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  • La lanceuse d’alerte d’UBS reconnue comme « collaboratrice occasionnelle » de l’Etat - Page 1 | Mediapart
    https://www.mediapart.fr/journal/france/161118/la-lanceuse-d-alerte-d-ubs-reconnue-comme-collaboratrice-occasionnelle-de-

    Dans une décision hautement symbolique, le tribunal administratif de Paris a jugé que Stéphanie Gibaud avait bien collaboré avec l’administration et la justice française pour démasquer les pratiques de son ancien employeur. Et qu’elle pouvait donc être indemnisée comme telle, même si le montant octroyé est très faible : 3 000 euros, alors que la lanceuse d’alerte réclamait plusieurs millions d’euros, au nom des nombreux préjudices que sa position lui a causés.

    « Mme Gibaud a transmis au SNDJ, spontanément ou à la demande de ce service, divers renseignements et fichiers relatifs aux activités de la société UBS France, écrit le juge. Les renseignements recueillis et exploités par le SNDJ avec le concours de Mme Gibaud ont permis aux enquêteurs de comprendre le fonctionnement des relations entre les entités françaises et suisses de la société en cause, ainsi que les conditions d’organisation des événements. » L’ancienne salariée de la banque peut donc être à juste titre considérée comme un « collaborateur occasionnel du service public » (COSP).

    De ce fait, le tribunal a jugé que « les préjudices que Mme Gibaud a subis en raison de cette collaboration doivent être intégralement réparés par l’administration ». Sur le principe, c’est une énorme avancée pour la lanceuse d’alerte, qui n’a cessé depuis plusieurs années de demander que l’État la rétribue pour l’aide apportée à la justice, alors même que son action lui a causé de lourds préjudices (et l’a conduite brièvement à faire de la politique aux côtés de Nicolas Dupont-Aignan).
    C’est cette ligne d’argumentation qu’a balayée le tribunal administratif. Belle victoire symbolique. « Le statut de COSP procure à Stéphanie Gibaud la protection fonctionnelle de l’État, qui doit protéger ses agents contre les menaces, violences, voies de faits, injures, diffamations ou outrages dont ils font l’objet. C’est la première fois que les juges appliquent le statut jurisprudentiel de collaborateur occasionnel du service public à un lanceur d’alerte », se réjouit dans un communiqué son avocat Antoine Reillac.

    Pour autant, la décision ne satisfera pas Stéphanie Gibaud sur le plan matériel. L’État a été condamné à lui payer seulement 3 000 euros, au titre du préjudice moral subi, « à raison de la situation de stress causée par sa collaboration au service public pendant son activité professionnelle, entre les mois de juin 2011 et janvier 2012 ». Mais le tribunal a jugé que cette collaboration n’avait pas entraîné son licenciement, dont la procédure avait démarré dès 2009, ni les conséquences négatives liées à la publicité de son action en tant que lanceuse d’alerte.

  • Evasion fiscale : le procès en diffamation entre UBS et son ex-responsable marketing attendra

    http://www.lemonde.fr/police-justice/article/2017/02/02/evasion-fiscale-le-proces-en-diffamation-entre-ubs-et-son-ex-directrice-mark

    Le tribunal correctionnel de Paris a mis en délibéré au 9 mars sa décision sur un potentiel sursis à statuer, dans l’attente des conclusions sur les soupçons de fraude fiscale de la banque.

    Cela devait être le procès UBS avant le procès. Stéphanie Gibaud avait rendez-vous avec son ancien employeur devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris, jeudi 2 février. En cause, des passages de son livre, La Femme qui en savait trop, dans lequel l’ex-responsable marketing de la filiale française décrit les pratiques d’évasion fiscale présumée de la banque. « Diffamation, » accuse UBS.

