• Plusieurs millions de nouveaux réfugiés et déplacés climatiques en 2019

    Un porte-parole du Haut-commissariat aux réfugiés (HCR) de l’ONU a déclaré mercredi que des millions de nouveaux déplacés et réfugiés climatiques étaient apparus en 2019, dont près de 750 000 personnes pour la seule Somalie, en proie à d’intenses aléas climatiques.

    “Le bruit du vent nous a réveillés en pleine nuit. Quelques instants plus tard, de l’eau a commencé à entrer chez nous. Nous avons seulement réussi à attraper nos enfants avant de nous enfuir vers une zone surélevée.” Rafael Domingo, un père de quatre enfants, a tout perdu lors du passage du cyclone Idaien mars dernier au Mozambique. Comme lui, 73 000 personnes se sont retrouvées sans-abri, ne laissant d’autre choix que de fuir les zones sinistrées, ont raconté de nombreux témoins à l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

    Qu’ils changent simplement de région ou qu’ils quittent leur pays après une catastrophe naturelle, ces hommes et ces femmes incarnent une catégorie de migrants dont on parle peu : les déplacés et les réfugiés climatiques. Selon le Conseiller spécial sur l’action pour le climat du HCR, Andrew Harper, “rien que sur la première moitié de l’année, les tempêtes, les inondations et autres catastrophes ont provoqué plusieurs millions de nouveaux déplacements”.

    Dans un discours alarmant prononcé à la COP 25 de Madrid, mercredi 11 décembre, le porte-parole onusien explique que “les changements climatiques amplifient la fréquence et l’intensité des catastrophes naturelles et qu’ils contribuent à fragiliser les populations et à déclencher des conflits”. Il estime par conséquent que “davantage de personnes seront menacées de déplacement à moins qu’une action urgente ne soit prise.”

    Outre les catastrophes naturelles, Andrew Harper s’est dit “particulièrement préoccupé” par l’épuisement des ressources naturelles, la diminution des rendements agricoles ou encore la pénurie de bétail qui deviennent “des multiplicateurs de menaces de conflit et d’instabilité pouvant conduire à des crises humanitaires et à de nouveaux déplacements, à la fois en interne et au-delà des frontières.”

    En première ligne de ces menaces climatiques, la région du Sahel voit déjà des effets dévastateurs. “En Somalie, un pays hautement vulnérable aux changements climatiques, plus de 746 000 personnes ont été déplacées au sein du pays cette année à cause de l’intensification de la sécheresse, mais aussi des inondations monstres et des conflits”, souligne Andrew Harper.

    Dans les régions fragiles, souvent frappées par les catastrophes naturelles, les déplacés parviennent rarement à retrouver leur ancienne vie. “Beaucoup d’entre nous ne pourrons jamais rentrer chez eux. La sécheresse en Somalie revient tout le temps. Les habitants n’ont pas assez de temps ou de moyens pour se remettre sur pieds à chaque fois”, a expliqué à l’OIM Halima, une mère de trois enfants déplacée en Somalie à cause de la sécheresse.
    Plus de 250 millions de réfugiés climatiques en 2050
    Dans son dernier rapport sur la paix dans le monde paru en juin, l’Institute for Economics and Peace, un think tank australien, estimait à 18 millions le nombre de personnes forcées à quitter leur foyer à cause d’une catastrophe naturelle. Cela correspond à plus de 60% de l’intégralité des déplacements dans le monde en 2017.
    Les auteurs du même rapport notent également qu’actuellement, près d’un milliard de personnes vivent dans des zones “hautement à très hautement” exposées aux aléas climatiques. Ainsi, des millions de personnes risquent de se déplacer ou migrer dans un futur proche. La Banque mondiale estime que d’ici 2050, on dénombrera 143 millions de migrants climatiques originaires d’Afrique sub-saharienne, d’Asie du sud-est et d’Amérique latine. Au total, ils pourraient même dépasser les 250 millions à l’échelle de la planète, selon les prévisions de l’ONU.

    Depuis la COP 25 Madrid, le HCR a appelé à “une action urgente” notamment en mettant en place des systèmes de prévision et d’alerte précoce améliorés ainsi que des stratégies de réduction des risques. Il s’agit également “d’intensifier les efforts d’adaptation et de résilience” en diversifiant, par exemple, les sources de revenus des populations fragiles qui dépendent souvent entièrement de l’agriculture ou de la pêche, par exemple.

