city:autun

  • http://desordre.net/spectacles/l_etreinte

    Il était temps, sans doute, que je me prenne par la main pour fabriquer une page du Désordre qui rende compte de la lecture de L’Etreinte par Adrien Genoudet et moi-même.

    L’Etreinte c’est ce texte magnifique d’Adrien ( https://inculte.fr/produit/letreinte ) dont je ne saurais trop vous recommander la splendide lecture, ça pourrait changer pas mal de choses pour vous, dans un premier temps dans la façon dont vous pensez les attentats du 13 novembre et par extension le reste du monde et de l’existence.

    Lorsque j’ai découvert ce texte assez inouï, j’ai écrit une longue lettre à Adrien que je ne connaissais pas du tout. Six mois plus tard Adrien et moi étions transits de trac dans les coulisses du musée de la danse à Rennes où nous avons présenté une première lecture-projection d’un mélange de très beaux extraits de l’Etreinte et de ce qu’ils m’inspiraient dans cette fameuse lettre à Adrien.

    Depuis nous l’avons relue-rejouée à Beaubourg en février dernier, à Autun, à la Folie, chez Martin et Isa, en juin, et nous serions sur le départ d’une tournée internationale (et triomphale) à Louvain-la Neuve en Belgique, mais chut.

  • C’est à Autun, chez Martin et Isa, dans les faubourgs de la Folie, 10, route de Château-Chinon, le 16 juin à 20H00, Isa Bordat nous fera la grâce d’un Mordre et Unir , puis Adrien Genoudet et moi-même feront une lecture-veillée de L’Etreinte , d’après le texte éponyme d’Adrien, entrecoupé d’extraits d’une lettre que je lui ai écrite après la lecture de L’Etreinte .

    Ce sera l’occasion de déguster des petites choses qui n’ont lieu que dans les chaudrons d’Isa, de découvrir le très beau livre d’Adrien et même, de repartir avec un exemplaire dédicacé de L’Etreinte , d’ Une fuite en Egypte ou encore de Raffut , qui vient de sortir

  • Vous entrez dans un théâtre, sur scène une grande table noire, de part et d’autre de la-quelle, deux chaises indiquent qu’il y aura, conformément à l’affiche du spectacle, deux lec-teurs, d’ailleurs leurs deux textes sont posés sur la table au-devant des chaises et sont éclairés vivement dans un rectangle de lumière qui emprisonne parfaitement les deux tas de feuilles, la réflexion des deux tas de feuilles blanches est d’ailleurs le seul éclairage, si ce n’est la lumière rouge d’un écran, au lointain, derrière la table. La sonorisation de la salle de spectacle passe en boucle une chanson d’un autre temps, Smile, chantée par Timi Yuro. Vous vous installez et discutez, ou pas, avec les personnes autour de vous. Ça dure un peu, on vous passe bien cinq fois la chanson, c’est un peu lassant à vrai dire, puis au moment, où cela pourrait presque devenir plaisant, panne d’électricité, toutes les lumières s’éteignent et la chanson est brusquement interrompue. La rumeur autour de vous cesse. Deux ombres viennent s’assoir, l’une à jardin, l’autre à cour. Puis tout d’un coup le vidéoprojecteur envoie une image générique et sombre de la ville de nuit et, avec elle, la sonorisation, elle, crache des coups de feu, des cris, des invectives et pendant cinq minutes le plan fixe de la ville ne bouge pas, il se rapproche d’un immeuble, il y a une vie silencieuse dans des appartements, en revanche la bande-son est insoutenable parce que vous avez compris, assez rapidement, qu’il s’agissait d’un enregistrement aux abords du Bataclan un soir de 13 novembre 2015. Et très franchement, vous seriez en droit de vous demander si on vous a bien regardés, qui sont les personnes qui sont en train de vous imposer ces longues minutes, de les revivre d’une façon spectaculaire, vous êtes à deux doigts de vous lever et de foutre le camp, d’autant que la probabilité n’est pas faible que vous ayez perdu un proche dans les attentats du 13 novembre 2015, ou dans un autre attentat, ou encore que vous connaissiez, parmi vos proches, une personne qui a effectivement perdu quelqu’un dans des conditions tellement éprouvantes et, donc, qui sont les personnes - les deux ombres sur scène - - qui sont en train de faire spectacle de tout et de justement d’un événement pareillement mortifère ? Pour tout vous dire, les deux ombres en question y pensent salement et même redoutent qu’effectivement, vous vous leviez et même que vous les invectiviez et les deux ombres le redoutent tout particulièrement qu’elles trouveraient la chose, votre désertion, vos invectives, parfaitement justifiées et ces deux ombres sont en train de spéculer dans le noir, sans même se regarder, mais elles en ont parlé entre elles, plus d’une fois, et longtemps, de savoir si c’est ce qu’il va se passer ou si, au contraire, elles vont pouvoir s’appuyer sur la confiance du public pour lui dire ce qu’elles ont à vous dire - lire.

    Et pour tout vous dire, les deux ombres en question ne sont pas exactement des professionnels du spectacle, elles ont un putain de trac et cette entrée en matière ne fait qu’ajouter de la peur à leur peur, la peur du public à la leur. Sans compter, répétitions obligent, que cette bande-son les deux ombres l’ont entendue un très grand nombre de fois et que ce n’est pas parce qu’elles l’ont déjà entendue un grand nombre de fois qu’elle fait moins mal à entendre, ce serait plutôt le contraire. De là à vous dire que les deux ombres s’imposent à elles-mêmes ce qu’elles sont en train de vous imposer. Dans la bande-son, la voix angoissée et incrédule d’un journaliste du Monde, voisin du Bataclan, qui, réflexe professionnel, filme au téléphone de poche la petite rue derrière le Bataclan - le passage Saint-Pierre Amelot - par lequel s’échappent des personnes, comme elles peuvent, parmi lesquelles une femme qui explique être enceinte et qu’elle va bientôt lâcher - de la rembarde de fenêtre à laquelle elle s’est suspendue pour s’échapper. Et de fait elle finira par tomber - ici, je préfère tout de suite dire que cette femme est toujours en vie et que son enfant est né quelques mois plus tard. Le journaliste du Monde filme et enregistre sa propre voix, trempée dans l’angoisse qui exige de savoir : « mais qu’est-ce qu’il se passe ? »

    Et maintenant que se passe-t-il ?

    Les deux îlots de lumière éclairent à nouveau les tas de feuille. Une voix off, jeune, en-tame la narration : « Désormais, nous le savons, tout est à recommencer. »

    Si vous avez reconnu l’incipit de L’Étreinte d’Adrien Genoudet, vous avez bon. Et vous vous doutez depuis le début que je suis une des deux ombres et que l’autre c’est celle d’Adrien Genoudet et que nous sommes en train d’entamer la lecture spectacle de l’Étreinte, vous avez bon aussi. Et à vrai dire si vous n’avez pas encore lu L’Étreinte d’Adrien, je ne peux que vous encourager à le faire et vous allez enfin lire quelque chose de sensible, d’intelligent et de cultivé sur le sujets des attentats du 13 novembre 2015, ça devrait vous changer de tout ce que vous avez déjà lu sur le sujet. Le texte d’Adrien va vous prendre par la main, vous emmener partout où la violence a éclos et semé la mort et vous dire d’une très poétique façon que Notre Mal vient de plus loin, pour reprendre le titre d’Alain Badiou. Adrien avec force exemples, comparaisons, métaphores, symboles, citations, bref avec toutes les armes de la littérature, va faire rien moins que de vous dire que pour monstrueux que soient les attentats de novembre 2015, ils ne venaient pas de nulle part, qu’ils étaient en nous, prêts à germer, que notre part inconsciente, mieux encore, notre histoire, et notre culture, portaient tout cela en elles et en nous. Et pour comprendre, entendre de telles atrocités en somme, il va falloir nous faire confiance. Une confiance presque aveugle et qu’en quelque sorte ce qu’on vous a imposé au début de notre affaire c’était une manière, un peu maladroite, de vous demander cette confiance.

    Et aussi invraisemblable que cela puisse paraître à la fin, vous serez remué et retournée ou retourné et remuée. En tout cas pas indemnes. A Rennes, après la première lecture, au foyer, un homme un peu plus âgé que moi est venu me trouver pour me dire que cette lecture lui avait fait prendre conscience que depuis le 13 novembre 2015 il se trompait du tout au tout dans sa lecture de ces faits affreux, et que pour ainsi parler, sur le sujet, on nous raconte beaucoup de carabistouilles, on nous fait avaler des couleuvres.

    Il n’empêche la question des moyens employés subsiste, pourquoi ce début, et d’autres effets - je e vais pas tout vous dire non plus, des fois qu’on le rejoue, notamment le 16 juin à Autun, notez ! - et qui sommes-nous pour nous permettre de tels effets, une telle violence ?

    Nous avons joué deux fois ce spectacle. Les deux fois, pendant tout le début, j’étais au bord de vomir de trac et d’angoisse, et quand c’est à moi de prendre la parole le premier - « Adrien, je viens de lire l’Étreinte que Tiffanie avait mis de côté pour moi » - je peux vous dire que je ne fais pas le fier, en revanche je suis vidé d’une chose, je n’ai plus peur et je vais pouvoir faire ce que j’ai à faire et que je ne sais pas vraiment faire, à savoir lire en public, devant une centaine de personnes, et même - les idées d’Adrien, des fois ! - vous gratifier de cinq dix minutes de complète improvisation sur une guitare électrique, instrument que je maîtrise presque aussi bien que des patins à glace. Bref je suis lancé. Et pour Adrien, c’est un peu pareil, pour lui c’est plus dur que pour moi, ses parties de texte sont plus longues à lire et c’est un peu son texte qu’on est en train de défendre ici. Et lancés, nous avons acquis une forme de légitimité, en tout cas, j’en ai le sentiment, après-coup.

    Et pour tout vous dire une chose qui me donne à moi, pour Adrien je ne sais pas, je pense que cela vient d’ailleurs, cette forme à la fois de légitimité et de courage, c’est que je me dis que je ne pourrais jamais dire quelque chose de plus stupide que tout ce que j’ai entendu de la part des femmes et des hommes politiques de ce pays en commençant par le premier d’entre eux, le précédent président de la République, je sais je l’ai déjà dit, les deux pieds mal assurés sur les décombres du Bataclan, déclarer, faussement martial, que la France est en guerre. Et il s’est dit des choses plus stupides encore, notamment le 14 juillet suivant après les attentats de Nice, quand cet abruti de Guaino - l’homme qui vomit ses électeurs aux dernières législatives perdues par lui - qu’il faudrait installer des lance-roquettes sur des endroits comme la promenade des Anglais à Nice. C’est qu’elle va être belle la promenade des Anglais, ses palmiers et ses lance-roquettes, parfaitement intégrées dans le paysage, Philippe Stark nous fera bien quelque chose.

    Je ne vais pas m’attarder sur le fait que l’état d’urgence décrété en 2015 n’a finalement été levé qu’une fois que ses dispositions avaient été intégrées au sein même du code civil, en revanche je ne doute pas qu’à la prochaine occasion, quand l’état d’urgence sera de nouveau décrété, cela permettra de corser encore un peu plus l’affaire, je crois même que militaires et bleusaille pourront désormais décider d’élire domicile chez qui leur semble bon, peut-être au-rons-ils la politesse d’apporter leurs propres brosses à dents, mais cela ne sera pas tant par politesse mais par souci, sans doute, de ne pas mélanger torchons et serviettes dans leurs petits fichiers de collectes d’ADN. Bref l’état d’urgence c’est maintenant. Surtout, comme l’ont amplement montré les journées du procès de Tarnac, la lutte contre le terrorisme, si fictive soit-elle, c’est en fait le Nord des gouvernements de droite qui se succèdent sur le trône. Ce serait très injuste et incorrect de ma part sans doute de sous-entendre que pendant que d’amples ressources matérielles et humaines étaient dédiées à la surveillance d’un magasin d’épicerie dans un petit village de la Creuse, d’aucuns se radicalisaient, et pas que sur internet.