    Son ex-salariée licenciée en 2012 y raconte avec force détails les soirées, golfs et autres « somptueux pince-fesses » qu’elle organisait entre les chargés d’affaires d’UBS, suisses et français, et leurs riches clients ou ceux qu’ils tentaient de rabattre ; l’existence de « carnets du lait », dépeints comme une comptabilité parallèle de fonds collectés en France et transférés en Suisse, avec un objectif supposé : sauter la case impôt ; les documents qu’elle a refusé de faire disparaître, en 2008, après une perquisition dans le bureau de l’ancien numéro 2 d’UBS France, Patrick de Fayet.

    Démarchage illicite, faux comptes, destruction de preuves, harcèlement… UBS conteste presque tout du récit de celle assise, jeudi, sur le banc des prévenus.

    La présidente de la 17e chambre reprend son souffle et tente de faire le point, « sereinement », sur « un dossier qui part un peu dans tous les sens ». Car elle se heurte à un problème majeur : pour comprendre l’affaire de diffamation qui l’occupe aujourd’hui, elle doit se plonger dans les soupçons de fraude fiscale, « fondés ou pas, l’histoire le dira à la fin ». Et l’histoire est justement loin d’être tranchée judiciairement.
    Après quatre ans d’enquête menée par le juge Daïeff, le parquet financier a requis en juin 2016 le renvoi de la banque suisse, de sa filiale française et d’une demi-douzaine de ses anciens dirigeants devant le tribunal correctionnel pour « blanchiment aggravé de fraude fiscale » et/ou « démarchage bancaire illicite ».

    Patrick de Fayet, lui, avait décliné par courrier l’invitation à venir témoigner. Ses activités en province le retenaient. Surtout, ajoute l’ex-numéro 2, il est « partie prenante » dans l’« autre » affaire. Celle pour laquelle il a fait savoir, fin juin, son intention de plaider coupable.

  • Mediator, UBS, HSBC : les rudes lendemains des lanceurs d’alerte

    http://www.lemonde.fr/societe/article/2016/04/25/mediator-ubs-hsbc-les-rudes-lendemains-des-lanceurs-d-alerte_4908085_3224.ht

    Les nouveaux héros du quotidien se reconnaissent aux « bravo » et « merci » que leur adressent les passants dans la rue. A cet air ému et à leur allure un peu gauche lorsqu’ils montent sur scène pour recevoir un prix, une Marianne, voire le diplôme de citoyen de l’année. Ces honneurs les portent et les réconfortent, bien sûr. Mais une fois les estrades redescendues, les vivats évanouis, eux seuls, les « lanceurs d’alerte », connaissent l’envers du décor et les conséquences qu’a eues leur geste sur leur vie et celle de leurs proches.

    Difficile de savoir combien ils sont à payer le prix fort pour avoir dénoncé les dysfonctionnements dont ils ont été témoins dans leur travail. Mais le procès d’Antoine Deltour qui s’ouvre mardi 26 avril au Luxembourg aux côtés d’un de ses ex-collègues, Raphaël Halet, et du journaliste Edouard Perrin, est emblématique de ces lendemains vertigineux. Le père de famille de 30 ans risque dix ans de prison et plus d’un million d’euros d’amende. L’intérêt général retiendra que l’ancien auditeur de PricewaterhouseCoopers a permis la révélation d’un vaste système d’optimisation fiscale établi entre des multinationales et le Grand-Duché. Son ex-employeur bloque sur le vol de données et la divulgation de secrets d’affaires.

    L’après est souvent cauchemardesque, mais si c’était à refaire, la quasi-totalité des personnes interrogées par Le Monde recommenceraient. La question se pose d’autant moins chez ceux dont l’alerte constituait le cœur de métier.

