• “Loger les DALOS” – Au pied du ministère, un #campement pour le #droit_au_logement !
    https://radioparleur.net/2024/12/10/loger-les-dalos-au-pied-du-ministere-un-campement-pour-le-droit-au-log

    Depuis le 26 novembre, le #DAL (Droit au #logement) a posé son campement au pied du #ministère_du_logement et de la Rénovation urbaine, sous les bureaux de la nouvelle ministre éphémère Valérie Létard, nommée par le gouvernement Barnier aujourd’hui démissionnaire. Les banderoles jaunes aux couleurs du collectif interpellent au loin : « 1 toit […] L’article “Loger les DALOS” – Au pied du ministère, un campement pour le droit au logement ! est apparu en premier sur Radio Parleur.

    #Au_fil_des_luttes #Carousel_1 #Non_classé #Toujours_en_lutte #au_fil_des_luttes #hébergement #lutte_sociale #mobilisation #paris #propriété #squat

  • Les expulsions de campements, bidonvilles et squats en forte hausse, selon les associations
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/12/05/les-expulsions-de-campements-bidonvilles-et-squats-en-forte-hausse-selon-les

    Les expulsions de campements, bidonvilles et squats en forte hausse, selon les associations
    Par Claire Ané
    Dans son sixième rapport annuel, l’Observatoire des expulsions des lieux de vie informels fait état d’« une nette augmentation » des évictions de personnes qui vivent dans des campements, des bidonvilles, des squats, ou encore dans un véhicule ou sur un simple matelas. Et cette hausse « traduit une politique d’expulsions systématique », ajoute l’organisme fondé par huit associations, dont la Fondation Abbé Pierre, Médecins du monde et la Ligue des droits de l’homme.
    Près de 1 500 expulsions ont été dénombrées entre le 1er novembre 2023 et le 31 octobre 2024, en hausse de 34 % en un an, annonce la coordinatrice de l’observatoire, Célia Mougel, qui précise que « ce bilan, s’il est de mieux en mieux documenté, reste en deçà de la réalité, de nombreuses évictions passant sous les radars ». Comme les années précédentes, la majorité a eu lieu dans quatre communes du littoral du Nord et du Pas-de-Calais, point de départ des migrants qui tentent de gagner le Royaume-Uni : Calais, Dunkerque, Marck et Loon-Plage. Mais l’écart se resserre avec le reste de la métropole, où 608 évictions ont été décomptées, en hausse de 60 % en un an et de 400 % en quatre ans.
    Plus de 100 000 personnes ont été contraintes de quitter leur lieu de vie – parmi elles, certaines ont été décomptées plusieurs fois, parce qu’elles subissaient des évictions répétées. « Leurs droits sont bien trop souvent bafoués », ajoute Célia Mougel : une décision de justice, susceptible d’accorder des délais, ne survient que dans 13 % des cas. Les décisions administratives, permettant une éviction rapide en cas d’urgence, sont devenues plus fréquentes.
    88 % des personnes délogées sont renvoyées à l’errance
    Surtout, 68 % des expulsions s’effectuent sans fondement légal, un taux qui monte à 98 % sur le littoral du Nord et du Pas-de-Calais. Une fois délogées, 88 % des personnes concernées sont renvoyées à l’errance. Seulement 11 % se voient proposer une mise à l’abri temporaire, et 0,65 % « un relogement digne, pérenne et adapté ».
    Le rapport décrit ensuite les effets de ces expulsions sur la santé. « Les personnes sans domicile ont une espérance de vie en moyenne de 30 ans inférieure à la population générale », rappelle le président de Médecins du monde, Jean-François Corty, avant de citer une étude menée en Nouvelle-Aquitaine : « Plus les conditions d’habitat sont précaires et illégales et plus le risque de maladie chronique et de dépression sévère est élevé. »
    Les expulsions aggravent la situation, renvoyant les personnes plus loin des services de santé, et engendrant des ruptures dans le suivi. Il cite l’exemple d’une expulsion qui avait empêché de procéder à une deuxième injection de vaccin alors qu’une épidémie de rougeole sévissait. Selon le délégué général de l’Association nationale des gens du voyage citoyens, William Acker, les évictions successives ont une autre conséquence néfaste pour la santé : « Les personnes sont contraintes de se réfugier dans les interstices laissés libres en raison des nuisances : au plus près d’usines Seveso, sur des terrains aux sols pollués qui peuvent causer du saturnisme… »
    « Les mauvaises pratiques perdurent d’année en année, et pèsent de plus en plus sur les personnes qui en sont victimes. L’instruction du 25 janvier 2018 visant à résorber les campements et bidonvilles marquait une volonté politique, mais elle est loin d’avoir été suivie d’effets », regrette Célia Mougel. « Faute d’avoir réussi à convaincre les ministres du logement successifs, nous demandons aujourd’hui la mise en place d’une commission parlementaire pour une stratégie de résorption globale, contraignante, et qui ne fasse pas de distinction entre les publics », annonce le directeur des études de la Fondation Abbé Pierre, Manuel Domergue.

    #Covid-19#migrant#migration#france#expulsion#logement#sante#santementale#campement#bidonville#squat

  • #JO 2024 : des associations dressent le #bilan du « #nettoyage_social », avec 19 500 personnes expulsées

    Au moins 260 #lieux_de_vie_informels ont été évacués en #Ile-de-France entre avril 2023 et septembre 2024, selon un bilan dressé ce lundi 4 novembre par le collectif associatif Le Revers de la médaille.

    La pauvreté invisibilisée. Dans un #rapport publié ce lundi 4 novembre, le collectif Le Revers de la médaille dresse le bilan du « nettoyage social » organisé pour les Jeux olympiques de Paris (https://lereversdelamedaille.fr). Entre le 26 avril 2023 et le 30 septembre 2024, ce sont en effet 260 #lieux_informels (#campements, #bidonvilles, #squats…) qui ont été évacués en région parisienne. Sur cette même période, au moins 19 526 personnes ont été expulsées de leur lieu de vie, soit une augmentation de 33 % par rapport à la période 2021-2022 (13 124) et quasi stable par rapport à 2022-2023 (19 777), ajoute ce collectif qui compte une centaine d’associations.

    Le nombre de mineurs expulsés a « particulièrement augmenté » : ils sont au moins 4 550 à avoir été forcés de quitter leur lieu de vie informel, soit trois fois plus que sur la période 2021-2022 (1 527), et près de deux fois plus que sur la période 2022-2023 (2 637).

    « On aura eu une année exceptionnellement excluante pour les personnes les plus fragiles dans la région Ile-de-France », synthétise Paul Alauzy, coordinateur de Médecins du Monde et porte-parole du collectif, qui estime que le « nettoyage social » restera comme une « tache indélébile sur la vitrine » des JO 2024.

    En vue des prochaines éditions des Jeux, les associations préconisent entre autres « la consultation systématique des populations hôtes, l’accès à une information équilibrée, libre et de qualité, l’organisation bien plus en amont des Jeux de consultations ouvertes avec les acteurs de la société civile », suggérant la solution de d’organiser chaque édition des Jeux au même endroit, ce qui pourrait « répondre à de nombreux problèmes, qu’il s’agisse du nettoyage social, de la gentrification et des facteurs écologiques ».

    https://www.liberation.fr/societe/jo-2024-des-associations-dressent-le-bilan-du-nettoyage-social-avec-19-50
    #expulsions #jeux_olympiques #Paris #pauvreté #invisibilisation

  • En Californie, la crise des sans-abri s’invite dans la campagne électorale
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/10/01/en-californie-la-crise-des-sans-abri-s-invite-dans-la-campagne-electorale_63


    La maire de Los Angeles, Karen Bass, dans un campement de rue, lors d’une opération de promotion du programme « Inside Safe » offrant le relogement de sans-abri dans des hôtels, à Los Angeles, le 26 septembre 2024. MARIO TAMA / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP

    Une décision récente de la Cour suprême octroie désormais le droit aux municipalités de l’ouest du pays de criminaliser les personnes qui dorment dans la rue. Les démantèlements de tentes se multiplient, les démocrates souhaitant prouver aux républicains qu’ils savent gérer cette épineuse question.
    Par Corine Lesnes (San Francisco, correspondante)

    Un tournant dans la crise des #sans-abri ? Depuis que la Cour suprême a décidé fin juin qu’il n’existait aucun droit constitutionnel à dormir dans la rue, les municipalités de l’Ouest américain commencent à démanteler les #campements, et notamment en #Californie, l’Etat qui compte quelque 186 000 homeless, soit un tiers des personnes sans logement aux Etats-Unis.

    Le 28 juin, la Cour suprême a renversé une jurisprudence de 2019 qui interdisait aux villes de criminaliser le fait de dormir dans un lieu public si elles n’étaient pas en mesure de proposer un hébergement aux sans-abri – ceci au nom du 8e amendement de la Constitution qui prohibe les châtiments « cruels et inhabituels ».

    La Cour a estimé que le 8e amendement ne s’appliquait pas à la situation des #homeless. Une décision majeure qui permet de nouveau aux municipalités d’imposer des #amendes voire des peines de #prison aux sans-abri, même si aucune solution d’hébergement n’est disponible.

    (...) En période électorale, les élus ne peuvent ignorer que le spectacle des homeless prostrés sur les trottoirs est un crève-cœur de plus en plus intolérable pour leurs concitoyens.

    https://justpaste.it/cf8dv

    #logement #droit_au_logement

  • Chiusi dentro. Dall’alto.
    I campi di confinamento dei migranti nell’Europa del XXI secolo.

    Che aspetto hanno i campi di confinamento costruiti o finanziati dai Paesi dell’Unione europea in questi anni per segregare i richiedenti asilo e/o i migranti in transito e come hanno stravolto i territori nei quali sono stati realizzati? Grazie al libro “Chiusi dentro” curato da RiVolti ai Balcani ed edito da Altreconomia nel 2024 è nato il progetto digitale “Chiusi dentro. Dall’alto”, che con le immagini satellitari esclusive eseguite da PlaceMarks mostra il volto delle politiche europee: per bloccare, respingere, confinare, condannare alla marginalizzazione.

    Dalla Turchia alla Grecia, dalla Serbia all’Italia, dall’Albania alla Bosnia ed Erzegovina, passando per Lituania, Macedonia del Nord, Ungheria e ancora. Quindici Paesi, oltre 100 tra immagini e mappe per conoscere e far conoscere i campi dell’Europa di oggi.

    https://altreconomia.it/chiusi-dentro-alto-progetto
    #images_satellitaires #visualisation #détention_administrative #rétention #campements #Europe #encampement #migrations #réfugiés #Europe #marginalisation #images

    ping @reka @karine4 @_kg_

    • L’ultima spiaggia dell’unione Europea

      Nel Nord della Francia tra Calais e Dunkirk centinaia di persone tentano ogni giorno di attraversare la manica e raggiungere le coste dell’Inghilterra.

      I fratelli di Mohamed hanno corso durante tutta la marcia e una volta arrivati di fronte alla spiaggia si sono precipitati verso le dune di sabbia per raccoglierne a manciate e gettarsele addosso. A pochi metri di distanza, poco più di 50 persone disposte a semicerchio, commemorano il loro fratello minore, Mohamed, morto a soli dieci mesi, e #Dina_Al_Shaddadi, entrambe vittime della frontiera tra Francia e Inghilterra. Sono state le famiglie dei due a organizzare una “marche blanche” a Calais (la città francese più prossima all’Inghilterra). Hanno chiesto ai partecipanti di vestirsi di nero e portare dei fiori, e così è stato fatto.

      Mohamed è morto alla Caritas per un arresto cardiaco, un giorno dopo il rientro da un tentativo di attraversamento della frontiera. Dina invece è morta in mare.

      Il 27 di luglio si era aperta una finestra di passaggio per tentare la traversata. Il vento era buono, il tempo pure e Dina Al Shaddadi e la sua famiglia avevano deciso di provare per la quinta volta. Dina e sua sorella, Nour, sono salite per prime sulla barca, erano sicure di avercela fatta, l’Inghilterra era a un passo. Il gommone ha cominciato in fretta a riempirsi di persone che pur non avendo comprato un biglietto sono salite. Nour e Dina sono state schiacciate dalla massa di persone accalcate sull’imbarcazione. Nour ha provato a richiamare l’attenzione, a suggerire a chi era con loro di chiamare i soccorsi, ha cercato di impedire che si avviasse il motore e si arrivasse al largo. Solo quando il volto di Dina è sbiancato e il collo è diventato blu le persone intorno a lei hanno capito che la situazione era grave e hanno chiamato il 112. Era troppo tardi.

