• Quand la #mode surchauffe : #Shein, ou la course destructrice vers toujours plus de #vêtements

    En 2022, Shein enregistrait une croissance de 100 % de son chiffre d’affaires, atteignant 30 milliards de dollars. Alors que les enseignes de prêt-à-porter françaises s’enfoncent dans une crise économique et sociale sans précédent, les marques de #fast-fashion semblent être les seules à sortir leur épingle du jeu.

    https://www.amisdelaterre.org/publication/quand-la-mode-surchauffe-shein-ou-la-course-destructrice-vers-toujour
    #rapport #industrie_textile #textile

    • SHEIN, la marque d’#ultra_fast-fashion qui envahit le monde

      Shein est une marque d’ultra fast fashion chinoise. L’ultra fast fashion propose des vêtements très bas de gamme à un rythme effréné, à des prix défiant toute concurrence, visant particulièrement un public adolescent grâce à un marketing digital agressif.

      La croissance de la marque est exponentielle. Ses méthodes de production et le caractère jetable de ses vêtements sont une menace pour l’environnement, et sont rendues possibles grâce à un système d’exploitation humaine et une stratégie commerciale si agressive qu’elle paraît relever de pratiques anticoncurrentielles. Son modèle est incompatible avec un développement durable de l’industrie de la mode et du vivant en général. Faut-il interdire Shein et l’ultra fast fashion ?

      Cette question simple appelle une réponse épineuse mais a permis de soulever un mouvement citoyen d’indignation. Le 4 mai 2023, un collectif porté par The Good Goods – média et agence de conseil pour une mode fondée sur des preuves – a lancé une pétition pour contrer le modèle économique insoutenable de l’ultra fast fashion. Elle a recueilli plus de 250 000 signatures à date et permis un premier rendez-vous avec Bruno Le Maire, Ministre de L’Economie, des Finances et du Numérique.

      En amont d’un second entretien pour définir les restrictions, la pétition a besoin d’un maximum de signatures et le mouvement d’une sensibilisation du plus grand nombre au sujet de Shein et de l’ultra fast fashion en général.

      https://bonpote.com/shein-la-marque-dultra-fast-fashion-qui-envahit-le-monde

  • Blue jeans: An iconic fashion item that’s costing the planet dearly
    https://news.mongabay.com/2022/11/blue-jeans-an-iconic-fashion-item-thats-costing-the-planet-dearly

    The production of blue jeans, one of the most popular apparel items ever, has for decades left behind a trail of heavy consumption, diminishing Earth’s water and energy resources, causing pollution, and contributing to climate change. The harm done by the fashion industry has intensified, not diminished, in recent years.
    The making of jeans is water intensive, yet much of the world’s cotton crop is grown in semiarid regions requiring irrigation and pesticide use. As climate change intensifies, irrigation-dependent cotton cultivation and ecological catastrophe are on a collision course, with the Aral Sea’s ecological death a prime example and warning.
    While some major fashion companies have made sustainability pledges, and taken some steps to produce greener blue jeans, the industry has yet to make significant strides toward sustainability, with organic cotton, for example, still only 1% of the business.
    A few fashion companies are changing their operations to be more sustainable and investing in technology to reduce the socioenvironmental impacts of jeans production. But much more remains to be done.

    #jean's #coton #industrie_textile

  • #Taïwan, #Ouïghours : les dérives nationalistes de la #Chine de #Xi_Jinping

    Xi Jinping se prépare à un troisième mandat de cinq ans et à une démonstration de force au cours du 20e #congrès_du_Parti_communiste_chinois. Alors que son nationalisme exacerbé se traduit à la fois à l’intérieur des frontières, avec la répression des Ouïghours, et dans son environnement proche, en #Mer_de_Chine_du_sud, avec une pression accrue sur Taïwan, nous analysons les enjeux de ce congrès avec nos invité·es, Laurence Defranoux, journaliste et autrice des Ouïghours, histoire d’un peuple sacrifié, Noé Hirsch, spécialiste de la Chine, Maya Kandel, historienne spécialiste des États-Unis, et Inès Cavalli, chercheuse en études chinoises.

    https://www.youtube.com/watch?v=U4wiIwCaSY8


    #nationalisme #constitution #révision_constitutionnelle #pensée_Xi_Jinping #paternalisme #colonialisme #Xinjiang #colonialisme_Han #déplacements_de_population #exploitation_économique #limitation_des_libertés #enfermement #rééducation_politique #emprisonnement #répression #Nouvelles_Routes_de_la_soie #ressources #ressources_naturelles #Tibet #surveillance #surveillance_de_masse #terreur #camps_de_rééducation #folklore #assimilation #folklorisation #ethnonationalisme #supériorité_de_la_race #Han #culture #camps_de_concentration #réforme_par_le_travail #réforme_par_la_culture #travail_forcé #peuples_autochtones #usines #industrie #industrie_textile #programmes_de_lutte_contre_la_pauvreté #exploitation #paramilitaires #endoctrinement #économie #économie_chinoise #crimes_contre_l'humanité #torture

  • Safilin relance une production de fils de lin en France Matthieu Guinebault
    https://fr.fashionnetwork.com/news/Safilin-relance-une-production-de-fils-de-lin-en-france,1406481.h

    Au milieu des années 2000, le français Safilin avait déplacé sa production de fils de lin en Pologne. Fort du soutien de la filière et de l’appétence pour le Made in France, l’entreprise a relancé ce 17 mai à Béthune (Pas-de-Calais) sa production française de fils en lin, dans un nouveau bâtiment de 6.000 mètres carrés.

    Le projet avait été officialisé en mars 2021. L’objectif n’est pas une relocalisation, mais bien une expansion de la production sur le marché français, expliquait alors à FashionNetwork.com le président de l’entreprise, Olivier Guillaume.

    La nouvelle unité est amenée à produire 400 tonnes de fils à l’année d’ici à 2024, tandis que les effectifs vont progressivement passer d’une trentaine à une cinquantaine d’opérateurs. Ceux-ci peuvent d’ores et déjà compter sur dix machines acheminées depuis la Pologne, qui seront rejointes par des métiers à filer, bobineuses et étireuses.

    « La réimplantation (…) nous permet non seulement d’augmenter nos capacités de production mais aussi de répondre à la demande émergente de consommer plus local et durable de la part des consommateurs », explique Olivier Guillaume.

    « La clé de la réussite réside dans le transfert de savoir-faire avec les équipes polonaises. Depuis plusieurs mois, elles œuvrent aux cotés des mécaniciens et opérateurs français fraîchement embauchés afin de les former et régler les machines. Une filature de lin est un procédé mécanique où l’expertise de l’homme est indispensable pour pouvoir faire un fil de qualité. Sans cet accompagnement humain, le risque aurait été trop important », développe-t-il.

    Il aura fallu 5 millions d’euros d’investissement pour mener à bien ce projet, qui a reçu le soutien de l’Etat dans le cadre du programme Résilience, ainsi que celui de la région Hauts-de-France et de la communauté d’agglomération Béthune-Bruay.

    La filature était la seule étape manquante dans l’Hexagone pour réaliser des vêtements en lin 100% produits en France. Et ceci bien que la France soit de loin le plus gros producteur mondial de cette fibre.

    Important pour le textile-habillement Made in France, ce retour de Safilin sur le territoire national est une nouvelle étape dans la réapparition des filatures de lin, après les filatures successivement lancées par l’alsacien Velcorex et le normand Natup.

    « En parallèle, nous continuons à investir et à recruter en Pologne », indique Olivier Guillaume. Safilin compte deux sites dans le pays, qui totalisent 550 collaborateurs et produisent annuellement 4.000 tonnes de fils, à partir d’un lin à 95% français. Le site de Szczytno, ville au nord-est du pays, est tourné vers une filature « au mouillé » (utilisée principalement pour la confection textile), tandis que celui de Milakowo, au nord-ouest, opère « au sec » (fil plus épais notamment destiné à la décoration, mais aussi à des pièces épaisses).

    L’unité de Bethune jouera quant à elle sur les deux tableaux, mêlant production au mouillé comme au sec. De quoi renforcer la position de Safilin qui, avec son concurrent italien Linificio e Canapificio Nazionale, s’impose comme un leader sur les fils destinés au segment premium/luxe (lire notre dossier « Les Filatures de lin refleurissent en Europe »).

    Peu consommateur d’eau et cultivé sans produits chimiques, le lin profite de la demande croissante de matières naturelles et respectueuses de l’environnement. Pas moins de 80% de la production mondiale de lin teillé se concentre sur une bande de terre allant de la Normandie aux Pays-Bas. Très recherché pour ses capacités respirantes, le lin pèse à ce jour moins de 1% des fibres consommées dans le monde.

    #Lin #filatures #industrie_textile #Travail #ue #union_européene #Pologne # Bethune (Musée du Lin à Courtrai)

    • Images de travailleuses et de travailleurs , ça existe encore.
      La réalité.

      Réalité invisibilisée par nos médias et notre petite bourgeoisie qui croit avoir les mêmes intérêts que la haute bourgeoisie.

  • Le souffle de Martha

    #Martha_Desrumaux est une enfant du Nord à la destinée romanesque. « Petite bonne », puis ouvrière à neuf ans, elle deviendra, à force de révolte et d’engagement, une pionnière dans les combats pour les droits sociaux dans l’entre-deux guerres. Personnage féminin emblématique du Front Populaire, Jean Renoir la met en scène dans le film La vie est à nous en 1936. Instigatrice de la lutte des mineurs contre l’occupant nazi, elle est déportée en 1942 et participe à la résistance au sein même du camp de Ravensbrück. Dès 1945, elle est désignée pour être l’une des premières femmes députées de l’Histoire de France, avant de tomber dans un relatif oubli.

    https://lcp.fr/programmes/le-souffle-de-martha-55887
    #film #film_documentaire #documentaire

    #syndicalisme #femmes_ouvrières #classe_ouvrière #lutte_des_classes #CGTU #CGT #politique #industrie_textile #France #féminisme #communisme #parti_communiste #femmes_syndicalistes_et_progressistes #meneuse_communiste #engagement_public #vierge_rouge #Louis_Manguine #marche_des_chômeurs #militantisme #guerre_civile_espagnole #brigades_internationales #Résistance #sabotage #grève #Ravensbrück #camp_de_concentration #déportation #droits_des_femmes

    Une citation :

    « Je suis Martha Desrumaux et les nazis ne m’ont pas eue »

  • Les géants de l’habillement fragilisés par le confinement prolongé du Vietnam
    https://fr.fashionnetwork.com/news/Les-geants-de-l-habillement-fragilises-par-le-confinement-prolong

    Chaussures de sport, sweat-shirts, pantalons de survêtement : le confinement strict et prolongé du Vietnam en raison du coronavirus a provoqué des pénuries de produits chez des marques internationales telles que #Nike et #Gap, devenues de plus en plus dépendantes des fabricants de ce pays d’Asie du Sud-Est.