    (...) L’usure psychologique s’installe

    La réplique fut violente. Passe encore le climat délétère des dix-huit mois qui ont précédé son licenciement. Nettement plus désagréables furent le rat éventré retrouvé sur le climatiseur de sa voiture, les mots sur le pare-brise – « Si tu vas trop loin, on sait où tes enfants vont à l’école » –, son domicile visité, et ces « personnes, dans la rue, qui vous observent en regardant leur montre ». La banque niera toujours être à l’origine de telles intimidations. Hasard ou pas, son ex-collègue Stéphanie Gibaud, qui, elle aussi, a contribué à dénoncer ce système d’évasion fiscale, a retrouvé la porte de son appartement trois fois grande ouverte le matin. Depuis, elle vit avec un chien.

    A mesure que la menace s’éloigne, l’usure psychologique s’installe. Le bras de fer entre Nicolas Forissier et son ancien employeur dure depuis neuf ans. Certes, les 300 000 euros gagnés aux prud’hommes marquent une première victoire, mais UBS a fait appel. « Je ne manque de rien, j’ai un toit, un chauffage, mais ma vie est réduite à sa plus stricte simplicité. Tout mon salaire passe en frais d’avocats : 6 000, 7 000 euros par trimestre. Et je n’ose imaginer si je perds en appel. »
    L’affaire UBS a rapporté des milliards d’euros à l’Etat grâce à la régularisation de milliers de comptes, mais elle a détruit une femme. Stéphanie Gibaud, licenciée il y a quatre ans, est toujours sans travail.
    « J’ai mis du temps à reprendre connaissance. Maintenant, qui voudrait de celle qui a parlé ? », se désole l’ex-responsable événementiel d’UBS France.

    Aujourd’hui, elle vit des minima sociaux : 450 euros par mois quand on est mère célibataire de deux ados, c’est maigre. Au risque de lasser, elle rappelle les heures passées à renseigner les douanes. Ne comprend pas l’incapacité de l’Etat à indemniser le préjudice. Ses lettres à Bercy, au président de la République, au garde des sceaux, au défenseur des droits sont restées vaines.

    La famille trinque

    Le lanceur d’alerte échappe rarement à une campagne de discrédit. « Après quinze et vingt ans de travail sans histoire à Monaco, nous serions “des gestionnaires indélicats” », soupirent Céline Martinelli et Mathieu Chérioux, deux des trois anciens employés de la banque Pasche qui, en 2012, ont signalé des remises d’espèces douteuses. Ils ont été mis à la porte un an plus tard. « Les conséquences sont raides. Alors qu’on aurait très bien pu fermer les yeux, ne rien dire et partir chercher ailleurs, nous voilà sans emploi » – aucune banque n’a répondu à leurs lettres de candidatures –, « déboutés en premier instance » par le tribunal du travail et avec « des amis monégasques qui nous ont subitement tourné le dos ».

    Inévitablement, la famille trinque. A la maison, le sujet prend toute la place. Vos amis vous trouvent obsessionnel. « Alors que c’est souvent eux qui, par sympathie, demandent des nouvelles de “votre” affaire », rectifie Daniel Ibanez, organisateur du Salon du livre des lanceurs d’alerte, et ardent détracteur du tunnel Lyon-Turin. Amélie, la petite dernière de la pneumologue Irène Frachon, ne veut plus entendre parler du Mediator ni des laboratoires Servier qui lui ont volé sa mère durant six années de sa vie. Hervé Falciani, l’informaticien de HSBC parti en 2008 avec des listes d’évadés fiscaux, et désormais conseil « du gouvernement grec, de municipalités Podemos en Espagne, mais aussi de Chypre », vit toujours sous protection en Espagne.

    Le couple d’Olivier Thérondel n’a pas résisté. Lui, c’est l’ancien fonctionnaire de Tracfin, la cellule antiblanchiment de Bercy, qui s’agaçait sur un blog de la lenteur avec laquelle sa direction gérait l’affaire Cahuzac. « Lorsque j’ai reçu ma convocation pour “violation du secret professionnel”, j’ai voulu médiatiser. Pendant des mois, j’ai été absorbé par mon combat, alors que mon amie, le politico-financier c’était pas son univers. » Condamné à deux mois de prison avec sursis, mais sans inscription au casier, il est toujours aux douanes. Il vit mal sa perte d’anonymat et, lors de ses rendez-vous, évite de donner son nom le premier soir de peur que la jeune femme ne rappelle pas.