      Dalla Brexit il numero di persone che hanno tentato di attraversare per mare il confine è aumentato notevolmente, così come è cresciuto il numero di vittime. Non ci sono abbastanza barche per tutti, il viaggio ha un costo molto alto – si parla di duemila euro per un tragitto che per vie legali costerebbe 40£ – e chi non paga un biglietto ai “passeur” (i trafficanti) prova a saltare all’ultimo dentro la barca, come è successo a Dina e Nour, compromettendo la sicurezza di tutti, anche la propria.

      Per contrastare gli “sbarchi irregolari” i governi di Francia e Inghilterra hanno avviato degli accordi bilaterali per bloccare le partenze dalle Coste francesi: il litorale di Calais è altamente militarizzato, il porto è circondato da filo spinato e le pattuglie della polizia monitorano le spiagge di Boulogne, Calais e Grand Synthe.

      Di notte migranti e polizia giocano a nascondino: i primi si confondono nelle dune di sabbia e tra la vegetazione, quando non vedono uomini in divisa all’orizzonte corrono portando in alto il gommone, una volta entrati in acqua accendono il motore e salgono, molto velocemente, per partire e godere dell’immunità: la polizia in acqua non li può toccare.

      Ma l’attenzione della polizia non riguarda soltanto la costa, tocca anche la città di Calais. Dopo lo smantellamento della giungla nel 2016, dove abitavano circa 10.000 persone, i campi si sono dispersi e frammentati in diversi luoghi della città. Ogni 48 ore almeno venti –ma spesso molti di più – uomini della Police Nationale in tenuta anti-sommossa operano degli sfratti nei campi: portano via alcune tende, al cui interno si trovano spesso i pochi averi di chi vive in quei rifugi di fortuna, a volte arrestano qualcuno, e poi passano al campo successivo.

      Una mattina mentre la polizia sta sgomberando il campo cosiddetto “Unicorn”, accanto all’ospedale di Calais, Nassim (nome di fantasia) li guarda e dice: «Io ero come loro». Sua madre è siriana, suo padre turco, dopo il 2011 è scappato da Damasco, ha attraversato il confine ad Ovest ed è andato a vivere con la sua famiglia nella città natale del padre, vicino a Gaziantep nella Turchia dell’Est. Lì ha deciso di arruolarsi nell’esercito: «Ho cominciato il periodo di addestramento e mi hanno spedito a presidiare il confine con la Siria, ma non ho resistito, sono dovuto scappare via non potevo sopportare il modo in cui il corpo militare turco agiva su quel confine».

      Così è andato via, ha attraversato l’Europa a piedi lungo la rotta balcanica per arrivare in Germania dove ha imparato il tedesco e ha cominciato un processo di integrazione. Dopo un anno il governo tedesco gli ha fatto sapere che la sua domanda d’asilo non era stata accettata, Nassim se n’è dovuto andare da un posto che aveva cominciato appena a chiamare casa per la terza volta.

      È partito per Calais all’inizio di luglio, nel campo si annoia, dice che non c’è nulla da fare, vuole andare in Inghilterra e ricominciare la sua vita che è in pausa da mesi. Lui, a differenza di altri che arrivano a Calais e decidono di restare in Francia, è certo di dover partire. In poco più di un mese ha tentato sette volte la traversata senza mai riuscirci. A volte è colpa del tempo, quando piove o c’è troppo vento è bene non avventurarsi in mare; altre volte è stata la polizia a fermarlo. L’ultimo tentativo lo ha sfiancato, è tornato al campo stanco e insofferente, e nonostante di norma sfoderasse un inglese perfetto ha preferito usare Google traduttore per parlare con i volontari. Ha detto: «Sono troppo stanco per pensare». La polizia aveva sorpreso lui e altri compagni sulla spiaggia all’alba mentre trasportavano un gommone, che è stato subito confiscato, e in seguito alle proteste di alcuni di loro gli agenti della Police Nationale hanno usato gas e manganelli.

      Quando il gruppo è tornato al campo si sono fatti vedere curare le ferite da alcuni studenti di medicina inglesi volontari a Calais, poi sono spariti nella boscaglia, dove avevano lasciato le tende. Alcuni le hanno trovate al loro posto, Nassim no. Ne aveva bisogno per riposarsi in vista del giorno successivo, quando avrebbe tentato di nuovo, l’Inghilterra per lui è l’unica soluzione.

      https://scomodo.org/lultima-spiaggia-dellunione-europea
      #mourir_aux_frontières #morts_aux_frontières #migrations #réfugiés #frontières #décès #Calais #France #Manche #marche_blanche #campement #Unicorn

  • « Il ne faut pas que les touristes nous voient… »
    Les JO et l’invisibilisation des personnes migrantes à la rue
    https://lestempsquirestent.org/fr/numeros/numero-2/il-ne-faut-pas-que-les-touristes-nous-voient-les-jeux-de-paris-2

    Les #expulsions de #campement, avec ou sans proposition d’#hébergement, et les envois hors d’Île-de-France des personnes #migrantes sans-domicile, perdurent depuis neuf ans avec des variations de dispositifs, de fréquence et d’intensité. La concentration des pratiques de régulation sur certains lieux mettent en évidence des enjeux de disparition ou d’invisibilisation des campements aux abords des chantiers puis des sites des Jeux. À l’approche de l’ouverture des #JOP 2024, on observe une systématisation des départs en région des personnes migrantes #sans-abri et l’intensification des expulsions de campements et de squats. L’organisation de ce méga-événement constitue une opportunité pour les autorités d’accélérer la mise en œuvre de mesures pré-existantes.

    Les évolutions récentes de certaines pratiques et politiques publiques, et les tâtonnements issus des résistances qu’elles ont occasionnées, ont poussé les autorités à reconfigurer leur organisation. Elles deviennent plus discrètes qu’auparavant. L’invisibilisation ne concerne plus seulement uniquement les personnes migrantes sans-abri, mais également les pratiques préfectorales et policières qui s’exercent sur elles. Une invisibilisation à plusieurs niveaux qui va dans le sens d’un « spectacle sécuritaire » contenu et non-conflictuel.

    Au-delà de l’accélération et de l’intensification de certaines pratiques des autorités dues à l’organisation des Jeux, la poursuite des régulations par l’(auto-)expulsion au cours de ces presque dix dernières années souligne le caractère routinier et limité du modèle de gestion du sans-abrisme des populations migrantes en Île-de-France par les pouvoirs publics. Si une petite partie seulement de l’énorme attention médiatique internationale que les Jeux suscitent pouvait être détournée vers ce problème, le spectacle n’aurait pas été totalement en vain. C’est l’ambiguïté de ce genre d’événement : il doit plus qu’à l’ordinaire cacher pour faire voir, mais il peut aussi se retrouver à faire voir ce qu’on cherche ordinairement à cacher. Du moins peut-on toujours l’espérer.

  • À Paris, ultime cycle d’expulsions avant les JO
    https://listmonk.collectifaccesaudroit.org/campaign/8b2c6b62-b99d-41fb-886e-fd85f804dded/b5729fae-81e6-436c-b953-c18f57cd3d30

    Depuis mai 2023, plus de 12.500 personnes ont été expulsées de leur lieu de vie, afin de faire place nette pour accueillir les JOP2024. La semaine dernière, nous avons documenté la situation d’une dizaine de campements dans le Nord-Est parisien et la Seine Saint-Denis. Ces lieux de vie informels ont été expulsés et les personnes qui y vivaient se sont vues proposer une prise en charge exceptionnelle d’un mois, le temps de la compétition, sans aucune garantie pour la suite. Leurs tentes ont été remplacées par des bornes vélib, des tables de pique-nique ou encore des blocs de béton afin d’empêcher toute réinstallation de campement. Du jamais vu dans un temps si court ! Source : Collectif accès au (...)

  • #ENTRE_DEUX_MONDES

    Ce polar est monstrueusement humain, « forcément » humain : il n’y a pas les bons d’un côté et les méchants de l’autre, il y a juste des peurs réciproques qui ne demandent qu’à être apaisées.
    Bouleversant

    Fuyant un régime sanguinaire et un pays en guerre, Adam a envoyé sa femme Nora et sa fille Maya à six mille kilomètres de là, dans un endroit où elles devraient l’attendre en sécurité. Il les rejoindra bientôt, et ils organiseront leur avenir.
    Mais arrivé là-bas, il ne les trouve pas. Ce qu’il découvre, en revanche, c’est un monde entre deux mondes pour damnés de la Terre entre deux vies. Dans cet univers sans loi, aucune police n’ose mettre les pieds.
    Un assassin va profiter de cette situation.
    Dès le premier crime, Adam décide d’intervenir. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’il est flic, et que face à l’espoir qui s’amenuise de revoir un jour Nora et Maya, cette enquête est le seul moyen pour lui de ne pas devenir fou.

    Bastien est un policier français. Il connaît cette zone de non-droit et les terreurs qu’elle engendre. Mais lorsque Adam, ce flic étranger, lui demande son aide, le temps est venu pour lui d’ouvrir les yeux sur la réalité et de faire un choix, quitte à se mettre en danger.

    http://www.michel-lafon.fr/livre/1921-Entre_deux_mondes.html
    #migrations #asile #réfugiés #Calais #Jungle #campement #livre #polar #Olivier_Norek #violence

    • Citation :

      - Bon, je crois qu’on est d’accord pour dire que tous ces types dans la Jungle fuient la guerre ou la famine. On n’est pas sur une simple migration économique mais sur un exil forcé. Ce serait un peu inhumain de leur coller une procédure d’infraction à la législation sur les étrangers et de les renvoyer chez eux. On passerait pour qui ? Mais d’un autre côté, c’est plutôt évident que personne ne veut se soucier de leur accueil puisqu’on les laisse dans une décharge aux limites de la ville. Alors on leur a créé le statu de ‘#réfugiés_potentiels’.
      – C’est la première fois que j’entends ça, concéda Bastien en enfournant un euro dans la machine à café du palier.
      – Cherchez pas, ça n’existe nulle part ailleurs et dans aucun texte de loi. C’est du fait maison Calais, spécialité locale. En gros, avec ce statut bâtard, on ne eut pas les interpeller. Logique, si on refuse de les intégrer en France, ce n’est pas pour les faire rentrer dans le système judiciaire. Mais on ne leur donne pas non plus la qualité complète de réfugiés, sinon, il faudrait s’en occuper. Donc avec cette appellation de réfugiés potentiels, ni on ne les arrête, ni on ne les aide. On les laisse juste moisir tranquilles en espérant qu’ils partiront d’eux-mêmes.

      (pp.108-109)
      Voilà un nouveau mot à ajouter à la liste de #mots pour désigner les personnes en migration : « réfugiés potentiels »
      –—

      ajouté à la métaliste sur les mots de la migration :
      https://seenthis.net/messages/414225
      #vocabulaire #terminologie #mots

  • Paris : en trois jours, près de 500 migrants ont été évacués de leurs campements - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/58551/paris--en-trois-jours-pres-de-500-migrants-ont-ete-evacues-de-leurs-ca