    Dans son usine de tissus à l’est de Hanoï, Claudia Anselmi, la directrice de Hung Yen Knitting & Dyeing, sous-traitant pour plusieurs géants européens et américains de l’habillement, se demande chaque jour si les machines vont devoir s’arrêter.

    Lorsque la dernière vague de #Covid-19 a frappé le pays au printemps, la production a chuté de 50%, et l’Italienne est confrontée à des problèmes d’approvisionnement.

    « Les restrictions de voyage ont mis en péril toute la logistique d’entrée et de sortie... cela a créé de longs, longs retards » dans la livraison du fil utilisé dans des maillots de bain et des vêtements de sport pour des clients tels que #Nike, #Adidas et Gap, a-t-elle déclaré à l’AFP.

"Nous ne survivons que si nous avons du #stock".

    Ajouter à cela des mesures de #confinement contrôlées de manière stricte qui ont empêché de nombreux vietnamiens de se rendre au travail ou de circuler pendant de longues périodes.

    

Plusieurs chauffeurs du delta du Mékong ont dû attendre trois jours et trois nuits dans leur véhicule avant d’entrer dans Can Tho (sud), a raconté Hamza Harti, le responsable de l’entreprise de logistique FM Logistic lors d’une table ronde à la chambre de commerce française de Hanoï. « Ils étaient sans nourriture, sans rien ».

 

    Accélérées par la guerre commerciale entre Washington et Pékin, les relocalisations d’usines de la #Chine vers l’Asie du Sud-Est se sont amplifiées ces dernières années, particulièrement au bénéfice du Vietnam.


    Risques de rupture d’approvisionnement
    Mais les mesures sanitaires exposent désormais les #multinationales à des risques de rupture d’#approvisionnement.



    L’équipementier Nike, qui produit la moitié de ses chaussures dans le pays communiste, a annoncé des pénuries et a revu ses prévisions de vente à la baisse, déclarant que 80% de ses usines dans le sud du pays ont dû fermer.



    Le japonais Fast Retailing, propriétaire de la marque #Uniqlo, a également mis sur le compte du blocage du Vietnam des retards dans la production de ses vêtements.

    #Adidas a de son côté estimé que la baisse de ses ventes pourrait atteindre jusqu’à 500 millions d’euros d’ici à la fin de l’année.

    

Plusieurs marques dont Nike et Adidas ont annoncé qu’elles envisageaient de produire temporairement ailleurs qu’au Vietnam.


    Dans une lettre adressée au Premier ministre Pham Minh Chinh, plusieurs associations d’entreprises américaines, européennes, sud-coréenne et du sud-est asiatique ont tiré la sonnette d’alarme, avertissant que 20% de leurs membres fabricants avaient déjà quitté le pays.

"Une fois la production déplacée, il est difficile d’y revenir", ont-ils écrit.

    Nguyen Thi Anh Tuyet, directrice générale adjointe de Maxport Vietnam, dont les 6.000 employés fabriquent des vêtements de sport pour des entreprises comme #Lululemon, #Asics et Nike, a déclaré à l’AFP que l’entreprise était « très inquiète » de voir ses clients retirer leurs commandes, même si elle est l’une des rares à avoir traversé ces derniers mois pratiquement indemne.



    Sans clients étrangers, « nos travailleurs se retrouveraient sans emploi », a-t-elle ajouté. La pandémie n’a pas seulement frappé l’industrie textile du pays, elle menace également le café, le Vietnam étant le premier producteur mondial de robusta.


    Les constructeurs automobiles n’y ont pas échappé non plus : #Toyota a réduit sa production pour septembre et octobre, en partie à cause du virus, et a déclaré à l’AFP que « l’impact a été important au Vietnam », ainsi qu’en Malaisie.

    

Les pénuries ont été aggravées par un regain de la demande en Occident, après un effondrement au plus fort de la crise du Covid-19.

Dans son usine textile près de Hanoï, Mme Anselmi pense que les entreprises resteront au Vietnam si le pays parvient à retrouver une certaine normalité en octobre :

    « Si nous pouvons permettre aux usines de travailler, je pense que la confiance (dans le Vietnam) est toujours là ».

    #Textile #Vietnam #Italie #café #vêtements #industrie_textile #conditions_de_travail #exploitation #mode #coronavirus #capitalisme #chaîne_d'approvisionnement #mondialisation #pénuries

  • #7_minuti

    À Yssingeaux (France), en 2012, une dizaine d’ouvrières sont appelées à se décider sur l’avenir de leur #fabrique, qui vient d’être cédée à une #multinationale du textile. Afin de conserver leur #emploi, elles doivent renoncer à #sept_minutes (sur les quinze normalement accordées) de #pause_déjeuner tous les jours : la décision est soumise au vote.

    https://www.youtube.com/watch?v=cUjopyHP_WU

    #film #femmes #femmes_ouvrières #travail #industrie_textile #rachat #résistance #chômage #pause

  • Travail forcé des #Ouïgours : une enquête ouverte en France contre des géants du textile, dont Uniqlo et Zara
    https://www.nouvelobs.com/justice/20210701.OBS46003/travail-force-des-ouigours-une-enquete-ouverte-en-france-contre-des-geant

    Le parquet national antiterroriste (PNAT) a ouvert fin juin une enquête pour « recel de crimes contre l’humanité » visant quatre géants du textile, dont Inditex et Uniqlo, accusés d’avoir profité du travail forcé d’Ouïgours en Chine, a indiqué une source judiciaire ce jeudi 1er juillet à l’AFP, confirmant une information de Mediapart.

    • Ouïghours : une enquête ouverte en France contre Uniqlo et des géants du textile pour recel de crimes contre l’humanité
      1 juillet 2021 Par François Bougon
      https://www.mediapart.fr/journal/international/010721/ouighours-une-enquete-ouverte-en-france-contre-uniqlo-et-des-geants-du-tex

      Une enquête pour recel de crimes contre l’humanité a été ouverte fin juin à Paris à la suite d’une plainte déposée deux mois auparavant contre Uniqlo et trois autres géants du textile par trois ONG (le collectif Éthique sur l’étiquette, l’association Sherpa et l’Institut ouïghour d’Europe) et une rescapée ouïghoure.

      Pour la première fois, la justice française se saisit d’un dossier lié à la répression impitoyable des minorités ethniques turcophones, notamment les Ouïghours, au Xinjiang, dans le nord-ouest de la Chine, par le régime chinois. Une enquête a été ouverte fin juin à Paris pour recel de crimes contre l’humanité à la suite d’une plainte déposée deux mois auparavant par trois ONG (le collectif Éthique sur l’étiquette, l’association Sherpa et l’Institut ouïghour d’Europe) et une rescapée ouïghoure, a-t-on appris de source judiciaire.

      Cette action ne vise pas directement les autorités de la République populaire de Chine – « Il semble actuellement peu probable que les dirigeants chinois puissent être renvoyés devant une juridiction répression pour répondre de leurs actes », reconnaît le texte de la plainte –, mais les multinationales aux marques connues qui sont accusées de profiter du système de répression mis en place par Pékin dans cette région stratégique proche de l’Asie centrale : en l’occurrence trois géants du textile – le groupe espagnol Inditex, propriétaire de la marque Zara, le japonais Uniqlo et le français SMCP (Sandro, Maje, Claudie Pierlot et De Fursac) – et le fabricant américain de chaussures de sport Skechers.

      Pour les plaignants, ces grandes entreprises, qui se sont pourtant dotées ces dernières années de comités d’éthique chargés de veiller aux bonnes pratiques parmi leurs sous-traitants, profitent malgré tout du travail forcé des Ouïghours et des autres minorités turcophones (kazakhes et kirghizes) en commercialisant des produits dans des usines y ayant recours.

      Manifestation de solidarité avec les Ouïghours devant l’ambassade de Chine à Paris en juillet 2020. © Noémie Coissac/Hans Lucas/AFP Manifestation de solidarité avec les Ouïghours devant l’ambassade de Chine à Paris en juillet 2020. © Noémie Coissac/Hans Lucas/AFP

      Ils avaient porté plainte à la fois pour recel du crime de réduction en servitude aggravée, recel du crime de traite des êtres humains en bande organisée, recel du crime de génocide et recel de crime contre l’humanité, mais seul ce dernier chef a été retenu par le parquet. L’enquête a été confiée au pôle spécialisé du tribunal de Paris dans la lutte contre les crimes contre l’humanité qui dépend du Parquet national antiterroriste (PNAT) et a une compétence universelle.

      « C’est une très bonne nouvelle, d’autant plus que le collectif parlementaire de solidarité avec les Ouïghours vient de déposer une proposition de résolution pour la reconnaissance du génocide au Xinjiang par la France. Cela ne peut que renforcer nos demandes et nos démarches », a déclaré à Mediapart Dilnur Reyhan, présidente de l’Institut Ouïghour d’Europe.
      « Un moment historique »

      Interrogé par Mediapart, l’avocat William Bourdon, à l’origine de la plainte, estime que « l’ouverture de cette enquête va faire tomber les masques sur le cynisme des grandes enseignes de textiles qui communiquent à tour de bras sur leurs engagements éthiques et s’accommodent de s’enrichir, en connaissance de cause, au prix des pires crimes commis à l’encontre des communautés ouïghoures ».

      « L’ouverture d’une enquête pour recel de crime contre l’humanité est une première, elle ouvre une porte pour l’avenir essentielle afin de mettre un terme à une culture de duplicité qui reste encore trop familière pour les grandes entreprises multinationales », a-t-il poursuivi.

      Pour sa part, Sherpa, par la voix de sa directrice Sandra Cossart, « se réjouit de l’ouverture d’une enquête préliminaire pour recel de crime contre l’humanité, qui témoigne de l’implication potentielle des acteurs économiques dans la commission des crimes les plus graves afin d’augmenter leurs marges bénéficiaires ».