    « Il faut casser le mythe du lanceur d’alerte assoiffé de média. En réalité, il rêve d’être tranquille chez lui », confirme Daniel Ibanez.
    Bernard ne souhaite d’ailleurs ni que l’on donne son nom de famille ni que l’on s’étende trop sur sa nouvelle vie de libraire, pour préserver sa sérénité retrouvée. Il y a dix ans, directeur financier dans le parapétrolier, il s’était ému auprès de sa hiérarchie du système de contournement de l’impôt de la société. Pressions, intimidations, rumeurs, procès, il a tout subi, et n’a jamais retrouvé de travail dans sa branche.

    Seul, on ne tient pas

    Le seul à regretter son geste est l’ex-commandant de police Philippe Pichon, pourfendeur du fichier de traitement des infractions STIC et de ses données approximatives conservées plus que de raison. Face à la sourde oreille de sa hiérarchie, il se tourne vers la presse. Le site d’information Bakchich réalise un joli coup en publiant, en 2008, les fiches de Johnny Hallyday et Jamel Debbouze, mais le ministère de l’intérieur n’apprécie guère. L’indélicat est mis à la retraite d’office et n’a pu conserver sa maison que grâce à la solidarité familiale. En 2014, le médiateur de la police nationale a plaidé pour sa réintégration. Lui qui rêve « de contact humain », et vivote de missions de conseil juridique, l’attend toujours.

    Un jour, pourtant, les procédures judiciaires s’éteignent et l’ennemi qui a hanté vos nuits disparaît. Foi de Denis Robert, l’homme qui s’est battu dix ans contre la chambre de compensation luxembourgeoise Clearstream. Antoine Deltour ne fut pas le premier à lui demander conseil. Seul, on ne tient pas, confirme Denis Robert. Lui a supporté la quarantaine de procédures initiées dans cinq pays grâce à l’ingéniosité d’une bande de copains qui a tout osé – vendre des tee-shirts, transformer un mauvais vin en cuvée « Denis Robert », organiser un concert à la Cigale – pour payer les plus de 100 000 euros d’honoraires d’avocats.

    Antoine Deltour n’a pas encore cette notoriété mais son comité a déjà récolté 18 000 euros. Après l’émission « Cash investigation » sur les « Panama papers », Stéphanie Gibaud a, elle, reçu 12 000 euros de dons anonymes. En attendant qu’une loi cohérente et adaptée protège les lanceurs d’alerte en France, la société civile soutient comme elle peut ses modèles du moment.

  • Affaire UBS : le policier viré parce qu’il en savait trop

    http://www.lemonde.fr/evasion-fiscale/article/2016/02/19/affaire-ubs-le-policier-vire-parce-qu-il-en-savait-trop_4868161_4862750.html

    Au-delà d’un système sophistiqué de fraude fiscale généralisée, l’affaire UBS met en lumière le rôle trouble joué en coulisses par le contre-espionnage français, entre 2009 et 2012. La Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, devenue DGSI) avait découvert, au moins dès 2009, soit deux ans avant que la justice n’en soit informée, tous les détails du processus frauduleux mis en place, en France, par le géant bancaire suisse pour approcher de riches Français et les convaincre d’ouvrir un compte en Suisse. Pourtant la DCRI, à l’époque très proche du pouvoir politique, s’est bien gardée de saisir l’autorité judiciaire. Quant à l’enquêteur susceptible de mettre au jour le scandale, il a été limogé en mai 2012…

    Tout commence au printemps 2009 lorsque Hervé Preuilh, capitaine de police, affecté depuis un an à la sous-direction « K », chargée de la protection du patrimoine économique à la DCRI, est alerté par une connaissance, Nicolas Forissier, cadre à UBS France, de l’existence d’un mécanisme de fraude fiscale transfrontalier élaboré par la banque. Le capitaine rédige immédiatement une note dans laquelle il écrit, déjà, que « pour pouvoir gérer les opérations clients dissimulées par ce stratagème transfrontalier dit “transborder”, le dirigeant d’UBS France SA tenait un listing informatique et manuel dit “carnet du lait” dans un fichier informatique “Vache”. »(...)

