• Pour freiner le #frelon_asiatique, les #apiculteurs appellent à l’aide tout la population française
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/02/29/contre-le-frelon-asiatique-les-apiculteurs-appellent-a-la-mobilisation-gener

    Parmi ses recommandations, GDS France met en exergue le #piégeage printanier des #reines fondatrices. Pour être efficace, la chasse aux fondatrices de #colonies de #frelons asiatiques exige un quadrillage organisé et relativement serré du territoire concerné. A Trégastel (Côtes-d’Armor), 53 bénévoles équipés de pièges prêtés par la municipalité et garnis d’un cocktail adapté (il est possible de mélanger du sirop, de la bière et du vin) ont capturé 1 146 fondatrices entre le 15 mars et le 15 mai 2023. Dans les mois qui ont suivi, le nombre de nids de frelons repérés (et détruits) a chuté, passant d’une densité de treize au kilomètre carré en 2021 à cinq, un niveau considéré comme « acceptable » par les organisations apicoles.

    « Il est confirmé que là où un piégeage coordonné est organisé, des effets significatifs sont constatés, mais il faut bien admettre que l’on ne pourra pas éradiquer le frelon asiatique », prévient Laurent Cloastre, ingénieur conseil auprès de GDS France.

    Effets du piégeage aléatoires
    Le piégeage au long cours, s’il est efficace, est également controversé, car il ne peut pas être totalement sélectif. Les leurres anti-Vespa velutina attirent en effet d’autres insectes, comme les frelons européens (qui, à l’occasion, croquent eux aussi quelques abeilles, mais en moins grande quantité), les coccinelles, les abeilles solitaires, les papillons ou d’autres populations nécessaires à la pollinisation ou à l’alimentation des oiseaux. C’est pourquoi il est généralement recommandé d’utiliser des pièges vendus dans le commerce, dont les moins chers ne coûtent que quelques euros, plutôt que de transformer hâtivement en pièges des bouteilles en plastique découpées.

    Question efficacité, Quentin Rome, spécialiste du frelon asiatique au #Muséum_national_d’histoire_naturelle, ne privilégie pas le piégeage, dont il juge les effets aléatoires. Selon lui, « il faudrait plutôt mettre l’accent sur l’installation d’une muselière sur le devant de la ruche, un grillage qui gène l’action prédatrice et réduit le stress des abeilles, ou d’une harpe électrique placée sur le chemin des frelons asiatiques ». Problème : la première coûte une vingtaine d’euros et la seconde, dans les 200 euros.

    Christian Guespin, apiculteur et président du Groupement de défense sanitaire apicole des Côtes-d’Armor, souhaite d’abord que s’opère une prise de conscience collective. « En Bretagne, où le frelon asiatique est devenu tellement envahissant que chacun le connaît, on ne fera reculer sa présence qu’à condition de s’adresser aux citoyens », martèle-t-il. En 2023, dans le département, quelque 6 500 piégeurs volontaires ont ainsi capturé chacun une moyenne de 21 reines fondatrices. Un bilan qu’il faut apprécier en rappelant qu’une seule colonie de Vespa velutina produit jusqu’à 13 000 individus par saison et consomme 11,5 kilos d’insectes.

  • Ce que les #abeilles murmurent à l’oreille des humains, par Raúl Guillén (Le Monde diplomatique, décembre 2017)
    https://www.monde-diplomatique.fr/2017/12/GUILLEN/58169
    #apiculture

    La plupart des apiculteurs des zones tempérées rencontrent de manière plus ou moins prononcée les mêmes difficultés. Mais ce n’est pour l’instant pas le cas partout, notamment en Australie, où la variété d’#abeilles_mellifères européenne a été introduite. Grâce à une stricte politique de contrôle douanier des espèces animales et végétales, le varroa n’a pas infesté les ruches du pays. En outre, les abeilles y conservent de grands espaces naturels. Résultat, les #apiculteurs n’enregistrent pas de pertes exceptionnelles, tandis que des essaims reviennent à l’état sauvage et colonisent certaines zones, au point que les abeilles sont même considérées maintenant comme une espèce invasive. Dans certains parcs protégés, des programmes d’éradication visent à lutter contre la concurrence qu’elles font, de par leurs choix de nidification, à des animaux autochtones.

    Dans le reste du monde, le nombre de #ruches a plus que doublé durant les cinquante dernières années, si bien que l’on compte aujourd’hui 83 millions de ruches sur l’ensemble du globe, contre 49 millions en 1961 (7). Même si le rythme de destruction des espaces sauvages ne faiblit pas, l’agriculture industrielle intensive ne s’est pas encore répandue aussi massivement, au détriment des habitats naturels, en Afrique subsaharienne et en Amérique tropicale que dans les zones tempérées. En outre, les variétés d’abeilles mellifères d’Afrique tropicale résistent mieux au varroa et sont capables de migrer quand le milieu devient défavorable. L’une de ces variétés (Apis mellifera scutelatta) fut ainsi introduite accidentellement en Amérique tropicale, où elle s’est aussi bien développée que dans sa région d’origine, remplaçant les variétés européennes introduites pendant la période coloniale.

    Dans ces régions foisonnent également les colonies sauvages. En Afrique du Sud par exemple, dans une zone moins propice que les forêts européennes pour les abeilles mellifères et dépourvue d’activité apicole, on a retrouvé des densités de 12,4 à 17,6 colonies par kilomètre carré. La même étude donnait pour l’Allemagne, où l’apiculture est bien répandue, des densités de 2,4 à 3,2 colonies par kilomètre carré, ce qui correspond à la densité de ruches tenues par des apiculteurs (8) et à la densité moyenne en Europe (9). À l’inverse, dans certaines régions des États-Unis, et notamment la Californie, on observe la quasi-disparition des colonies sauvages (10). Il apparaît presque certain que les seules abeilles mellifères qui y subsistent ont accompli un processus de domestication et dépendent entièrement des soins des êtres humains. Leur disparition comme espèce sauvage au moins dans une grande partie des régions tempérées et leur transformation en animaux d’élevage, incapables de survivre sans les humains, en dit long sur la perte de biodiversité provoquée par le développement et l’industrialisation de l’agriculture intensive. Tout autant que sur ce qui pourrait advenir dans les régions tropicales, où la destruction des espaces naturels continue à un rythme sans précédent.

    Raúl Guillén

    Journaliste et ouvrier apicole