    D’ailleurs il est désormais loisible de prendre la mesure de cette menace, tout du moins ce que l’on veut bien nous en dire. Vous n’imaginez pas à côté de quoi nous sommes passés. Le journal Le Monde - au sommet sa volonté de nous informer sans doute, ou est-ce de nous pousser dans le gosier des données, graphiques compris, toutes droites pondues et made in ministère de l’Intérieur - nous donne donc le récit, à la fois exhaustif et pléthorique, de tous les attentats manqués ou réussis - leurs mots, pas les miens. Et cela me met dans une colère noire, vous n’avez pas idée.

    Voici désormais les impensés du pouvoir et de leur chambre à écho, la presse.

    À l’antiterrorisme, ils et elles sont trop forts, ils et elles n’arrêtent pas de nous éviter la mort au coin de la rue. Regardez tout ce qu’ils et elles ont déjoué.
    Mais il faut quand même continuer d’avoir peur.
    Grâce à l’état d’urgence, qui fait tellement l’économie de la liberté de chacunes et cha-cuns, on n’a pu déjouer tant et tant d’attentats (dont par ailleurs il est assez difficile de déter-miner le niveau de terreur, quelques empêchements de quitter le territoire national pour des mineurs sont parfois caractérisés, hypothétiquement, comme des évitements de grands mal-heurs, ce qu’ils sont peut-être, c’est possible, mais sont-ce vraiment des attentats déjoués)
    Mais il faut quand même continuer d’avoir peur.
    Lisez bien cette longue liste d’attentats déjoués et vous devriez normalement en trouver un près de chez vous. Elle n’est pas passée bien loin celle-là. Couplez cela avec un peu d’intelligence artificielle et la prochaine fois vous devriez avoir les horaires de passage manqué de la grande faucheuse. Quand on vous dit que l’antiterrorisme est une fiction - je vais finir par leur envoyer mon C.V. d’auteur et donc des compétences à revendre dans le domaine de la fiction, au moins je serais vraiment payer pour de telles compétences qui seraient enfin reconnue à leur insurpassable hauteur.
    Mais il faut quand même continuer d’avoir peur.
    Last but not least, ne perdez jamais de vue, braves gens, que le sujet de préoccupation principale qui doit être le vôtre c’est que le terrorisme est partout - devenez un peu comme Finkielkraut, désolez-vous que Nuit debout détourne l’attention publique de l’islam radical.
    Mais il faut quand même continuer d’avoir peur.

    Est-ce que la logique pure ne pourrait pas nous venir un peu en aide, chers et chères journalistes du Monde, le journal qui décode ? Est-ce qu’un attentat déjoué n’est pas, en soi, un non-événement par excellence ? Et est-ce qu’un non-événement n’est pas une non-information ? Et est-ce qu’une non-information n’est pas, par définition, de la désinforma-tion ? De la fiction ?

    D’ailleurs posez-vous un peu la question, là, tout de suite, de quel fait d’actualité le pouvoir, et ses médias inféodés, aimeraient détourner notre attention, là, tout de suite, maintenant ?

    Je vous aide un peu ou vous trouvez par vous-mêmes ?

    #pendant_qu’il_est_trop_tard

  • Mon inconscient se sentant traqué
    Devient cruel
    Et m’impose tristesse peur et cruauté

    Avant-hier j’étais triste
    Hier j’avais peur
    Ce matin je suis cruel

    Petit-déjeuner à sept
    Thé noir, tartines de confiture d’orange
    Comté

    Promenade autour du temple de Janus
    Avec Monique qui me raconte
    Un épisode de blizzard à Montréal

    Notre petite marche
    A la vertu divine
    D’éclaircir le ciel !

    Janus
    Pas
    Mort

    Janus pas mort
    Toujours vivant
    Et puissant !

    Je suis un athée
    Qui donnerait volontiers du crédit
    À des mythologies anciennes

    Martin me fait un café
    Je m’installe à une petite table carrée
    Et je suis concentré comme jamais, Autun !

    J’entends bien
    Qu’on s’affaire dans la cuisine
    Mais je suis concentré comme jamais

    Phil
    À
    Table !

    De petits éperlans frits
    Me font penser à B.
    Et à l’Escala

    Nous déjeunons
    Pure provocation, dehors
    Sous un ciel d’orage

    Et la pluie, bonne amie
    Nous laisse déjeuner en paix
    Nous prenons le dessert dans la cuisine

    Gâteau de marrons
    Lait de poule
    Concert de soupirs d’aise

    Je monte m’allonger
    Pendant qu’une conversation du futur
    S’organise avec le Québec

    Je rêve d’un match de rugby
    En pleine forêt de bouleaux
    Comme dans L’Enfance d’Ivan, tu vois ?

    Les défenseurs
    Nous tirent dessus à balles réelles
    En fait c’est la guerre qui est partout

    Je reçois un mail de Mathilde
    Qui compose Raffut
    Rien ne vaut le travail le dimanche

    L’orage de grêle
    Joue fort
    Sur le toit de tôle

    Il fait sombre
    Mon petit écran éclaire peu
    Le grand atelier de Martin

    Dans cette pénombre mal percée
    Le concert augmente en intensité
    La musique improvisée est partout

    Je passe une petite heure
    Avec Martin qui me montre un tableau
    Que je ne connaissais pas : mon portrait !

    Dehors c’est le déluge
    Et nous buvons du café
    En parlant peinture

    Et on finit par s’attrouper
    Autour du feu
    Studieux, toutes et tous, Liszt aussi

    Je bois un bol de soupe
    En bout de table
    Les au-revoir pour bientôt

    Martin m’aide à charger
    Ma précieuse cargaison
    Son tableau d’après Van Dyck

    Je conduis prudemment
    De nuit et sous la pluie
    La musique très forte, électrique

    Et j’avale les kilomètres
    C’est dimanche soir
    Et je suis heureux

    En arrivant le soir
    Je trouve le premier jet
    De composition de Raffut

    Un peu plus
    Et je réveillerais Zoé
    Pour tester sa lecture de dyslexique

    En tout cas
    Pour moi-même, dyslexique léger
    Cela fait déjà une différence

    #mon_oiseau_bleu

  • Mon Oncle Michel s’est remis à la peinture
    Il peint sur du papier photo
    Des vues en contre-plongée

    Je réchappe de justesse
    A l’écrasement par un tramway
    Devant lequel j’avais traversé imprudemment

    Je rejoins une communauté de clochards
    Qui vivent sous un échangeur d’autoroute
    Je joue de la musique avec l’un d’eux

    Je discute avec un autre
    Qui de sa blague à tabac
    Sort un lézard et me le jette

    Le lézard se faufile dans mon col
    Et grossit et enfle sous ma chemise
    J’ai de plus en plus peur, on se moque

    Je tente de me réveiller
    Pour m’extraire de ce cauchemar
    Mais je ne m’en sors pas comme ça

    Je dois finalement
    Saisir mon courage à deux mains
    Et saisir le lézard qui s’agrippe à mon dos

    Je dépasse ma peur
    Je survis
    Je me réveille en tremblant

    Oh bah ce rêve-là
    Je serais content de le partager
    Avec McEnroe !

    Petit
    Déjeuner
    Pantagruélique

    Je remonte dans l’atelier
    Pour reprendre les notes de mon rêve
    Le téléphone vibre, c’est McEnroe

    « - Je ne vous dérange pas ?
    – Non pensez, je suis en train de noter
    Mon rêve de cette nuit pour mardi »

    Petites courses pour les repas
    De ces deux prochains jours
    Abondance de chefs ne nuit pas

    Œuf mollé
    Epinards aux écorces d’orange
    Conté

    Sieste dans une cathédrale
    Repu, allongé, mon regard
    Vagabonde dans l’atelier de Martin

    Je m’octroie le plaisir d’un peu de lecture
    L’affaire de Tarnac dans Lundi matin papier
    Mon admiration pour leur courage aux neuf

    Mon admiration pour leur courage
    Leur intelligence, leur analyse fine
    Et leur talent rédactionnel

    Je finis par verticaliser ma position
    Quel indécrottable fainéant
    Et je me mets un peu au travail

    Je pars chercher Martin au Creusot
    Concerto en Fa majeur pour clavecin
    De Jean-Sébastien Bach, ça swingue, terrible

    À la gare du Creusot
    Des trains tellement rapides
    Passent en percutant l’atmosphère

    Le quai est désert
    Je ferme les yeux
    Je me croirais au Tracé

    Si Seijiro Murayama
    Jouait du train
    Il pourrait jouer la même musique

    De retour à Autun
    Des odeurs capiteuses de curcuma
    Promesses de Thaïlande bourguignonne

    Monique
    Martin, Isa et moi
    Garance, Axel et Rose

    Cabillaud lait de coco et piments
    Chou-kal aux écorces d’orange
    Soufflé aux pommes

    La fatigue me tombe dessus de bonne heure
    Et je m’endors en pleine conversation !
    Le vieil homme et la journée réussie

    #mon_oiseau_bleu

  • Le rêve de ce matin
    S’enfuit le temps
    De me retourner

    Je me lève d’excellente humeur
    Je fais ma valise pour Autun
    Nous partons au collège avec Zoé

    Nous passons sous les fenêtres de la docteure L.
    Et tout mon rêve de cette nuit
    Et sa grande tristesse me reviennent d’un coup !

    Je consulte la docteure L.
    Avec Émile qui va mal
    Il faut le mettre sous camisole

    Le cabinet de la docteure L. qui pleure
    Est une immense baie vitrée
    Constellée de gouttes de pluie

    Papa
    Tu as l’air
    Tout chose ?

    Je viens de me souvenir
    Du rêve de cette nuit
    Et il était très triste

    C’est une consolation de faire route
    Avec Zoé jusqu’au collège
    Après qu’une telle tristesse tombe sur moi

    Open space
    Affaires courantes
    Je tire jusqu’au déjeuner

    Déjeuner avec mon collègue Julien
    Nous avions gardé un meilleur souvenir
    De cette table. Deux cafés en face

    Je remets un peu d’ordre
    Dans mes fichiers d’écriture
    Avant le week-end

    En démarrant l’autoradio
    Libère une voix familière
    Que je ne veux plus entendre

    J’écoute malgré tout
    Comme par souci de vérification
    Rien d’imprévu, au contraire, ronron

    J’ai emporté plein de disques
    L’embarras du choix
    À plus de cent kilomètre-heure

    Ma covoitureuse a annulé hier soir
    J’ai le sentiment d’une conversation fantôme
    Avec une personne dont je ne connais que la vignette

    Je m’arrête prendre passe un café
    Dans une station-service
    Où cinq plus tôt, ce qui me rend triste, un peu

    J’allais écrire un poème
    À propos de mes choix musicaux
    Mais je crois qu’on s’en moque un peu

    D’ailleurs
    Est-ce qu’on ne se moque pas
    Du reste aussi ?

    Et avec cette préoccupation
    Tout en conduisant
    Quand arriverai-je à la fin de Mon Oiseau bleu ?

    La plaine d’Avallon
    Toujours ce moment spécial
    Dont j’ignore tout de la raison

    Après Saulieu
    La route que j’aime tant
    Il faut doux, j’ouvre, j’entrouvre

    Isa
    Rose
    Et moi

    Rose et moi
    Dans le hangar
    Faisons du petit bois

    Il n’y a plus guère qu’à Autun
    Que je manie encore un peu la hache
    Vlan une bûche me revient dans le tibia

    Claudiquant et penaud
    J’apporte le bois à Rose
    Qui fait du feu comme son père

    Trinquant avec Isa et Rose
    Regardant les flammes s’éparpiller
    Par grand vent, je suis incrédule

    Peut-on commencer une journée
    Dans la tristesse, transiter par l’open space
    Et finir en beauté près des flammes ?