    « Confidentiel Défense »

    Pour le fonctionnaire de police, les ennuis commencent. « M. Bellemin-Comte, rapportera-t-il au juge, m’indique déjà connaître les mécanismes de fraude fiscale que pratique UBS ainsi que sa connaissance de l’existence des fichiers “carnet du lait” et “Vache”. » Pour le moins étonné, M. Preuilh pense alors se mettre en retrait du dossier : « Ma hiérarchie connaissant le sujet, pour ne pas aller au-delà de mes attributions professionnelles et éventuellement ne pas empiéter sur le travail d’un autre service dans le domaine de la recherche financière, je n’insiste pas davantage. »

    Les mois suivants néanmoins, le policier continue d’entretenir le contact avec sa source chez UBS. Durant cette période, la DCRI, effectivement très bien informée, produit plusieurs notes de renseignement, classées « Confidentiel Défense », d’une grande précision. Le 14 avril 2009, le contre-espionnage décrit par exemple sur dix pages un « système d’évasion fiscale structuré », signalant même que certains de ses aspects ont fait l’objet d’une « dénonciation à la Commission bancaire par l’ancien directeur de l’agence UBS de Strasbourg. »

    La note affirme que « UBS France s’est livré à des démarchages massifs de ses clients afin de leur proposer un système d’évasion fiscale à destination de la Suisse » et évoque un rapport d’audit interne à la banque, « remis à la direction d’UBS France le 24/09/2007 » et soulignant des « anomalies », notamment un écart considérable « entre les chiffres fournis par le contrôle de gestion et ceux enregistrés par le département commercial, (...) indice probant d’une activité occulte d’UBS France SA ». « Le système d’évasion fiscale mis à disposition des clients français d’UBS était directement organisé depuis la Suisse », conclut la note, qui contient nombre d’indications techniques, relatives au mécanisme délictueux, parfaitement détaillées.

    « Sujet sensible »

    D’autres notes de renseignement tout aussi bien informées seront produites les mois suivants par la DCRI, qui écrit ainsi, le 24 septembre 2009 : « Il semble se confirmer que de nombreux pays ont été la cible d’un système d’évasion fiscale organisé par UBS depuis la Suisse. Outre la France et les Etats-Unis, on peut ainsi citer la Grande-Bretagne, l’Italie, le Canada et la Turquie. »

    Mais au sein de la DCRI, « l’activisme » du capitaine Preuilh, qui continue à s’intéresser au dossier et à échanger avec sa source, semble indisposer. Le 24 novembre 2009, il est convoqué par son chef. « M. Bellemin-Comte me reproche immédiatement de ne pas lui avoir indiqué que je connaissais un cadre d’UBS France », rapportera M. Preuilh au juge. Au cours de l’entretien, son supérieur aurait même mis « en évidence sa connaissance d’échanges de conversations » qu’il aurait eues avec Nicolas Forissier : « Il cite mot pour mot certaines des phrases que j’ai tenues. Il insiste également pour connaître la date à laquelle M. Forissier m’a informé de la fraude, ce qui semblait avoir une importance pour lui, mais je ne sais pas laquelle. A la fin de l’entretien, M. Bellemin-Comte me demande de ne plus revoir M. Forissier et de ne plus travailler sur ce sujet », affirme encore M. Preuilh. « Le sujet UBS et fraude fiscale était déjà connu de ma sous-direction. (...) Le sujet était suffisamment sensible pour qu’on me demande de ne plus travailler dessus. J’ajoute que lors de l’entretien du 24 novembre, à aucun moment M. Bellemin-Comte ne m’a demandé ce que je connaissais réellement de la fraude fiscale », révèle-t-il.