      « Cela démontre que le travail innovant de Sherpa, qui aboutit ici pour la première fois à l’ouverture d’une enquête pour “recel de crimes contre l’humanité” contre des multinationales, permet de faire bouger les lignes du droit afin de lutter contre l’impunité des acteurs économiques, poursuit-elle. Il importe néanmoins de ne pas se limiter aux quelques acteurs ciblés ici : un système de dispositions légales rend possible chaque jour ces pratiques, c’est ce système qu’il faut combattre. »

      De son côté, l’eurodéputé Raphaël Glucksmann, au premier rang dans le combat pour la reconnaissance du génocide au Xinjiang, tout en évoquant « un moment historique », juge qu’il s’agit d’« un message extrêmement puissant envoyé à ces multinationales ».
      Tensions à venir

      Récemment, en dévoilant un rapport de son organisation sur les crimes exercés au Xinjiang, la secrétaire générale d’Amnesty International, Agnès Callamard, avait dénoncé l’apathie de la communauté internationale et des instances des Nations unies. Elle avait appelé la communauté internationale à « s’exprimer et agir à l’unisson pour que cessent ces atrocités, une fois pour toutes » et à une enquête indépendante des Nations unies.

      Des ONG dénoncent l’internement par Pékin depuis 2017 de plus d’un million de personnes au Xinjiang dans des centres de rééducation politique. Le régime communiste dément ce chiffre, évoque des « centres de formation professionnelle » aux fins de déradicalisation.

      Alors que la Chine célèbre avec faste le centenaire du Parti communiste (voir ici le spectacle donné lundi soir dans le Stade olympique en présence du secrétaire général Xi Jinping et là le grand rassemblement jeudi sur la place Tiananmen), l’annonce de l’ouverture de cette enquête ne manquera pas de provoquer de nouvelles tensions avec Pékin, qui réfute en particulier les accusations de génocide, portées par exemple par Washington et d’autres capitales occidentales (pas par Paris).

      En mars, la Chine avait imposé des sanctions à dix responsables politiques européens – dont cinq eurodéputés, dont Raphaël Glucksmann –, ainsi qu’à l’encontre de centres de réflexion et d’organes diplomatiques, en représailles à celles imposées par les Occidentaux aux hauts dirigeants chinois accusés de violations des droits de l’homme au Xinjiang.
      Lire aussi

      Amnesty dénonce des crimes contre l’humanité contre les musulmans du nord-ouest de la Chine Par François Bougon
      Gulbahar Jalilova, rescapée ouïghoure : « Nous ne sommes pas des êtres humains pour eux » Par Rachida El Azzouzi

      Par la suite, le Parlement européen avait voté une résolution suspendant la ratification d’un accord encadrant les investissements avec la Chine conclu en décembre tant que Pékin n’aura pas levé ces mesures de rétorsion.

      Une cinquantaine de députés français, parmi lesquels Frédérique Dumas et Aurélien Taché, ont déposé le 17 juin une proposition de résolution afin que la France reconnaisse le génocide au Xinjiang, comme l’ont fait le gouvernement des États‑Unis, les Parlements britannique, néerlandais et canadien.

      « Des procédures similaires sont en cours dans d’autres États (Belgique, Allemagne, Lituanie et Nouvelle‑Zélande). Quant à elle, la France a dénoncé un “système de répression institutionnalisé” en février 2021 et a engagé des réflexions sur l’emploi du terme de “génocide”, sans toutefois reconnaître ni condamner ce crime en tant que tel », expliquent-ils. Lors d’une conférence de presse mardi, Alain David, du groupe socialiste et membre de la commission des affaires étrangères, a espéré pouvoir la présenter au vote à l’automne.
      Devoir de vigilance

      Parallèlement au combat des ONG, des députés européens ont poussé pour l’adoption d’un cadre législatif plus sévère pour encadrer les pratiques des multinationales et de leurs sous-traitants, en particulier dans le secteur textile. Une loi a été adoptée en 2017 en France mais son champ d’action reste limité.

      En mars a été adopté par le Parlement européen à une très large majorité un projet d’initiative sur le devoir de vigilance, qui pourrait servir de base à une proposition de directive que la Commission doit présenter à l’automne.

      Les eurodéputés souhaitent contraindre les entreprises à « identifier, traiter et corriger » toutes les opérations, y compris dans leurs filières, qui pourraient porter préjudice aux droits humains, à l’environnement ou encore à la « bonne gouvernance » (corruption, pots-de-vin). Ils proposent aussi l’interdiction dans l’UE de produits liés à de graves violations des droits humains, comme le travail forcé ou des enfants.

      « L’ouverture de l’enquête [par la justice française – ndlr] est dans le droit-fil du combat que l’on mène au Parlement européen sur le devoir de vigilance », a souligné Raphaël Glucksmann auprès de Mediapart.

      Cependant, Total, Bayer ou des géants du textile à l’instar d’Inditex (Zara) ne manquent pas d’investir à fond dans le lobbying à Bruxelles, dans l’espoir d’assouplir le texte (lire ici). Business first…

  • La bataille de Hlaing Thar Yar a été un tournant du mouvement de résistance en Birmanie
    https://justpaste.it/66sp3

    Le fragile équilibre qui prévalait entre ouvriers birmans et entreprises chinoises de textile a volé en éclats dans la banlieue de Rangoun.

    De la fumée s’échappe encore des cendres des barricades marquant l’entrée de Hlaing Thar Yar, la zone industrielle la plus dense de Birmanie, au nord-ouest de Rangoun. Des soldats bloquent les routes principales. La loi martiale y a été décrétée le 15 mars, le lendemain d’une journée sanglante, faisant au moins 50 morts rien que dans cette banlieue, soit le bilan le plus meurtrier depuis le début du coup d’Etat.

    (...)Le 14 mars, après plus d’un mois de grève générale, des centaines d’habitants du quartier et d’ouvrières s’étaient réunis pour manifester au milieu des usines, comme ils l’avaient déjà fait à plusieurs reprises. Certains étaient armés de sabres, de cocktails Molotov et de lance-pierres, prêts à en découdre avec les militaires.

    « Même si c’est un piège de l’armée, nous n’avons plus d’autre choix que de nous battre. Ils nous tirent dessus lorsque nous manifestons pacifiquement. Si nous ne gagnons pas, ceux qui sont morts l’auront été en vain » , nous avait dit, la veille du défilé, Su Nwe, 25 ans, serveuse dans un restaurant chinois du quartier. Ce jour-là, Mahn Win Khaing Than, le vice-président du gouvernement en exil formé par les parlementaires de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD), avait déclaré sur Facebook que « le peuple birman a le droit à l’autodéfense ». A la mi-journée, le 14, les manifestants ont été accueillis par des tirs de sniper et d’armes automatiques.

    « Pour chaque manifestant tué nous brûlerons une usine » (...) En février, des messages avaient largement circulé sur les réseaux sociaux, évoquant un sabotage des pipelines chinois (un oléoduc et un gazoduc, reliant le golfe du Bengale au Yunnan) si la Chine soutenait les généraux, selon une menace sous forme de boutade « If the military coup is an internal affair, then this pipeline is also our internal affair » (« Si le coup d’Etat est une affaire interne, alors l’explosion du pipeline sera notre affaire interne »), que Pékin a prise très au sérieux.

    #Birmanie #ouvriers #ouvrières #industrie_textile

  • Enquête vidéo : ce que les réseaux sociaux chinois révèlent des camps d’internement et du travail forcé des Ouïgours
    https://www.lemonde.fr/international/video/2021/01/06/enquete-video-ce-que-les-reseaux-sociaux-chinois-revelent-des-camps-d-intern

    Malgré la censure et les dénégations de Pékin, l’analyse des réseaux sociaux chinois par « Le Monde » expose la politique de répression menée contre les musulmans ouïgours, au Xinjiang. Près de 400 camps d’internement, plus d’un million de détenus et des centaines de milliers de travailleurs forcés… Depuis 2018, l’ampleur de la persécution des Ouïgours en Chine émerge progressivement. Mais selon le gouvernement chinois, ces camps d’internement seraient des « centres de formation professionnelle » et les (...)

    #Nike #Amazon #domination #religion #Islam #prison #SocialNetwork #surveillance #travail (...)

    ##Zara

  • #En_découdre - paroles ouvrières en roannais

    Après la deuxième guerre mondiale, l’industrie textile emploie des milliers d’ouvrières sur le territoire Roannais. Elles produisent des vêtements de luxe dont la qualité est reconnue dans la France entière. A travers une série d’entretiens, ce film retrace l’histoire de ces femmes rentrant souvent jeunes à l’usine. Elles y découvrent des conditions de travail difficiles, le paternalisme patronal, mais également la solidarité ouvrière. Relatant les inégalités qui se jouent entre ouvriers et ouvrières, elles décrivent surtout la rencontre avec la culture syndicale et leur volonté d’en découdre avec l’exploitation. Des promesses d’émancipation de « mai 1968 » jusqu’aux combats contre la fermeture des usines et les destructions de leurs emplois à partir des années 1980, ces paroles ouvrières livrent une mémoire à la fois personnelle et politique des grandes mutations du monde contemporain.

    https://vimeo.com/330751537


    #ouvrières #femmes #industrie #femmes_ouvrières #France #industrie #histoire #industrie_textile #textile #témoignages #histoire_ouvrière #CGT #syndicat #syndicalisme #usines #bruit #paternalisme
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  • #IMMIGRATION ENQUÊTE
    Dans l’enfer des grands bourgeois du Nord : des femmes de ménage portugaises témoignent
    15 AOÛT 2020 PAR MICKAËL CORREIA

    Pour la haute bourgeoisie française, les #femmes_de_ménage portugaises sont les plus intégrées, des « perles qu’il faut à tout prix conserver ». Derrière les murs de leur propriété se livre pourtant une lutte des classes au quotidien.

    Les mains crevassées de Rosa* tournent minutieusement les pages d’un cahier spiralé. Sur petits carreaux et avec une écriture scolaire, elle y a consigné toute une vie de #travail_domestique. « Voilà, je l’ai noté ici : 7,15 euros net de l’heure. C’était mon salaire de femme de ménage fin 2017, après trente ans d’ancienneté. Ils me déclaraient mais ils me payaient aussi pas mal d’heures au noir », soupire la petite femme de 63 ans.

    « Ils » désignent une richissime famille installée dans le #Nord depuis la fin du XIXe siècle. Elle y a investi dans les filatures avant d’être un des piliers de l’industrie textile de la région. Son digne représentant, Édouard M., a incarné une figure du patronat paternaliste local (voir Boîte noire). Dans les années 1970, il régnait sur des usines lainières à Tourcoing, au nord de #Lille, ainsi qu’en Afrique du Sud ou aux États-Unis. Depuis, le groupe s’est diversifié, mais les fils et petits-fils M. dirigent encore des entreprises textiles de pointe dans le département.