    Paris : en trois jours, près de 500 migrants ont été évacués de leurs campements
    Par Marlène Panara Publié le : 18/07/2024
    Les exilés installés sur les bords des canaux de l’Ourcq et de Saint-Denis, ainsi que sur les quais de Seine du Pont Marie à Paris, ont tous été évacués de leurs lieux de vie informels entre le 16 et le 18 juillet. Des « mises à l’abri » saluées par les associations, qui déplorent dans le même temps une accélération du « nettoyage social » avant les JO.
    Des démantèlements en série en région parisienne. Ce jeudi matin, une centaine de jeunes migrants - des mineurs en recours, qui en attendant une décision du juge pour enfants se retrouvent à la rue - réfugiés sous le pont Marie, à Paris, ont été délogés par la police. Une quarantaine d’entre eux a accepté le transfert proposé par les autorités vers le centre d’accueil et d’examen de la situation (CAES) de Melun, à 65 km de Paris. Trop loin pour les 60 autres, qui « par obligation administrative, ou parce qu’ils suivent des cours de français dans la capitale, ne peuvent se permettre d’aller en Seine-et-Marne », explique Antoine de Clerck, membre du collectif Revers de la médaille, qui alerte sur l’expulsion des populations précaires de Paris en amont des Jeux olympiques de Paris.
    Mercredi 17 et mardi 16 juillet déjà, 401 autres exilés ont été évacués et pris en charge par les autorités. Hier matin, les forces de l’ordre sont intervenues pour démanteler deux campements regroupant respectivement 150 et 80 migrants dans le nord de Paris : l’un au niveau du pont de Flandres, dans le XIXe arrondissement, l’autre vers le pont de Stains, le long du canal Saint-Denis dans le nord parisien. D’après la préfecture d’Ile-de-France, 209 de ces personnes ont été mises à l’abri dans des centres situés dans la région. Selon des témoins, l’évacuation s’est déroulée dans « le calme ».
    La veille, mardi, les autorités ont évacué les occupants d’un autre campement, cette fois-ci le long du canal de l’Ourcq, où résidaient selon les associations environ 200 à 250 personnes. D’après la préfecture d’Ile-de-France, 192 ont été prises en charge, dont 173 en Île-de-France, et un mineur à Paris. « Ces personnes pourront bénéficier avec leur accord d’une évaluation de leur situation administrative et d’un accompagnement social et sanitaire », détaille encore la préfecture dans un communiqué. La plupart des migrants évacués ces deux derniers jours ont été transférés dans des CAES franciliens. Une décision bienvenue pour les associations, qui s’étonnent en revanche de cette soudaine disponibilité. « Avant, il fallait répondre à des conditions drastiques pour y accéder. Et là, tout le monde pouvait, a commenté Paul Alauzy, coordinateur de Médecins du Monde et l’un des porte-parole du Revers de la médaille. Avant les Jeux, c’est vraiment une logique de ‘on donne des solutions temporaires dans la région parisienne pour être sûr de bien vider les rues’ ». « Ils ont vraiment parachevé le grand nettoyage social juste avant le commencement des JO ».
    « Comment cela se fait-il que ces places soient libres maintenant ? Alors que jusqu’ici cette année, on nous disait toujours que c’était plein, d’où les transferts en SAS régionaux, s’interroge aussi Antoine de Clerck. Évidemment, ces ’mises à l’abri’ c’est une bonne chose pour les exilés, on ne le nie pas. Mais ça donne vraiment l’impression que les autorités se sont gardés les CAES d’Ile-de-France sous le coude, juste avant les JO, pour vider les quais juste à temps ». De son côté, la préfecture rappelle dans son communiqué que « ces deux mises à l’abri s’inscrivent dans le cadre de la mobilisation constante de l’État pour accompagner les personnes les plus vulnérables ». Elle assure par ailleurs que « 2 500 personnes ont été mises à l’abri depuis des campements situés dans l’espace public à Paris en 2024 ». « Ces interventions viennent compléter le système de droit commun organisé par l’État, permettant l’hébergement chaque nuit en Ile-de-France d’environ 120 000 personnes en situation de précarité », ajoute-t-elle. Pour Antoine de Clerck, « cette communication nous laisse très amers ». « Certains camps démantelés le long des canaux parisiens existent depuis trois ans, rappelle-t-il. Si on voulait vraiment mettre les gens ‘à l’abri’, on l’aurait fait avant ».
    Lors des évacuations, la préfecture a également proposé aux migrants d’être transférés dans un SAS de Besançon, à l’est de la France. Sur les 401 personnes prises en charge au total, « seuls trois ont accepté », affirme Antoine de Clerck. Créés en mars 2023 à l’initiative du président de la République, les SAS régionaux ont pour objectif de répartir les primo-arrivants sur le territoire français, l’hébergement en région parisienne étant régulièrement saturé. Mais ce type de structures a depuis montré ses limites : les migrants ne retrouvent pas partout le même tissu associatif que celui qui émaille la capitale, ou la communauté de leur pays d’origine, souvent source d’aide et de solidarité. D’autant plus que la durée d’hébergement dans le SAS n’excède pas trois semaines. Après ce laps de temps, de nombreux exilés, sans solution, se retrouvent une fois de plus à la rue. « Il y a un an on m’a emmené à Bordeaux, j’ai dormi dans un logement cinq jours, puis à la rue, donc je suis revenu à Paris parce que j’y connaissais des gens », a raconté à l’AFP Nassir, 34 ans, arrivé en France en 2017 du Soudan. « Monter dans un bus pour ne rester que quelques jours ça me sert à rien, je ne vais pas trouver du travail. » Certains migrants délogés ont quant à eux préférés partir par leurs propres moyens. « Je ne suis pas monté dans le bus parce que dans 15 jours on nous remettra à la rue. On a besoin d’un logement stable pour faire les démarches ou suivre des cours de français », a expliqué Hassem, 27 ans, Soudanais, qui avait élu domicile sous le Pont de Flandres voici deux mois.
    Jamal Ahmed, 30 ans, originaire lui aussi du Soudan, s’était installé il y a deux ans au même endroit. « Je suis déjà monté dans le bus pour aller à Ris-Orangis [Essonne, au sud de Paris], j’ai été logé un mois. Puis on m’a dit dehors ! Alors je suis revenu ici car je savais qu’il y avait de la place ».

    #Covid-19#migrant#migration#france#JO#campement#CAES#mineur#sante

  • Dunkerque : une plainte déposée à la suite de la découverte d’un liquide bleu dans une cuve d’eau potable à destination des migrants
    https://www.lemonde.fr/international/article/2024/06/21/dunkerque-une-plainte-deposee-a-la-suite-de-la-decouverte-d-un-liquide-bleu-

    Dunkerque : une plainte déposée à la suite de la découverte d’un liquide bleu dans une cuve d’eau potable à destination des migrants
    L’association britannique Roots a déposé plainte après avoir découvert de l’eau souillée dans une citerne destinée aux exilés du campement de Loon-Plage.
    Le Monde avec AFP
    Une plainte a été déposée après la découverte d’un liquide bleu dans une cuve d’eau potable mise à disposition des migrants par une ONG dans un campement de Loon-Plage, près de Dunkerque, a appris l’Agence France-Presse vendredi 21 juin auprès d’associations. Ce liquide a été retrouvé le 14 juin, a fait savoir l’ONG britannique Roots, qui vient en aide aux migrants présents sur le littoral du nord de la France dans l’attente d’une tentative de traversée vers l’Angleterre, confirmant une information de Libération. L’association a porté plainte. Roots précise avoir donné aux gendarmes un échantillon du liquide pour qu’il soit analysé. Christopher, un bénévole de Roots, évoque une odeur chimique et mentholée, comme celle d’un produit ménager.
    « C’était un acte volontaire, dont on ne connaît pas la finalité mais, dans tous les cas, l’intention était de nuire », assène auprès de Libération Thomas Chambon, chargé de mission des maraudes sur le littoral pour l’association Utopia 56. La cuve est placée à l’écart du camp, à la jonction de deux routes de campagne. Pour la remplir, il faut se hisser et dévisser un gros bouchon au sommet de la citerne de 1 000 litres, selon nos confrères. Les membres de Roots avaient déjà retrouvé la citerne percée à coups de couteau.
    Médecins du monde explique à Libé qu’« on voit beaucoup des cas de gale. Des femmes présentent des infections urinaires, surtout l’été. Elles limitent leur consommation d’eau, en lien avec l’absence de toilettes dignes et sécurisées. » Sans compter l’impossibilité de se laver correctement.
    D’après Claire Millot de l’association Salam, qui distribue des repas aux exilés dans ce secteur, 300 à 400 personnes vivent actuellement sur ce vaste campement. Un point d’eau y a été installé par la communauté urbaine de Dunkerque à la suite de la grève de la faim d’un bénévole de l’association à la fin de 2023. L’amélioration de l’accès à l’eau des migrants était l’une des revendications, mais, selon Claire Millot, d’autres points d’eau qui devaient être installés ne l’ont pas été. L’association Roots, non mandatée par l’Etat, dispose et remplit des cuves d’eau potable sur le campement pour permettre aux migrants de boire, cuisiner et se laver.« Là, c’était un liquide bleu, donc les gars ne l’ont pas bu mais cela aurait été incolore et un poison, même un poison pas très violent qui donne juste mal au ventre, dans les conditions sanitaires dans lesquelles ils vivent, cela aurait pu être dramatique », s’alarme Mme Millot. Ce type d’actes sur le campement de Loon-Plage est, selon elle, « une première », mais elle craint que ce type de faits ne « se multiplient ».
    A Calais, une cuve d’eau de l’organisation Calais Food Collective avait été retirée par la mairie en août 2023, les associations dénonçant une nouvelle tentative d’« entrave à l’aide humanitaire ». L’énième épisode d’une guerre d’usure de longue date menée par la ville dirigée par la maire Natacha Bouchart (Les Républicains) contre les « points de fixation » des personnes exilés. En 2021, Calais Food Collective dénonçait le harcèlement quasi quotidien des services de la ville, de la préfecture et de la police : « 3 février, cuve enlevée par la police ; 8 février, cuve volée par police (…) ; 13 juin, de l’essence est répandue autour de la cuve (…) 21 août, cuve détruite au même moment qu’une opération de CRS ; (…) 4 septembre, urine et bris de verre sur une cuve ».
    L’association Utopia 56 souligne, pour sa part, que l’accès à l’eau est un droit fondamental et que deux personnes migrantes sont mortes noyées, en 2022 et 2023, « dans un canal en souhaitant se laver par manque d’accès à l’eau sur le campement [de Loon-Plage] ». L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’il faut entre 50 et 100 litres d’eau par personne et par jour pour répondre aux besoins de base. A Calais, selon un rapport conjoint du collectif d’ONG Coalition eau et de l’association Solidarités International, datant de 2022, les exilés sur place disposaient en moyenne d’à peine 4,9 litres par jour.

    #Covid-19#migrant#migration#france#calais#humanitaire#campement#sante

  • Avant les #JO, un « nettoyage social » à Paris ? Un nouveau campement évacué, une partie des migrants transférés en régions
    https://www.sudouest.fr/france/avant-les-jo-un-nettoyage-social-a-paris-un-nouveau-campement-evacue-une-pa

    Une centaine de migrants ont été évacués d’un camp de fortune dans le 12e arrondissement de #Paris, ce mardi matin. Certains ont été transférés vers des villes de province. Les associations dénoncent un « #nettoyage_social » de la capitale avant les Jeux olympiques, cet été
    Un #campement informel sous un pont de Paris, où vivaient plus de cent #migrants, a été démantelé mardi 6 février et une cinquantaine d’#exilés ont été transférés en province, a-t-on appris auprès des autorités et de plusieurs organisations humanitaires.

  • Mayotte : des barrages de collectifs citoyens contre l’insécurité et l’immigration
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2024/01/29/mayotte-des-barrages-de-collectifs-citoyens-contre-l-insecurite-et-l-immigra