    L’après-midi même, afin de se « couvrir », le capitaine Preuilh rédige un courrier à l’intention de son supérieur dans lequel il rappelle avoir découvert, grâce à « un ancien cadre de la banque UBS Paris », « un système occulte de fraude ou d’évasion fiscale pour les clients français fortunés ». Evoquant le listing informatique support du système occulte, il conclut à l’adresse de M. Bellemin- Comte : « J’avais eu l’occasion de m’entretenir avec vous sur ce “carnet du lait” et la fraude commise par UBS, à l’époque vous m’aviez indiqué que vous aviez déjà connaissance de ce mécanisme. »

    Mis sur la touche

    Marginalisé à la DCRI, le capitaine Preuilh, qui voit sa notation baisser, sera finalement mis sur la touche juste avant le second tour de l’élection présidentielle de 2012. Son éviction lui est notifiée par le chef du contre-espionnage, Bernard Squarcini. L’homme de confiance de Nicolas Sarkozy dans les services indique ainsi au directeur des ressources de la police nationale, le 4 mai 2012, qu’il « ne peu[t], pour des raisons de sécurité, maintenir en fonctions » à la DCRI le capitaine Preuilh.

    Au juge Daïeff, ce dernier confiera : « Je pense que ce qui m’était reproché, c’est qu’ayant, à la différence de la plupart de mes collègues, travaillé en police judiciaire, je me préoccupais de la transmission à l’autorité judiciaire du renseignement, lorsqu’il avait une nature pénale. Or, autant dans le terrorisme il y a une pratique de judiciarisation du renseignement, autant dans le domaine économique je n’en connais pas à la DCRI. »

    L’attitude de la DCRI à l’époque est pour le moins intriguante. Le juge a d’ailleurs saisi, en 2013, une note remise par un collectif d’officiers de renseignement et de police à Yann Galut, député socialiste du Cher, qui travaillait sur l’évasion fiscale. « Pourquoi, après avoir découvert cette infraction pénale [commise par UBS], la sous-direction K de la DCRI ne l’a-t-elle pas dénoncée au procureur de la République ? Pourquoi la sous-direction K a-t-elle axé son travail de surveillance sur les cadres d’UBS qui dénonçaient le système de fraude plutôt que sur ceux à l’origine du système ? », se demandaient ces policiers. En d’autres termes, craignait-on la révélation de certains noms, comme celui de Valeria Bruni-Tedeschi, la belle-sœur de Nicolas Sarkozy, ou celui de Liliane Bettencourt ?

    Enquête préliminaire en mars 2011

    Ces interrogations font écho à une affaire similaire, le scandale HSBC : initiée par Le Monde, l’opération « SwissLeaks » a notamment permis de révéler que le patron de la Direction nationale des enquêtes fiscales (DNEF), Roland Veillepeau, avait été écarté, exactement à la même période, au cours de l’été 2009, pour s’être montré, lui aussi, beaucoup trop curieux. Parmi les bénéficiaires d’avoirs occultes à HSBC Genève, figuraient par exemple... Liliane Bettencourt et son gestionnaire de fortune, Patrice de Maistre. Des noms que l’on retrouve dans l’affaire UBS : c’est en effet via des comptes occultes détenus chez UBS AG, à Genève, via la Fondation Schueller-Bettencourt ou la holding Clymène – deux structures gérées par M. de Maistre – que furent rapatriées, en France, des sommes considérables. Certaines d’entre elles, au cœur de l’affaire Bettencourt, bénéficièrent à des personnalités politiques de droite...