    Rosa habite une de ses maisons étroites en brique typiques des quartiers populaires de #Roubaix et de #Tourcoing. Assise dans son salon tout en similicuir, elle revient sur son parcours jusqu’à son embauche comme femme de ménage chez les M. : « Je viens de Covilhã, une ville industrielle textile du #Portugal. Je suis arrivée en France en avril 1968, à l’âge de 11 ans. Mon père avait passé clandestinement et à pied la frontière un an plus tôt. Il a travaillé comme ouvrier chez Tiberghien, une énorme filature de Tourcoing. » À 18 ans, la jeune immigrée portugaise devient ouvrière à la Lainière de Roubaix puis à l’usine textile Desurmont.

    Dès le début du XXe siècle, l’agglomération de Roubaix-Tourcoing, qualifiée de « Manchester française », est une capitale mondiale du textile, avec plus de 110 000 salariés employés dans le secteur. Le patronat du Nord esquive les crises successives de la filière en misant sur la vente par correspondance – en créant des groupes comme La Redoute et Les 3 Suisses – et en faisant appel à une main-d’œuvre immigrée portugaise ou maghrébine. Mais dès le début des années 1980, la désindustrialisation lamine la région. Roubaix sombre dans le chômage de masse.

    « L’usine Desurmont a mis la clé sous la porte. Ma mère était déjà servante pour une famille de la grande bourgeoisie du Nord. J’avais une tante qui était la domestique de Édouard M. Un de ses enfants avait besoin d’une femme de ménage. Ils m’ont prise en 1986 et j’ai bossé deux ans au noir avant qu’ils me contractualisent pour venir habiter sur leur propriété », enchaîne Rosa.

    Du jour au lendemain, l’ouvrière au chômage quitte Roubaix pour Marcq-en-Barœul, la banlieue huppée de Lille.

    « Le contrat était abusif, mais j’avais vraiment besoin d’argent. Il y était par exemple stipulé qu’un an sur deux, je n’avais pas le droit de partir en vacances : j’étais obligée de rester mes quatre semaines de congé dans la propriété », indique l’ex-employée de maison.

    Manoir et maisons de maître, piscine, écuries, fermette et prairies : le domaine des M. est immense, à l’image du patrimoine des habitants de Marcq-en-Barœul. La commune fait partie des municipalités françaises qui possèdent le plus d’habitants redevables de l’impôt sur la fortune immobilière.

    À moins de six kilomètres de là, Roubaix est considérée comme la ville la plus pauvre de l’Hexagone – 45 % de sa population vit sous le seuil de pauvreté.

    Marcq-en-Barœul et les bourgades voisines de Bondues, Mouvaux et Wasquehal – un triangle que d’aucuns surnomment « BMW » – regorgent de demeures cossues aux noms bucoliques comme La Cerisaie, La Prairie ou La Hêtraie. Les grandes familles bourgeoises du Nord y vivent en toute discrétion. Mais derrière les haies de cyprès impeccablement taillées qui ceignent ces propriétés se cache un violent enfer domestique.

    « Je faisais tout : le ménage, la lessive, le repassage, les repas, détaille Rosa. Sans compter que j’ai élevé leurs quatre enfants payée au black : le soir, je devais parfois revenir à 19 heures rien que pour donner le bain à un de leurs petits… »

    Durant les trois décennies où elle a travaillé au cœur de l’intimité des M., la distanciation de classe était de rigueur. Au quotidien, la femme de ménage portugaise n’était pas autorisée à utiliser les mêmes toilettes qu’eux, à boire leur eau minérale ou à s’asseoir sur une de leurs chaises pour se reposer.

    « Un jour, leur fille âgée d’à peine 7 ans était agitée alors que je m’occupais d’elle. Je lui ai demandé d’être plus calme et elle m’a lancé : “Tu es la bonne, tu dois m’obéir” », rapporte avec tristesse Rosa. Dans la propriété, les enfants de la domestique n’ont pas à fréquenter ceux de l’employeur. « Ces derniers m’affirmaient que je n’avais pas à jouer avec eux, car leurs parents leur avaient dit que j’étais un pauvre », témoigne un des deux fils de Rosa.

    « Un samedi soir sur deux, à chaque Noël et à quasi chaque jour férié, j’étais obligée de faire le service pour leurs réceptions familiales, relate l’ancienne employée. Ils m’obligeaient à porter une jupe noire avec un petit tablier blanc. J’avais horreur de ça, je me sentais ridicule. »

    Ces dîners s’organisent dans des conditions de travail déplorables. Rosa n’a ni le temps de manger, ni l’autorisation de se garder une part de ce qu’elle avait passé toute la journée à cuisiner. « C’était exténuant physiquement et moralement. Mon dos était en miettes à force de servir individuellement chaque convive dans des plats très lourds, et ce durant des heures. J’étais en même temps stressée car les repas s’éternisaient : comme j’avais obtenu qu’ils me paient plus après minuit, ils m’imposaient de tout nettoyer avant cette heure fatidique », précise-t-elle.

    Les congés légaux dont bénéficient la femme de ménage et les absences pour cause familiale ou médicale sont quant à eux une source permanente de tensions avec l’employeur.

    Face à leurs discours culpabilisants, Rosa doit sans cesse faire valoir ses droits les plus élémentaires. « Ma patronne ne supportait pas que je prenne mes quatre semaines de vacances, assure-t-elle. À chaque retour au travail, elle martelait avec ironie : “Alors on s’est bien amusée ? Une semaine ne vous suffit pas pour vous reposer ?”. Après un de mes rares arrêts maladie, j’ai eu l’indécence de parler de dates de congés. Elle m’a répliqué : “Mais n’y pensez même pas, vous rentrez à peine de vacances là !” »

    Quand, en 2005, son plus jeune fils est emmené d’urgence à l’hôpital à la suite d’une agression, Rosa se voit rétorquer, après avoir osé demander l’autorisation de quitter la maison : « Vous ne pouvez pas partir comme ça, il faut d’abord que vous finissiez la salle de bains. »

    Exploitation domestique
    À la fin des années 1960, l’#immigration_portugaise s’intensifie en France. Rien qu’entre 1969 et 1971, 350 000 Portugais s’installent dans l’Hexagone.

    « La stratégie des immigrés portugais est alors de faire rapidement un maximum d’argent : on se prolétarise en France pour pouvoir sortir du prolétariat de retour au pays, rappelle Victor Pereira, historien spécialiste de l’émigration portugaise et maître de conférences à l’université de Pau. Mais le projet évolue au fil du temps : les enfants naissent, on les scolarise ici et le retour au Portugal s’avère plus compliqué car après la chute de la dictature en 1974, les autorités portugaises se concentrent sur le rapatriement des retornados, les Portugais installés dans les anciennes colonies africaines. »

    Et l’historien d’ajouter : « Pour les #Portugais de Roubaix-Tourcoing, il est difficile de distinguer immigration économique et politique. Nombre d’entre eux viennent de la région de Covilhã, au centre du pays, qui a été un foyer industriel textile agité par des grèves ouvrières et réprimé par la dictature fasciste de Salazar. À cela s’ajoute la guerre coloniale portugaise : beaucoup de jeunes hommes immigraient en France pour fuir le service militaire qui les obligeait à combattre durant quatre ans en Angola, au Mozambique ou en Guinée-Bissau. »

    Comme Rosa, Sandra, 75 ans, est issue du centre du Portugal et a immigré dans le Nord en 1968. Ouvrière piqûrière dans une usine textile, elle est licenciée en 1985 à la suite de la fermeture de l’établissement industriel. Elle devient alors femme de ménage à Mouvaux pour deux grandes familles : les V. et les T.

    Nom incontournable de l’#industrie_textile locale, le groupe V. possédait dans les années 1960 pas moins d’une trentaine de manufactures entre Roubaix et Tourcoing. La puissante famille compte de tentaculaires ramifications économiques et politiques. Les T. sont quant à eux intimement associés au développement de l’industrie textile du Nord. Ils ont fondé au XIXe siècle une prestigieuse banque, qui a appuyé les riches entrepreneurs du territoire.

    Tout en bêchant les salades de son petit potager, Sandra glisse : « Honnêtement, je n’ai jamais vu des gens comme ça. » Pendant plus de trente ans, elle a nettoyé, récuré, aspiré, repassé et cuisiné pour ces deux grands noms du capitalisme familial nordiste. Mais son emploi en tant que femme de ménage n’a été qu’une longue traversée du désert en termes du droit du travail. « J’ai beaucoup bossé pour eux au noir et je n’ai jamais eu de contrat de travail », souligne Sandra.

    À l’instar de Rosa, elle doit être à leur entière disponibilité, notamment pour les agapes familiales. « Chaque dimanche soir, j’étais épuisée et morte de faim : il m’était interdit de me servir dans les plats. Je devais manger en cachette », confie-t-elle.

    L’employée de maison est par ailleurs étroitement contrôlée. Au début des années 2000, alors que les V. étaient partis en voyage un mois, elle est accusée à leur retour d’avoir débuté tard une journée de travail. « J’étais terrifiée car effectivement j’avais commencé ma matinée avec une demi-heure de retard. J’étais chez le médecin, il y avait une longue file d’attente… J’ai appris plus tard qu’ils avaient demandé au voisin de me surveiller. Après vingt ans de service, me faire ce coup-là ! », s’indigne-t-elle.

    Lors du décès de son mari en 2013, Sandra, alors âgée de 68 ans, officie toujours chez les V. et les T. Absente une semaine pour cause d’enterrement, ces derniers ne feront preuve d’aucune clémence malgré ses 28 ans à leur service : ces sept jours seront froidement décomptés de sa fiche de paie.

    Après deux décennies de dévouement domestique et d’épargne consciencieuse, Sandra parvient à s’acheter enfin sa propre maison, un modeste pavillon. Dès lors, les remontrances patronales sont fréquentes et son salaire horaire ne sera plus jamais augmenté en dépit de son ancienneté. « Ils me répétaient en boucle : “Vous achetez une sacrée propriété grâce à l’argent de la France !” Ce qui me tue, c’est qu’ils n’arrêtent pas de dire que nous les Portugaises, nous sommes de bonnes travailleuses, bien intégrées, propres et sérieuses mais ils n’acceptent pas que nous ayons les mêmes droits qu’eux », dénonce-t-elle.

    Sandra s’effondre alors en larmes : « Il y a 20 ans, j’ai dû ramener ma petite-fille chez les V. car sa mère était absente. C’était juste l’affaire de quelques heures. Je l’ai mise dans la salle de jeux, elle s’est assise sagement sur une petite chaise et la mère de ma patronne lui a hurlé dessus, comme à un chien : “Assieds-toi par terre tout de suite !” » Et de conclure : « J’étais fière de lui présenter ma petite-fille de 7 ans, mais ça a été une humiliation terrible. »

    Chez les M., Rosa est pour sa part sans cesse comparée aux Maghrébins, appréhendés comme moins serviles et moins intégrés que les Portugais. « Ils me ressassaient que nous étions catholiques comme les Français, que nous avions la même culture et que nous étions un peuple courageux », se souvient Rosa. Lors des gros travaux annuels d’entretiens de la propriété, elle est tenue de faire entrer les ouvriers noirs ou maghrébins par une porte de service. « Ma nièce, qui me remplaçait habituellement lors de mes congés, ne s’est plus fait appeler à partir de 2018 par les M. le jour où ils ont appris que sa fille fréquentait un Arabe », déplore-t-elle.