    Mayotte : des barrages de collectifs citoyens contre l’insécurité et l’immigration
    Par Nathalie Guibert et Jérôme Talpin (Saint-Denis (La Réunion), correspondant)
    Le préfet Thierry Suquet a peut-être annoncé un peu prématurément, samedi 27 janvier, le « rétablissement de la liberté d’aller et venir » à Mayotte, après la levée par les forces de l’ordre des barrages qui ont entravé la circulation de l’île durant la semaine. Celle-ci a vu se multiplier des blocages de collectifs de citoyens excédés par l’insécurité et l’immigration, tandis que des bandes de quartiers barraient d’autres axes à l’occasion d’affrontements intervillages, une pratique devenue courante.
    Lundi 29 janvier, de nouveau, des routes ont été barrées dans plusieurs localités. Alors que la crise de l’eau commence tout juste à se résorber grâce à la saison des pluies, le département de l’océan Indien connaît un énième accès de fièvre.Plusieurs collèges sont restés fermés à l’issue du week-end, pour des raisons diverses. Notamment celui de Koungou, attaqué mercredi dernier par des bandes venues y régler leurs différends à coups de machettes et de pierres. Des heurts ont encore eu lieu aux abords de l’établissement ce lundi, et le recteur, qui s’est rendu sur place, a été la cible d’un caillassage sur son trajet, a rapporté la chaîne La 1ère.
    Dans la soirée de dimanche, c’est la brigade de gendarmerie de Sada qui a subi l’assaut d’une cinquantaine de jeunes hommes. « Ils ont jeté des pierres et des cocktails Molotov sur la caserne sans faire de dégâts majeurs. Avec l’arrivée de renforts, le calme est revenu vers 23 heures », a indiqué le commandement de la gendarmerie. Le Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale a de son côté été déployé à Mramadoudou. Une sorte de routine, même si la gendarmerie dit devoir désormais gérer des « profils de délinquants » classiques ciblant les forces de l’ordre.
    S’ajoutant à ces affrontements réguliers, de nouvelles tensions ont éclaté quand des collectifs de citoyens, minoritaires mais très visibles sur l’île, s’en sont pris au campement de migrants installé autour du stade de Cavani à Mamoudzou. Quelque 500 Africains venus de République démocratique du Congo, du Burundi, du Rwanda et de Somalie, s’y sont installés dans des abris précaires depuis le mois de mai, une partie d’entre eux ont un statut de demandeurs d’asile. Leur nombre croissant aurait agi auprès d’eux comme un élément déclencheur.
    « Les autorités nous expliquent qu’ils sont protégés par le droit d’asile mais nous ne pouvons le comprendre dans nos conditions de vie actuelles », alerte Haoussi Boinahedja, syndicaliste présent sur un barrage constitué de branchages et de carcasses de voitures, sur la RN3, à Chirongui. « L’immigration illégale déstabilise et étouffe ce petit territoire qui est le plus pauvre de France. J’entends la colère des gens. Je crains le pire. » Selon lui, l’Etat doit mettre fin au « titre de séjour territorialisé » qui contraint les immigrés détenteurs à rester à Mayotte.
    Avec les « mamans » de son Collectif des citoyens de Mayotte 2018, Safina Soula organise, elle, un sit-in depuis le 6 décembre devant le service des étrangers de la préfecture, entravant le traitement des dossiers. « Ce camp, c’est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase, proteste-t-elle. Il y a l’immigration clandestine venue des Comores voisines et maintenant c’est l’Afrique qui voit Mayotte comme un sas d’entrée en France et en Europe. » Quant à la lutte contre l’insécurité : « Nous avons demandé l’état d’urgence. Rien. Mayotte va exploser. » L’opération Wuambushu, déployée par le ministère de l’intérieur d’avril à août 2023 sur les deux fronts de l’immigration illégale et de l’insécurité, n’aura apporté qu’un court répit.
    Les barrages sont tenus par des pères et des mères de famille, assure Safina Soula. « Ce ne sont pas des fous mais des agents hospitaliers, des pompiers, des chauffeurs de transports scolaires qui n’en peuvent plus de se faire caillasser tous les jours, juge-t-elle. Le confinement à Mayotte ne s’est pas arrêté en 2020. La population est cloîtrée en fonction de l’humeur des délinquants. Le soir, tout le monde essaie de rentrer avant 18 heures pour être en sécurité et a peur pour ses enfants ».
    La préfecture a commencé à démanteler le camp du stade de Cavani le 25 janvier. Le vendredi 26, les « mamans » du collectif ont été délogées de l’entrée principale de la préfecture. Mais elles y sont revenues lundi matin, tandis que les barrages des collectifs réapparaissaient. « Il existe un deux poids deux mesures par rapport à l’attitude du gouvernement avec les agriculteurs, souligne Mme Soula. Nous vivons un manque de considération. »La situation met en danger toute la population, s’est alarmé le directeur de l’hôpital, Jean-Mathieu Defour, sur La 1ère. « La mobilité des soignants est gravement entravée. Cette situation exceptionnelle conduit le centre hospitalier de Mayotte à fonctionner avec moins de 50 % de son personnel. »
    « Anarchie à Mayotte », a dénoncé pour sa part dans un tweet la députée (Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) Estelle Youssouffa. La parlementaire accuse le préfet Thierry Suquet de se montrer plus ferme vis-à-vis des Mahorais des collectifs qu’envers les fauteurs de troubles des quartiers. Le haut fonctionnaire, sur le départ, a défendu le bilan de l’Etat dans un long courrier adressé à l’association des maires de Mayotte le 26 janvier.
    « Depuis maintenant deux ans, le gouvernement a fortement augmenté les moyens humains et matériels dédiés à la sécurité et à la lutte contre l’immigration clandestine », assure le préfet. Et de citer les escadrons de gendarmerie, pérennisé (pour un d’entre eux) ou envoyés en renfort (deux), le détachement de dix agents du Raid, l’arrivée de drones, la création d’une brigade de gendarmerie effective début 2024, ou « l’affectation de 200 à 300 policiers et gendarmes dédiés à la sécurisation du transport scolaire chaque jour ». Depuis novembre, indique-t-il encore, « plus de 50 délinquants impliqués dans des troubles à l’ordre public et des faits de violence ont été interpellés et les deux tiers condamnés à des peines de prison ». Et les communes ont reçu 1,8 million d’euros de dotations en équipements de sécurité. Le préfet vante un « résultat historique », quant aux interceptions de migrants illégaux venus des Comores par la mer : « En 2023 ce sont plus de 660 kwassas [barques] transportant près de 8660 personnes qui ont été interceptés », soit plus des trois quarts d’entre eux, affirme-t-il. Mais quelque 23 000 étrangers arrivent et repartent de Mayotte chaque année, des chiffres stables en dépit des promesses de durcissement du ministère de l’intérieur.

    #Covid-19#migrant#migration#frannce#mayotte#crise#kwassas#traversee#comores#migrationirreguliere#campement#securite#sante

  • Face à la vague de froid en Ile-de-France, la détresse de jeunes exilés « ni majeurs ni mineurs » aux yeux de l’Etat
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/01/19/face-a-la-vague-de-froid-en-ile-de-france-la-detresse-de-jeunes-exiles-ni-ma

    Face à la vague de froid en Ile-de-France, la détresse de jeunes exilés « ni majeurs ni mineurs » aux yeux de l’Etat
    Par Fatoumata Sillah
    Lasso Camara a regardé, dans un froid glacial, les flocons de neige recouvrir Paris dans la nuit de mercredi à jeudi. Le thermomètre est descendu jusqu’à − 5 °C. Paire de gants, chaussettes, pulls et couette issus de dons ne suffisent pas à le réchauffer. Le jeune Guinéen de 17 ans, arrivé à Paris il y a trois semaines, dort dans une tente sous le pont de Notre-Dame, en face de la Seine, et ce, depuis le mardi 9 janvier. C’était sa première nuit dehors, alors qu’une vague de froid touchait déjà l’Hexagone avec des températures négatives sur presque tout le territoire. L’adolescent n’a pas trouvé de solution d’hébergement d’urgence.
    Aux yeux des associations, Lasso est un « mijeur » (contraction de mineur et majeur). Aux yeux de l’Etat, il n’entre dans aucune case administrative. Ni officiellement mineurs ni majeurs, ces exilés n’ont pas obtenu la reconnaissance de leur minorité à leur arrivée en France, après une évaluation du département où ils ont tenté leur chance. Leurs documents d’identité, quand ils en ont, les preuves écrites de leurs parcours, ainsi que leurs récits, témoignent pourtant du contraire. S’ensuit alors une bataille administrative durant laquelle ils sont exclus des dispositifs de protection de l’enfance et ne peuvent prétendre aux aides réservées aux majeurs.
    « Des évaluateurs partent du principe que ces jeunes sont malhonnêtes », plutôt que de prouver leur minorité, « ils vont tenter de prouver qu’ils mentent et qu’ils sont incohérents », analyse Patricia Mothes, maîtresse de conférences en sciences de l’éducation à l’Institut catholique de Toulouse, dont les recherches portent notamment sur la scolarisation des enfants migrants.
    Après que le plan Grand Froid a été déclenché, le gouvernement a annoncé le déblocage d’une enveloppe correspondant à 10 000 places supplémentaires d’hébergement d’urgence en Ile-de-France. Paris a ouvert un gymnase pour mettre à l’abri cinquante jeunes durant quelques jours. Mais Lasso n’a pas obtenu de place. Ni lui, ni la centaine de migrants de toutes nationalités qui dorment dans les trente-neuf tentes de son campement, ou les près de six cents autres dispersés dans au moins une vingtaine de sites, identifiés par l’association de défense des exilés Utopia 56, dans Paris et sa première couronne.
    Le 115, numéro d’urgence pour les personnes sans abri, est, lui, saturé. « Quand on l’appelle, on ne nous répond pas, ou on nous rappelle que seuls les majeurs sont pris en charge. Quand on appelle le 119 [service de protection d’enfants en danger], personne ne vient nous chercher », rapporte Yacoub Cissé, 16 ans et voisin de Lasso. Alors, c’est la rue et pendant les épisodes de grand froid, « vraiment, c’est dur ». « Moi, j’ai cru que j’étais à la limite de mourir cette nuit. Il faisait tellement froid », témoigne, toujours choqué, Sekouba Traoré, 16 ans. Dans une boucle WhatsApp dédiée aux jeunes et aux familles qui campent dehors, Utopia 56 a diffusé des messages audio expliquant comment reconnaître une hypothermie et appeler les secours. Quand le jour se lève, Lasso, Yacoub et lui s’affairent à trouver des couches de vêtement en plus pour les prochaines nuits, si possible une couette et une couverture de survie pour le toit de la tente. « J’aimerais bien avoir au moins trois couvertures et plus de chaussettes », dit Lasso, qui espère, autrement, récupérer le duvet d’un de ses compagnons, là depuis plus longtemps, auquel il souhaite d’être enfin pris en charge par l’aide sociale à l’enfance.
    A Utopia 56, « on fait des maraudes chaque soir », raconte Alice Bertrand, chargée des mineurs non accompagnés au sein de l’association. Dans la nuit de mercredi 17 à jeudi 18 janvier, trois bénévoles d’une vingtaine d’années font le tour de l’est et du centre de la capitale. « Bonsoir, c’est Utopia, on a du thé et du café », annoncent-ils à leur arrivée dans les campements qu’ils ont identifiés en amont. En anglais, en français ou avec des traducteurs, selon la langue de leurs interlocuteurs, « avez-vous besoin de gants, manteaux ou chaussures ? », demandent Elias Hufnagel, Maëlle Foix et Thomas Dufermont.
    Dans leur voiture, ils ont des cartons de produits d’hygiène, de vêtements, quelques Sheltersuit, cette veste imperméable et coupe-vent qui peut se transformer en combinaison une fois zippée sur un sac de couchage, et des tentes. Même si Alice Bertrand et Thomas Dufermont constatent que les dons ont été nombreux cet hiver, les dix-neuf tentes que les bénévoles peuvent distribuer sont insuffisantes par rapport à la demande. « En ce moment, nous comptons entre 90 et 150 nouveaux mineurs non accompagnés par semaine », selon Alice Bertrand. Utopia se prépare par ailleurs à récupérer – « aujourd’hui, demain, on ne sait pas » – les jeunes à l’abri dans le gymnase ouvert à Paris lorsque le plan Grand Froid sera désactivé et qu’ils se retrouveront à la rue. Des tentes leur seront données pour leur première nuit.
    En France, il n’existe aucune donnée fiable sur le nombre précis de mineurs non accompagnés présents sur le territoire, selon l’ONG Médecins du monde. Le ministère de la justice communique seulement sur le nombre de jeunes pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. En 2022, ils étaient 14 782, pour la plupart originaires de Côte d’Ivoire, de Guinée, de Tunisie, du Mali, d’Afghanistan ou encore du Bangladesh. L’association médicale et humanitaire estime toutefois que, dans 70 % des cas, la prise en charge est rejetée. Ces jeunes doivent faire une demande de recours pour que leur minorité soit finalement reconnue et faire valoir leur droit à être mis à l’abri. Le délai entre la saisine du juge des enfants et sa décision varie selon le département. « A Créteil, dans le 94 [Val-de-Marne], ça peut aller jusqu’à sept mois », d’après Renaud Mandel, de l’organisation Accompagnement et défense des jeunes isolés étrangers (Adjie). Le dossier de Lasso est à Créteil. Dans six mois et huit jours, il devra s’y représenter pour une première audience avec un juge. A l’issue de celle-ci, le magistrat peut demander des investigations complémentaires, comme un examen de maturation osseuse, pouvant prolonger de plusieurs semaines la décision, ou se prononcer. En attendant, Lasso sait qu’il continuera de dormir dehors. « On s’y habitue », lâche-t-il.
    Le traitement de ces jeunes migrants avant la reconnaissance de leur minorité ou lors de leur recours juridique est dénoncé par de nombreuses ONG, qui estiment que la Convention internationale des droits de l’enfant n’est pas respectée. La Cour européenne des droits de l’homme avait aussi condamné la France, en 2019, pour avoir infligé un « traitement dégradant » à un mineur isolé afghan lorsqu’il était en France. Cet enfant, âgé de 11 ans à l’époque, n’avait pas été pris en charge par les autorités. Il avait vécu environ six mois dans le bidonville de Calais (Pas-de-Calais). Unicef France a également interpellé la France à plusieurs reprises sur la situation de ces jeunes.
    L’Adjie a, de son côté, alerté, une nouvelle fois, la Mairie de Paris, en vain. « Nous vous demandons de bien vouloir, en urgence, demander la prise en charge de ces jeunes » face « à la situation de danger du fait de leur minorité et de leur isolement ». La vague de froid « ajoute un danger potentiel de mort pour ces jeunes aux organismes déjà affaiblis par de longues semaines d’errance dans les rues de la capitale », a écrit Renaud Mandel à Anne Hidalgo et Dominique Versini, l’adjointe à la maire de Paris en charge des droits de l’enfant et de la protection de l’enfance. « Avant on avait une réponse, maintenant plus personne nous répond », regrette-t-il. Dominique Versini n’a pas répondu aux sollicitations du Monde. Pas plus que le ministère du logement, dont le cabinet est vide dans l’attente de la nomination de toute l’équipe du gouvernement de Gabriel Attal. L’adjointe à la maire de Paris en charge des solidarités, de l’hébergement d’urgence et de la protection des réfugiés, Léa Filoche, renvoie, elle, vers l’Etat.