    L’agence onusienne appelle également les pays accueillant des réfugiés à instaurer un véritable cadre de protection pour les populations déplacées par le climat. À ce jour, les catastrophes naturelles et autres événements dus au réchauffement de la planète ne constituent pas un argument permettant de demander l’asile, les déplacés environnementaux n’ont d’ailleurs aucun statut juridique défini comme c’est le cas pour les réfugiés. La Suède fait toutefois figure de pionnière en la matière en reconnaissant depuis 2005, le droit à la protection pour les personnes victimes de catastrophes environnementales. Depuis 2009, une quarantaine de pays africains a également ratifié la Convention de Kampala sur la protection et l’assistance des déplacés environnementaux inter-Afrique.

    Les questions climatiques occuperont une place de choix à l’occasion du tout premier Forum mondial sur les réfugiés, les 17 et 18 décembre prochains à Genève, puisqu’il s’agira de l’un des six thèmes fondamentaux discutés et pouvant, comme l’espère Andrew Harper du HCR, donner lieu à des actions concrètes dès 2020.

    https://www.infomigrants.net/fr/post/21507/plusieurs-millions-de-nouveaux-refugies-et-deplaces-climatiques-en-201
    #IDPs #réfugiés_climatiques #réfugiés_environnmentaux #déplacés_internes #asile #migrations #réfugiés #climat #prévisions #Somalie #sans-abri #catastrophe_naturelle #changements_climatiques #Sahel #COP_25 #risques #protection #statut #Convention_de_Kampala

    Lien entre changements climatiques et #conflits :

    Outre les catastrophes naturelles, #Andrew_Harper s’est dit “particulièrement préoccupé” par l’épuisement des ressources naturelles, la diminution des rendements agricoles ou encore la pénurie de bétail qui deviennent “des multiplicateurs de menaces de conflit et d’#instabilité pouvant conduire à des #crises_humanitaires et à de nouveaux déplacements, à la fois en interne et au-delà des frontières.”

    #guerre

    • Asile : réfugié climatique, un statut non reconnu mais qui compte

      L’ONU prévoit 250 millions de réfugiés climatiques d’ici à 2050 dont une grande partie sera issue d’une Afrique sub-saharienne pas assez résiliente face à l’intensification des catastrophes naturelles. Le phénomène pourrait amplifier les départs de migrants vers l’Europe, sauf que le statut de réfugié climatique n’y est pas reconnu.

      Sécheresses, inondations, ouragans : les épisodes météorologiques dévastateurs sont de plus en plus fréquents et de plus en plus intenses sous l’effet du changement climatique. Si aucune région du monde n’est épargnée, toutes n’ont pas la même propension à la résilience ni les mêmes capacités de reconstruction.

      En Afrique sub-saharienne, au Moyen-Orient ou en Asie, des pans entiers de population sont déjà contraints de quitter leur région ou même leur pays d’origine pour tenter de tout recommencer ailleurs. Ce sont des “réfugiés climatiques”.

      Si le terme est apparu pour la première fois en 1985 dans un rapport du Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE), il n’existe à ce jour dans le monde aucun statut juridique pour ces déplacés environnementaux. La Suède fait toutefois figure de pionnière en la matière en reconnaissant depuis 2005, le droit à la protection pour les personnes victimes de catastrophes environnementales. Depuis 2009, une quarantaine de pays africains a également ratifié la Convention de Kampala sur la protection et l’assistance des déplacés environnementaux inter-Afrique. Et plus récemment, début novembre, la Nouvelle-Zélande a annoncé se pencher sur la création d’un visa spécial pour les réfugiés climatiques du Pacifique.

      Reste que pour la plupart des pays de la planète, le changement climatique ne peut justifier une demande d’asile. En France, notamment, “ce n’est pas un argument recevable en tant que tel, mais il peut être pris en compte et ajouté au dossier dans certains cas”, indique une porte-parole de France Terre d’Asile, contactée par InfoMigrants. “Si le changement climatique vous force, par exemple, à partir de chez vous pour une région où votre ethnie est mal acceptée ou menacée, l’argument pourra être entendu. Mais on ne reconnaît que ce qui est de la main de l’Homme. Le climat ne peut être utilisé que comme un élément de compréhension au dossier”, précise l’ONG.

      “Une crise migratoire en Europe ? Attendez de voir dans 20 ans...”