    Après l’indépendance de l’Algérie en 1962, la France craint d’être submergée par une vague d’immigration nord-africaine. En avril 1964, sous pression du patronat déjà friand de la main-d’œuvre portugaise bon marché, le premier ministre Georges Pompidou autorise la libre entrée en France de tout Portugais démuni de papiers. « Pour légitimer le racisme envers les Algériens, les autorités françaises ont à l’époque produit tout un discours sur le Portugais qui est bon travailleur, peu revendicatif, mais aussi représentant de la dernière immigration européenne (après les Italiens et les Espagnols) et par là même, assimilable, avance Victor Pereira. C’est absurde, car personne ne connaissait les Portugais – et on ne les connaît toujours pas aujourd’hui : ce sont de célèbres inconnus. »

    Pour l’universitaire, les stéréotypes assignés aux femmes de ménages portugaises, tels que leur servilité innée ou le fait d’être des travailleuses de confiance, sont des constructions sociales, fruits de mises à l’épreuve et d’humiliations. « Beaucoup tentaient par exemple de piéger leurs employées de maison en cachant des billets sous le canapé, appuie Victor Pereira. Il y avait tout un capital réputationnel à gagner auprès de leur employeur pour pouvoir ensuite bénéficier d’autres ménages – “Ma Maria, vous pouvez lui faire confiance.” » Des stratagèmes sournois que confirment Rosa et Sandra, qui trouvaient au début de leur carrière de l’argent posé négligemment sous les lits ou dans les chemises à repasser.
     « Les Portugais ont été l’objet d’un processus de racialisation en France, en contrepoint à l’immigration algérienne. Des stigmates essentialisants leur ont été accolés, comme le fait qu’ils soient naturellement “dociles”, “durs à la tâche”, représentant de “braves gens” aux ambitions limitées et qui “s’intègrent très bien”, commente Margot Delon, chargée de recherche CNRS au Centre nantais de sociologie. Ils ont un statut supérieur à celui des minorités coloniales et post-coloniales plus dominées mais inférieur à celui des “Blancs”. Les Portugais représentent ainsi une catégorie intermédiaire, qu’on qualifie dans les sciences sociales de “Blancs honoraires”. »

    Selon la sociologue, cette « blanchité vide » se traduit notamment par le fait qu’une forte proportion de femmes portugaises occupent des positions dominées et ségrégées sur le marché de l’emploi, comme employée de maison ou concierge. « Leurs employeurs recréent des frontières physiques et sociales à l’intérieur des foyers, réagit Margot Delon au parcours de Rosa et Sandra. Une fois qu’on n’a plus besoin d’elles, elles perdent rapidement leur utilité et on les jette. »

    Démission forcée
    Depuis le salon, la télévision publique portugaise balance le nouveau tube de l’été. Impassible, Ana, 65 ans, demeure les bras croisés sous la verrière du toit de sa cuisine. « Mon père, mon frère et moi avons tous été embauchés dans les usines tourquennoises des Tiberghien. Le paysage était triste, rempli de cheminées, quel choc par rapport à Covilhã !, se remémore-t-elle. Puis, toutes les filatures ont fait faillite. J’étais enceinte de mon premier garçon et j’ai trouvé facilement quelques petits ménages. Les Portugaises avaient déjà bonne réputation. »

    Après avoir travaillé au noir pour un couple de grands industriels de renom, Ana rentre chez les D. en 1991. La famille est à l’origine d’une entreprise florissante qui compte aujourd’hui parmi ses clients Louis Vuitton, Areva ou Total.
    Dans leur manoir du nord de Lille avec piscine, sauna et terrain de tennis, Ana a sué sang et eau, rémunérée en chèques emploi-service et sans contrat de travail. « Je n’arrivais jamais à faire tout le ménage, car leur propriété était gigantesque, un vrai labyrinthe d’escaliers, explique-t-elle. Il y régnait un désordre monstrueux, ils jetaient toujours leurs vêtements à terre, et puis je devais m’occuper de leurs trois enfants, auxquels je m’étais très attachée. »

    Les D. cultivent une lubie : celle des gros chiens de race, de type saint-bernard ou bergers allemands. « Ils en possédaient cinq. C’était horrible, car je passais des matinées entières à nettoyer leurs excréments, l’urine, leurs traces de terre dans toute la maison, se rappelle Ana. Ils se battaient souvent entre eux. Et puis un jour, l’accident. »

    Un matin de mars 2015, la femme de ménage, en arrivant à la propriété, se fait attaquer par l’un des molosses : « Il voulait mordre un chien avec qui il ne s’entendait pas. Toute ma main a été déchiquetée dans sa gueule. Il y avait du sang partout, on voyait mes os. » Elle est recousue en urgence à l’hôpital de Tourcoing avec une vingtaine de points de suture mais la blessure, très grave, s’infecte. Ana bénéficie alors d’un arrêt pour accident du travail que le médecin lui renouvelle chaque mois, le temps de son rétablissement et de sa rééducation par des spécialistes.

    « Ma patronne m’a pendant tout ce temps harcelée pour savoir quand je reprenais le boulot. Mon médecin m’a affirmé que vu mon état de santé, c’était tout bonnement impossible, révèle Ana. Elle m’a tellement mis sous pression que dès que la sonnerie du téléphone retentissait, tout mon corps tremblait. En novembre, j’ai craqué. J’avais peur de perdre mon boulot, j’y suis retournée. »

    La reprise du travail se mue en cauchemar. Alors que les D. font habituellement appel à une entreprise spécialisée pour nettoyer une fois par an les vitres du manoir, son employeuse exige qu’Ana, alors âgée de 60 ans, exécute ces travaux périlleux malgré sa main blessée.

    « Je n’ai pas retrouvé la même personne. Elle voulait me pousser à bout pour que je démissionne de mon poste : comme j’étais à cinq ans de ma retraite et victime d’un accident du travail, elle devait me verser des indemnités plus importantes. Mais pour eux ça ne représente rien, tellement ils sont fortunés… », signale la sexagénaire.

    Après trois jours de ménage, son médecin tape du poing sur la table pour qu’Ana ne se rende plus au travail. Terrifiée par les D., elle est accompagnée par un médiateur afin que ses employeurs signent les documents qui stipulent l’inaptitude médicale de la salariée à la suite d’un accident du travail. Lui remettant son chèque pour solde de tout compte, la patronne d’Ana objecte alors : « Je ne m’attendais pas à ça de vous. » Cette même année, l’entreprise familiale D. engrangeait un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros.

    « Nous sommes de plus en plus sollicités par des Portugaises qui ont travaillé comme femmes de ménage, concierges ou gardiennes d’immeuble. Elles ont des anciennetés assez conséquentes et les employeurs se rendent compte qu’ils vont devoir payer des indemnités de départ à la retraite importantes à leurs yeux, assure Eloy Fernandez, militant CGT à la section Salariés des services à la personne (SAP). Ils font tout alors pour les évincer. Cela se traduit par du harcèlement moral à travers des remarques désobligeantes, de la surcharge de travail ou des tâches dégradantes à effectuer. »

    À partir de 2015, Rosa souffre d’une maladie pulmonaire chronique avant de contracter une grave hépatite à l’été 2016. Dès lors, l’ambiance chez les M. est délétère. Éreintée physiquement et à l’approche de la retraite, la femme de ménage est l’objet de pressions et d’humiliations quotidiennes afin qu’elle quitte son poste. Début 2017, Rosa demande à son employeur le rachat d’un balai-raclette. Le lendemain, elle trouve une simple lavette avec un mot manuscrit : « Pour nettoyer les sols à genoux. » « J’allais au boulot la peur au ventre, en me demandant bien ce qui allait me tomber dessus. Le pire, c’est que je me sentais coupable car ils me disaient : “Nous comptons vraiment sur vous” ou “Ne nous laissez pas tomber” », raconte la femme de ménage.
    « Ils ne voulaient ni me licencier ni attendre mon départ à la retraite afin de ne pas avoir à verser d’indemnités, s’insurge Rosa. C’est leur méthode : harceler pour que l’on parte de son propre chef. C’est ce qui est arrivé avec ma prédécesseure, ainsi que ma tante qui trimait pour Édouard M. » Fin 2017, son opiniâtreté conduit à ce qu’elle soit finalement licenciée. Un an avant sa retraite.

    Au bout de trente ans d’exploitation domestique, elle part avec 7 482,59 euros, indemnité de licenciement et solde de tout compte inclus, sans un seul mot de remerciement ni un cadeau de départ. « J’ai ouvert l’enveloppe contenant le chèque : j’en ai pleuré de rage. Ils n’ont même pas arrondi la somme, disant se conformer au strict minimum légal, s’emporte Rosa. En faire appel au Code du travail alors qu’ils m’ont régulièrement payée au noir, c’est un comble ! »

    Corps usés, esprits brisés

    Permanent à la CGT-SAP, Stéphane Fustec observe : « Nous avons depuis peu affaire à des Portugaises fragilisées, isolées professionnellement, qui ont parfois quarante ans de travail domestique et qui renoncent à leur droit de par l’attachement affectif qu’elles ont avec leur employeur. La convention collective du particulier employeur est très dérogatoire du Code du travail : c’est vraiment le service minimum. »
    En 2017, Sandra, se casse grièvement le haut du bras en tombant chez elle. Elle propose alors à sa belle-fille de la remplacer chez les V. et les T., le temps qu’elle se remette de sa blessure. À son retour, ses employeurs lui font comprendre qu’avec son bras accidenté, elle ne pourra plus être aussi performante qu’auparavant et lui propose de ne l’embaucher que deux journées par mois pour faire l’argenterie et le repassage.

    « Ma belle-fille était jeune, effectuait des tâches plus lourdes comme nettoyer les plafonds, alors pourquoi s’embarrasser d’une vieille de plus de 70 ans ?, concède Sandra. Je n’ai pas accepté leur proposition. Malgré mes trente ans d’ancienneté, j’ai décidé de partir moi-même, sans aucune indemnité. J’ai voulu garder ma dignité. »

    Aujourd’hui encore, la belle-fille de Sandra effectue le ménage chez les V. et les T. Comme elle n’a ni autre emploi ni permis, son mari la conduit en voiture depuis Orchies, soit 70 km aller-retour par jour, pour un salaire de misère.

