je me sens en phase avec son angle d’approche, le recours au concept de bon sens est un raccourci idéologique, un sophisme, qu’un débat rigoureux devrait proscrire..

    • Le mec qui s’autorise à définir LE féminisme ou LE programme féministe comme la disparition des genres, et qui appuie ses élucubrations sur le bon sens, en fait il ne sait juste pas lire et ce n’est pas moi qui vais perdre mon temps à lui apprendre.

    • On sait aussi que chez un même individu, tous les marquages du sexe peuvent ne pas être cohérents ; cela complexifie, mais n’abolit en rien, l’existence de deux types fondamentaux d’organes reproducteurs

      Pour que telle ou telle espèce (un grand nombre dont homo sapiens) se reproduise (sans manipulation bizarre dans des laboratoires), il faut obligatoirement un organe sexuel (donc un individu) produisant des gamètes mâles et un autre organe (d’un autre individu) produisant des gamètes femelles. Le fait qu’il y ait de rares exceptions ne change pas ce principe de base.

      http://fr.wikipedia.org/wiki/Gam%C3%A8te

      Chez de nombreuses espèces, en revanche, il existe deux types de gamètes qui sont différenciables par la taille et éventuellement par l’apparence : la fécondation est alors dite anisogame. Les petits gamètes, ou microgamètes, définissent l’individu qui les produit comme étant de sexe mâle, les gros gamètes, ou macrogamètes, de sexe femelle.

      C’est la définition biologique du sexe (= c’est la définition du sexe tout court, puisque ce qui est non-biologique c’est justement le genre et non pas le sexe).

      Enfin pour moi, c’est comme ça que j’avais compris en quoi consistait le genre par rapport au sexe. Mais du coup ça ne serait pas ça ?

      Ok, mais dans ce cas @touti, je veux bien quand même des pistes pour comprendre pourquoi ce que je pensais être le genre par rapport au sexe, n’est finalement pas ça. Perso je suis réellement embrouillé par rapport à ce que je pensais avoir compris. :(

    • @monolecte : justement je ne suis pas d’accord avec l’idée que tout ce qui est biologique est indépassable. Au contraire, l’humain a toujours cherché a s’opposer à la nature, et parfois c’est tant mieux car je ne crois pas que la nature nous ait « programmés » pour être bons et vivre heureux, mais juste pour survivre, parfois aux dépens de nos congénères.

      Et puis la biologie ne peut pas inviter à penser binaire, bien au contraire, c’est un formidable domaine pour comprendre et accepter la diversité.
      (cf http://seenthis.net/messages/149689)

      Je n’ai jamais vu en quoi la biologie pouvait de manière incontestable servir à justifier une quelconque hiérarchisation entre êtres humains. Je me bats contre l’idée qu’un argument « biologique » serait supérieur à un argument moral. C’est aux humains à définir comment ils veulent exister et coexister socialement, la morale sert à cela, aucun alibi biologique ne peut servir à autoriser à faire des uns des prédateurs et d’autres des proies..

    • @rastapopoulos Je n’ai pas les compétences pour ce que tu me demandes.
      Je pense seulement qu’il est fondamental de bousculer nos concepts et la culture de la domination masculine et non de faire un cours de biologie sexuelle.

    • Deux emissions de radio sur le livre de Anne Fausto-Sterling, Biologiste américaine, Historienne des sciences et militiante féministe, Professeure de Biologie et d’études de genre à l’Université Brown (Providence - Rhode Island), intervient à propos de son dernier essai :
      - « Corps en tous genres : la dualité des sexes à l’épreuve de la science » (La découverte, octobre 2012) -

      http://www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-1ere-partie-la-science-du-corps-en-question-2

      http://www.franceculture.fr/emission-la-suite-dans-les-idees-sexe-et-genre-une-dualite-avec-anne-f

    • Souvent, la nette impression domine que prenant systématiquement le genre comme cible, ses détracteurs se cantonnent au plus bas niveau, se promettant les délices d’une apocalypse humaine « Ça va être l’abolition des sexes, sûr qu’on va se faire castrer, d’Adam ou de Eve, comment reconnaitra-t-on la salope qui a foutu le bordel ?, pas touche à mes préjugés, les filles en roses et vive les ignares… » Pourquoi ce besoin à devenir si cons pour tenter de rabaisser cette recherche (au milieu d’autres recherches féministes) à leur petite inquiétude morale de reproduction alors qu’on commence à peine à percevoir le système de construction des individus, de leur sexe, les liaisons et les fondements des dominances, source d’un début de déconstruction de celles-ci, de l’acceptation de l’autre et du refus des inégalités. Quel intérêt véhicule ce discours emprunt de mépris

      Si vraiment c’est le genre qui crée le sexe, cela veut dire au moins 1) que l’abolition des genres entraînera aussi celle des sexes 2) que dans le monde animal, les sexes n’existent pas

      avec le reste du même avenant alors qu’heureusement un autre discours se forge.

      Merci @mad_meg de tes liens, ça permet de rappeler que le genre n’existe pas, qu’il est seulement un concept qui permet d’appréhender les influences culturelles, sociales qui façonnent une personne, mais aussi son sexe.

      http://www.franceculture.fr/emission-la-grande-table-1ere-partie-la-science-du-corps-en-question-2

      La biologiste qui nous parle ici du partage entre nature et culture met en évidence leur imbrication, sans que l’un prédomine sur l’autre : la société construit non seulement les discours sur le corps, mais aussi le corps lui-même.