    Nous dînons de trois belles truites
    Cuites sur la braise
    Et résistons mal à la palette des fromages

    On rit beaucoup
    Au-dessus des squelettes
    De nos poissons

    Je prépare mon lit avec Isa
    Dans le grand atelier de Martin
    Je vais dormir seul dans une cathédrale !

    Je lis le numéro 2 de Lundi matin papier
    À propos de l’affaire de Tarnac
    Ce serait drôle si ce n’était pas drôle

    Je m’endors
    D’un coup
    Sec !

    #mon_oiseau_bleu

  • Et il entame un nouveau fichier
    Tandis qu’il fait encore nuit
    McEnroe et moi. Fichier créé à 6 : 00, un score de tennis

    McEnroe et moi
    Démarre un 29 février 2018
    Sur un score de tennis

    Les aventures démarrent tôt ce matin
    Une dame appelle à l’aide pour démarrer
    Mobilisation de mes voisins, mes câbles, leur voiture

    Courses vite faites
    Avec Émile comme assistant technique
    Le tout en moins d’une heure

    Le tout en moins d’une heure
    C’est du temps en plus pour jouer
    Plus sûrement pour écrire

    Plus sûrement pour écrire
    Mais est-ce qu’écrire
    Ce n’est pas, un peu, jouer ?

    Pour Tiffanie
    Je brode un argumentaire
    À propos de l’autisme

    Je l’intitule
    L’autisme expliqué
    À une fille du Sud-Ouest

    Et rarement
    Ai-je été aussi clair
    Sur le sujet

    Je lis au lit
    Les Monarques
    De Phil

    I’ve got
    Butterflies
    In me stomach

    Je pleure un peu
    L’enfance de Phil, la mort du père
    Et je ris beaucoup, Phil

    Je prends l’avion pour Tel Aviv avec Phil
    Je n’ai pas besoin de chercher très loin
    Le livre resté en cavalier ouvert à la bonne page

    Je dépose Phil à son hôtel
    On se promet de reprendre l’entraînement
    Pour le Cervin le lendemain matin

    Je ne suis pas fatigué
    Je sors prendre l’air, entre dans un café
    Et rencontre une anthropologue

    Nous échangeons plaisamment
    Elle me demande mon numéro
    Je suis incapable de le lui donner

    Une virago s’interpose
    Et fouille dans les photographies prises
    Avec mon téléphone de poche

    Et finit par y trouver ce qu’elle cherche
    Une photo de homard en 3D
    Good luck with that one McEnroe !

    http://www.desordre.net/musique/webster.mp3

    Déjeuner seul
    Un peu de musique
    Hodges/Webster mezzo voce

    Le café de la maison
    Est tellement meilleur
    Que celui de l’open space

    Home office
    Je découvre par la fenêtre
    La neige tombée cette nuit

    Home office
    Emile aimerait bien sortir
    Je lui prête mes gros croquenots

    Home office
    J’affiche la couverture de Raffut
    En fond d’écran

    Home office
    Je note les détails surprenants
    Du rêve de ce matin

    Home office
    Charlie Parker/Dizzie Qu’il est speed
    Et un jeune Monk au piano !

    Home office
    Et il faut s’intéresser
    A la question du déjeuner

    Visite surprise
    De Clément et Juliette
    Changement de fusil d’épaule

    Visite surprise
    Il faut toujours avoir
    Du poisson dans son réfrigérateur

    Home office
    Après la vaisselle
    Il faut retourner au cahier des charges

    Home office
    Gérer les entrées et sorties
    Des enfants

    J’avance l’heure de la sortie du bureau
    Pour aller me promener avec Emile
    Froid mordant, et un peu humide

    Marche de peu de mots
    Comme souvent les marches avec Emile
    Mais le sentiment d’une proximité silencieuse

    Dans le métropolitain
    J’envoie des messages
    Désopilants à Zoé qui répond de même

    J’ai un peu d’avance
    Sur mon rendez-vous avec Adrien
    À L’Industrie

    Je corrige quelques pages
    De Frôlé par un V1
    Quand j’entends : « Monsieur De Jonckheere ? »

    On rentre de plain-pied
    Dans L’Étreinte, critique de Beaubourg
    Et échange d’idées pour Autun

    Je parle du Trahison de Pinter
    Vu au théâtre avec Zoé
    L’idée de cuisiner sur scène

    Affrontements habituels
    Avec Adrien on a souvent besoin
    De s’expliquer et ensuite plein accord

    L’Industrie se bonde
    Tintamarre infernal
    Mais discussion et quelle !

    En sortant Adrien croise une connaissance
    Qui me tend la main : « Yannick Haenel
    – Philippe De Jonckheere », réponds-je

    Nous partons boire un autre verre
    Je trinque avec Yannick Haenel !
    Je voudrais avoir des témoins !

    Yannick Haenel fait montre de la même immodestie
    Se pensant entré dans l’espace littéraire
    Le voilà qui s’imagine prophète a posteriori

    La réalité est moins flatteuse
    Il est un faible révisionniste qui écrit très médiocrement
    Comme Jonathan Littell

    J’écrivais de ces chroniques
    Moi, il y a une huitaine d’années !
    Soit j’ai vieilli, soit je me suis calmé

    Adrien nous lâche
    Je suis sauvé par Corentin
    Belge médiateur universitaire qui nous étudie

    Du métropolitain
    Je traverse un bras de bois de Vincennes
    Nuitamment, sombre, je me sens tellement bien

    Quelques pages des Monarques
    J’y vais doucement
    Pour ne pas tuer Phil trop vite

    #mon_oiseau_bleu

  • Plusieurs fois dans la nuit
    Réveillé
    Frappé par la violence du vent

    Et par de telles bourrasques
    Les spores insaisissables du rêve
    De cette nuit, éparpillés, tels des cendres

    Café matinal
    Avec Lola
    Le vent nous fascine

    Pensée pour l’atterrissage
    De Martin et Isa
    De retour du Québec

    Dans quel état dispersé
    Seront-ils ce soir
    À Autun ?

    Je prépare ma valise
    Lola me cuisine des galettes indiennes
    Et une salade de chou chinois

    On se dit au revoir
    Ému
    Je retraverse le massif des Maures

    Je reconnais, de loin
    La Montagne Sainte-Victoire
    D’après les tableaux de Cézanne !

    Je finis par retrouver ma jeune co-voitureuse
    Qui s’étonne de mon absence de GPS
    J’avais appris la carte par cœur. « Comme mon Grand-Père ! »

    Route longue
    Difficile
    Conversation pas déliée

    Je dépose ma co-voitureuse
    Au kiosque de la place d’Autun
    Mondes qui ne se touchent pas

    Je retrouve Martin et Isa
    Ensuqués de décalage horaire
    Et l’Arroux qui monte, qui monte

    Je monte la garde pendant la nuit
    Drôle de sentinelle, qui lit
    Et qui écoute de la musique

    De temps en temps
    Je me sers de la sculpture de Martin
    Comme d’un zouave pour jauger

    Vers trois heures il me semble
    Que l’eau est étale
    À quatre heures, légère décrue

    L’eau n’est finalement pas rentrée
    Elle s’est arrêtée juste à temps
    Une légère trace humide dans la trappe

    #mon_oiseau_bleu

  • Météo des neiges, #télévision de #riches - Acrimed | Action Critique Médias
    http://www.acrimed.org/Meteo-des-neiges-television-de-riches

    Alors pourquoi la #météo des neiges est-elle programmée à une heure de grande écoute ? C’est parce que la télévision montre beaucoup plus de membres de la classe supérieure que de gens des classes populaires. On entend souvent dire que la télévision serait un organe de propagande du gouvernement ou le temple de la bêtise ou du consumérisme. Mais ce qui saute aux yeux d’abord c’est qu’elle fait des membres de la classe supérieure la référence obligée de tous les autres. Cette surreprésentation a des conséquences sur nos perceptions de la société – elles contribuent par exemple à notre méconnaissance des inégalités : ces couples de cadres avec trois enfants et une grande maison comme ceux du programme court « Parents mode d’emploi » sur France 2 deviennent la norme du « Français moyen » alors qu’ils font de fait partie des classes supérieures.

    Mais cela a aussi des conséquences politiques : sur chaque sujet, ce sont d’abord des membres de la petite ou moyenne bourgeoisie qui s’expriment, donnant leur point de vue comme valant pour tous les autres et contribuant à valider certaines réformes et décrédibiliser certains mouvements sociaux. On interroge ainsi beaucoup plus souvent des entrepreneurs que des salariés pour parler des vertus d’un rétrécissement du code du Travail. Pourquoi cette domination des classes supérieures à la télévision et comment en sortir ?

    #inégalités #représentation

  • Elle me poursuit encore dans mes rêves
    Mais même en rêve je parviens
    Un peu, à la repousser

    Dans mon rêve, une nouvelle discipline
    De photographie : photographier
    Des événements futurs

    Petit déjeuner gargantuesque
    Rires et discussions
    Visite de l’atelier de Martin

    Parmi les bustes
    Que peint Martin
    Un que je reconnais bien

    Belle marche dans les ondulations
    Du Morvan, lumière changeante
    Pas de champignon mais un bel objet rouillé

    François nous reçoit
    Soupe de citrouille
    Lentilles riz, et un armagnac, et quel !

    François raconte une histoire (avec talent)
    Interminable (qu’il fait durer, durer, durer…)
    Avec une chute minuscule (j’adore)

    Une belle partie d’échecs avec Angelo
    Un verre d’Armagnac, un conte
    Et c’est l’heure de retourner travailler

    Retour à Autun
    Martin me file un coup de main
    Avec l’affiche de l’Étreinte

    Isa au sommet de sa sorcellerie
    Galettes coréennes
    Aux moules et crevettes. Extraordinaire

    Lesté de ma galette coréenne
    Je prends la route, haleine de poireaux
    Et musique à fond

    Je passe devant un troupeau
    De moutons aux yeux albinos
    Dans les phares de ma voiture

    Dans les phares de ma voiture
    Des moutons insomniaques
    Comptent les voitures qui passent

    http://www.desordre.net/musique/eels.mp3

    Les Eels chantent : I need some sleep
    I’ve tried counting sheep
    But there’s one I always miss
    . Je ris

    Dans une station-service déserte
    Un couple de vieux Russes
    Se dispute

    Un pâtisson
    Un potimarron
    Un butternut

    Un morceau de conté
    De la sauce de soja
    Et des rires. Souvenirs d’Autun

    Maison endormie
    Dans laquelle
    Je m’endors sans délai

    I need some sleep
    I’ve tried counting sheep
    But there’s one I always miss

    Je repense
    Aux moutons
    Insomniaques

    #mon_oiseau_bleu

  • Tandis que je sors du studio d’enregistrement
    L’ingénieur du son me confie qu’on devrait passer
    Tout l’enregistrement en italique.

    Je fais mon sac en hâte
    Ce soir je pars à Autun
    Couronnement d’une semaine riche

    Miettes de croissant
    C’est vendredi
    Sur mon clavier

    À la terrasse du BDP avec Julien
    On croise Hélène, pas vue depuis depuis…
    Souvenirs des Arts Déco

    En route pour Autun
    Manou Farine reçoit Daruysh Shayegan
    Atiq Rahimi et Mahmoud Chokrollahi

    Comme à son habitude, elle laisse les microphones ouverts
    Et ses invités prestigieux entre eux
    A la fin de l’émission : ils parlent en perse !