    Il suffit de s’attarder sur leur démarche laborieuse, leurs épaules voûtées ou leurs mains tout en anfractuosités. Rosa, Ana et Sandra ont leurs corps brisés. « J’ai perdu plus de 50 % de ma capacité respiratoire, à cause de l’eau de Javel, de la soude caustique et des bombes aérosols que je devais utiliser tous les jours », développe l’employée des M.
    Ana souffre d’algodystrophie, une maladie des articulations osseuses fort douloureuse. Quant à Sandra, elle a déjà subi deux opérations chirurgicales des genoux. Toutes les trois témoignent de leur dos ruiné, à force de tâches ménagères répétitives – transporter les courses et les paniers de kilos de linges dans les escaliers, récurer les salles de bains le corps courbé.

    « Les femmes de ménage arrivent à la retraite physiquement très abîmées. Les dernières statistiques du ministère du travail montrent que les taux d’accident du travail et de maladies professionnelles sont en train d’augmenter trois fois plus que la moyenne chez les salariés des services à la personne, analyse Stéphane Fustec de la CGT-SAP. Les employées de maison n’ont pas à effectuer de visite médicale pendant leur carrière. Par ailleurs, le travail domestique est très accidentogène, à cause de la répétition des mouvements et de la pluralité des tâches à faire. »

    Au-delà des corps usés, la violence d’être mises brutalement à la porte après des dizaines d’années de labeur pour des employeurs avec qui de forts liens d’intimité se sont noués laisse des traces psychologiques. « La nuit, je fais régulièrement des cauchemars : je suis toujours là bas, chez les D., à faire le ménage », lâche Ana.

    Depuis cinq ans, elle est suivie par une psychologue pour soigner une lourde dépression. Rosa se remet aussi à peine d’une dépression après ses deux dernières années de travail mentalement éprouvantes : « Je pleurais tout le temps. J’avais peur de ne plus pouvoir joindre les deux bouts : tout cela a eu un impact sur mes relations avec ma famille et mes amies. »
    « Désormais, à cause de toutes ces années sous-payées et du travail au noir, je touche moins de 900 euros par mois de retraite avec ma complémentaire, alors que j’ai commencé à bosser à 16 ans », se désole Ana. Son mari a été récemment mis à l’arrêt à cause d’une hernie discale, après quarante ans d’usine textile et de missions intérim.

    Toutes les deux veuves et vivant seules, Sandra et Rosa perçoivent également une retraite modique, aux alentours des 800 euros mensuels. Pour survivre, ces dernières sont aujourd’hui contraintes de refaire quelques heures de ménages. Toujours pour d’illustres familles bourgeoises du Nord. Et toujours au noir. Des Portugaises bien intégrées, pour sûr.

    Si vous avez des informations à nous communiquer, vous pouvez nous contacter à l’adresse enquete@mediapart.fr. Si vous souhaitez adresser des documents en passant par une plateforme hautement sécurisée, vous pouvez vous connecter au site frenchleaks.fr.

    *À la demande des intéressées, les témoignages des femmes de ménage interviewées ont été anonymisés.

    Contrairement aux règles que nous nous sommes fixées à Mediapart, nous avons volontairement choisi d’anonymiser les noms de ces grandes familles pour lesquelles elles ont travaillé afin de ne pas exposer ces femmes de ménage qui ont accepté de témoigner. Il nous était impossible en effet de publier les noms de leurs employeurs sans leur poser des questions et assurer le contradictoire, comme le veut la loi. Mais les contacter et leur demander de réagir aurait inévitablement conduit à désigner ces femmes courageuses qui ont accepté de raconter leur quotidien dégradant et les humiliations qu’elles ont eu à subir.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/150820/dans-l-enfer-des-grands-bourgeois-du-nord-des-femmes-de-menage-portugaises

    #bourgoisie #domesticité

  • Le passé nauséabond de l’industrie textile suisse

    Bien qu’elle n’ait pas eu de colonies, la Suisse a profité du colonialisme. C’est ce que montre l’histoire des #indiennes_de_coton imprimé. Le commerce de ces #tissus colorés avait des liens avec l’#exploitation_coloniale, le #prosélytisme_religieux et le #commerce_des_esclaves.

    Au 17e siècle, le #coton imprimé venait d’#Inde – la seule région possédant le savoir-faire nécessaire. Mais bientôt, cette technique de production d’étoffes imprimées de couleurs vives fut copiée par les Britanniques et les Néerlandais qui, grâce à la mécanisation, les produisaient à meilleur prix. Ils supplantèrent l’industrie textile indienne. Les « indiennes » claires et abordables produites en Europe connurent une telle vogue que, sous la pression des producteurs de laine, de soie et de lin, Louis XIV, le Roi-Soleil, dut interdire leur production et leur importation.

    Cette interdiction fut une aubaine pour la Suisse du 17e siècle. Des #huguenots français qui s’étaient réfugiés en Suisse pour fuir les persécutions religieuses dans leur pays fondèrent des #usines_textiles à #Genève et à #Neuchâtel, d’où ils pouvaient écouler les indiennes en France par #contrebande. La demande atteignait alors un sommet : en 1785, la #Fabrique-Neuve de #Cortaillod, près de Neuchâtel, devint la plus grande manufacture d’indiennes d’Europe, produisant cette année-là 160’000 pièces de #coton_imprimé.

    Le boom en Suisse et le commerce des esclaves

    Le commerce des indiennes a apporté une énorme prospérité en Suisse, mais il avait une face obscure : à l’époque, ces étoffes étaient utilisées en Afrique comme monnaie d’échange pour acheter les #esclaves qui étaient ensuite envoyés en Amérique. En 1789 par exemple, sur le #Necker, un navire en route pour l’Angola, les étoffes suisses représentaient les trois quarts de la valeur des marchandises destinées à être échangées contre des esclaves.

    Les entreprises textiles suisses investissaient aussi directement leurs fortunes dans la #traite des noirs. Des documents montrent qu’entre 1783 et 1792, la société textile bâloise #Christoph_Burckardt & Cie a participé au financement de 21 #expéditions_maritimes qui ont transporté au total 7350 Africains jusqu’en Amérique. Une grande partie de la prospérité des centres suisses du textile était liée au commerce des esclaves, que ce soit à Genève, Neuchâtel, #Aarau, #Zurich ou #Bâle.

    Un projet colonial

    Au milieu du 19e siècle, la Suisse était devenue un des plus importants centres du commerce des #matières_premières. Des marchands suisses achetaient et revendaient dans le monde entier des produits tels que le coton indien, la #soie japonaise ou le #cacao d’Afrique de l’Ouest. Bien que ces marchandises n’aient jamais touché le sol helvétique, les profits étaient réalisés en Suisse.

    L’abolition de l’esclavage aux États-Unis à la suite de la guerre de Sécession a conduit à une crise des matières premières, en particulier de la production du coton qui était largement basée sur une économie esclavagiste. Le marché indien prit encore plus d’importance. L’entreprise suisse #Volkart, active aux Indes depuis 1851, se spécialisa alors dans le commerce du #coton_brut. Afin d’étendre ses activités dans ce pays, elle collabora étroitement avec le régime colonial britannique.

    Les Britanniques dirigeaient la production et, sous leur joug, les paysans indiens étaient contraints de cultiver du coton plutôt que des plantes alimentaires et devaient payer un impôt foncier qui allait directement dans les caisses du gouvernement colonial. Combinée avec l’extension du réseau de chemins de fer à l’intérieur du sous-continent indien, cette politique oppressive permit bientôt à Volkart de prendre en charge un dixième de l’ensemble des exportations de coton vers les manufactures textiles d’Europe. Volkart avait son siège à #Winterthour et occupait ainsi une situation centrale sur le continent européen d’où elle pouvait approvisionner les #filatures installées en Italie, dans le nord de la France, en Belgique, dans la Ruhr allemande ou dans toute la Suisse.

    Les collaborateurs de Volkart devaient éviter les comportements racistes, mais cela ne les empêcha pas d’adopter en Inde certains usages de l’occupant colonial britannique : les Indiens n’avaient pas accès aux salles de détente des employés européens.

    Ardeur missionnaire

    Une autre entreprise prospère à l’époque coloniale fut la #Société_évangélique_des_missions_de_Bâle, ou #Mission_bâloise. Fondée en 1815 par des protestants suisses et des luthériens allemands, son but était de convertir les « païens » au #christianisme. Elle a connu un certain succès au sud de l’Inde dans les territoires des États actuels du #Kerala et du #Karnataka, en particulier auprès des Indiens des couches sociales inférieures qui accédaient ainsi pour la première fois à la formation et à la culture.

    Toutefois, en se convertissant à une autre religion, les autochtones prenaient le risque d’être exclus de leur communauté et de perdre ainsi leur gagne-pain. La Mission de Bâle a réagi en créant des filatures afin de donner des emplois aux réprouvés. Elle résolvait ainsi un problème qu’elle avait elle-même créé et en tirait encore des bénéfices : dans les années 1860, la Mission exploitait quatre filatures et exportait des textiles aux quatre coins de l’#Empire_britannique, de l’Afrique au Proche-Orient en passant par l’Australie.

    L’industrie textile a largement contribué à la prospérité de la Suisse mais de nombreux déshérités l’ont payé au prix fort dans les pays lointains. La Suisse n’était peut-être pas une puissance coloniale indépendante, mais elle a énormément profité du colonialisme.

    https://www.swissinfo.ch/fre/indiennes_le-pass%C3%A9-naus%C3%A9abond-de-l-industrie-textile-suisse/45862606

    #histoire #histoire_suisse #industrie_textile #textile #colonialisme #colonisation #Suisse

    –—

    Ajouté à la métaliste sur la Suisse coloniale :
    https://seenthis.net/messages/868109

  • Le temps des ouvriers. Le temps de l’#usine (1/4)

    Du début du XVIIIe siècle à nos jours, Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen, rappelant en une synthèse éblouissante ce que nos sociétés doivent aux luttes des « damnés de la terre ».