    Une chose est certaine, s’agissant d’UBS, c’est seulement en mars 2011 que le parquet de Paris, saisi d’une dénonciation de l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) – l’autorité administrative indépendante chargée de surveiller l’activité des banques et des assurances en France –, a ouvert une enquête préliminaire sur des faits que le contre-espionnage connaissait pourtant depuis des années.
    Evincé de la DCRI par le pouvoir socialiste dès mai 2012, M. Squarcini a assuré au Monde ne pas avoir « conservé un souvenir particulier de cette affaire UBS, qui ne devait donc pas être très sensible ! Je suis certain en revanche n’avoir jamais reçu la moindre instruction ni subi aucune pression de qui que ce soit. De manière générale, dans le domaine économique, lorsque nous découvrions des éléments concrets, ils étaient transmis à Tracfin », l’organisme anti-blanchiment de Bercy.

    S’agissant du cas de M. Preuilh, M. Squarcini a indiqué : « Son nom ne me dit rien du tout. Si j’ai écrit qu’il ne pouvait rester à la DCRI pour des motifs de sécurité, cela signifie qu’il avait perdu son habilitation secret-défense à la demande de son supérieur hiérarchique, M. Bellemin-Comte. Lui seul pourrait vous dire pourquoi. » Sollicité par Le Monde, M. Bellemin-Comte a invoqué ses actuelles fonctions de coordinateur national du renseignement à l’Elysée, estimant qu’elles lui interdisaient de s’exprimer.

  • http://www.franceinfo.fr/economie/femmes-d-exception/stephanie-gibaud-ex-responsable-marketing-chez-ubs-j-ignorais-que-c-etait

    Stéphanie Gibaud, ex-collaboratrice de la filiale française de la banque suisse UBS, auteur de « La femme qui en savait trop » sur les coulisses de l’évasion fiscale en Suisse, est une lanceuse d’alerte. Elle a trouvé le courage immense de faire face, seule, à un système supposé d’évasion fiscale vers la Suisse, organisé au sein d’UBS France.

  • Ces 600 milliards qui manquent à la France | Le nouvel Economiste
    http://www.lenouveleconomiste.fr/ces-600-milliards-qui-manquent-a-la-france-15518

    les cadres d’UBS France évaluent à quelque 85 millions d’euros le montant des avoirs qui ont été soustraits par leur banque au fisc français, chaque année, en moyenne, depuis l’an 2000. “En dix ans, ce sont environ 850 millions d’euros d’avoirs qui ont échappé à l’impôt, grâce à nos seuls services d’évasion fiscale”, affirme l’un d’entre eux. Beth, qui travaille au cœur du groupe UBS, à Lausanne, confirme les estimations de son collègue parisien. Elle fait remarquer que la filiale française enregistre un lourd déficit comptable structurel depuis sa création en décembre 1998, à hauteur d’environ 560 millions d’euros, ce qui devrait suffire à alerter les autorités publiques de contrôle des banques.

    #corruption

  • Une évasion fiscale massive continue malgré les promesses gouvernementales | Vous avez dit sécurité ?
    http://insecurite.blog.lemonde.fr/2012/04/03/une-evasion-fiscale-massive-continue-malgre-les-promesses-go

    600 milliards d’euros : c’est la vertigineuse somme cachée depuis des décennies dans les paradis fiscaux, soit près de 10% du patrimoine des Français. Au terme d’un important travail de recoupement des sources, l’auteur affirme que depuis 2000, UBS France aurait soustrait en moyenne 85 millions d’euros au #fisc français chaque année. Il estime ainsi à 590 milliards d’euros l’ensemble des avoirs français dissimulés dans les #paradis_fiscaux dont une partie en Suisse. Il conclut aussi que « chaque année, plus d’un tiers de l’impôt potentiel sur les revenus français – soit près de 30 milliards d’euros – n’est pas perçu, rien que par la dissimulation de ces avoirs et des produits financiers dans les paradis fiscaux ».

    #fraude_fiscale #passager_clandestin