      (…)

      Il y a un double mouvement : on peut lire le genre dans le corps, et en même temps le corps ne dit pas la vérité. Elle -Anne Fausto-Sterling - passe du sexe au genre sans cesse pour avancer, tout en repérant le rapport entre le savant et le politique.

    • Ben oui @odilon, c’est justement la définition qu’en donne l’auteur de l’article cité, et celle que j’avais en tête.

      @touti, l’auteur dont on parle ici n’est pas du tout un détracteur du genre, au contraire, il en donne une définition qui correspond bien aux études féministes faite à ce sujet (il s’agit de tout ce qui est construit socialement) et il est d’accord avec ça d’après ce que j’ai lu. Là il « pinaille » sur la logique de la phrase « c’est le genre qui crée le sexe ». Phrase que j’avoue ne pas encore saisir, même si je ne doute pas qu’il doit bien y avoir une explication logique (que je tente de comprendre, en ce qui me concerne).

      @aude_v, ta citation qui suit « il y a une réponse assez claire », là je crois que j’arrive à comprendre un peu (par contre je n’ai pas pigé d’où vient cette citation).
      Quant au lien que tu mets sur l’article réglementariste publié dans la revue Période, j’ai un doute en lisant ton commentaire : as-tu bien vu que c’était un texte de Morgane Merteuil (pas d’un universitaire mâle donc) ? Il semblerait que ça réponde ou fasse écho aux articles du Diplo du même mois.

  • Sur la lutte “autonome” des femmes
    http://cdarmangeat.blogspot.fr/2014/07/a-propos-de-la-lutte-autonome-des-femmes.html

    La première est de calquer la situation des sociétés primitives sur celle du communisme futur, en faisant comme si on pouvait raisonner toutes choses égales par ailleurs. Or, les choses ne sont justement pas du tout égales par ailleurs — c’est pour cette raison que l’existence ou l’inexistence d’un matriarcat passé, en elles-mêmes, ne prouvent strictement rien sur les futurs rapports entre les sexes. Ce que j’ai essayé d’expliquer dans mon bouquin, c’est que le capitalisme a bouleversé de fond en comble les structures sociales, de sorte que le communisme futur ne sera pas seulement différent de celui du passé par son développement technique. Il s’en distinguera par des rapports sociaux tout à fait différents et, en l’occurrence, opposés : le critère du sexe, qui était la ligne principale, sinon unique, de partage du travail social dans les sociétés primitives, sera totalement abandonné dans la société de l’avenir. Cette société s’édifiera en effet sur un terreau d’où le capitalisme aura déjà extirpé la plupart des raisons qui ont fondé, (pré)historiquement, la division sociale (et inégale) des sexes. Pour dire les choses autrement, et plus simplement : je manque peut-être d’imagination, mais je ne vois pas par quelles voies une société qui, sur la base du développement acquis par le capitalisme, ayant aboli entre autres la propriété privée des moyens de production, les inégalités matérielles et les frontières, et ayant élevé d’une manière colossale le niveau matériel et moral de l’humanité, pourrait continuer à entretenir l’oppression d’un sexe par un autre (de la même manière qu’on ne voit pas comment une telle société pourrait continuer à entretenir des oppressions de « race » ou de nationalité). Et, sauf erreur, je ne crois pas que personne ait jamais développé un raisonnement sérieux à l’appui d’une telle possibilité.

    #communisme

    • Étrange cette idée que c’est le capitalisme qui aurait supprimé la division sexué du travail. On peu tout autant dire, et ça me paraît logique que le capitalisme a du s’adapter aux luttes populaire qui l’on forcé à s’adapter a une division non sexué du travail. Faut-il rappeler qu’il y a des endroits sur Terre ou le capitalisme est bien bien présent et ou la division sexuelle du travail l’est toujours ?
      C’est une vision très abstraite d’un capitalisme plus idéologique que réel a mon avis.

    • Ce qu’il dit ne veut pas dire que la division sexuée du travail n’existe plus dans le capitalisme. Un peu avant il dit :

      Ce que j’ai essayé d’expliquer dans mon bouquin, c’est que le capitalisme a bouleversé de fond en comble les structures sociales, de sorte que le communisme futur ne sera pas seulement différent de celui du passé par son développement technique. Il s’en distinguera par des rapports sociaux tout à fait différents et, en l’occurrence, opposés : le critère du sexe, qui était la ligne principale, sinon unique, de partage du travail social dans les sociétés primitives, sera totalement abandonné dans la société de l’avenir.

      Il dit simplement que dans le capitalisme, le critère du sexe n’est plus la ligne principale de partage du travail social. D’après lui, c’est seulement depuis la modernité capitaliste qu’on peut penser l’abolition de cette division.

      Perso, je ne suis pas d’accord avec tout ce qu’il dit, mais son livre Le communisme primitif n’est plus ce qu’il était est vraiment intéressant. Il suffit de le lire ou de lire d’autres articles sur son blog pour réaliser qu’il ne dit pas ce que tu veux lui mettre dans la bouche.

    • Je lirai son livre puisque je l’ai acheté (et oui... encore une preuve de mes achats :p ). Mais ce ne serai pas le 1er a pensée que le capitalisme a réaliser ce renversement.
      D’ailleurs dans ce que tu dis, c’est encore différent, tu indiques en gros que ce n’est pas la ligne du capitalisme de préserver cette inégalité, ça laisse déjà plus de place a des contingences.
      Quoi, qu’il en soit, je regarderai un peu plus dans le détail :)
      Ce n’est pas une mauvaise chose de débattre :D ... Mais la, je pars pour une semaine de danse en Auvergne, a Gennetines !