    #Covid-19#migrant#migration#france#MNA#hebergement#urgence#ASE#ong#campement#minorite#iseolement#sante

  • Calais, « impensé » du projet de loi « immigration »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/12/15/calais-impense-du-projet-de-loi-immigration_6205927_3224.html

    Calais, « impensé » du projet de loi « immigration »
    Par Julia Pascual (Calais (Pas-de-Calais), envoyée spéciale)
    Alors que le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, se rend vendredi dans la ville frontière défendre sa politique migratoire, les associations humanitaires investies dans l’aide aux migrants jugent le projet de loi très éloigné de leur réalité. (...)
    Selon les estimations, ils seraient à ce jour environ 1 500 à Calais – originaires du Soudan, d’Afghanistan, d’Erythrée… – à vivoter dans des camps pourtant démantelés toutes les quarante-huit heures. C’est ici que le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, devait se rendre, vendredi 15 décembre. Un déplacement symbolique dans cette ville frontière, alors que le projet de loi sur l’immigration a essuyé une motion de rejet à l’Assemblée nationale quatre jours plus tôt et qu’il doit être étudié en commission mixte paritaire à partir du 18 décembre. A Calais, M. Darmanin devait rencontrer la maire Les Républicains Natacha Bouchart et décorer des policiers et gendarmes « blessés durant des missions de lutte contre l’immigration irrégulière ».
    Le délit de séjour irrégulier ? « Ils ne vont pas arrêter 1 500 personnes, ce n’est pas une mesure organisable, estime cependant Amélie Moyart, de l’association d’aide aux migrants Utopia 56. Et puis les gens viennent de pays en guerre où on ne peut pas les renvoyer. » « Comme en période électorale, Calais est un endroit de théâtre, un piédestal pour draguer la droite et faire passer son projet de loi », accuse Juliette Delaplace, chargée de mission « personnes exilées » depuis plus de quatre ans à Calais pour le Secours catholique. Ils sont nombreux à penser que la loi Darmanin ne répond pas à leur problématique, parmi celles et ceux qui côtoient les personnes migrantes dans les campements de fortune de la Côte d’Opale. « Le texte parle beaucoup des étrangers délinquants mais ça ne nous concerne pas », considère Jeanne Bonnet, 25 ans, qui participe à un projet de maison d’hospitalité, La Margelle, ouverte il y a un an à Calais. Ce lieu peut accueillir, pendant un mois et demi maximum, neuf personnes « qui veulent réfléchir sur leur projet, se stabiliser en France ou demander l’asile par exemple ». Jeanne Bonnet est originaire d’un village de Vendée, Montaigu, qui, en 2016, lors du démantèlement de la « grande jungle » de Calais, a vu débarquer des Afghans. Ils ont depuis trouvé du travail et vivent à La Roche-sur-Yon. « Regardons déjà ce qui marche avant de voter une loi », dit-elle.
    Le démantèlement de 2016, Claire Millot, 74 ans, s’en souvient aussi. Elle était déjà investie auprès de l’association de distribution de repas Salam, dont elle est aujourd’hui secrétaire générale. « C’est la seule chose qui a marché parce que Bernard Cazeneuve [ministre de l’intérieur de l’époque] avait levé l’application du règlement Dublin pour que les gens demandent l’asile en France. Pendant plus de deux mois, on n’a plus vu personne sur les camps. »
    Le règlement européen de Dublin prévoit qu’un demandeur d’asile doit faire étudier sa situation dans le pays qui a enregistré ses empreintes, le plus souvent celui par lequel il est arrivé en Europe. Parmi les candidats au départ vers l’Angleterre, nombreux sont ceux qui fuient les conséquences de ce règlement. C’est le cas de Mohamada (qui n’a pas souhaité donner son nom, comme les personnes citées par leur prénom), un Soudanais de 23 ans qui a ses empreintes en Espagne, et qui ne peut donc pas demander l’asile en France ou en Allemagne. Cela fait deux semaines qu’il s’abrite dans un hangar désaffecté de Calais.
    A l’accueil de jour du Secours catholique de Calais, où 900 personnes viennent quotidiennement s’abriter, on aimerait aussi que les procédures de demande d’asile soient facilitées, alors que « cela prend plus d’un mois et demi avant de pouvoir enregistrer sa demande », déplore Juliette Delaplace. Sans compter que, pour le faire, les personnes doivent se rendre à Lille depuis les camps. Plusieurs recours en référé-liberté ont été déposés devant le tribunal administratif pour obliger la préfecture à améliorer ses délais. Wehbe Muhamad, 18 ans, est à l’origine de l’un d’eux. Lui a renoncé à l’Angleterre, mais il désespère de quitter la « jungle ». « Améliorer les conditions d’accueil, l’enregistrement des demandes d’asile, suspendre le règlement de Dublin, ce sont des impensés de la loi “immigration” », dénonce Juliette Delaplace.
    « Si je restais en France, je serais toute ma vie sans-abri », redoute Abdulhaman, un autre Soudanais de 23 ans, à Calais depuis trois mois déjà. Avant ça, il a été sous le périphérique parisien pendant trois semaines. « La situation est catastrophique. Et la seule bonne nouvelle du projet de loi, c’est l’interdiction de placer en rétention les mineurs », estime Juliette Witt, 27 ans, de l’association Project Play, qui propose des séances de jeu pour les enfants vivant dans des camps. « Ils sont souvent malades, montrent des signes d’épuisement, et sont très anxieux à propos des violences policières et des traversées », rapporte-t-elle.
    Jeudi 14 décembre, ils étaient nombreux à attendre devant les arrêts de bus de Grande-Synthe (Nord), pour gagner les plages autour de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais). La météo s’annonçait propice aux traversées. Depuis le début de l’année, environ 29 000 personnes ont rejoint le Royaume-Uni à bord d’embarcations pneumatiques, contre plus de 45 000 en 2022. Dans la nuit de jeudi à vendredi, une soixantaine de personnes ont été secourues alors que leur embarcation se dégonflait et que certaines se trouvaient à l’eau. L’une d’elles est décédée tandis qu’une autre a été transportée à l’hôpital de Calais, en urgence absolue. Par ailleurs, un Soudanais est mort d’un arrêt cardiaque lors d’un autre naufrage, la même nuit. Ceux qui échouent à franchir le pas de Calais devront regagner les campements, détrempés.
    Il est arrivé à plusieurs reprises à Olivier Carton, le maire centre gauche de la commune de Dannes, au sud de Boulogne-sur-Mer, de prêter une salle aux naufragés transis. Le temps d’une nuit, pour qu’ils se changent, se sèchent, se nourrissent. Les 1 300 habitants de sa commune ont voté à plus de 64 % pour Marine Le Pen au second tour de l’élection présidentielle, mais, le maire en est persuadé, « ce n’est pas parce qu’on vote une loi d’expulsion que les migrants ne vont pas traverser la mer ».« Si déjà on gagnait une benne à ordures et rien qu’un point d’eau, ça changerait tout » : Claire Millot a appris à avoir des attentes modestes. Autour de 1 000 personnes se trouveraient sur le principal camp de migrants, installé depuis plus de deux ans à Loon-Plage (Nord). Les gens utilisaient les bornes à incendie pour se servir en eau, mais la dernière a été coupée en novembre. C’est ce qui a poussé Pierre Lascoux, un bénévole de Salam de 62 ans, à entamer une grève de la faim, le 22 novembre. Il a déjà perdu plus de 9 kilos. « Manquer d’eau en France, vous imaginez ?, nous interpelle-t-il. En août 2022, un jeune est mort noyé en essayant de se laver dans le canal de Bourbourg [à proximité du campement]. »
    Le projet de loi « immigration » ? « C’est drainer l’opinion des Français, qui vivent de plus en plus dans la peur », dit M. Lascoux, qui s’est installé dans une chambre de la maison Sésame, à Herzeele (Nord), un lieu de vie citoyen, qui permet d’offrir quelques jours de répit aux personnes en transit vers le Royaume-Uni. Il y a ce jour-là dans la maison un grand monsieur soudanais, qui porte sur son dos son fils de 15 mois. « Je vais traverser », nous dit-il en descendant l’escalier de la maison, engoncé dans son manteau. Il part sous la pluie. Cela fait des mois qu’il erre en France. Une nuit de traversée, il a été séparé de sa femme et de leurs autres enfants. Eux sont déjà en Angleterre. Lui entend les rejoindre.

    #Covid-19#migrant#migration#france#calais#loimigration#traversee#campement#traversee#manche#grandebretagne#sante#droit#asile#violence

  • A Calais et à Dunkerque, plusieurs camps de migrants évacués par la police
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/11/30/a-calais-et-a-dunkerque-plusieurs-camps-de-migrants-evacues-par-la-police_62

    A Calais et à Dunkerque, plusieurs camps de migrants évacués par la police
    La préfecture du Pas-de-Calais a fait valoir la nécessité de mettre à l’abri les personnes à l’approche de l’hiver. Les associations dénoncent des « expulsions forcées ».
    Le Monde avec AFP
    Des centaines de candidats à l’exil ont été à nouveau évacués, jeudi 30 novembre à l’aube, de plusieurs lieux de vie autour de Calais et de Dunkerque, où ils campent dans des conditions exécrables avec l’espoir de se rendre au Royaume-Uni. L’association Utopia 56 a dénoncé sur X une « expulsion d’une ampleur jamais vu », rapportant des cas de personnes « forcées de monter dans des bus et expulsées vers l’ensemble du territoire français ».
    A Loon-Plage près de Dunkerque (Nord), comme dans les campements près de Calais (Pas-de-Calais), des bus ont été mobilisés pour emmener les migrants vers des abris d’urgence à l’écart du littoral. La préfecture du Pas-de-Calais a fait valoir la nécessité de mettre à l’abri les personnes à l’approche de l’hiver. Dans les campements détrempés par les pluies diluviennes de novembre, les températures sont actuellement négatives la nuit. « On va avoir plusieurs jours et probablement plusieurs semaines où il fera très froid, par conséquent la situation de vie sur les camps est extrêmement précaire », a souligné François-Xavier Bieuville, sous-préfet de Dunkerque. « L’objectif est de sauver les vies », a-t-il ajouté, alors que les tentatives de traversées se poursuivent malgré les conditions météo.
    Deux personnes ont péri dans la Manche le 22 novembre, lorsque leur embarcation a fait naufrage à quelques centaines de mètres du rivage, deux ans presque jour pour jour après le drame qui avait coûté la vie à vingt-sept migrants en 2021.Les associations dénoncent quant à elles des « expulsions forcées », voyant dans ces opérations récurrentes une volonté d’épuiser les personnes en transit.
    L’évêque d’Arras, Mgr Olivier Leborgne, qui s’est rendu sur place, a souligné que les évacuations se font sans prévenir, ni faire de diagnostic social, déplorant que « la seule porte d’entrée est sécuritaire ». « Est-ce qu’elle pourrait être humanitaire ? D’abord est-ce qu’on peut respecter le droit ? », a-t-il lancé, rappelant les propos du pape à Marseille sur le risque de « naufrage de civilisation » dans la peur et l’indifférence opposées au phénomène migratoire.A Calais, 400 à 800 personnes ont été délogées, a indiqué le Secours catholique, dénonçant des « expulsions forcées » car certaines de ces personnes ont été poursuivies, voire contraintes de monter dans des bus. Véronique Devise, présidente du Secours catholique qui était sur place jeudi, a demandé « une ouverture du plan Grand Froid de façon plus souple », pour héberger les migrants sans les expulser.
    Le Secours catholique appelle également à multiplier les lieux d’accueil de jour – alors qu’ils sont seuls à gérer un lieu de ce type actuellement –, pour faciliter l’accès au droit des migrants, ainsi qu’à augmenter le nombre des lieux d’hébergement d’urgence et à mieux protéger l’enfance. Après le passage des forces de l’ordre, des équipes de nettoyage mobilisées par l’Etat ont vidé des tentes installées dans un bosquet sur le campement de la rue de Judée. (...) Selon une militante de l’association d’aide aux exilés Calais Food Collective, « on a réussi à arriver avant la police et à réveiller des personnes, mais ils n’ont pas forcément pu rassembler leurs affaires ». Une grande tranchée fraîchement creusée borde le terrain, pour empêcher les distributions alimentaires, selon le collectif. Un des campements évacués, celui de la Turquerie, près de Calais, avait déjà été évacué le 10 octobre, ainsi qu’en mai et en juin derniers.