      Selon les estimations de l’ONU, le monde comptera au moins 250 millions de réfugiés climatiques d’ici 2050. En moins de 10 ans, les dangers liés au climat “déplacent en moyenne 21,7 millions de personnes par an, soit 59 600 par jour”, souligne Steve Trent, directeur exécutif de la Fondation pour la justice environnementale (EJF), dans un rapport publié début novembre. “Si l’Europe pense avoir un problème avec la crise migratoire actuelle, attendez de voir dans 20 ans quand les conséquences du changement climatique forcera des millions de personnes à quitter l’Afrique”, enchérit le général Stephen Cheney, retraité de l’armée américaine, cité par le rapport.

      “Il faut regarder les choses en face : l’Afrique a une population jeune et de plus en plus éduquée. L’enseignement est dispensé dans des langues comme l’anglais, le français, l’espagnol, le portugais… alors bien sûr, l’Europe est une meilleure destination aux yeux de ces jeunes [...] Et il est impossible d’arrêter cette migration”, explique Ibrahim Thiaw, directeur exécutif de l’agence pour l’environnement de l’ONU, joint à Nairobi par InfoMigrants.

      Parmi les régions les plus vulnérables : le Sahel, jusqu’à la Somalie, affirme-t-il, des régions où la production agricole est cruciale. Elle représente par exemple 30% du produit intérieur brut en Sierra Leone, au Liberia ou en Centrafrique. Dix-sept des vingt pays les plus dépendants à l’agriculture au monde se trouvent en Afrique sub-saharienne.

      Le changement climatique, un amplificateur des conflits

      “En combinant l’accroissement démographique -l’Afrique comptera 2 milliards d’habitants en 2050- à la dégradation des ressources naturelles et leur mauvaise gestion, la seule issue possible c’est la migration, poursuit Ibrahim Thiaw. Les déplacés climatiques sont un phénomène déjà présent, qui s’accentue de jour en jour sans que l’on puisse véritablement le quantifier car beaucoup de paramètres entrent en jeu et nous n’avons même pas de définition claire de ce qu’est un réfugié climatique.”

      Un statut qui pourrait ne jamais être reconnu internationalement, bien que le rôle du changement climatique dans les conflits actuels soit démontrable. “En Syrie, on comptait déjà 1,3 et 1,5 million de personnes fuyant la sécheresse avant même que la guerre ne commence. Personne ne dit que le changement climatique est la raison du conflit syrien, mais il est à ne pas en douter un ‘amplificateur des menaces’ pouvant mener à des violences”, argue Steve Trent de l’EJF.

      Si Ibrahim Thiaw de l’ONU ne croit pas, pour l’heure, à une convention mondiale sur les réfugiés climatiques, il exhorte la communauté internationale mettre en place et appliquer des accords régionaux sur le modèle de la Convention de Kampala encore trop méconnue. Il encourage aussi les potentiels migrants à bien réfléchir à leur projet migratoire avant de se lancer aveuglément sur des routes souvent dangereuses à travers le désert, les forêts tropicales ou la Méditerranée. “Un pays comme l’Ouganda est très accueillant. Il n’y a pas de camp de réfugiés et ils sont exemplaires sur l’intégration”, conclut-il.

      https://www.infomigrants.net/fr/post/6031/asile-refugie-climatique-un-statut-non-reconnu-mais-qui-compte

    • Groundswell : Preparing for Internal Climate Migration

      This report, which focuses on three regions—Sub-Saharan Africa, South Asia, and Latin America that together represent 55 percent of the developing world’s population—finds that climate change will push tens of millions of people to migrate within their countries by 2050. It projects that without concrete climate and development action, just over 143 million people—or around 2.8 percent of the population of these three regions—could be forced to move within their own countries to escape the slow-onset impacts of climate change. They will migrate from less viable areas with lower water availability and crop productivity and from areas affected by rising sea level and storm surges. The poorest and most climate vulnerable areas will be hardest hit. These trends, alongside the emergence of “hotspots” of climate in- and out-migration, will have major implications for climate-sensitive sectors and for the adequacy of infrastructure and social support systems. The report finds that internal climate migration will likely rise through 2050 and then accelerate unless there are significant cuts in greenhouse gas emissions and robust development action.


      https://openknowledge.worldbank.org/handle/10986/29461
      #rapport

  • Les Personnes déplacées internes en #Afrique : repères juridiques et réalités. Contribution à l’étude de la #Convention_de_Kampala

