à Kfar Bilu, dans la ferme des Polishuk, les volontaires ont remplacé les ouvriers

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  • Guerre Israël-Hamas : à Kfar Bilu, dans la ferme des Polishuk, les volontaires ont remplacé les ouvriers
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    Guerre Israël-Hamas : à Kfar Bilu, dans la ferme des Polishuk, les volontaires ont remplacé les ouvriers
    Par Raphaëlle Bacqué (Kfar Bilu, Israël, envoyée spéciale)
    Reportage Les Thaïlandais, employés à la cueillette des fruits, attendent d’être rapatriés dans leur pays. Les Palestiniens ne sont plus les bienvenus. Partout dans le pays, des bénévoles suppléent le manque de main-d’œuvre étrangère ou celle d’Israéliens rappelés par l’armée.
    Depuis des années, les Polishuk emploient pour la cueillette cinq ouvriers thaïlandais et deux Palestiniens de Gaza, logés sur place, dans ces maisons de bois qui donnent à cette ferme de Kfar Bilu, située à un peu plus d’une trentaine de kilomètres de Tel-Aviv, un petit air de banlieue américaine. Mais plus rien ne ressemble à « avant ». Depuis les attaques terroristes du 7 octobre, les Thaïlandais sont partis. Mardi, ils étaient alignés en longue file dans le hall de l’hôtel Intercontinental de Tel-Aviv, à attendre que l’ambassade de Thaïlande organise leur rapatriement. « Trois mille cinq cents des huit mille travailleurs venus en Israël ont déjà repris l’avion pour Bangkok », affirmait alors l’une des diplomates thaïlandaise. Et le flot ne tarit pas. Les deux ouvriers palestiniens ne reviendront pas non plus. « La police les a arrêtés », raconte encore Oded Polishuk, qui croit savoir qu’ils ont été emmenés jusqu’à Ramallah, la capitale de la Cisjordanie administrée par l’Autorité palestinienne, où se trouvent déjà de nombreux réfugiés. Depuis que la guerre menace, les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza détenteurs d’un permis de travail sont interdits de séjour en Israël. Par crainte des attentats, dit-on. D’ailleurs, les Polishuk n’en veulent plus. « Comment pourrait-on encore avoir confiance après ce qui s’est passé ? », lance le frère d’Oded, Gal, un ingénieur qui vient de s’engager dans l’armée.
    Devant les grands cageots de fruits, trois personnes s’activent. Ce sont des volontaires qui, depuis une dizaine de jours, arrivent partout dans les restaurants, les hôpitaux ou les fermes afin de remplacer les soldats mobilisés ou les ouvriers qui font défaut. Shiraz Salomon et Morian Menuhin font partie de ces bénévoles. « Dans la vie normale », comme dit Shiraz, ces deux quinquagénaires, amis de plus de vingt ans, sont tous deux associés dans un cabinet d’architectes de Tel-Aviv. Jusque-là, ils rénovaient, à Jaffa, ce vieux quartier collé à Tel-Aviv où vivent juifs et arabes israéliens, des maisons et de beaux lofts de briques et de bois, que Shiraz montre sur son téléphone portable. « Victim of love », lit-on sur son tee-shirt pendant qu’elle trie de grosses grenades rouges. C’est une fille de gauche, charmante, généreuse, tout à fait « bobo ». Lui est une sorte de géant, bonhomme et rassurant.
    Alors qu’ils avaient manifesté de concert, ces derniers mois, contre le gouvernement Nétanyahou, Shiraz et Morian ont cessé de parler de politique. « Pour éviter de trop s’engueuler, dit-elle, parce qu’il a viré dans la paranoïa et la guerre, quand je reste attachée à la paix avec les Palestiniens. » Cela fait amèrement sourire Morian, qui la juge « naïve ». Mais enfin, ils sont venus tous les deux accomplir ce travail harassant de tri « plutôt que de ressasser toute la journée en regardant les nouvelles angoissantes à la télé ».
    Dans les champs, trois autres volontaires cueillent des clémentines. Ceux-là sont des Français venus en Israël il y a une douzaine d’années, d’un tout autre style que les architectes de Tel-Aviv. (...) ».

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