    Lever d’une pleine lune rousse
    Sur la plaine d’Avallon
    Comme l’apparition d’une amie

    Martin et Isa
    Transformés
    Par le Japon

    Récits du Japon
    Morgon
    Tempura de cabillaud

    Martin et Isa
    Décalés
    Seul le soir

    Premières ébauches
    De l’affiche de l’Étreinte
    Quelques pages de Handke

    #mon_oiseau_bleu

  • http://www.desordre.net/musique/beatles.mp3

    Deux rêves curieux, l’un l’absolue frustration
    Attente d’un train qui ne vient pas, l’autre
    Le rêve parfait, les Beatles jouent pour moi seul

    Levé le premier
    Je bois mon café dans le jardin
    Comme sur la margelle au Bouchet

    L’atmosphère a tiédi
    Le ciel s’est assombri
    Mais je ne suis pas triste

    Elle n’est pas venue
    Elle n’avait jamais dit qu’elle viendrait
    Je serais guéri quand je ne raconterais plus de fables

    Deux kilogrammes
    De sardines
    A évider

    En chantonnant It’s all right
    To eat fish because
    Fish don’t have feelings

    Mes sardines
    Ont fière allure
    Le ventre ouvert

    Mon café
    A goût
    De poisson

    Poème tapé
    Avec les doigts
    Qui sentent la sardine

    Dimanche matin laborieux
    Chacun trouve rapidement
    Quelque chose à faire, lendemain

    Isa nettoie ses chaudrons
    Dans la chaleur accrue
    D’un gigantesque feu

    C’est à Autun
    Qu’ont lieu
    Les plus belles fêtes

    Et c’est souvent le dimanche
    En nettoyant et rangeant
    Qu’éclatent les plus gros rires

    Où il est souvent question
    D’un lait de poule
    Et de quelques autres moqueries

    Les filles ne sont pas en reste
    Pour reconduire moqueries
    Et anecdotes. La vie

    Sardines à la braise
    Ratatouille et haricots plats
    Restes des desserts, café

    Sieste dans une chaleur pesante
    Rêves-reptiles, immédiatement
    Evaporés, anguilles et lézards

    http://desordre.net/bloc/ursula/2014/sons/pink_floyd.mp3

    Départ longtemps différé
    Pour les gorges de la Canche
    Pink Floyd passe sur l’autoradio

    Soudain au milieu de la forêt
    Une installation hydraulique
    Et son immense tuyau d’adduction

    Chemin qui confine parfois
    À l’escalade, je sue sang et eau
    Heureusement que j’ai maigri !

    Lumière orgiaque
    Chaleur tropicale
    Chaleur de l’amitié aussi

    Soif inextinguible
    Le long d’un petit
    Cours d’eau

    À la sortie du bois
    Mon téléphone sonne
    Légère détresse de Sarah

    Tu me manques
    Texte-je pour
    Arrondir les angles

    Chemin du retour avec Isa
    Elle me parle de son installation
    Et de sa performance à New York !

    Je lui parle de mon projet
    De livre tête bêche
    et aussi de celui de récit croisé

    Je suis choyé
    Avant de repartir
    On me sert une soupe

    Sur la route du retour
    A travers bois, fenêtre ouverte
    Je respire goulument l’air des futaies

    Je mène ma barque
    A travers une circulation dense
    En rêvassant les yeux ouverts

    http://desordre.net/bloc/ursula/2014/sons/rem.mp3

    Dans un embouteillage
    Je mets la radio et tombe
    Sur une veille chanson de REM

    En vieil homme seul
    J’avale mes médicaments
    Et je branche mon respirateur

    #mon_oiseau_bleu

  • Finalement, non, je m’en doutais un peu
    Un rêve médiocre, une partie de volley-ball
    Dans une rame de métropolitain, c’est bien aussi

    Mon ordinateur le matin
    Tandis que je m’approche de lui
    « De quoi a encore-t-il rêvé cette nuit ? »

    Macron révise
    Sa stratégie
    De communication

    Le chef de l’État
    Estime que la phase de raréfaction
    De sa parole est terminée

    Un collègue a découvert Une fuite en Égypte
    On en parle en plein open space
    Tel est le cours, parfois surprenant, de ma vie

    Et tu écris à propos de quoi maintenant ?
    Et je lui montre mon écran
    Ouvert sur les Anguilles les mains mouillées

    Il fait soudain un temps de cochon
    Au café, relisant, écrivant
    Je détache mal ma pensée d’elle

    Il
    Faudrait
    Pourtant

    Sur le petit écran de mon appareil-photo
    Je retrouve les images de mes enfants cet été
    Cela redonne un sens à ma vie, un si petit écran

    Mon voisin à la terrasse du BDP
    Est un jeune ouvrier poussiéreux
    Qui mange de bon appétit son poulet massala

    J’aime le soin qu’il prend
    A disposer ses couverts
    Et assaisonner son repas

    Phil, fais-moi ce plaisir, cette grâce
    Détache ton esprit
    Tu n’as pas droit à ce malheur

    Le malheur
    C’est pour les opprimés
    Un peu de décence !

    Et ça va
    Tout de suite
    Un (peu) mieux. Presque

    Relisant Élever des chèvres en open space
    Jusqu’au bout tu dois te méfier de toi-même
    De ton désir de parler de ton train électrique

    Mais
    Tu touches
    Au but

    Tu fignoles
    Comme tu faisais enfant
    Avec tes maquettes d’avion

    Un des plaisirs pervers de ma vie
    Ecouter une conférence d’Onfray
    En voiture. En route vers Autun

    Sur la même route j’apprends
    Qu’Orson Welles s’est intéressé
    A l’affaire Dominici

    Et d’autres trucs
    Qui m’intéressent
    Moins

    Dans l’atelier d’Isa
    En m’installant je sursaute
    Une couleuvre, non un jouet en plastique

    À la table de mes amis
    On parle trois langues
    Et ce n’est pas simple

    Plaisir, toujours
    De baragouiner
    Un peu d’Allemand

    Ça fait du bien d’être à Autun
    Ca la repousse un peu
    Pas seulement elle

    Je m’endors d’un coup
    Comme si je m’enfonçais
    Dans mon lit, cela ne m’arrive jamais

    #mon_oiseau_bleu

  • Rêve des capsules olfactives
    Des souvenirs de ses parents
    À sa propre naissance

    Il n’est pas sept heures
    Et je suis déjà en train
    D’écrire ( Anguilles et Oiseau bleu )

    Peu après sept heures
    Je reçois le courriel d’une jeune mère
    Et qui reprend le travail. Ému

    http://www.desordre.net/musique/taylor.mp3

    Ma voiture est malade
    Mon garagiste qui écoutait Cecil Taylor
    A revendu son affaire, puis-je avoir confiance ?

    Je maigris encore
    Je vais finir par apercevoir
    Mes testicules !

    Retour de vacances de ma collègue F.
    Troublée, elle a besoin de parler, à moi donc
    Ma reconversion professionnelle dans le champ psy

    C’est lundi dans le monde
    Est-ce que les ouvriers moldaves
    Sont revenus ? Un jour aller en Moldavie

    J’ai été actionnaire une fois dans ma vie
    Pendant une heure, le temps de vendre
    Toutes les actions de mon employeur (intéressement)

    L’intéressement
    Ne m’intéresse pas
    Je ne suis pas intéressé

    Le garagiste m’explique une panne
    Je pourrais ne pas avoir de voiture vendredi
    Pour aller à Autun écouter l’Anguison Quartet

    Le vieux garagiste
    Qui écoutait Cecil Taylor
    Aurait compris un tel enjeu

    On nous parle d’une cellule terroriste à Ripoll
    On me dit Ripoll et je pense au portail de son monastère
    Et je voudrais continuer de penser à Ripoll de cette manière

    Je fais semblant
    De ne pas penser à elle tout le temps
    De temps en temps cela fonctionne

    Et de temps en temps
    Je reçois un signe d’elle
    Pas toujours volontaire

    Quelqu’un a peint un cercle ciblé
    Sur le trottoir, il est inscrit Wish you were here
    Là-même où nous nous sommes embrassés la première fois

    Je vais prendre des nouvelles de mon automobile
    J’adore l’odeur délétère de l’atelier (poussière et peinture)
    Mais je plains les jeunes mécaniciens qui y travaillent

    J’ai aimé, jeune, puis détesté
    Plus vieux, l’odeur délétère
    De l’hyposulfite de sodium

    Sans parler
    De L’hydroquinone
    Oxydée

    Dîner
    Avec
    Émile

    Dîner,
    En tête-à- tête
    Avec Émile

    Diner en tête-à-tête
    Avec Émile
    Au restaurant

    Diner en tête-à-tête
    Avec Émile
    Au restaurant japonais

    À la demande d’Émile
    Dîner en tête-à-tête
    Au restaurant japonais

    À l’initiative d’Émile
    Dîner en tête-à-tête au restaurant japonais
    Émile s’était habillé élégamment pour moi !

    Je raccompagne Émile
    Nous passons par des rues inconnues
    Belle lumière, beauté d’Émile, grandi

    Coup de téléphone à B.
    Coup de téléphone à A.
    Coup de téléphone à C.

    L’échange avec B.
    Me catapulte
    En Provence

    Pas
    Celui
    Avec A.

    Avec C.
    Il est question
    De faire passer un piano par la fenêtre

    Attentat de Barcelone :
    La police a abattu Abouyaaqoub,
    Le conducteur de la fourgonnette

    Commentaires élogieux pour la police
    Au bas de cet article
    Je m’interroge à propos du verbe abattre

    On abat un arbre
    On abat une bête
    Abat-on un homme ?

    Tous les soirs je me demande bien
    De quoi sera fait le prochain paragraphe
    Des Anguilles les mains mouillées ?

    #mon_oiseau_bleu

  • J – 30

    Dans le métropolitain, le lis Hors du chantier natal de Claro, mélange foutraque de deux biographies, celle d’un ethnologue russe du siècle précédent le siècle précédent et celle de l’auteur, à laquelle donc, s’ajoute la conversation de ma voisine dans la rame qui explique dans le détail à son compagnon comment elle souhaite que soit construite la bibliothèque du salon et j’en suis presque à lui proposer bientôt de prendre la construction en charge, parce qu’il me semble avoir compris ce qu’elle voulait, à la différence de son compagnon, et que cela fait partie des choses que je sais faire, si seulement elle accepte de raccrocher et, partant, d’enlever cette épaisseur surnuméraire qu’elle impose à ma lecture quand j’en viens à comprendre que, pas du tout, je me comprends, mais cette conversation de téléphone de poche d’une inconnue et qui me fait envisager comment je concevrais certaines coupes à mi-bois et comment je jouerais de la fausse équerre dans l’angle du mur du fond, pour lequel son compagnon et elle ne sont visiblement pas d’accord, cette conversation donc, me permet d’ancrer avec force ce récit, peut-être trop intelligent à mon goût, à un réel, à un vernaculaire, qui me rendent cette lecture plus concrète, plus intelligible. Et j’en viendrais presque à suivre cette femme dans les couloirs du métropolitain jusqu’aux dernières pages du livre. Les rayonnages de la bibliothèque construits, je ne manquerais pas de lui offrir le livre de Claro, avec une dédicace, à celle qui m’a fait lire Claro . Et ce n’est pas rien.