    #Covid-19#migrant#migration#france#calais#dunkerque#campement#expulsion#og#humanitaire#hebergement#migrationirreguliere

  • Les #expulsions ont des conséquences délétères sur la vie des #enfants

    L’Observatoire des expulsions des lieux de vie informels dénonce, dans son rapport annuel, des opérations qui compromettent la #scolarité des enfants et le #suivi_médical des #femmes_enceintes, à cause de l’#errance forcée qu’elles provoquent.

    Des femmes enceintes qui ne peuvent pas bénéficier d’un suivi médical continu, des enfants brutalement retirés de l’école, des mineur·es isolé·es démuni·es et traumatisé·es : les conséquences des expulsions des personnes occupant des lieux de vie informels sont multiples et délétères.

    C’est la conclusion du cinquième rapport annuel de l’Observatoire des expulsions de lieux de vie informels (#squats, #bidonvilles et #campements, #caravanes, #voitures ou camions) publié mardi 28 novembre. Il regroupe huit associations indépendantes, parmi lesquelles le Collectif national droits de l’homme Romeurope, la Fondation Abbé Pierre ou encore Médecins du monde.

    Elles ont recensé, entre le 1er novembre 2022 et le 31 octobre 2023, date du début de la trêve hivernale, 1 111 expulsions sur le territoire national, dont 729 pour le littoral nord (Calais, Pas-de-Calais, Dunkerque dans le Nord).

    Si les expulsions sur le littoral nord ont diminué de 58 %, elles ont augmenté de 24 % en un an sur le reste du territoire, outremer inclus, et concerné en moyenne 74 personnes chaque jour.

    85 % de ces expulsions sont dites « sèches », car elles n’ont donné lieu à aucune solution d’hébergement ou de relogement. 14 % ont donné lieu à des mises à l’abri pour au moins une partie des habitant·es. 1 % seulement ont donné lieu à un dispositif d’insertion, un hébergement stable ou un logement, pour au moins une partie des habitant·es, détaille l’Observatoire.

    L’organisme explique qu’il est difficile d’avoir des données précises sur les enfants mais compte cette année 5 531 enfants expulsés (contre 3 212 l’année précédente). Ce chiffre est très largement sous-estimé, a-t-il précisé lors de la conférence de presse de présentation du rapport.
    Le suivi compromis des grossesses

    Cette année, l’Observatoire s’est focalisé sur les conséquences concrètes des expulsions sur la vie des enfants et de leurs mères. Il rappelle que « la précarité, et en particulier l’absence de logement, est depuis longtemps identifiée par la littérature scientifique comme un facteur de risque lors de la grossesse ».

    Les chiffres sont éloquents. Une femme enceinte devrait avoir accès à sept consultations prénatales et à trois échographies au moins, rappelle Médecins du monde.

    Or, plus d’une femme enceinte sur trois rencontrées par les équipes des programmes fixes de Médecins du monde en France en 2022 présente un retard de suivi de grossesse, comme la quasi-totalité des femmes enceintes rencontrées par le programme de médiation en santé du Comité pour la santé des exilés (Comede) en Île-de-France. Un écart majeur avec la population générale, parmi laquelle moins de 5 % des personnes enceintes sont dans ce cas.

    Les associations soulignent que les suivis médicaux et de grossesse sont déjà erratiques d’ordinaire. Notamment parce que l’ouverture de droits à une couverture maladie exige une domiciliation administrative. Les démarches, surtout avec la barrière de la langue, peuvent être délicates. Certaines personnes peuvent aussi perdre des papiers dans la cohue des expulsions impromptues.

    Ces dernières insécurisent aussi les futures mères, qui cherchent « en premier lieu à répondre à des besoins de stricte survie », quitte à sacrifier leur santé.

    « Il y a des personnes qu’on va perdre de vue à la suite des expulsions. Elles vont se réinstaller beaucoup plus loin, dans une autre commune, à l’autre bout d’une métropole, a détaillé Antoine Bazin, coordinateur Médecins du monde à Toulouse, devant la presse. Et les suivis par les PMI [centres de Protection maternelle et infantile – ndlr] de secteur, par exemple, pour les femmes enceintes, les suivis par des médecins traitants si on peut en avoir, ou par des centres de santé, vont être rendus plus compliqués parce que les personnes vont être isolées. »

    Les expulsions compliquent aussi le suivi de pathologies. Dans son rapport, l’Observatoire rapporte comment une opération de dépistage de la tuberculose dans un bidonville du Val-d’Oise, au printemps 2023, après la découverte d’un cas sur le lieu de vie et quatre hospitalisations d’enfants, a été compromise par des expulsions successives.

    Même chose pour les campagnes de vaccination ou le repérage des cas de saturnisme, dus à une exposition au plomb pouvant affecter le développement psychomoteur des enfants.

    Par ailleurs, la vie quotidienne d’un enfant vivant dans un lieu de vie informel est aussi bouleversée par l’instabilité provoquée par les expulsions. La scolarité de ces enfants mais aussi leur équilibre mental et psychique sont ébranlés. En 2022, l’Unicef avait déjà alerté sur l’état de santé mentale dégradé des enfants sans domicile.

    Les expulsions sont de plus en plus violentes (voir l’opération « Wuambushu » à Mayotte), dénonce l’Observatoire. Antoine Bazin, de Médecins du monde, explique que les enfants sont les « acteurs passifs » de ces événements et vont vivre la violence intrinsèque au déroulement des opérations d’expulsions. En « vraies éponges », ils vont en conserver des souvenirs qui peuvent avoir des conséquences sur leur construction psychique.

    Julie Bremont, représentante du Comité de pilotage interassociatif MNA Nord-Littoral, confirme : « Les expulsions sont en elles-mêmes un moment très générateur d’anxiété et de peur pour les jeunes. Déjà, de par la violence du dispositif, avec des dizaines de camions de CRS et des policiers en uniforme. Ces opérations d’expulsion sont très souvent accompagnées de violences verbales et physiques. »
    Décrochages scolaires

    De son côté, Célia Mougel, coordinatrice de l’Observatoire des expulsions, souligne que 77 % des expulsions recensées (en dehors du Nord littoral) ont eu lieu pendant l’année scolaire, ce qui, évidemment, produit des décrochages, des déscolarisations, notamment quand on sait que pour réinscrire un enfant, il faut au moins six mois. Si les municipalités coopèrent, ce qui n’est pas toujours le cas.

    Contraindre ces familles à quitter leur lieu de vie et leur point d’ancrage entraîne des effets à long terme sur les enfants. Ils rencontrent alors des difficultés dans la continuité pédagogique, un sentiment d’exclusion ou encore des problèmes d’apprentissage.

    Le cas d’un collégien, Alex, raconté dans le rapport, le prouve. Le garçon aura vécu trois expulsions qui lui auront fait perdre une année scolaire entière. Aujourd’hui, à 12 ans, Alex et sa famille dorment sous un pont en Seine-Saint-Denis et il n’est plus scolarisé.

    Pour toutes ces raisons, l’Observatoire enjoint aux pouvoirs publics de suspendre les expulsions pendant l’année scolaire, pour éviter l’exclusion scolaire et le décrochage des enfants en cours d’année. Manuel Domergue, de la Fondation Abbé Pierre, considère qu’il faudrait aussi déployer davantage de médiateurs scolaires dans ces lieux de vie informels.

    Le reste du temps, les associations estiment qu’aucune expulsion ne devrait avoir lieu sans qu’un diagnostic social préliminaire (l’instruction du 25 janvier 2018 qui le recommandait n’est pas respectée), un accompagnement social global et des solutions de relogement dignes, adaptées et pérennes n’aient été mis en place. Cela pour permettre « une sortie des bidonvilles par le haut ».

    https://www.mediapart.fr/journal/france/281123/les-expulsions-ont-des-consequences-deleteres-sur-la-vie-des-enfants
    #enfance #mineurs #statistiques #chiffres #2022 #expulsions_sèches #santé_mentale #SDF #sans-abrisme #sans-abris #déscolarisation

  • LA CONDITION DES PERSONNES EXILÉES A PARIS : 8 ANNÉES DE VIOLENCES POLICIÈRES ET INSTITUTIONNELLES

    Trois ans après l’expulsion brutale d’un campement de 500 tentes #place_de_la_République, nous vous partageons le premier #rapport du #CAD (#Collectif_Accès_au_Droit), qui documente les violences policières envers les personnes exilées à Paris et dans sa proche périphérie.

    Ce travail, basé sur le recueil de 448 #témoignages recensés depuis 2015 et sur une enquête flash réalisée ces dernières semaines auprès de 103 personnes exilées, démontre que ces violences constituent depuis 8 ans la condition des personnes exilées à Paris.

    https://collectifaccesaudroit.org/rapport

    #sans-papiers #migrations #France #violences_policières #harcèlement #violence #violence_systémique #violences_institutionnelles #campement #destruction #nasse #nasse_mobile #Paris

    ping @isskein @karine4

  • En Ile-de-France, un rapport dénonce des violences policières quasi systématiques sur les migrants lors des évacuations - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/53429/en-iledefrance-un-rapport-denonce-des-violences-policieres-quasi-syste

    Actualités
    L’évacuation du campement de Saint-Denis, où dormaient près de 200 migrants, le 22 juillet 2021. Crédit : @enfants_afghan
    En Ile-de-France, un rapport dénonce des violences policières quasi systématiques sur les migrants lors des évacuations
    Par Louis Chahuneau Publié le : 24/11/2023
    Dans un rapport publié jeudi, le collectif inter-associatifs « Accès au droit » documente la récurrence des violences verbales et physiques commises à l’encontre des migrants lors des démantèlements de campements informels par les forces de l’ordre, en Île-de-France. Une stratégie qui viserait à décourager définitivement les exilés de s’installer dans la rue, à l’approche des Jeux olympiques 2024.
    Des évacuations de campements toujours plus violentes. C’est le constat qui ressort du rapport publié jeudi 23 novembre par le collectif inter-associatif Accès au droit (CAD) sur les violences « policières et institutionnelles » à l’encontre des migrants, à Paris et sa région.Créé en 2023, ce collectif, qui rassemble des bénévoles d’associations, des juristes et chercheurs spécialisés, a documenté les violences verbales ou physiques associées aux évacuations de campements de migrants en Île-de-France depuis 2015. Selon ses travaux sur les principaux lieux de vie informels parisiens, le constat est sans appel : sur les 93 exilés interrogés, 81% déclarent avoir été victimes de violences policières, à plusieurs reprises dans 66% des cas.
    Le collectif a recensé 448 témoignages de violences policières en huit ans, dont 88 % résultent de « situations d’évictions, de dispersions dans l’espace public ». Un tiers des témoignages (30 %) rassemblés concernent des violences physiques, du simple coup de pied au passage à tabac, et un autre tiers (33 %) des confiscations ou destructions de biens. Cela va du « coup de pied » ou « de matraque » à un exilé prié de rassembler ses affaires plus vite, jusqu’à de rares cas de « passages à tabac bien documentés », indique à l’AFP un responsable de l’observatoire, requérant l’anonymat en raison de ses fonctions dans une institution publique.
    Le rapport précise que « l’immense majorité de ces violences s’est déroulée dans le nord-est de Paris, dans le 18, 19, 20e arrondissement et les communes limitrophes du 93 ». Ces violences restent « très largement sous-documentées car elles se produisent dans des lieux isolés, à des heures ’invisibles’, rendant difficile le recueil de preuves pour envisager d’entreprendre un recours. »
    Par ailleurs, les exilés vont rarement porter plainte après avoir été victimes de violences, « considérant tout recours inutile notamment à cause d’un faible niveau de confiance envers les forces de l’ordre ».
    « Cette violence policière constitue une troisième violence après celle du départ et du parcours migratoire » Les membres du projet ont décidé de lancer ce travail de documentation après l’évacuation violente du campement informel place de la République (10e arrondissement de Paris) où dormaient près de 500 migrants, en grande majorité afghans, le 24 novembre 2020. (...) Face à la violence des images, et au tollé politique, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin avait même évoqué des « faits inacceptables » et annoncé l’ouverture de deux enquêtes pour « violences par personne dépositaire de l’autorité publique ». De son côté, le président de la République Emmanuel Macron avait promis « des sanctions » à l’encontre des policiers fautifs. Mais d’après le collectif Accès au droit, les violences policières sur les campements de migrants n’ont fait que s’amplifier depuis cet épisode. « Cette violence policière constitue une troisième violence après celle du départ et du parcours migratoire », rappelle le collectif qui estime que l’imminence des Jeux olympiques 2024 (26 juillet-11 août 2024) motive les autorités à repousser les migrants hors de Paris pour faire place nette.
    Début mars, une vidéo rendue publique par l’association Utopia 56, membre du collectif, montre un CRS diffuser plusieurs jets de gaz lacrymogène sur un matelas dans un campement de fortune sous le métro aérien. L’affaire avait provoqué l’ouverture d’une enquête administrative des CRS et fait l’objet d’un signalement à l’IGPN.
    « Si le système est pensé pour disperser, il est très efficace »
    Depuis le début de l’année 2023, la préfecture d’Île-de-France a procédé à 33 opérations de « mises à l’abri », selon l’AFP. « On constate qu’il y a quasiment une ’mise à l’abri’ par semaine, explique Paul Alauzy, coordinateur à Médecins du monde et bénévole du CAD, joint par InfoMigrants. Il y a trois SAS régionaux qui libèrent 50 places par semaine, donc la cadence des évacuations augmente. Dès qu’un campement atteint 100 ou 200 personnes, on le démantèle. »
    Sur les huit dernières années, le CAD estime que la préfecture d’Île-de-France a procédé à 369 opérations d’évacuation de campement impliquant 80 000 migrants. Une cadence infernale qui n’est pas sans conséquences sur la santé mentale des exilés : « Il peut y avoir un épuisement psychique énorme, un sentiment d’insécurité constant parce qu’ils sont toujours en état d’alerte. Concrètement, cela provoque des insomnies, des cauchemars, et un comportement d’évitement vis-à-vis des forces de police », témoigne à InfoMigrants Leticia Bertuzzi, psychologue et coordinatrice santé mentale chez Médecins sans frontières (MSF).Ces dernières années, lorsqu’un campement était démantelé, les migrants éligibles à un hébergement provisoire (comme les demandeurs d’asile) étaient mis à l’abri en région parisienne, tandis que les autres étaient contraints de reformer un plus petit campement ailleurs. Mais la donne a changé depuis la création des SAS régionaux en 2023 : « Si le système est pensé pour disperser il est très efficace, s’il est pensé pour loger et accueillir dans de bonnes conditions, il fonctionne mal », résume Paul Alauzy. Sollicités par InfoMigrants au sujet du rapport, la préfecture d’Île-de-France et le ministère de l’Intérieur n’ont, pour l’instant, pas répondu à nos sollicitations.

