Chronique d’un film catastrophe bien préparé - par Guillaume Lachenal (Libération)
▻http://www.liberation.fr/monde/2014/09/18/chronique-d-un-film-catastrophe-bien-prepare_1103419
Contrairement à ce qu’on a pu écrire récemment, Ebola n’a jamais été négligée : depuis la première épidémie de 1976, le virus a été un formidable moyen de faire financer des recherches fondamentales en virologie (notamment la construction de laboratoires de haute sécurité dès le début des années 80) et de ringardiser le soutien aux systèmes de médecine préventive et d’action sociale « vieille école ». Pas un appel d’offres, pas un communiqué de presse sur la « biosécurité » n’oubliaient de citer le virus Ebola, tant il incarnait, avant même la présente épidémie, l’archétype de la menace émergente. Depuis vingt ans, Ebola a bien été la raison d’être (avec le Sras, la variole et la grippe aviaire) des programmes gouvernementaux consacrés à la préparation aux pandémies.
alors où est passé l’argent ?
les exercices de simulation condensaient, sous une forme pure, le nouveau paradigme de la santé mondiale tel qu’il se manifestait en Afrique : une forme d’intervention où l’action réelle sur des maladies réelles devenait secondaire, au profit de vastes programmes spéculatifs de « surveillance virale », comme l’initiative du chasseur de virus californien Nathan Wolfe, de « traitement préventif » du VIH ou de projets de « mobile-health » qui voyaient dans les smartphones une manière d’abolir les distances, le manque de personnel et les carences des institutions africaines.
* Maître de conférences à l’université Paris-Diderot et à Sciences-Po, chargé du cours « Global Health in Africa : Critical Perspectives »