    Je retrouve ma voiture garée dans le bois de Vincennes. Je démarre, je profite d’un ralentissement de la circulation pour faire un demi-tour pour le moins hasardeux, je coupe une ligne continue, l’avenue est à quatre voies, vous voyez le genre. Surgit une voiture de police et je pense raisonnablement que mon heure est venue, je n’ai pas avec moi les papiers de la voiture, à vrai dire c’est rare que je les ai avec moi, j’ai perdu mon permis de conduire il y a au moins un an, je me fais chaque fois la promesse d’aller à la sous-préfecture pour m’occuper de son remplacement et je sais, Martin la dernière fois que je suis allé à Autun m’en a fait suffisamment le reproche, que mes pneus sont lisses, mon compte est bon. C’est sans compter sur le dieu des ivrognes. La voiture de police se porte à ma hauteur en roulant par ailleurs toutes sirènes hurlantes à contre sens de la voie opposée, mais ce n’est pas après moi que les policiers en ont mais à un autre citoyen qui roule, lui, dans une voiture qui a une autre apparence que la mienne, plus propre, et des pneus dont je vois bien qu’ils sont profondément gravés, eux, sans compter que lui a parfaitement indiqué par son clignotant qu’il souhaiterait tourner à gauche au prochain feu, je ne peux pas dire que je me sois embarrassé d’une tel protocole lors de mon demi-tour, un peu cavalier, et même, un peu dangereux, je le reconnais sans mal, on n’est pas toujours brillant, surtout conducteur, en revanche cet autre conducteur, plus prudent et plus civil, a, contre lui, d’être fort brun et sombre de peau.

    Du temps de mon apprentissage de la photographie, mon père a un jour eu un besoin urgent d’une photographie d’identité. Et je lui ai réglé cette affaire pendant le week-end. Le samedi matin je l’avais fait poser devant un mur blanc, j’avais réglé le flash en indirect avec rebond sur le plafond blanc, l’enfance de l’art en somme. Mon père avait besoin de cette photographie d’identité dans le cadre de son travail, aussi il avait mis une chemise, une cravate et une veste de costume, pour le reste c’était samedi matin, il sortait de sa douche, il était donc en slip. Et il aura été en slip pratiquement jusqu’à la fin de sa carrière sur tous les documents professionnels le concernant, comme par exemple son badge d’accès à certaines zones protégées dans les aéroports. Et je ne peux pas m’empêcher d’y repenser tandis que Renaud Montfourny tire mon portrait de jeune primo-romancier, atteint, en pleine prise de vue, par une crise aigüe de démangeaison du scrotum.

    #qui_ca

  • J – 64 : Nous n’avons pas vu le retable du jugement dernier de Rogier Van der Weyden — puisque nous avons trouvé portes closes à Beaune —, mais nous avons fait le tour d’un petit lac dont les romains se servaient pour alimenter en eau la ville d’Autun.

    Nous n’avons pas mangé de cette côte de bœuf — puisque je ne mange plus de viande ? dont j’aimais régaler mes amis quand je viens à Autun, mais Martin a cuit excellemment nos maquereaux sur la braise.

    Nous n’avons pas fait de photographies des dernières réalisations d’Isa, mais j’ai pris presque 600 photographies pendant le week-end à Autun — alors que je ne prends presque plus de photographie.

    Nous n’avons pas regardé Toni Erdman sur l’écran géant du hangar, là-même où j’avais projeté les images d’ Apnées et celles du spectacle avec Brâhma , mais nous avons discuté de Carl André.

    Nous n’avons pas mangé de la sole, mais du cabillaud.

    Nous ne nous sommes pas quittés comme souvent peu de temps après le déjeuner du dimanche midi parce que chaque fois je dois prendre toutes les précautions nécessaires pour être rentré et accueillir les enfants, et de ce fait nous avons pu aller nous promener en forêt, une merveilleuse forêt aux immenses mélèzes et aux jeunes chênes.

    Nous n’avons pas bu de bourgogne blanc mais du Gamay et cela allait très bien avec les bulots et le cabillaud.

    Je n’ai pas pu écouter le disque offert par Sophie Agnel en trio, parce qu’il était en quatuor avec un drone, le moteur vrombissant de mon automobile, du coup j’ai écouté des variétés internationales, Frank Zappa.

    Je n’ai pas vu les éoliennes nuitamment sur le chemin du retour, mais j’ai deviné leurs grandes ombres à bâbord, dans la nuit.

    #qui_ca

  • J – 65 : Mon esprit d’escalier est parfois sans remède.

    Samedi soir Martin et Isa avaient invité leur ami Denis, désormais à la retraite après une longue carrière comme agriculteur, Denis notamment produisait un fromage de chèvre qui rivalisait avec les pélardons de la Cézarenque que j’avais eu une fois l’occasion de lui faire goûter de retour des Cévennes en faisant un crochet par Autun pour couper la route, et ce soir-là Denis était là. Denis raconte un peu les mésaventures des repreneurs de sa ferme il y a quelques années auxquels il avait pourtant prêté main forte dans un très louable effort de transition. Malheureusement ces derniers n’ont pas eu la présence d’esprit d’écouter les conseils d’ancien de Denis qui avait pourtant fait de son exploitation une référence locale en matière de fromage de chèvres et ont fait graduellement capoter l’affaire. Ces repreneurs n’étaient pas agriculteurs de métier, ils tentaient de réinventer leur vie et avaient suivi une formation théorique pour ce qui relevait de la reconversion professionnelle, ils appliquaient trop strictement les savoirs reçus en formation et ne voulaient pas entendre que ces derniers devaient impérativement être pondérés par une connaissance locale acquise de longue date par un agriculteur qui, lui, avait réussi à produire du très bon fromage à cet endroit justement. Par exemple ils insistaient pour que les chèvres soient menées aux champs par un chien berger, ce qui dans la configuration des lieux n’avait aucune raison d’être et présentait par ailleurs l’inconvénient de stresser le troupeau. Denis se désole de cet entêtement. Et il me prend à témoin, me demandant, toi qui es informaticien, si tu voulais produire du fromage de chèvre au Rebout, tu t’y prendrais comment ? Et j’éclate de rire parce que je ne peux pas encore révéler à Denis que je suis justement en train de donner la dernière main à un roman dont le titre Élever des chèvres en Ardèche (et autres logiques de tableur) indique que son intrigue se trouve un peu à la croisée des chemins de ce dont il nous parle ce soir.

    Et j’en oublie même de demander à Denis quel est le nombre de litres de lait qu’il faut pour faire un fromage ce qui est précisément le détail, le renseignement, après lequel le narrateur informaticien ne cesse de courir sans jamais parvenir à élucider ce point ce qui l’empêche beaucoup de mener à bien ses calculs de probabilité quant à ses chances de reconversion professionnelle dans l’élevage des chèvres en Ardèche.

    Je ne saurais donc jamais combien il faut de litres de lait de chèvre pour produire un pélardon. Je sais combien de litres une chèvre produit par jour, je sais le prix d’une chèvre, je sais le nombre de chèvres qu’il me faudrait pour une exploitation de fromage de chèvres dans les Cévennes, je sais le prix de certaines installations d’occasion sur internet, on trouve beaucoup de choses sur internet, quand même bien pratique internet, mais on ne trouve pas sur internet le renseignement quant au nombre de litres qu’il faut pour produire un pélardon. Telle est, pour moi, la limite d’internet. Et c’est à cette limite que des amis comme Denis prennent le relai. Encore faut-il penser à le leur demander quand on les voit.

    Et écouter sa réponse.

    #qui_ca

  • J – 66 : Dans la vie il y a des journées d’ennui perdu au milieu d’un open space et dont l’enjeu finalement est de tout faire pour qu’en en sortant il me reste quelques forces vives pour travailler à ce qui me tient véritablement à cœur ET il y a aussi le spectacle d’un champ d’éoliennes en Bourgogne, éclairé par un le couchant sur fond de ciel d’orage tout juste passé.

    En route pour Autun.

    ( Et , une série entamée il y a quatre ans qu’il faudrait que je revisite. http://www.desordre.net/bloc/ursula/2015/images/vacances/index_ursula.htm)

    #qui_ca

  • J-152 : Je me demande si Guy - mon ordinateur s’appelle Guy - ne vieillit pas un peu, ou peut-être est-ce moi, je suis allé trop vite, je n’ai pas fait attention, que sais-je ?, Guy m’a posé une question, j’ai répondu sans réfléchir, sans y penser, j’ai été dépassé, je ne me suis pas rendu compte et j’ai continué de travailler, sans me rendre compte qu’en fait, j’avais potentiellement demandé à Guy de scier la branche sur laquelle j’étais assis. Et Guy a sans doute fait ce que je lui avais demandé de faire. Bref ce matin, parmi mes disques durs externes - une demi-douzaine tout de même - le disque dur qui porte le nom d’immense_disque ne contenait presque plus de données, juste trois petits fichiers images qui j’avais rangés à la va vite à la racine la dernière fois que je suis allé à Autun, notamment le scan d’une petite peinture de Martin à même une de mes photographies. Et la chose était incompréhensible parce que Guy par ailleurs avait l’air de penser que des quatre téraoctets d’immense_disque il n’en restait plus qu’un qui fut disponible.

    J’interrogeais Guy en tous sens usant de mille subterfuges pour lui soutirer des informations, j’avais bien compris que lorsque je double cliquais sur immense_disque , Guy ne retrouvait pas autre chose que les trois fichiers déjà cités, aussi je tentais de biaiser en appelant des fichiers récents depuis différentes applications mais alors les réponses n’étaient pas rassurantes qui me disaient que non, décidément non, ces fichiers, les plus récents donc, n’étaient pas disponibles, ils avaient disparu, j’ai tenté d’accéder aux fichiers de mon site internet, de mes sites internet, depuis l’interface de compositions de pages html, rien à faire, depuis le logiciel de transferts de fichiers rien non plus : je n’avais manifestement plus accès à tout ce que j’avais pu produire de fichiers depuis presque deux ans et je savais que je n’étais pas particulièrement à jour de mes sauvegardes.

    Oui, je sais c’est assez mal. Le problème étant que je ne parviens plus à suivre depuis que je me suis mis à faire de la vidéo d’une part mais surtout du film d’animation, deux activités qui tout d’un coup se sont mises non seulement à remplir mes disques durs d’une façon quasi exponentielle et aussi à les remplir parfois de tout un tas de fichiers dont je ne sais jamais bien à quoi ils correspondent, apparemment des fichiers de travail des logiciels de fabrication de séquences animées et de montage. Bref j’ai graduellement perdu le contrôle de ma petite entreprise : il y a deux ans, je devais consommer un téraoctet de nouvelles données par an, je ne suis désormais pas loin de quatre par an, ce qui d’ailleurs me fait m’interroger sur la pertinence d’un projet que je suis en train de caresser, un projet d’un long métrage réalisé uniquement avec des photographies (animations, time lapse , séquenceurs etc…)

    Mais je n’en suis pas là, puisque pour le moment j’ai potentiellement perdu trois téraoctets de données. Ce qui me donne un peu le vertige tout de même.

    La perte des données est un événement physiquement déstabilisant.

    Ce n’est pas une blague en fait. J’ai tenté de réagir avec calme. Je me suis dit dans un premier temps que j’étais trop ému, oui, ému, pour avoir la moindre réaction intelligente, or il est primordial de réagir avec calme et intelligence si je veux avoir la moindre chance de revoir ces données, certaines au moins. J’ai voulu éteindre l’ordinateur, juste avant que je me dise que déjà ce n’était pas forcément une bonne idée, pour le moment Guy pensait encore que immense_disque contenait des données, il n’était pas exclu qu’un reboot lui fasse voir les choses différemment, il allait falloir agir avec prudence. Et tel les personnages de 2001 l’Odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, je suis remonté du garage et à l’abri de Guy je me suis fait un café pour réfléchir à la façon dont j’allais procéder avec lui.

    J’ai fait tomber la cafetière en la dévissant ce qui a eu pour effet de voiler son couvercle, certes pas au-delà du réparable, mais j’ai pu constater qu’au moment où le café percole, le sifflement ne produit plus tout à fait la même note. J’ai vu que mes mains tremblaient. Je me suis dit du calme.

    J’ai tenté de me raisonner. Je me suis dit, il y a deux solutions. Je vais trouver le moyen de retrouver ces données, apparemment Guy a l’air de penser qu’il y a des données, et pas qu’un peu, trois téraoctets tout de même, sur immense_disque . Et la deuxième solution c’est que les données aient été effectivement formatées, écrasées, que ce soient des ex-données et de me poser la question, est-ce que c’est si grave ?