    #Covid-19#migrant#migration#france#paris#jeuxolympiques#evacuation#sante#santementale#campement#demandeurdasile#violencepoliciere#violenceinstitutionnelle#police

    • Pour les seuls squats et foyers de travailleurs migrants, le collectif Schaeffer, signataire de la lettre ouverte, estime à 4 100 le nombre de ressortissants de pays africains qui ont été déplacés de la Seine-Saint-Denis après le démantèlement de leur lieu de vie. Pour l’essentiel, ils vivent désormais sur les berges du Canal Saint-Denis, selon les organisations qui leur viennent en aide.

      A ceux-là s’ajoutent les plus de 1 600 personnes qui ont été transférées depuis six mois dans des « sas » d’hébergement en régions, ouverts en avril par le gouvernement pour y orienter les personnes migrantes à la rue en Ile-de-France, où les situations de #campements sont récurrentes et l’hébergement d’urgence saturé. Les autorités ont également tenté d’interdire début octobre les distributions alimentaires dans un quartier populaire du nord de Paris, une décision finalement retoquée en justice.

      [...]
      Les associations, elles, appellent les autorités à « garantir une continuité de la prise en charge des personnes en situation de précarité et d’exclusion, avant, pendant et après les Jeux » olympiques (26 juillet-11 août). Elles demandent également à intégrer les comités de pilotage des JO. Paul Alauzy [#Médecins_du_monde] défend la demande : « On connaît le terrain et on peut aider à ce que les choses se passent bien ».

      #JO #nettoyage_social #Paris #squats #migrants foyers

  • Les distributions alimentaires interdites dans le nord de Paris
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/10/10/les-distributions-alimentaires-interdites-dans-le-nord-de-paris_6193556_3224

    La préfecture de police justifie l’interdiction de distributions pendant un mois en leur reprochant de « stimuler la formation de campements ».

    La #Préfecture de police de #Paris (PP) a pris un arrêté interdisant, à compter de mardi 10 octobre et pour un mois, les #distributions_alimentaires dans un quartier du nord de Paris où se concentrent les campements de #migrants et des #sans-abri, provoquant l’ire des associations. L’arrêté signé lundi par le préfet, Laurent Nuñez, prévoit une « interdiction des distributions alimentaires » entre le 10 octobre et le 10 novembre sur un secteur « délimité » des 10e et 19e arrondissements, qui concerne neuf artères dans le quartier populaire autour des stations de métro #Stalingrad et #Jaurès.
    C’est là, selon la #PP, « que ces distributions alimentaires engendrent, par leur caractère récurrent, une augmentation de la population bénéficiaire de ces opérations et qu’elles contribuent, en corollaire, à stimuler la formation de campements dans le secteur du boulevard de la Villette, où se retrouvent des migrants, des personnes droguées et des sans-domicile fixe ».
    Le quartier, argumente la PP, est devenu « un point de fixation pour de tels campements ». Les « attroupements », les « débordements sur la voirie », certaines échauffourées ainsi que la présence de « toxicomanes » constituent des « troubles à l’ordre public » qui ont conduit « pour la première fois » le préfet de police à prendre un tel arrêté sur ce secteur parisien, précise la préfecture à l’Agence France-Presse.

    Arrêtés similaires pris à Calais

    Pourtant, il n’y a « jamais eu d’incidents sur nos sites de distribution », conteste Philippe Caro, un responsable du collectif Solidarité Migrants Wilson, l’une des organisations dont l’action est visée. « On complique la vie des associations et des gens, sans jamais résoudre leurs problèmes. On va juste déplacer le problème, mais avec les Jeux olympiques qui arrivent, on sent que la pression monte et là les toxicomanes vont servir de prétexte pour virer tout le monde » du nord de Paris, estime-t-il.
    « C’est une fois de plus ces personnes qui vont trinquer », a également réagi Samuel Coppens, de l’Armée du salut, qui effectue des distributions sur d’autres secteurs. Les interdictions vont priver entre « 200 et 500 personnes » chaque jour de nourriture, déplore à son tour Océane Marache, coordinatrice parisienne à Utopia 56, qui intervient auprès des exilés à la rue.

    Pour l’association, l’Etat applique à Paris « le même schéma qu’à Calais » , où des arrêtés similaires sont pris régulièrement depuis 2020. Le fait que cette interdiction parisienne soit décidée mardi 10 octobre, journée internationale de lutte contre le sans-abrisme, est « révélateur de la politique anti-SDF que mène l’Etat », estime-t-elle.

    #campement #Calais #réfugiés #exilés #JO

  • À la frontière serbo-hongroise, les exilés entre deux feux

    C’est le « game » : franchir la #clôture anti-migrants que la Hongrie a érigée à la frontière serbe en 2015, puis espérer échapper à la violence des patrouilles hongroises. Environ un millier d’exilés attendent leur tour à #Subotica, dans des squats ou dans la forêt, en jouant au chat et à la souris avec la police serbe. Reportage.

    « J’ai déjà tenté dix fois de passer en Hongrie, ça n’a pas marché », confie Arman. « Mais je n’abandonne pas ! » Assis sur un vieux tapis poussiéreux, sous une tonnelle bricolée avec du bois et une grande bâche bleue de récupération, le jeune Afghan d’une vingtaine d’années, qui espère rejoindre le Royaume-Uni, décortique des pistaches en écoutant de la musique sur une petite enceinte portable avec deux de ses amis. C’est là qu’ils ont trouvé un refuge temporaire, entre les lignes de chemin de fer et un vieux bâtiment abandonné de la gare de Subotica, au nord de la Serbie, à la frontière avec la Hongrie. Pour le moment, en cette fin de matinée chaude et ensoleillée, Arman et ses deux compagnons de route patientent. Mais le soir venu, c’est sûr, ils tenteront une fois de plus le « game ».

    Le « game », c’est-à-dire quitter la ville de Subotica, atteindre la forêt qui jouxte la frontière, puis tenter de franchir le « mur anti-migrants », formule du Premier ministre hongrois, Viktor Orbán : il s’agit d’une double barrière de plus de trois mètres de haut, dont l’une est surmontée de barbelés Concertina, longue de 175 kilomètres, dotée de caméras et de détecteurs de mouvements, et surveillée par de multiples patrouilles de la police hongroise. Quelque 800 millions d’euros ont été nécessaires pour ériger ce dispositif construit à la fin de l’été 2015, alors que des milliers d’exilés cherchaient à se réfugier en Europe, fuyant la guerre en Syrie ou la violence et la pauvreté dans leur pays.

    Franchir le « mur » ne garantit cependant pas de pouvoir continuer la route vers l’Union européenne. « Quand les policiers hongrois nous attrapent, avant de nous renvoyer en Serbie, ils confisquent ou détruisent nos téléphones », témoigne Arman. « Ils se montrent souvent violents, particulièrement quand ils découvrent que nous sommes afghans. » Des pratiques de refoulements (ou « pushback ») qui ont valu à la Hongrie une condamnation de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) en décembre 2020, mais qui n’étonnent plus Maria Marga, chargée des programmes de Collective Aid, une organisation qui soutient les exilés à Subotica. Présente depuis 2019, l’équipe sur place recueille très régulièrement des témoignages d’exilés refoulés par la police hongroise, souvent violemment, « et ce en dépit des lois internationales et du principe de non-refoulement », souligne la responsable associative.

    En attendant de passer la frontière, la plupart des exilés survivent dans des campements informels faits de tentes et d’abris de fortune dans des « jungles » au cœur de la forêt. Le Centre de réception, ouvert en 2015 par les autorités à l’entrée sud de la ville, qui héberge actuellement plus de 400 personnes pour une capacité de 220 places, reste sous-doté pour accueillir les exilés présents à la frontière, estimés à un millier. Rencontré à proximité du camp, Naïm, un adolescent de quatorze ans, semble un peu perdu. « Je suis là depuis trois jours, il n’y a pas de place dans le camp, alors je dors ici », indique Naïm en désignant la terre battue qui jouxte le centre. L’adolescent a quitté il y a six mois Deir Ez Zor, dans l’est de la Syrie, puis a transité par la Turquie, la Bulgarie avant d’atteindre le nord de la Serbie. Malgré ses quatorze ans, il passera la nuit dehors.

    Naïm n’est pas le seul à dormir à l’extérieur du camp. D’autres exilés squattent où ils peuvent en ville ou bien s’abritent dans la forêt située à une dizaine de kilomètres au nord de Subotica. Selon Maria Marga, « les expulsions de campements et de squats menées par la police serbe ont été constantes ces trois derniers mois ». Dans un récent rapport, le réseau d’associations Border Violence Monitoring Network (dont Collective Aid est membre) a recensé 27 opérations d’expulsions menées au cours du seul mois de juillet 2023, dont certaines ont été émaillées de violences de la part des forces de l’ordre, de destructions de tentes et de vols d’affaires appartenant à des exilés. « Ces expulsions accentuent la précarité des exilés, qui se retrouvent isolés et éprouvent des difficultés à se procurer nourriture et eau », déplore Maria Marga.
    Frontex en renfort

    Début août, les autorités serbes ont mobilisé plus de 800 policiers et gendarmes pour une vaste opération destinée à démanteler des réseaux de passeurs : treize personnes ont été arrêtées et des armes ont été saisies. Maria Marga souligne que la communication des autorités serbes n’évoque pas « les 300 personnes exilées qui ont aussi été arrêtées avant d’être envoyées par bus dans des camps, dont celui de Preševo, à 500 kilomètres, tout au sud de la Serbie ». L’objectif de ce type d’opérations, selon elle : éloigner ces personnes de la frontière avec la Hongrie. « Ces expulsions visent simplement à plonger les exilés dans un climat d’hostilité et d’insécurité », conclut la responsable associative.