    La migration est devenue, de nos jours, un sujet d’actualité dans le monde. En Europe, les débats sont passionnés et les politiques nationales deviennent de plus en plus restrictives en la matière. La forme de migration dite forcée est assurément multicausale et tous les experts s’accordent aujourd’hui à reconnaître la prégnance du phénomène du déplacement interne même si son impact médiatique demeure limité. Quantitativement, le nombre des déplacés internes est depuis longtemps nettement plus important que celui des demandeurs d’asile et réfugiés et les chiffres l’attestent amplement. Ainsi, la responsabilité internationale des réfugiés constituant une charge de plus en plus pesante pour quelques grands pays d’accueil reste malgré tout moins forte corrélativement à celle qui repose sur les États souvent sous-développés et donc pauvres à propos des déplacés internes. De nos jours, un éclairage était devenu nécessaire, vingt ans après l’adoption des Principes directeurs au niveau universel et neuf ans après celle de la Convention étudiée. La présente introspection est un plaidoyer en faveur du respect de leurs droits en forçant l’Union africaine à devenir beaucoup plus visible et plus entreprenante y compris sur le terrain. Étant donné que le déplacé interne d’aujourd’hui est aussi un potentiel demandeur d’asile ou un éventuel migrant, le sujet doit devenir une préoccupation majeure de la communauté internationale.


    https://www.publibook.com/les-personnes-deplacees-internes-en-afrique-reperes-juridiques-et-realite
    #IDPs #déplacés_internes #livre #réfugiés

    • La Convention de Kampala et le droit à ne pas être déplacé arbitrairement

      Les rédacteurs de la Convention de Kampala se sont largement inspirés des Principes directeurs relatifs au déplacement de personnes à l’intérieur de leur propre pays tout en tenant compte du contexte africain ; la reconnaissance du droit à ne pas être déplacé arbitrairement en est un exemple particulièrement patent.

      La Convention de l’Union Africaine sur la protection et l’assistance aux personnes déplacées en Afrique – la Convention de Kampala adoptée en 2009 – doit en grande partie son développement aux Principes directeurs relatifs au déplacement interne. Elle reflète les principes internationaux des droits de l’homme et du droit humanitaire tels que incarnées dans les Principes directeurs, mais elle intègre également différents aspects pertinents de normes provenant des mécanismes régionaux des droits de l’homme en vigueur en Afrique.

      C’est dans la reconnaissance du droit à ne pas être déplacé arbitrairement que la Convention de Kampala incarne le plus étroitement les Principes directeurs. Ce principe qui est au cœur-même de la protection des personnes déplacées à l’intérieur de leur propre pays (PDI), élève la protection relative au déplacement interne et transforme une considération éthique en une obligation juridique au sujet de laquelle il est possible de demander aux États de rendre des comptes. Quatre aspects principaux de ce droit sont couverts dans les Principes directeurs et, par extension, dans la Convention de Kampala.

      Premièrement, tout acte de déplacement doit être conforme au droit international. S’inspirant des Principes directeurs, la Convention de Kampala énumère les raisons pour lesquelles le déplacement est interdit aux termes du droit international, comme par exemple la discrimination visant à altérer la composition ethnique, ou la ségrégation religieuse ou raciale de la population. Elle rejette également l’utilisation du déplacement en tant qu’instrument de punition collective, le déplacement « issu de situations de violence ou de violations généralisées des droits de l’homme » – comme par exemple, la violence qui a fait suite aux élections de 2007 au Kenya et qui a entrainé des déplacements en masse – ainsi que tout déplacement pouvant être assimilé à un génocide, des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité.

      Alors que les Principes directeurs interdisent la mutilation et la violence sexospécifique à l’égard des PDI (Principe 11), la Convention de Kampala va plus loin et interdit les pratiques préjudiciables comme cause de déplacement. À cet égard, elle doit énormément au Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, relatif aux droits de la femme en Afrique (connu sous le nom de Protocole de la femme africaine[1]), un instrument qui va bien plus loin que d’autres traités internationaux dans le soutien et la promotion des droits reproductifs. Outre des circonstances dans lesquelles des filles fuient la menace des mutilations génitales féminines et de mariages d’enfants, forcés, ou précoces, dans certaines parties de l’Afrique le repassage des seins, une pratique qui provient en partie de la croyance selon laquelle aplatir les seins des jeunes filles atténueraient leur tendance à la promiscuité, est également une cause de fuite. En interdisant ce type de pratiques préjudiciables comme causes de déplacement, la Convention de Kampala reflète très clairement le contexte africain.