    Ben oui, quand même un peu, me suis-je dit. Par exemple, c’est la première chose à laquelle j’ai pensé, les photographies prises au concert du Surnatural Orchestra samedi dernier, dans le lot il y en avait quand même quelques-unes qui valaient sans doute la peine d’être gardées, et puis Hanno allait être déçu, et avec lui les autres membres de la fanfare. Oui, pour cela, c’était embâtant. Mais est-ce que l’essentiel n’était pas sauvegardé, d’une façon ou d’une autre, par exemple ma façon de tout envoyer en ligne au fur et à mesure que je construis les pages html du Désordre faisait que pour ce qui était du travail sur le site, j’étais paré. Pour mes textes, comme je passais mon temps à en envoyer des versions notamment pour corrections à Sarah ou Julien, ce serait facile de retrouver de tels fichiers et je venais, au début de la semaine d’envoyer un fichier qui portait le nom éloquent de fuite_en_egypte_fichier_definitif.rtf à mon éditeur - j’aime bien dire mon éditeur . Finalement là où c’était le plus ennuyeux - quand je me parle à moi-même, quand je raisonne, je ne dis pas ennuyeux, j’ai plutôt tendance à penser et dire emmerdant et chiant, mais ennuyeux me plait à l’écrit, la contraction de l’ennui et des yeux sans doute - c’était pour les images en haute définition, sachant que par ailleurs une bonne partie de mon travail de photographe se trouve sur le site du Désordre , certes pas dans des définitions d’origine, donc ne permettant pas, entre autres choses, l’impression, mais je dois me poser sincèrement la question, en dehors de quelques images que je fais tirer de temps en temps pour faire des cadeaux la plupart du temps, est-ce que j’imprime quoi que ce soit ? Non.

    Et c’est curieux parce que buvant mon café en regardant pas la fenêtre en pensant à tout cela, je me suis calmé, j’ai senti comme l’oppression que j’avais d’abord sentie à la découverte que peut-être j’avais perdu toutes mes données des deux dernières années au pire était en train de refluer et nettement plus calme, je me suis de nouveau assis devant Guy et je lui ai demandé, sans hargne, sans nervosité quelles étaient les solutions qu’il proposait. Je me suis souvenu que j’avais un jour téléchargé un logiciel qui permettait de récupérer des données écrasées, mais je ne trouvais plus trace de ce logiciel puisque ma logithèque était contenue sur immense_disque , du coup j’ai téléchargé un autre logiciel qui cependant ne m’a pas beaucoup rassuré parce que ce logiciel dont c’est pourtant le métier avait l’air de penser au contraire de Guy que mon disque dur était quasiment vierge. Guy m’a proposé de faire un scan du disque dur avec tentatives de récupération de secteurs défectueux, tout en me précisant que selon la taille des unités sur lesquelles il pouvait produire de telles tâches cela risquait de prendre un peu de temps tout de même, j’ai brièvement estimé que pour scanner et récupérer trois téraoctets de données, cela risquait effectivement de prendre quelques heures, voire quelques jours.

    Je me suis dit qu’après tout c’était le moment ou jamais de tenter cette opération, quand bien même elle serait chronophage, et que monopolisant les ressources de Guy cela me contraindrait à trouver autre chose à faire de mes dix doigts que de l’html, comme par exemple de ranger un peu cette maison, de réparer les deux ou trois choses qui ne fonctionnaient plus, en quelque sorte d’étendre la réparation, et même, que si cela se trouvait, si Guy finissait par me dire non, décidément, non il ne retrouvait pas mes données, celles que nous avions produites ensemble, si j’apprenais la chose alors que j’avais remis de l’ordre dans mes papiers, réparé le tiroir de la cuisine et l’interrupteur de la lampe de chevet de Nathan, que j’avais avec moi la conscience du type qui s’est acquitté de ces tâches du quotidien, la mauvaise nouvelle serait plus facile à accueillir, j’ai donc lancé la recherche et la réparation des secteurs défectueux d’immense_disque et je suis remonté du garage avec la volonté d’en découdre avec la machine à coudre. Et c’était étonnant de voir comment des tâches que j’avais remises au lendemain depuis des lustres tombaient avec une facilité déconcertante, en une petite demi-heure, un café et l’écoute d’un vieux vinyle j’avais remis de l’ordre dans mes papiers en cours, en une demi-heure, un autre café et la face B du même vinyle, j’avais expédié la réparation du tiroir de la cuisine, je montais dans la chambre de Nathan, constatais que je ne pourrais pas réparer sans couper l’électricité pour ne pas courir le risque d’une électrocution, je suis donc descendu dans le garage et j’étais sur le point de commuter le disjoncteur quand j’ai vu s’inscrire sur l’écran que Guy venait de terminer le premier pourcent de la vaste tâche de récupération de mes données, je me suis dit que c’était encourageant et au moment d’appuyer sur le bouton, je me suis soudainent souvenu, ce que je peux être distrait des fois, que Guy avait besoin de l’alimentation électrique pour travailler. Un peu plus et je perdais tout pour de bon je crois.

    Depuis ce matin onze heures, Guy a scanné entre 6 et 7 pourcents d’immense_disque, en revanche pour ménager le suspense il refuse, pour le moment, d’indiquer qu’il récupère quoi ce soit et m’interdit l’accès au disque dur immense_disque .

    Si cela se trouve, il fait tout cela pour rien. Et j’ai vraiment perdu toutes mes données. Ou pas. Ou il n’aura pas avec cette manipulation retrouvé mes données, nos données, mais je pourrais chercher encore une autre méthode.

    Le soir, avant de remonter, avant d’éteindre les lumières du garage, j’ai souhaité bon courage à Guy.

    N’empêche je dois avoir sacrément vieilli pour avoir réagi avec un tel calme, ce n’est sans doute pas un mal, rester calme, en revanche je me méfie du prix à payer pour une telle sérénité, vieillir.

    Exercice #44 de Henry Carroll : Créez un récit fort en une photographie

    #qui_ca

  • https://www.youtube.com/watch?v=j90wXnECKiw

    http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/surnatural_orchestra_pauvre_paris.mp3

    On va encore dire que je mélange tout.

    La France est en guerre, déclare un président de la république dont force est de constater qu’il ne fait peur à personne, non d’ailleurs que ce soit ce que l’on attende de lui, c’est juste que c’est un peu court et un peu improvisé comme déclaration de guerre, les deux pieds dans la poussière et les gravats du Bataclan . Et on pourrait facilement pardonner ce manque d’assise, ce côté déclaration de guerre sur un coin de table de bistro, si en plus d’être improvisé, cette déclaration n’était pas complétement stupide. En fait monsieur le président pas très assuré, vous êtes assez con pour ne pas savoir, ou mal faire semblant de ne pas le savoir, ou pire encore, de penser que nous ne le savons pas, nous, que nous sommes assez cons pour ne pas le savoir, mais la France, notre petit pays gris, poussiéreux et peureux, est en guerre depuis le 8 mai 1945, depuis les massacres de Setif en Algérie, et je ne suis pas certain que si on cumule, depuis cette date de la fin de la Seconde guerre mondiale, et donc du début de la Troisième guerre mondiale, tous les jours, toutes les périodes, pendant lesquelles la France n’a pas été en guerre quelque part dans le Monde, on parvienne à quelques années de paix. Ainsi du 8 mai 1945 jusqu’à la fin de la guerre d’Indochine, cela aura été la guerre sans discontinuer. Puis ce furent les années septante, celles des ingérences giscardiennes, la légion qui saute un peu partout en Afrique, missions d’ingérence qui furent plus ou moins tacitement reconduites dans les années 80, en 1991, la première guerre d’Irak, celle du Père ― puisque nous ferons cette remarquable exception de ne pas participer à la guerre du Fils ―, la Bosnie-Herzégovie, en 1995, l’Afghanistan à partir de 2001, la Lybie en 2012 et désormais la Syrie, où on peut dire que l’engagement de la France aura été particulièrement anisochrone, nous n’y sommes pas allés quand il fallait et nous y sommes allés quand ce n’était plus le moment d’y aller ― au rugby on dirait arriver en retard au soutien ce que vos coéquipiers auront du mal à vous pardonner tant c’est l’essence même du jeu.

    Bref, ce n’est pas très brillant Monsieur le Président. Ni très rassurant. Tant l’intelligence ne semble pas être de votre côté, ni de celui de votre clique, à la fois les vôtres et à la fois vos faux ennemis, parce qu’avec la droite, dont vous êtes, c’est très pratique, que ce soit la droite de la droite, la droite droite ou la gauche de la droite, cela reste et cela restera toujours la droite.

    Et nous, que nous reste-t-il pour faire face aux dangers dont vous-mêmes ne serez jamais frappé, mais pour nous ce sont autant de dangers qui peuvent nous frapper à tout moment, pour tout vous dire, il ne s’en est pas fallu de grand-chose pour vous ayez à prononcer mon nom parmi une liste de personnes ayant laissé la vie ce fameux soir de novembre l’année dernière, dangers dont on doit sans doute remercier votre incompétence crasse, votre absence de courage et in fine votre manque constant d’intelligence, de vision sur le long terme, de nous faire pleuvoir ces dangers sur la tête, que nous reste-t-il face à ces ciels sombres ?, eh bien il nous reste la poésie, la musique aussi, la beauté sans doute, mais aussi le courage, le courage que nous donne notre fragilité.

    Tout cela, la poésie, la musique, la beauté, le courage et la fragilité, je l’ai vu sur scène, sur la scène d’un chapiteau, samedi soir, lors d’un spectacle intitulé l’Esquif , rencontre prodigieuse entre la compagnie Inextremiste Basinga et le Surnatural Orchestra et j’en aurais pleuré. Surtout à la fin.

    J’imagine qu’il faudrait que je fasse la chronique de ce qui m’a tant plu, tant ému, dans ce spectacle, ce serait très difficile tant chaque moment de ce spectacle m’a enchanté à la fois par sa beauté, pour les risques aussi bien physiques qu’esthétiques qui étaient encourus par tous, et cette manière de solidarité qui était une évidence et à laquelle le public s’est même, contre son gré, retrouvé mêlé. Pour ce faire il faudrait presque que je commence par la fin. Essayons.

    Le dernier morceau du dernier album du Surnatural Orchestra , Ronde , s’intitule Pauvre Paris , c’est un morceau lent, triste, avec un passage de chœur au milieu du morceau, il y a dans ce morceau une évidence, c’est la musique que les attentats du 13 novembre ont inspirée aux musiciens du Surnatural Orchestra , c’est triste comme des rues sombres, désertes et pluvieuses au milieu d’une nuit d’errance, c’est triste et c’est beau et les chœurs disent assez bien que la grande faucheuse est passée par là, c’est en mode mineur de chez mineur, impossible d’écouter ce morceau sans sentir la tristesse vous prendre aux tripes, le chœur décroit, la musique avec lui, et puis c’est une relance terrible, un riff rageur de guitare électrique et une envolée à la Surnatural , c’est free , extrêmement free , free de chez-free-en-face, tendance free , les saxophones hurlent, après la tristesse, le refus, à la fois le refus de la tristesse et le refus de se laisser enterrer, l’envie de vivre, on ne peut pas continuer, il faut continuer, on va continuer. C’est poignant et, de fait, on a, aussi, envie de continuer. Et maintenant imaginez la vingtaine de musiciens du Surnatural jouer cette folie, cette beauté d’abord triste et chaloupée, puis cette hargne pleine de défi, ces vingt musiciens, batteur et percussionniste compris, en équilibre sur trois madrillets qui ploient sous le poids des musiciens, de leurs instruments et de leur danse, les trois madrillets en équilibre sur trois bouteilles de gaz, à tout moment ils peuvent tous tomber, tous ensemble, et ils jouent et comme ils jouent ! Mieux, les trois acrobates équilibristes installent un quatrième côté, un madrillet en équilibre sur une bouteille de gaz et vont chercher quelques personnes dans le public et les emmènent en équilibre sur ce si tellement frêle esquif, et c’est tout le public qui est relié à cette précarité : tout est dit, notre fragilité, le courage qui peut être le nôtre en étant collectif, solidaire, la beauté, la poésie et la musique. Enfin. Enfin un peu d’intelligence et de la beauté. Comme réponse.

