Les complotistes tissent leur toile en Bretagne | Le Télégramme
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Le couple de Landeleau a apposé à l’entrée de sa propriété, une plaque indiquant qu’il héberge le consulat de l’État vivant breton.
Le Télégramme/Didier Déniel
Conseil national de transition, État vivant breton, ou encore One Nation : les groupes de conspirationnistes, citoyens souverains, ont fleuri ces dernières années en France et en Bretagne. Une nébuleuse qui dit agir pour l’émancipation des individus et refuse l’autorité de la République.
Ces dernières semaines, une vidéo montrant un couple qui refusait de se soumettre à un contrôle d’alcoolémie dans le Nord a fait le buzz sur la toile. L’homme et la femme contestaient l’autorité des forces de l’ordre, et plus globalement celle de la République, pour laquelle elles agissaient. Des illuminés, direz-vous. Pas seulement. Car derrière ces postures, ils se nourrissent d’un nouveau mode de pensée, mettant l’individu, et son bien-être, au-dessus des lois et de l’organisation sociétale. Ces groupes se mettent hors-cadre, veillant bien à ne jamais se rapprocher d’un parti politique, d’une institution ou d’une ONG. Un mouvement né dans le sillage des antivax les plus acharnés et de leurs théories conspirationnistes.
En France, ce mouvement a pris une telle ampleur qu’elle fait l’objet d’une surveillance accrue des services de police et de gendarmerie. Le plus répandu serait le Conseil national de transition (CNT), dont le but ultime serait de renverser le gouvernement et de mettre à bas la cinquième République. Selon le CNT, le pouvoir serait entre les mains de politiciens corrompus d’une « cinquième République sans existence constitutionnelle » ayant mis en place des mesures sanitaires pour placer sous contrôle la population. Aujourd’hui le salut passerait par un pouvoir confié à des Français « tirés au sort, qui exerceraient la souveraineté nationale ».
Le 13 février dernier, le calme du bourg de Landeleau a été troublé par une manifestation lors du conseil municipal.
Le Télégramme/Didier Déniel« La République Française n’a aucune légitimité sur la Bretagne »
Il n’aura fallu que quelques mois pour que naisse dans notre région, une déclinaison identitaire de ce mouvement baptisée « Conseil national de transition breton » ou encore « État vivant breton ». Selon les têtes pensantes de ces groupes, la France n’aurait aucune légitimité sur la Bretagne, étant donné que les clauses du contrat de mariage entre la duchesse Anne et Louis XII, et les engagements politiques y afférents, n’auraient pas été respectés. De fait, tout Breton serait donc un être indépendant et autonome qui ne serait pas soumis aux lois de la République.
Dans cette mouvance, un groupe localisé près de Brocéliande est particulièrement actif depuis quelque temps. Selon plusieurs sources, il est intervenu en février dernier dans la commune de Landeleau (29) pour soutenir un couple qui a construit des habitats légers sur son vaste terrain, sans autorisation aucune. L’homme et la femme, installés depuis la crise sanitaire, ont été condamnés à 3 000 euros d’amende et à déconstruire ces habitations avant le 16 avril. Le tout assorti d’une astreinte de 200 euros quotidienne si la décision de justice n’est pas respectée. À ce jour, les constructions sont toujours en place.
« Le 13 février, une douzaine de personnes qui n’étaient pas de la commune ont perturbé le conseil municipal, raconte le maire, Yvon Coquil. Ils étaient venus contester la décision de justice. Je les ai invités à assister au conseil sans prendre la parole. Ils ont refusé. C’était assez tendu. J’ai dû appeler la gendarmerie. Je ne connaissais pas ces gens. En tout cas, ils étaient extérieurs à la commune. »
« Parfois des profils inquiétants »
Soutenu dans un premier temps par des membres du CNT, le couple semble avoir pris fait et cause pour ce mouvement, comme le prouvent certains de ses écrits postés sur les réseaux sociaux. « Nous sommes de l’État vivant breton depuis de nombreux mois déjà. Nous ne sommes plus concernés par le droit et les décisions de la République française Présidence (…) Nous sommes redevenus mandataires de nos personnes juridiques et vivantes. »
Ces postures inquiètent un spécialiste de ces mouvements interrogé par nos soins « Ces personnes se lavent le cerveau entre elles. Elles sont tellement déconnectées de la réalité qu’elles en ignorent la présence d’autres entités qui relaient les mêmes discours. Elles perdent tout sens critique. Souvent, on a affaire à des idéalistes non-violents. Mais parfois certains profils sont plus inquiétants ».