      La Convention de Kampala permet certains types de déplacements pour des motifs spécifiques, dans les situations de conflit armé, par exemple, pour des impératifs militaires, ou lorsqu’il s’agit d’assurer la protection des populations civiles. Ce type de motif autorisé inspiré des Principes directeurs découle du droit international humanitaire et en particulier du Protocole II additionnel aux Conventions de Genève de 1949. Dans les situations de catastrophe naturelle, le déplacement est permis lorsqu’il est nécessaire pour préserver la sécurité et la santé des populations concernées. Toutefois, en ce qui concerne le déplacement induit par le développement, la Convention de Kampala opère un virage significatif. Le projet initial de la Convention de Kampala reflétait l’interdiction de cette forme de déplacement telle qu’elle figure dans les Principes directeurs, à savoir « dans le contexte de projets de développement de vaste envergure qui ne sont pas justifiés par des considérations impérieuses liées à l’intérêt supérieur du public » (Principe directeur 6(c)), mais cette partie a été modifiée par la suite pour devenir l’Article 10 de la Convention de Kampala en vertu duquel il est demandé aux États d’éviter, « dans la mesure du possible », le déplacement provoqué par des projets. Ce n’est que dans le cas de communautés spécialement attachées et dépendantes de leur terre qu’il est exigé aux États de veiller à ce que le déplacement n’ait lieu qu’en cas « de nécessité impérative dictée par les intérêts du public » (Convention de Kampala Article 4(5)).

      Le deuxième aspect du droit de ne pas être déplacé arbitrairement est que le déplacement, autorisé dans certaines circonstances en vertu du droit international, doit être exécuté en conformité avec les dispositions de la loi – c’est-à-dire, en satisfaisant toutes les garanties procédurales minimales. En ce qui concerne toutes les formes de déplacement, les Principes directeurs – se faisant l’écho de la Convention de Genève relative à la protection des personnes civiles en temps de guerre[2] – définissent les garanties procédurales minimales dans le Principe 7 qui exige qu’ « avant toute décision nécessitant le déplacement de personnes, les autorités concernées [fassent] en sorte que toutes les autres possibilités soient étudiées afin d’éviter le recours à une telle mesure [...][et veillent] à ce que les personnes déplacées soient convenablement logées ». Même s’il n’existe pas de normes minimales fixées dans le cadre des Principes directeurs concernant les catastrophes naturelles, et plus spécifiquement le changement climatique, ces circonstances figurent dans la Convention de Kampala. Alors que le changement climatique gagne en reconnaissance au fil du temps, il s’agit d’un des domaines dans lesquels la Convention de Kampala va plus loin que les Principes directeurs en mentionnant explicitement le changement climatique (il est vrai que les Principes directeurs reconnaissent les « catastrophes » en termes généraux, ce qui – même sans les définir de manière explicite – peut se rapporter aux impacts du changement climatique).

      Le troisième aspect du droit de ne pas être déplacé arbitrairement est que le déplacement ne doit pas être exécuté d’une manière qui contreviendrait au respect des droits de l’homme. Comme les Principes directeurs, la Convention de Kampala exige des États qu’ils respectent leurs obligations au titre des droits de l’homme en ce qui concerne la manière dont les déplacements sont exécutés, par exemple, dans les situations de projets de développement.

      Finalement, la Convention de Kampala exige des États qu’ils adoptent des mesures visant à corriger les impacts négatifs du déplacement sur les PDI. Comme le Principe 3(2) des Principes directeurs, l’Article 5(9) de la Convention de Kampala instaure la disposition relative au droit de demander et recevoir de l’assistance et l’érige en droit des PDI. L’aspect fondamental de cette disposition – de même que l’essentiel des deux instruments – consiste principalement à garantir la protection et l’assistance des PDI, et à les protéger contre les conséquences négatives du déplacement qui peuvent ne pas avoir été prévues avant ou pendant la période du déplacement interne.

      L’émergence de la Convention de Kampala en tant que norme régionale relative au déplacement interne est une solide indication de la pertinence et de la signification des Principes directeurs en tant que déclaration initiale et autorisée de principes internationaux régissant la protection et l’assistance des PDI. Même avec certaines adaptations visant à mieux refléter les réalités du contexte africain, la Convention de Kampala reste l’expression la plus patente de la contribution que les Principes directeurs ont apportée aux instruments contraignants relatifs au déplacement interne successifs.

      https://www.fmreview.org/fr/Principesdirecteurs20/adeola