    Dès le début du XVIIIe siècle, en Grande-Bretagne, une nouvelle économie « industrielle et commerciale », portée par le textile, chasse des campagnes les petits paysans et les tisserands indépendants. Pour survivre, ils doivent désormais travailler contre salaire dans des fabriques (factories) qui rassemblent plusieurs milliers d’ouvriers, sur des métiers appartenant à des marchands devenus industriels. C’est la naissance de la classe ouvrière anglaise. Le travail en usine, le Factory System, où seul compte le profit, impose aux déracinés une discipline et une conception du temps radicalement nouvelles. Avec la révolution industrielle de la fin du XVIIIe siècle, ils subissent un dressage plus violent encore, sous la loi de machines qui réduisent l’ouvrier à un simple rouage.
    Surexploitée et inorganisée, cette classe ouvrière primitive, qui oppose à la main de fer de l’industrie naissante des révoltes spontanées et sporadiques, va mettre plusieurs générations à inventer ses propres formes de lutte, dans une alliance parfois malaisée avec les républicains anglais, inspirés par la Révolution française de 1789. Ses revendications sont sociales et politiques : réglementation du travail des enfants, salaires, durée du temps de travail, liberté syndicale, droit de grève, suffrage universel... Dans les années 1820, après des décennies de combats perdus, une classe ouvrière anglaise puissante et combative semble en mesure de faire la révolution.

    Temps complet
    La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann (Austerlitz, Lénine, Gorki – La révolution à contre-temps) livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’informations. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

    https://www.arte.tv/fr/videos/082189-001-A/le-temps-des-ouvriers-1-4

    #documentaire #film_documentaire #film
    #agriculture #cleasning #nettoyage #industrie #industrie_textile #industrialisation #expulsions_forcées #histoire #Ecosse #UK #exode_rural #déplacés_internes #IDPs #histoire #force_de_travail #classe_ouvrière #Highlands #désindustrialisation #compétition #factory_system #esclavage #Crowley #temps #contrôle_du_temps #salaires #profit #filatures #travail_d'enfants #enfants #femmes #New_Lanark #Robert_Owen #silent_monitor #école #Institut_pour_la_formation_du_caractère #paternalisme #contrôle #tyrannie #liberté_de_commerce #grève #émeute #insécurité_sociale #pauvreté #workhouse #criminalisation_de_la_pauvreté #résistance #Enoch #Great_Enoch #John_Ludd #général_Ludd #luddisme #luttes #insurrection #cadence #progrès_technique #accidents_de_travail #Angleterre #insurrection_luddite #massacre_de_Peterloo #odeur #intercheangeabilité #temps_des_ouvriers

    Sur le silent monitor :

    This small four-sided wooden block was known as a ’silent monitor’ and was used by Robert Owen as a means of imposing discipline at his #New_Lanark_Mills.

    Robert Owen was strongly opposed to the use of corporal punishment, so in order to keep discipline at the New Lanark Mills, he devised his own unique system. The ’silent monitors’ were hung next to each worker in the mills, with each side displaying a different colour. ’Bad’ behaviour was represented by the colour black; ’indifferent’ was represented by blue; ’good’ by yellow; and ’excellent’ by white. The superintendent was responsible for turning the monitors every day, according to how well or badly the worker had behaved. A daily note was then made of the conduct of the workers in the ’books of character’ which were provided for each department in the mills.


    https://www.peoplescollection.wales/items/10456

    New Lanark :

    • Le temps des ouvriers (4/4)Le temps de la destruction

      Stan Neumann déroule sur plus de trois siècles l’histoire du monde ouvrier européen. Dernier volet : dans les années 1930, la classe ouvrière semble plus puissante que jamais. Le succès, en 1936, du Front populaire en France témoigne de cette force. Pourtant, les ouvriers européens vont de défaite en défaite...

      En Espagne, la dictature franquiste, soutenue par Hitler et Mussolini, triomphe en 1939. Puis dans l’Europe asservie, l’Allemagne nazie fait des ouvriers des pays vaincus des « esclaves du XXe siècle » : « travail obligatoire » pour les ouvriers de l’ouest de l’Europe, « extermination par le travail » des juifs, des Tsiganes et des prisonniers de guerre soviétiques.
      Après 1945, la guerre froide génère de nouvelles fractures. En Occident, on achète la paix sociale en améliorant les conditions de vie et de travail dans la plus pure tradition fordiste. À l’Est, le pouvoir est confisqué par des partis uniques qui prétendent représenter les ouvriers tout en les privant des libertés syndicales avec le soutien de l’URSS et de ses tanks. L’espoir renaît dans les années 1970, qui voient fleurir les utopies révolutionnaires, des Lip à Solidarnosc. Mais c’est un chant du cygne. Avec son cortège de misère et de chômage, la désindustrialisation a commencé.

      Temps complet
      La classe ouvrière a-t-elle disparu, ou simplement changé de forme, de nom, de rêve ? Conciliant l’audace et la rigueur historique, l’humour et l’émotion, le détail signifiant et le souffle épique, Stan Neumann ("Austerlitz", « Lénine »", ""Gorki"" – ""La révolution à contre-temps") livre une éblouissante relecture de trois cents ans d’histoire. Faisant vibrer la mémoire des lieux et la beauté des archives, célébrissimes ou méconnues, il parvient à synthétiser avec fluidité une étonnante quantité d’information. Les séquences d’animation, ludiques et inventives, et un commentaire dit par la voix à la fois présente et discrète de Bernard Lavilliers permettent de passer sans se perdre d’un temps à l’autre : celui du travail, compté hier comme aujourd’hui minute par minute, celui des grands événements historiques, et celui, enfin, des changements sociaux ou techniques étalés parfois sur plusieurs décennies, comme le processus de légalisation des syndicats ou du travail à la chaîne. En parallèle, le réalisateur donne la parole à des ouvriers et ouvrières d’aujourd’hui et à une douzaine d’historiens et philosophes, hommes et femmes, « personnages » à part entière dont la passion communicative rythme le récit. On peut citer Jacques Rancière, Marion Fontaine, Alessandro Portelli, Arthur McIvor, Stefan Berger, avec Xavier Vigna comme conseiller scientifique de l’ensemble des épisodes. Cette série documentaire virtuose, où l’expérience intime coexiste avec la mémoire collective, au risque parfois de la contredire, révèle ainsi combien nos sociétés contemporaines ont été façonnées par l’histoire des ouvriers.

      https://www.arte.tv/fr/videos/082189-004-A/le-temps-des-ouvriers-4-4

      #poing_levé #Front_populaire #Espagne #Fígols #mujeres_libres #guerre_d'Espagne #mineurs #alcolisme #violence_domestique #expulsions_collectives #travailleurs_étrangers #Volkswagen #nazisme #extermination_par_le_travail #Berlin #Pologne #Hongrie #superflu #rock_and_roll #mai_68 #Sochaux #Lip #Solidarność #Solidarnosc #Anna_Walentynowicz #printemps_de_Prague #NUM #autonomie_ouvrière #Arthur_McIvor #Margareth_Thatcher #muséification #désindustrialisation #invisibilisation #uberisation

  • Did a Muslim Slave Make Your Chinese Shirt? - WSJ
    https://www.wsj.com/articles/did-a-muslim-slave-make-your-chinese-shirt-11571264293
    https://images.wsj.net/im-117506/social

    Our organization, Citizen Power Initiatives for China, has released a report titled “Cotton: The Fabric Full of Lies,” using direct evidence from data published by the Chinese Communist Party, Chinese companies and witness testimony to prove that prisons and re-education camps in the region are forcing inmates to work in China’s cotton supply chain.

    This report documents the modern slavery that distorts free trade, violates international labor standards and seriously violates human rights. Like the Soviet gulags, this penal system banishes inmates to a remote region and punishes them with hard labor, all while making money for the state.

    #Chine #Ouïghour·es #travail_forcé #Xinjiang #industrie_textile

  • Se l’operaio alle dipendenze del cinese è pachistano

    Che ci fa un piccolo imprenditore cinese in ginocchio? Perché solleva davanti alle telecamere e ai giornalisti un artigianalissimo cartello che recita “Cobas Comanda #Prato, Aiuto Istituzioni”? Perché alcuni operai pachistani vengono picchiati e finiscono in ospedale insieme a un sindacalista?

    Benvenuti a Prato, città di frontiera, ieri come oggi, città dove il nuovo lavorativo e imprenditoriale si presenta prima che altrove. Nei decenni del “piccolo è bello” era stato il distretto industriale per eccellenza; dagli anni Novanta è stato il distretto che ha prima accolto e poi criminalizzato l’imprenditoria dei migranti cinesi; dal 2014 è stato il luogo dove la Regione ha introdotto controlli serrati sul lavoro in maniera esplicitamente discriminante: solo le ditte cinesi sarebbero state controllate a tappeto; negli ultimi tempi, gli imprenditori cinesi di Prato – adeguandosi a un modello già in uso tra gli italiani – sono stati i primi imprenditori migranti ad impiegare massicciamente manodopera immigrata non cinese.

    Oggi Prato è la nuova frontiera di quello che si sarebbe tentati di considerare un conflitto tutto etnico: la contrapposizione tra datori di lavoro cinesi e operai pachistani nell’industria tessile e dell’abbigliamento.

    Nel distretto di Prato i cinesi erano arrivati in sordina, alla fine degli anni Ottanta, proponendosi come terzisti nell’abbigliamento per ditte finali dislocate in diverse città del Centro Nord Italia. Come operai impiegavano solo connazionali, introducendo quindi un modello di etnicizzazione del lavoro che, anche grazie al laboratorio usato come luogo di vita e di lavoro insieme, ha permesso di ristrutturare gli spazi e i tempi del lavoro: gli operai cinesi pagati a cottimo, infatti, si spostavano da un laboratorio cinese all’altro seguendo le commesse in arrivo e il bisogno di evaderle urgentemente. A poco a poco una parte dei terzisti cinesi è riuscita a fare il grande balzo imprenditoriale e ad aprire le proprie ditte finali nel “pronto moda”. Nel frattempo e con gradualità, i cinesi sono riusciti anche ad acquisire da imprenditori pratesi le tintorie che tingono per il pronto moda, ricavandosi quindi uno spazio crescente anche nel settore tessile, appannaggio tradizionale dell’imprenditoria autoctona. Oggi ci sono a Prato circa 3.700 imprese cinesi nelle confezioni e 400 nel tessile.

    Negli ultimi anni, l’organizzazione del lavoro sta cambiando drasticamente nelle imprese cinesi. Gli operai non sono più solo cinesi, ma anche pachistani, bangladesi e africani, sia nelle tintorie che nei laboratori di confezioni. A spiegare questa evoluzione contribuisce la difficoltà crescente per gli imprenditori cinesi di trovare e trattenere presso di loro operai cinesi. Questo a sua volta scaturisce dalla fine degli arrivi di manodopera a basso costo dalla Cina, e dal fatto che i cinesi che vivono in Italia da decenni, se possono, cercano impiego fuori dal manifatturiero.