    Je maintiens ce que j’ai déjà écrit ici, ce que j’avais échangé avec mon ami poète Laurent Grisel, à Autun, après Apnées : nos agissements ont tellement plus de portée que ceux des sinistres que nous tentons de marquer à la culotte .

    En vrac quelques descriptions des moments parfois sublimes de ce spectacle. La femme funambule fait son numéro sur un filin qui est maintenu tendu au-dessus du vide par la traction d’une vingtaine de spectateurs qui tirent sur ce filin, ce sont ces vingt et quelques spectateurs qui sont responsables de son équilibre.

    Avant même que le spectacle commence, on est déjà sollicité, le tromboniste distribue des hélices aux spectateurs tels des messages que ces spectateurs doivent aller apporter à d’autres spectateurs, l’autre spectateur c’est un étranger, le message un poème, et le poème donné, l’étranger est un semblable. Le tromboniste est par ailleurs prisonnier de la longueur limitée de la planche qui se trouve en équilibre sur deux bouteilles de gaz. C’est donc en engageant les spectateurs qu’il peut en atteindre d’autres.

    Constamment les trois équilibristes sont les anges gardiens des musiciens qui sont presque agis par eux, à quelques expressions près, on voit à peine les équili-bristes, c’est une manière de spectacle d’équilibre par procuration.

    À aucun moment l’équilibre des musiciens ne paraît très assuré, la fragilité est non feinte, elle est avérée et elle est sans cesse menacée, souvent par le même équilibriste un peu fou, en costume colonial, qui représente, à lui seul, le danger.

    Lorsque le tromboniste, encore lui, va recruter des spectateurs pour tirer sur le câble de la funambule, il crée sciemment de l’inconfort et de la gêne, il faudra un jour que nous réalisions que nous ne sommes plus garantis de rien et que nous de-vons lever notre cul et descendre dans l’arène.

    Après les applaudissements, le saxophone alto explique la nécessité d’une quête en faveur de la CIMADE du plateau des Mille vaches qui vient en aide aux réfugiés et leur donner cet asile que les sinistres refusent en notre nom.

    Je ne résiste pas à la tentation et au plaisir de pointer vers cette chronique :

    La Suède connaît un boom économique inattendu.
    Les économistes suédois n’en reviennent pas : ils ont dû revoir en urgence leurs modèles pour tenter de comprendre ce qu’il se passait avec leur pays. Imaginez : au quatrième trimestre 2015, c’est-à-dire l’hiver dernier, la Suède a connu un taux de croissance de 4,5%.
    Il a bien fallu trouver une explication. Les économistes distingués du royaume se sont réunis en congrès, ont passé des jours entiers à trifouiller les statistiques et, enfin, après des heures de discussions et de controverses, ils sont arrivé à un consensus scandinave.
    La raison de cette croissance aussi époustouflante que soudaine tient en un mot : les migrants. La Suède est, en proportion, le pays d’Europe qui, en 2014 et 2015, a accueilli le plus de réfugiés en Europe : 160 000 personnes pour 9 millions et demi d’habitants.

    https://www.franceinter.fr/emissions/les-histoires-du-monde/les-histoires-du-monde-10-octobre-2016 (https://seenthis.net/messages/531955 )

    Que les sinistres démissionnent et que l’on donne le pouvoir au Surnatural Orchestra , ils ne pourront jamais faire pire que les sinistres. Ce serait la seule chose responsable à faire.

    #qui_ca

  • Je n’écris pas, je ne parviens pas à écrire, quand cela me chante, quand je le voudrais. J’imagine qu’il faut que je sois traversé par je ne sais quoi d’ailleurs, et je me demande même si je ne préfère pas ne pas savoir. Quant à être traversé, c’est sans doute beaucoup dire.

    Mais je remarque une chose. J’écris sur toutes sortes de tables. Et il y a des bonnes et des mauvaises tables, des tables sur lesquelles j’écris bien, enfin bien, bien pour moi, et d’autres sur lesquelles je suis sec comme tout.

    Par exemple, la table du garage, je n’y écris généralement rien de bon. Quelles que soient les circonstances.

    La table de mon travail, de mon bureau, de l’ open space , de laquelle je devrais normalement y faire tout à fait autre chose, des choses d’ingénieur informaticien, de maîtrise d’ouvrage, et bien je n’y fais rien de bon dans le domaine de la maîtrise d’ouvrage, en revanche, je me demande si ce n’est pas la table de laquelle j’ai le plus écrit. Des romans entiers en fait. Nombre de fois d’ailleurs, mes collègues d’ open space constatant le caractère frénétique de ma frappe, m’ont demandé, en riant, si j’écrivais un roman, ou ont dit quelque chose comme, ma parole tu écris un roman. Raffut, le Jour des innocents, J.,Je ne me souviens plus, et Élever des chèvres en Ardèche (et autres logiques de tableur) ont été écrits presque entièrement sur cette table-là. Et il semble même que ce soit la destinée de Qui ça ? Et d’une bonne partie des différents écrits que je dois produire pour la Petite fille qui sautait sur les genoux de Céline . Encore que le premier jet de ce projet, je l’ai écrit sur ma table préférée.

    Ma table préféré pour écrire, c’est celle de ma chambre dans les Cévennes. Mais seulement le matin. L’après-midi cette table ne donne rien de bon et le soir non plus d’ailleurs. Cette table le matin est placée devant la fenêtre de ma chambre. De cette fenêtre j’embrasse toute la vallée de la Cèze et le versant oriental du Mont-Lozère. C’est de cette même table que j’ai écrit, pendant l’été 1989 mon mémoire de fin d’études aux Arts Déco à propos de Robert Frank. Il y avait dans la chambre un immense désordre de livres restés ouverts, des livres d’images, à certaines doubles pages, d’autres livres, des petits livres, essentiellement de théorie, en cavalier à même le sol, et sur la table, le tas de feuillets sur lesquels j’écrivais, à la main, ce mémoire, je m’étais donné un mois pour l’écrire, avant de repartir à Chicago fin août. A l’époque, je ne doutais de rien. De pas grand-chose en tout cas. Et je ne me serais jamais posé la question de la table sur laquelle j’écrivais.

    Il y a une table sur laquelle j’ai toujours très bien écrit, au point d’ailleurs d’y avoir eu recours consciemment au moins une fois, c’est la table dans l’atelier d’Isa (http://www.isabordat.net), à Autun, il suffit que j’y pose mon ordinateur de genoux et c’est parti, c’est sur cette table que j’ai fini d’écrire Portmsouth qui restait bloqué comme tout, et surtout c’est sur cette table, la table d’Isa que j’ai écrit le Déluge de Paques en quelques jours seulement.

    Depuis l’été dernier je dispose désormais d’une table dans ma chambre, laquelle s’est montrée être une très bonne table depuis, j’y ai écrit le deuxième moitié de Raffut , resté en suspens depuis plus d’un an, en l’espace de deux ou trois semaines, j’ai enchaîné avec Arthrose (spaghetti) , et c’est en alternance avec la table de mon bureau que j’ai écrit J. , et Je ne me souviens plus.

    C’est d’ailleurs dans cette alternance entre les deux tables, celle de l’ open space et celle de ma chambre que j’ai si bien écrit pendant tout l’automne, l’hiver et le printemps. C’est amusant d’ailleurs parce que j’ai entamé ce cycle d’écriture le 24 août 2015, c’était un dimanche soir, je venais de terminer l’installation de ma chambre, monter mon nouveau lit, entièrement réaménagé ma chambre, ses gères de livres, au point qu’il y avait assez de place pour y installer cette table, sur laquelle j’ai installé un sous-verre, comme j’aime à faire, et sous lequel j’ai fait une manière de pêle-mêle d’images comme j’aime à faire aussi, dans ce pêle-mêle se trouvent une lithographie de l’annonciation par L.L de Mars — remarquable représentation de l’envol de l’ange après l’annonce faite à Marie, laquelle se tient le ventre déjà rond, c’est comme si dans cet envol qui ressemble à une fuite par la fenêtre d’un amant, était contenu tout entier le mystère de l’immaculée conception enfin révélé — une sérigraphie de Doug Huston — au bas mot douze passages de couleurs parfaitement repérés — une photographie, une parmi des milliers de la pièce Inventory de Natalie Bookchin, une photographie de Karen Savage, un tract de Formes d’une guerre , une lithographie sur papier kraft d’un étudiant portoricain avec lequel je m’entendais à merveille à Chicago, Alejandro, mais je n’ai plus aucun souvenir de son nom de famille, un polaroid agrandi par mes soins de Jennifer Pilch, l’affichette annonçant la lecture débat avec @mona à la librairie Mille pages à Vincennes, un tirage numérique de Barbara Crane, un petit collage photographique de Hanno me représentant à la Garde de dieu, l’été 1989, un tirage par contact d’un négatif 20X25, photographie représentant un cercueil, photographie d’un étudiant dont j’ai oublié du tout au tout, et je ne connais personne qui pourrait le connaître — son sujet de prédilection, les entreprises funéraires l’a toujours un peu situé à la marge, il faisait grand cas de Nicholas Nixon, c’est bien tout ce dont je me souviens de lui — des billets de un dollar sur lesquels John Pearson avait imprimé des cyanotypes, une ancienne publicité pour les pneus de marque Dunlop , je ne sais pas pourquoi les couleurs de cette réclame font resurgir en moi des souvenirs des années septante, un petit dessin de L.L. de Mars, une photographie de Mouli et moi dans notre appartement au 943 North Wolcott, une de mes photographies de la Très Petite Bibliothèque et une autre de la série 22042003.txt et la photographie de Carlos Fadon Vicente dont j’ai déjà parlé et c’est donc à même ce pêle-mêle que je me suis photographié à l’intervallomètre en train d’écrire la deuxième partie de Raffut, indocte alors que ce serait sur ce sous verre que j’allais être tellement productif pour les prochaines semaines, et cela tout l’automne, tout l’hiver et tout le printemps.

    Mais je n’aurais jamais aussi bien écrit sur cette table seule, si l’écriture n’avait pas été entrecoupée par des moments d’écriture sur mon bureau d’ open space , c’est-à-dire, dans le pire contexte d’écriture que ce soit, un contexte dans lequel je risquais à tout moment d’être dérangé, voire surpris, en danger presque.

    Cela fait des années que je ne m’étonne plus qu’un certain inconfort est nécessaire à ma pratique de l’écriture, et qu’au contraire le confort, celui d’une belle table bien dégagée de tout désordre, la possibilité d’écouter de la musique dans de bonnes conditions, voire me verser un petit verre d’un excellent alcool , ou mieux encore celui du garage, avec tous les outils à portée de main, ce confort ne me vaut rien de bon, la preuve c’est dans les allers-retours en train entre Paris et Clermont-Ferrand que j’ai écrit la quasi intégralité du Bloc-notes du Désordre et pas seulement la rubrique, à quoi tu penses ?

    Et c’est ainsi qu’un lundi matin, au bureau, dans l’ open space , risquant d’être dérangé à tout moment, que j’ai eu l’idée de ce petit texte à propos des tables sur lesquelles j’écris, texte que je suis obligé d’interrompre parce que ma cheffe vient de rentrer dans l’ open space .

