Deux ou trois choses dont je suis presque certain à propos des « gilets jaunes »
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La colère des gilets jaunes doit donc être prise au sérieux. Et elle ne devrait pas surprendre. Elle s’inscrit en effet dans une évolution à la fois économique (le recul ou la stagnation du pouvoir d’achat), sociale (le creusement des inégalités, les difficultés du logement, de l’accès à l’université, la disparition des services publics de proximité…), territoriale (le déclassement réel ou ressenti des habitants des périphéries, des périurbains et des ruraux) et politique.
Cette dernière (l’évolution politique) est double puisqu’il s’agit à la fois du discrédit croissant des élites (tant politiques que journalistiques du reste) et de la crise de l’offre politique qui a abouti, en 2017, à un paroxysme dont on n’a peut-être pas assez réfléchi les conséquences.
Qu’Emmanuel Macron ait été élu par défaut ou par un concours de circonstances est une évidence que sa mise en scène d’un présidentialisme exacerbé ne rend que plus grotesque et énervante. Mais, au passage, les formations politiques classiques de gauche et de droite semblent avoir sombré durablement, et avec elles une partie de leurs relais syndicaux et associatifs. Du coup, la distance est maximale entre, d’une part, un pouvoir politique perçu comme l’appropriation des institutions par une petite élite parisienne de technocrates et de rentiers du monde économique et financier et, d’autre part, un « peuple » ou une « base » se retrouvant plus que jamais sans corps intermédiaires et sans médiation avec ce pouvoir politique.
Le désarroi des élus locaux – qui s’exprime notamment lors de leurs congrès annuels – est en ce sens révélateur et inquiétant. Il est du reste passé trop inaperçu, ou bien a été lui aussi trop vite ramené à de simples questions de fiscalité. Qu’un maire sur deux déclare être à bout et ne pas vouloir se représenter aux prochaines élections municipales, en 2020, est un fait qui peut également être pris comme un signal d’alarme.