    L’agence Frontex a recensé 145 600 franchissements irréguliers de frontières en 2022 dans la région des Balkans occidentaux, en augmentation de 136% par rapport à 2021, selon les données collectées par ses services. Pour les autorités européennes, la « route des Balkans » empruntées par de nombreux exilés venus du Proche et du Moyen-Orient est présentée comme une priorité. En octobre dernier, la Commission européenne a ainsi acté le renforcement du rôle de Frontex en Serbie, en Bosnie-Herzégovine, au Monténégro et en Albanie, et débloqué 39,2 millions d’euros destinés à « sécuriser » les frontières de ces pays via l’achat de systèmes de surveillance mobiles, de drones ou d’appareils biométriques.

    Une préoccupation déjà visible sur le terrain, comme en témoigne Maria Marga, qui constate « la présence depuis le début de l’année de policiers italiens, allemands ou néerlandais, tous avec leurs uniformes nationaux, mais portant un brassard Frontex ». Ce nouveau déploiement de l’agence, accusée par ailleurs d’avoir couvert les refoulements pratiqués par les garde-côtes grecs, inquiète la responsable associative. « À ce stade, les nouvelles missions des agents de Frontex sont peu claires : sont-ils ici pour soutenir les actions de la police serbe et patrouiller aux frontières ? Ou pour collecter des données ? »

    Alors que la nuit tombe sur Subotica, Arman et ses deux amis se mettent en route vers la Hongrie. Ce soir peut-être, le « game » le rapprochera un peu plus du Royaume-Uni, ou l’ancrera un peu plus longtemps en Serbie.

    https://www.courrierdesbalkans.fr/Exiles-a-la-frontiere-serbo-hongroise
    #Serbie #Hongrie #frontières #asile #migrations #réfugiés #game #the_game #route_des_Balkans #Balkans #murs #barrière_frontalière #forêt #campements #militarisation_des_frontières #Frontex

  • France : à Paris, plus de 200 migrants ouest-africains pris en charge | Africanews
    https://fr.africanews.com/2023/08/22/france-a-paris-plus-de-200-migrants-ouest-africains-pris-en-charge


    Des sans-papiers, des migrants et des demandeurs d’asile, sur un parking transformé en abri de nuit temporaire près de l’Arc de Triomphe à Paris, le 1er mars 2023 - Copyright © africanews EMMANUEL DUNAND/AFP or licensors

    Un #campement de #migrants installé depuis début août devant l’Hôtel de ville de Paris a été évacué et 226 personnes mises à l’abri, ont annoncé mardi les autorités.

    Ces migrants, "principalement originaires d’Afrique de l’Ouest, (...) ont été dirigés dans une structure d’accueil temporaire en Ile-de-France", indique un communiqué de la région Ile-de-France et de la #préfecture de #police.

    Ils seront ensuite orientés en régions "en fonction de leur situation et avec leur accord", dans des structures d’#hébergement_temporaires permettant un accompagnement social et sanitaire, ainsi qu’une évaluation de leur situation administrative quant au #droit_au_séjour, selon le communiqué.

    Depuis début août, quelques dizaines de familles campaient près du parvis : souvent des femmes avec des enfants très jeunes, venues notamment du Burkina Faso, de Côte d’Ivoire, du Sénégal ou du Mali.

    [Après 3 semaines de campement...] Lundi, la #mairie_de_Paris avait réclamé une opération de mise à l’abri de ces familles installées là pour demander une solution d’hébergement d’urgence. Il s’agit de la 24e opération en Ile-de-France depuis le début de l’année, avec au total 3 783 personnes prises en charge, précise le communiqué.

    #Paris #JO

  • #Orientation des migrants en région : des retours du terrain « de plus en plus inquiétants », faute de places dans l’#hébergement_d’urgence

    Des opérateurs craignent que la politique de #désengorgement de l’#Ile-de-France, qui passe par la création de « #sas », des centres d’#accueil_temporaire, n’offre pas de #solution pérenne.

    Marie (son prénom a été modifié) est déjà repartie. Cette Angolaise est arrivée à Bordeaux aux alentours de la mi-juin, avec son garçon de 6 ans. Cela faisait trois ans qu’ils étaient logés dans un centre d’accueil pour demandeurs d’asile (#CADA) dans le 12e arrondissement de #Paris.

    Courant avril, les gestionnaires de l’établissement ont commencé, selon Marie, à expliquer à certains des occupants – ceux qui avaient été #déboutés de leur demande d’asile ou qui avaient obtenu leur statut de réfugié – qu’ils devaient quitter les lieux, laisser la place à des personnes en cours de procédure. Ils leur ont proposé d’aller en région, à Bordeaux et en banlieue rennaise, dans des #centres_d’accueil temporaires.

    Certains ont refusé. Marie, elle, a été « la dernière à [se] décider à partir », sous la « #pression ». On lui avait fait miroiter une scolarisation pour son fils – déjà en CP à Paris – et un hébergement. Elle a vite déchanté. « On a pris mes empreintes à la préfecture et donné un récépissé pour une demande de réexamen de ma demande d’asile alors que je ne souhaitais pas faire cela, explique-t-elle. Je n’ai pas d’éléments nouveaux à apporter et je risque une nouvelle OQTF [obligation de quitter le territoire français]. On m’a expliqué que sans ça, je n’aurais pas le droit à un logement et que le 115 [l’#hébergement_d’urgence] à Bordeaux, c’est pire qu’à Paris, qu’on nous trouve des hébergements pour deux jours seulement. » Marie n’a pas hésité longtemps. Revenue à Paris, elle « squatte » désormais chez une amie. La semaine, elle envoie son fils au centre de loisirs tandis qu’elle fait des ménages au noir dans un hôtel. Tous les jours, elle appelle le 115 pour obtenir un hébergement. En vain.

    Cet exemple symbolise les difficultés du gouvernement dans sa politique d’ouverture de « sas ». Ces #centres_d’accueil_temporaire, installés en province, sont censés héberger des migrants qui se trouvent à la rue, dans des #hôtels_sociaux, des #gymnases ou encore dans les centres réservés aux demandeurs d’asile qui sont en cours de procédure.

    Approche discrète

    Cette politique, commencée début avril pour désengorger l’Ile-de-France – dont les dispositifs sont exsangues et plus coûteux pour le budget de l’Etat –, se veut pourtant innovante. Dix « sas » de cinquante places chacun doivent à terme ouvrir, dans lesquels les personnes transitent trois semaines au plus, avant d’être basculées principalement vers de l’hébergement d’urgence généraliste ou, pour celles qui en relèvent, vers le #dispositif_d’accueil des demandeurs d’asile. Ces « sas » reposent sur le #volontariat et, pour susciter l’adhésion, sont censés « permettre d’accélérer le traitement des situations des personnes dont l’attente se prolonge en Ile-de-France sans perspective réelle à court et moyen termes », défend, dans un courriel adressé au Monde, le ministère du logement.

    C’est ce dernier qui pilote désormais la communication autour du dispositif. Au moment du lancement de celui-ci, c’est le ministère de l’intérieur qui en avait présenté les contours. Un changement d’affichage qui n’est pas anodin. Dans un contexte sensible, où plusieurs projets de centres d’accueil pour migrants en région ont suscité des manifestations hostiles, voire violentes de l’extrême droite, les pouvoirs publics optent pour une approche discrète.

    Dans les faits, d’après les premiers éléments remontés et portant sur plusieurs centaines de personnes orientées, « 80 % sont des réfugiés statutaires et des demandeurs d’asile », le restant étant constitué de personnes sans-papiers, rapporte Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), qui chapeaute quelque 870 structures de lutte contre l’exclusion, dont les opérateurs de ces « sas » régionaux. « C’est un travail auprès des #sans-abri, migrants ou pas, ce n’est pas le sujet », martèle-t-on néanmoins au cabinet d’Olivier Klein, le ministre délégué au logement.

    « On est en train de planter le dispositif »

    Une posture qui agace Pascal Brice. Il dresse un parallèle avec la situation qui a prévalu à Saint-Brevin (Loire-Atlantique), où le maire (divers droite), Yannick Morez, a démissionné en dénonçant l’absence de soutien de l’Etat. L’édile avait été victime de menaces de mort et son domicile incendié dans un contexte de déménagement d’un CADA. « Il faut se donner les moyens politiques de réussir ce dispositif, or l’Etat n’assume pas sa politique d’accueil organisé et maîtrisé. Il fait les choses en catimini », regrette M. Brice. Les remontées du terrain seraient, en outre, « de plus en plus inquiétantes », assure le président de la FAS.

    Adoma, l’opérateur d’un « sas » de cinquante places dans le 10e arrondissement de Marseille, considère que ce dernier « joue son rôle ». « Nous en sommes au troisième accueil de bus et ça fonctionne. Nous avons la garantie que les gens ne seront pas remis à la rue », rapporte Emilie Tapin, directrice d’hébergement pour #Adoma dans la cité phocéenne, où ont jusque-là été accueillis une majorité d’hommes afghans en demande d’asile. Mais ailleurs, le manque de places d’hébergement d’urgence vers lesquelles faire basculer les personnes après leur passage en « sas » se dresse comme un sérieux obstacle.

    « Notre 115 est saturé et on a déjà des #squats et des #campements », s’inquiète Floriane Varieras, adjointe à la maire écologiste de Strasbourg. Une commune voisine, Geispolsheim, accueille un « sas ». « Sans création de places nouvelles, la tension sur l’hébergement d’urgence est tellement forte qu’on craint que le schéma vertueux qui visait à éviter que les personnes ne reviennent en région parisienne ne craque », signale à son tour la directrice générale de France terre d’asile, Delphine Rouilleault, qui s’occupe d’un « sas » près d’Angers.

    Le ministère du logement assure que 3 600 places ont été « sanctuarisées dans le parc d’hébergement d’urgence pour faciliter la fluidité à la sortie des structures d’accueil temporaires ». Ce qui sous-entend que ces orientations se feront à moyens constants.

    « On est en train de planter le dispositif, alerte Pascal Brice. Des gens sont orientés vers le 115 depuis les “sas” et remis à la rue au bout de quarante-huit heures. C’est insoutenable. Je me suis rendu dans plusieurs régions et, partout, l’Etat ferme des places d’hébergement d’urgence. Si les conditions perduraient, la FAS devrait à son plus grand regret envisager un retrait de ce dispositif. »

    La province ? « Tu ne peux pas bosser là-bas »

    Outre la question de l’hébergement, le succès des « sas » devait s’appuyer sur la promesse faite aux personnes d’une étude bienveillante de leur situation administrative. Sans parler franchement de régularisation, le ministère de l’intérieur avait assuré au Monde, en mars, qu’il y aurait des réexamens au regard du #droit_au_séjour. « Il y a un travail de conviction qui n’est pas encore installé », considère à ce stade Mme Rouilleault.

    Le Monde a rencontré plusieurs familles ayant refusé une orientation en #province, à l’image de Hawa Diallo, une Malienne de 28 ans, mère de deux filles, dont une âgée de 10 ans et scolarisée dans le 15e arrondissement. « J’ai beaucoup de rendez-vous à Paris, à la préfecture, à la PMI [protection maternelle et infantile], à l’hôpital, justifie-t-elle. Et puis le papa n’a pas de papiers, mais il se débrouille à gauche, à droite avec des petits boulots. »

    La province ? « Pour ceux qui sont déboutés de l’asile, ça ne sert à rien. Quand tu n’as pas de papiers, tu ne peux pas bosser là-bas », croit à son tour Brahima Camara. A Paris, cet Ivoirien de 30 ans fait de la livraison à vélo pour la plate-forme #Deliveroo. « Je loue un compte à quelqu’un [qui a des papiers] pour 100 euros par semaine et j’en gagne 300 à 400. C’est chaud, mais c’est mieux que voler. » Sa compagne, Fatoumata Konaté, 28 ans, est enceinte de quatre mois. Les deux Ivoiriens n’ont jamais quitté la région parisienne depuis qu’ils sont arrivés en France, il y a respectivement quatre et deux ans. Ils ont, un temps, été hébergés par le 115 dans divers endroits de l’Essonne. Depuis un an, « on traîne à la rue », confie Fatoumata Konaté. « Parfois, on dort dans des squats, parfois on nous donne des tentes. »

    Chaque nuit, rien qu’à Paris, un millier de demandes auprès du 115 restent insatisfaites. Lasses, le 6 juillet, plus d’une centaine de personnes en famille originaires d’Afrique de l’Ouest ont investi deux accueils de jour de la capitale tenus par les associations Aurore et Emmaüs et y ont passé la nuit, faute de solution. « La situation devient intenable, prévient le directeur général d’Emmaüs Solidarité, Lotfi Ouanezar. On ne résoudra rien si on ne change pas de braquet. »

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/17/orientation-des-migrants-en-region-des-retours-du-terrain-de-plus-en-plus-in

    #migrations #asile #réfugiés #France #hébergement #SDF #dispersion

    via @karine4