    Et si un jour je parviens à l’âge de la retraite, que je vive dans les Cévennes, il faudra sans doute que j’accentue la bancalité de la table de ma chambre pour la rendre productive.

    Exercice #6 de Henry Carroll : prendre une image politique de la nature.

    De la nature, je ne sais pas trop. Politique, oui, surement. Ne serait-ce que la légende de cette image : Ancien camp de Birkenau, Oświęcim, juin 2007.

    Ce sous-bois est celui dans lequel les victimes promises à l’asphyxie devaient se déshabiller, avant d’entrer, à leur tour, dans les chambres à gaz des crématoires 5 et 6 du fond du camp. La flèche, contemporaine, indique la prochaine station d’intérêt dans la visite du camp, c’est-à-dire, l’emplacement de ces deux crématoires.

    Il y a quelque chose de très déconcertant dans la visite que l’on peut faire aujourd’hui de ces camps. On peut voir, par exemple, des touristes en tenus de tourisme, c’est-à-dire, en été, short, chaussettes blanches, chaussures de sport et t-shirt aux différentes effigies, faire la queue, pour entrer dans la dernière chambre gaz, que les Nazis n’ont pas eu le temps de détruire dans l’ancien camp d’Auschwitz, les mêmes défiler devant des vitrines de la partie muséale du camp qui contiennent d’anciens boîtes de conserves de granulés de Zyklon B, et les mêmes également, se prenant en photo sous le portail qui indique Arbeit macht frei , à ma dernière visite, en juin 2007, les perches à selfie n’existaient pas encore.

    #qui_ca

  • http://www.desordre.net/bloc/ursula/2017/sons/pifarely_trace_provisoire.mp3

    J-227 : concert de Dominique Pifarély (violon) (@dominique) avec son quartet, Antonin Rayon (piano), Bruno Chevillon (contrebasse), François Merville (batterie), concert de sortie du disque du quartet, Tracé provisoire , chez ECM, tout de même.

    Ils attaquent un peu par la face Nord. Du coup pas facile de rentrer dans une écoute plaisante de prime abord, ce qui est rendu d’autant plus difficile que c’est presque une face opposée à celle qui avait été notre versant trois jours plus tôt à la Folie à Autun avec Michele, et c’est d’autant plus difficile de trouver quelques repères dans cette affaire que François Merville n’est pas nécessairement un batteur obsédé par la rainure du swing ou du groove , ou même, de simplement marquer la mesure, fut-ce de façon libre, non, il est libre tout court, c’en est même à se demander s’il est dans le tempo, une sorte de batteur paradoxal qui laisserait aux solistes la tâche de battre la mesure, en tout cas il fourrage dans un set abondant et divers tant dans les objets sur lesquels il frappe, caresse, tripote, que ceux dont il se sert pour taper, caresser, tripoter, on pourrait même avoir le sentiment qu’il est en train de régler son bazar pour le morceau suivant. Bruno Chevillon gratifie l’auditoire d’une pédale de basse fort sourde, quasi percussive, en ce début de morceau, c’est à la fois mécanique et sans timbre, mat, terriblement mal, de temps en temps, malgré tout, ponctué des premières vraies notes de contrebasse, au piano Antonin Rayon pose la couleur, par plages entières, et il faut donc être Dominique Pifarély lui-même, pour retrouver ses petits dans un tel désordre, à peine construit, tout juste ébauché, ce que, justement, il s’emploie à faire avec une sûreté dont on se demande d’où elle peut lui provenir, dans ce qui serait un néant, peut-être pas, une absence d’ordre résolue cela, oui.

    Et c’est de cette manière, de cette matière, de ce magma, que naît cette musique extraordinaire qui va nous être jouée ce soir, et dès ce premier geste créatif de Dominique Pifarély, cette installation en somme, il s’efface bien vite, manière de rappeler que les trois autres ne sont pas exactement ce que l’on peut appeler une section rythmique, en tout cas, il n’est pas né celui qui mettrait des chaînes assez solides aux pieds de ces trois-là pour les empêcher de prendre leur essor, c’est donc dans la pleine intelligence, la confiance et l’écoute de ces trois musiciens d’exception que Dominique Pifarély s’efface une première fois, ce ne sera pas la dernière, d’ailleurs c’en est presque une marque de fabrique, sinon celle de l’effacement du moins celle des alliances mouvantes au sein même de la formation. Les combinaisons par paires ― violon /piano, piano / contrebasse, piano / batterie, contrebasse / violon, contrebasse / batterie, batterie / violon ― puis par trios ― violon / piano / contrebasse, violon /piano / batterie, violon / contrebasse / batterie, piano / contrebasse /batterie, ça va vous suivez ? ― sans parler des solos complets des quatre instruments ne sont évidemment pas aussi nombreuses que celles possibles au sein du nonet de Dédales ― et le nom de cette formation est une indication sur son mode de fonctionnement ―, il n’empêche c’est bien de logiques d’alliage dont il est ici question. Et on se doute qu’un violoniste qui trouve, sans mal, les conditions d’un dialogue fécond avec une tromboniste ― voir Dédales donc ― n’aura aucun mal à produire quelque alchimie avec une contrebasse tenue par un Bruno Chevillon en grande forme, c’est-à-dire en pleines recherches, un Antonin Rayon, lui, déjà occupé aux alliages étendus de son clavier, comme si main gauche et main droite en créaient une troisième, comme on crée une troisième voix, une troisième voie, une troisième main qui serait dans les notes du milieu du clavier, et, donc, un funambule de la percussion qui semble ne rien aimer tant que provoquer des accidents sonores et, chercher, et trouver, les moyens de réparer ces catastrophes désirées.

    C’est une farandole, une farandole des métamorphoses, surgit une flute asiatique, japonisante, mais qui en joue ? : Dominique Pifarély au violon, qui peut donc tout faire avec cet admirable construction de bois verni, du violon certes, et quel, mais aussi, donc de la flute, de l’orgue par moment, de la guitare électrique aussi, alors, pensez si c’est facile pour un tel musicien de produire des sonorités d’alto ou encore de violoncelle.

    La contrebasse, parlons un peu d’elle, de son remarquable instrumentiste de ce soir, Bruno Chevillon. Bruno Chevillon joue de la contrebasse comme Antoni Tàpies ou Jasper Johns peignent, il y a un véritable dialogue avec la matière, la contingence. L’instrument contient des possibles, certains immédiats, le jeu cum arco et le pizzicato , c’est entendu, mais la caisse même de l’instrument se révèle être également une caisse de résonance qui peut être sollicitée de bien d’autres manières encore, comme, par exemple, par percussions allusives de l’archet au-devant du chevalet, à la fois champs et chant d’harmoniques, et la distribution de tout ceci se fait comme le mélange des tons sur une palette, mieux encore, par étalages successifs de nappes, comme le fait notamment Jasper Johns couvrant ses toiles de jaune citron avant d’entamer une cible verte et le vert alors chante et comme il chante ! Bruno Chevillon, musicien ou plasticien ? Les deux sans doute.

    Après avoir joué tous les morceaux du disque, tout juste sorti donc, les musiciens entament un passage ad lib partout (police nulle part) ― et là ils sont en fin de match, chauds ―, sans doute n’en avaient-ils pas la moindre idée avant de se lancer dans ce dernier tour de toboggan, avant de se retrouver une dernière fois sur le thème même du disque, une phrase lancinante chantée à la contrebasse.

    Déluge d’applaudissements, dans la salle on compte essentiellement des amis, des musiciens surtout, tous que je ne connais pas par leurs noms, mais tous que j’ai déjà aperçus au moins une fois sur une de scènes où se joue la musique vi-vante d’aujourd’hui. Je reconnais tout de même, Marc Ducret, Michele, bien sûr, Éric Groleau, Sylvaine Hélary, Nicolas du Surnat’ , Francis Marmande m’a-t-il sem-blé aussi, mais sans son chapeau, donc méconnaissable, et d’autres encore dont je ne connais pas les noms, mais sûr que l’un ou l’autre déjà aperçus aux Instants Chavirés .

    Il paraît que dans un pays dans lequel on trouve de telles richesses musi-cales, on en soit à politiquement anticiper le sabordage pur et simple, qu’on soit politiquement sans solution. Et si on donnait le pouvoir aux musiciens. A ceux-là en tout cas. Ils ne feraient pas pire, ils ne pourraient pas. Ils feraient sans doute plus harmonieux. Quel grand dommage que cela n’arrivera pas. Quel soulagement de savoir qu’ils vont continuer de faire de la musique, de cette musique-là justement.

    #qui_ca

  • J-227 : Magie de voir Dominique (@dominique) et Michele évoluer dans le cadre tellement familier de la Folie à Autun, chez Martin et Isa. Grande tablée samedi midi, balance l’après-midi avec Rose aux boutons, Dominique après une petite demi-heure de réglages qui déclare être comme un coq en pâte , moi tout proche d’un des retours de scène de Michele, j’entends les moindres détails de son jeu tellement subtil, on y est, là où je voulais être, dès le début de l’été.

    Plus tard le soir.

    Pendant que les spectateurs entrent et s’installent, et découvrent tout à la fois le caractère chaleureux de la scène, le set de Michele, la table de contrôle de Dominique, ma petite table à moi aussi, les deux tapis au sol qui délimitent la scène, l’écran derrière, sur lequel est projeté en boucle lente la séquence de la truite aux gommettes, Dominique a installé une manière de prologue auto généré. De temps en temps j’épie depuis la porte de l’atelier de Martin, je trouve cela beau et surtout très accueillant. Au premier rang, je vois Adèle qui est déjà en train de filmer en suivant mes recommandations, cette beauté de la transmission avec mes enfants.

    On s’installe, je réduis la luminosité de ce premier tableau, la main tremblante de trac sur la glissière de couche alpha, puis je bascule sur le calque suivant, celui des Croutes dorées explorées à la lampe de poche (http://www.desordre.net/bloc/contre/spectacle/images/croutes/grandes/index.htm), parfaite réaction de Dominique, on n’entend pas un bruit dans la salle, Michele installe quelques petits craquements dont il a le secret et c’est parti. Je suis tendu comme un arc.

    Durant une heure je prends un plaisir tellement vif à ces enchaînements, mes propres improvisations, mes petites audaces encore timides, des moments où les images et la musique, son rythme, son atmosphère, se touchent parfaitement, s’enlacent, le sentiment de produire avec les deux musiciens un objet rêvé, et cela tombe bien parce que c’est le thème même de ce que je voulais faire, des images paradoxales, spectrales, abstraites par endroits, complexes aussi, cette heure aura été la plus rapide de toute mon existence, la plus belle aussi sans doute, la plus paradoxale sans doute aussi, j’étais à la fois fiévreux de peur et à la fois au comble du bonheur, comme si les images qui étaient projetées sortaient littéralement de ma tête.

    Joie d’entendre le tonnerre d’applaudissements, le salut, bras dessus bras dessous avec Dominique et Michele, la force de ce triangle d’amitié, et le géné-rique qui arrache un sourire et des applaudissements répétés de la part de la septantaine de personnes présentes. Joie ensuite de croiser les regards de quelques amis, après le spectacle, tandis que nous dégustons quelques bouchées de pure sorcellerie culinaire d’Isa, parmi lesquels Laurent Grisel (@laurent2), avec lequel j’échange à propos de son Journal de la crise et de Qui ça ?

    Oui, Laurent, je maintiens, nos propres agissements ont tellement plus de portée que ceux des sinistres que nous tentons de marquer à la culotte, avec des moyens inégaux, ceux de simples citoyens conscients, pas floués, pots de terre lan-cés, tels des bouteilles de champagne, contre la coque du France dans la rade du Havre, en 1964, ne nous brisons pas inutilement. En tout cas pas contre de tels blindages d’égoïsme et, in fine, de bêtise et de lâcheté.

    #qui_ca