• Le journaliste rennais Nicolas Legendre reçoit le prix du livre Albert Londres pour « Silence dans les champs » - France Bleu
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    « Je suis très content, car cela récompense un travail de longue haleine et un métier que j’aime beaucoup », déclare ce mardi Nicolas Legendre, au lendemain de son prix du livre Albert Londres. Le journaliste rennais a enquêté sept ans pour son livre « Silence dans les champs », sorti en avril 2023 aux éditions Arthaud, et qui s’intéresse aux rouages du système agro-industriel breton.

    Une enquête difficile parfois, reconnait Nicolas Legendre. « Cela a été difficile de rassembler les pièces du puzzle, parce que c’est un sujet compliqué. Cela fait partie de notre histoire bretonne, mais aussi de notre géographie. Ce sont des firmes, des entreprises, des coopératives, c’est un système bancaire, c’est l’État et les collectivités, c’est l’Europe. Et puis ce sont aussi des croyances et une idéologie. Donc cela devient difficile de rassembler toutes les pièces du puzzle et d’expliquer, c’est ça qui a été vraiment le plus difficile. »

    Après la sortie de son livre, Nicolas Legendre a subi une campagne de dénigrement émanant notamment d’une association bretonne. « Ce prix Albert Londres est une très bonne réponse » à ses détracteurs, explique le journaliste. « On est allé jusqu’à me qualifier de journaliste à scandale, que je voulais la fin de l’agriculture bretonne. Redisons-le, ce n’était pas du tout mon but. Et d’ailleurs, ces accusations n’ont pas résisté à l’épreuve des faits. Je pense que ceux qui ont lu le livre le savent. »

    • Nicolas Legendre, journaliste d’enquête membre de « Splann ! », a reçu le prix Albert-Londres du livre pour « Silence dans les champs » (éditions Arthaud), à Vichy, le 27 novembre 2023. 🤐
      https://www.youtube.com/watch?v=gpke0hLgdTM

      « J’ai reçu depuis la parution du livre des centaines de messages. Leur teneur contraste bien souvent avec les réactions officielles publiques d’élus ou de responsables du monde agricole et agroalimentaire, en Bretagne et ailleurs.

      Certains, surtout à gauche et parmi les écologistes, ont pris acte du contenu et parfois se sont appuyés dessus pour porter des revendications ou pour demander à ce que des changements soient engagés.

      D’autres ont gardé un silence. Un silence parfois assourdissant, qui pour moi fait écho au titre du livre.

      D’autres enfin ont attaqué mon travail. Je pense à une élue du conseil régional qui m’a qualifié dans une tribune dans la presse bretonne de "pompier pyromane".

      Je pense à un vice-président du conseil régional qui dans une tribune, encore dans la presse régionale, m’a comparé sans vraiment me nommer, à Fouquier-Tinville, qui était un accusateur public pendant la Terreur qui a envoyé 2.000 personnes à la guillotine.

      Il y a aussi ce #lobby_agroindustriel qui a produit une note de synthèse qui n’était pas censée être rendue publique, mais que j’ai pu me procurer et que j’ai rendue publique. Note de synthèse dans laquelle on me qualifie de "journaliste à scandale" et dans laquelle on dit que je veux "la fin de l’agriculture en Bretagne". Rien que ça.

      Je n’évoque pas ces épisodes pour régler des comptes ou pour susciter la compassion. Après tout, ce genre de turbulence fait partie du métier. Si je les évoque, c’est parce que selon moi elles sont parlantes. Elles disent des choses sur notre incapacité collective à regarder les choses en face.

      La vérité, c’est que si le productivisme agro-industriel et le modèle dominant en Bretagne comme en France, ont contribué très largement au dynamisme économique de la Bretagne et de la France, à leur balance commerciale, entre autres, ils entraînent en même temps la disparition des paysans et imposent à ceux qui restent un impératif de compétitivité qui les pousse parfois à bout.

      Ils leur imposent aussi des injonctions contradictoires qui peuvent être toxiques. D’un côté "produisez", de l’autre "respectez le milieu". Ce système nourrit une fuite en avant économique intenable, dans laquelle la technique, la machine et le capital ne sont plus des moyens mais des fins en soi.

      La vérité, c’est également que ce système a donné naissance à des modes de domination quasi-féodaux.

      La vérité, c’est que ce système contribue largement au chaos climatique, à l’effondrement de la biodiversité et à la banalisation des paysages.

      La vérité, c’est que tout cela est su de très longue date, des chercheurs, des élus, des politiques. La vérité c’est qu’il existe des alternatives mais qu’elles ont été et continuent d’être marginalisées, torpillées, parfois tolérées ou récupérées.

      Je voudrais donc dédier ce prix à tous ceux qui font autrement. Paysans, élus locaux, militants environnementalistes, associatifs, institutionnels. Les consommateurs aussi, transformateurs, commerçants, restaurateurs... Ceux qui montrent, parfois de longue date, qu’une autre agriculture est possible donc qu’une autre alimentation est possible. Contre vents et marées et à la seule force de leur volonté puisqu’ils ne sont bien souvent pas soutenus par les institutions. Ou peu soutenus.

      Je voudrais également dédier ce prix à mes confrères et consœurs journalistes qui ont travaillé sur ces sujets bien avant moi et qui dans certains cas ont payé cher leur opiniâtreté. »

      https://splann.org/faire-un%20don