    Ma il processo di multi-etnicizzazione del lavoro non è solo una reazione a questo. Scaturisce anche dalla concreta possibilità per gli imprenditori di accrescere i propri profitti, impiegando una manodopera ancor più vantaggiosa di quella cinese. Se poi sono rifugiati – come lo sono buona parte dei migranti arrivati negli ultimi anni – gli operai diventano ancora più interessanti perché maggiormente vulnerabili.

    Già qualche anno fa, nelle fasi iniziali del processo di multietnicizzazione, la stampa locale aveva mostrato come vi fosse una sorta di gerarchia degli stipendi dei diversi gruppi di immigrati: gli operai cinesi erano al top, con stipendi (perlopiù a cottimo) di circa 1.300 euro, quelli pachistani e bangladesi avevano salari più bassi di circa 300-400 euro, e gli africani guadagnavano ancora meno. Invece, i pochi italiani che lavoravano nelle tintorie cinesi – operai specializzati o consulenti, a volte ex proprietari – ricevevano compensi ben diversi. Differenze nei salari di operai cinesi e altri immigrati non cinesi sono emerse anche da uno studio che ha analizzato l’impiego di manodopera immigrata non cinese nei centri ingrosso gestiti da cinesi nel Veneto (G. D’Odorico e D. Sacchetto, Il commercio all’ingrosso cinese in Italia: prospettive storiche e presenti in un’ottica globale, in Cinesi tra le maglie del lavoro).

    La differenza fondamentale tra gli operai cinesi e gli altri operai immigrati non sta però principalmente nei divari salariali, quanto nel fatto che i gli operai cinesi, a differenza degli altri immigrati, godono di benefit tradizionalmente garantiti agli operai cinesi nelle imprese cinesi: vitto e alloggio a costo zero. Nelle interviste che abbiamo raccolto nel corso dell’estate, gli operai pachistani protestavano per questo trattamento differenziato a parità di mansioni e di ore lavorate, e facevano i calcoli su quanto si alzerebbero le loro entrate mensili se come i cinesi non dovessero pagarsi l’appartamento e il cibo.

    Inoltre, dal nostro recente lavoro sul campo, così come da una ricerca sullo sfruttamento lavorativo finanziata dal Comune di Prato (A. Cagione e G. Coccoloni, Forme di sfruttamento lavorativo a Prato), emerge il potere assoluto dei datori di lavoro cinesi che lasciano a casa all’istante gli operai pachistani o africani quando, da mesi privi di un solo giorno libero, decidono di rimanere a casa per un giorno e quando chiedono di avere un contratto di lavoro, indispensabile per ottenere il permesso di soggiorno per lavoro. Non era mai stata registrata prima tanta rigidità nei rapporti lavorativi; al contrario, un vantaggio molto apprezzato dagli operai cinesi negli ultimi anni era la maggior flessibilità dell’orario di lavoro garantita dai datori di lavoro cinesi rispetto a quelli italiani – seppur in un contesto di forte sfruttamento e auto-sfruttamento. Inoltre, mentre i contratti di lavoro degli operai cinesi sono perlopiù a tempo indeterminato o si adeguano alle esigenze dei lavoratori cinesi di rinnovare il permesso di soggiorno per lavoro o di accedere al ricongiungimento con i familiari, i contratti dei lavoratori immigrati non cinesi sono di breve durata, quando ci sono.

    Il processo di etnicizzazione gerarchizzata in atto permette di fare luce su alcuni importanti mutamenti nel mondo del lavoro. L’idea che gli immigranti facciano i lavori che gli italiani non vogliono fare è in un certo senso superata. Oggi, e sempre di più, sono i datori di lavoro stessi a cercare attivamente gli operai immigrati preferendoli ai cosiddetti autoctoni. Detto altrimenti, il processo di etnicizzazione del lavoro scaturisce (anche) da volontà imprenditoriali di sfruttare al meglio il lavoro dipendente, giocando su tutte le forme di vulnerabilità possibili. E secondo molti il processo di precarizzazione intacca prima le categorie più vulnerabili, come i migranti e i giovani, per poi estendersi a fasce sempre più vaste di lavoratori, inclusi quelli cosiddetti “di concetto”. Allo stesso tempo, questo processo di sfruttamento rapace risponde all’esigenza di contenere sempre più il costo del lavoro in settori dove la concorrenza è serrata e i margini di profitto per i terzisti sono in continuo ribasso.

    Oggi, guidati dai sindacalisti autoctoni di Si Cobas – il sindacato di base che ha condotto lotte di successo tra gli immigrati che lavorano nella logistica – i pachistani impiegati in alcune aziende tessili pratesi gestite da cinesi scendono in sciopero e bloccano la produzione. Chiedono di non lavorare 12 ore al giorno 7 giorni su 7; chiedono di non avere contratti da 2, 4 o 6, ore ma contratti adeguati al numero di ore effettivamente svolte. Gli imprenditori cinesi reagiscono male agli scioperi dei lavoratori. I sindacalisti ci raccontano di imprenditori cinesi increduli, che non sanno spiegarsi come mai gli operai possano scendere in sciopero e addirittura possano bloccare la produzione, ostacolando l’entrata e l’uscita delle merci. A fine giugno, alcuni operai pachistani in sciopero sono stati portati in ospedale perché picchiati da cinesi durante un picchetto davanti alla tintoria dove lavoravano.

    Se pensiamo alle repressioni degli scioperi in Cina e all’irregimentazione del lavoro in Asia, viene da chiedersi se questo sia un modello tutto cinese di gestione della conflittualità con gli operai.

    Ma pensare che si tratti di un modello cinese è una foglia di fico. Oggi a Prato c’è una manciata di imprenditori pachistani nel settore delle confezioni che dà lavoro a connazionali. I loro operai ci raccontano che non c’è differenza tra i datori di lavoro cinesi e quelli pachistani: i livelli di sfruttamento sono gli stessi. Inoltre, i laboratori terzisti pachistani cuciono vestiti per ditte finali cinesi e italiane. Questo permette di capire che quello che è in atto non è uno scontro etnico, ma un’evoluzione nello sfruttamento del lavoro dove ogni imprenditore sfrutta ogni occasione per massimizzare il profitto. Pensare che si tratti di un modello cinese, inoltre, serve solo a non vedere come nel nostro Paese, da anni ormai, la difesa dei diritti dei lavoratori abbia finito per essere inusuale, inaspettata e perfino demonizzata. Diverse ricerche hanno mostrato come un costante processo di normalizzazione del lavoro precario – con la giustificazione che avrebbe favorito la ripresa dell’occupazione – ha portato a una proliferazione del lavoro povero e sfruttato. Contratti finti, che dichiarano orari di lavoro ridicoli rispetto a quelli effettivi non sono tipicamente cinesi. Paghe sempre più basse, lontane da quelle contrattuali sono la regola anche tra i giovani e meno giovani autoctoni, e ferie, malattia, e maternità sono diventati vocaboli sempre più desueti nel nostro Paese in generale, e non solo tra i lavoratori migranti.

    I cinesi hanno imparato cosa si può fare in questo Paese, lo hanno imparato così bene da dire oggi a chiare lettere – con quel cartello “Istituzioni aiuto!” – che si aspettano che il governo (locale) faccia rispettare il patto (nazionale) secondo cui i sindacati devono restare immobili e gli operai devono essere grati per avere il lavoro, non importa quanto grave sia lo sfruttamento. La cartina tornasole di questo stato di cose sta in un’azione istituzionale preoccupante: il foglio di via che la questura di Prato ha presentato ai due sindacalisti di Si Cobas che mobilitano i lavoratori pachistani in sciopero per avere un lavoro (più) dignitoso.

    https://www.rivistailmulino.it/news/newsitem/index/Item/News:NEWS_ITEM:4847
    #guerre_entre_pauvres #travail #exploitation #Italie #migrations #pakistanais #chinois #industrie_textile #ethnicisation_du_travail #textile #vulnérabilité #inégalités #salaire #ouvriers #précarisation #permis_de_séjour #etnicizzazione_gerarchizzata (#ethnicisation_hiéarchisée) #ethnicisation_du_travail #capitalisme #modèle_chinois #droits_des_travailleurs #working_poors #déportabilité

    ping @albertocampiphoto @wizo

  • Mme Li et la dentelle de Calais : récit d’un fiasco industriel
    https://www.mediapart.fr/journal/economie/090619/mme-li-et-la-dentelle-de-calais-recit-d-un-fiasco-industriel

    Racheté il y a trois ans par un groupe chinois qui lui promettait la lune, Desseilles, l’un des derniers fleurons de la dentelle calaisienne, vient d’être placé en redressement judiciaire. Récit d’un fossé d’incompréhensions.

    #Reportage #fermeture_d'usine,_dentelle,_Calais,_Desseilles

  • All What Your #Jeans Can (and Do) Hide !

    Paris, Milan, New York, Tokyo… These are just some of the world’s most prestigious fashion catwalks. There, and elsewhere, perfectly – and often unrealistically – silhouetted young women and men graciously parade to impress elite guests and TV watchers with surprising, fabulous creativity of the most renowned fashion designers and dressmakers.

    Yet…

    … Yet, regardless of the amazing costs of such shows – and of what you may wonder how eccentric can be some of the displayed clothing – there is a hidden cost that Mother Nature pays (and which is not included in the price tag).

    The environmental price

    2,000 gallons (some 7.570 litres) of water needed to make one pair of jeans;
    93 billion cubic metres of water, enough for 5 million people to survive, is used by the fashion industry every year;
    fashion industry produces 20% of global wastewater;
    clothing and footwear production is responsible for 8% of global greenhouse gas emissions;
    every second, the equivalent of one garbage truck of textiles is landfilled or burned;
    clothing production doubled between 2000 and 2014.


    http://www.ipsnews.net/2019/04/jeans-can-hide
    #industrie_textile #environnement #eau #effet_de_serre #climat #changement_climatique #déchets

  • Coup de gueule. Cette rage qui m’a envahie en voyant mon « fessier » sur un arrêt de bus
    https://www.revolutionpermanente.fr/Coup-de-gueule-Cette-rage-qui-m-a-envahie-en-voyant-mon-fessier

    Et oui j’enrage, une fois de plus, même si je ne découvre rien. J’enrage à la seule pensée que leur jeu fonctionne encore, celui qui consiste à nous faire croire que nous, les #femmes, ne devrions avoir comme barème d’estime de nous-mêmes que la courbure de notre #fessier. J’enrage qu’on cherche à nous faire croire que la liberté peut être synonyme d’une normalisation de nos #corps, j’enrage que la femme en soit toujours réduite au statut de #femme-objet, j’enrage que tant de femmes, sœurs, filles, mères, en souffrent chaque jour, persuadées malgré elles que leur valeur se mesure à leur tour de poitrine. J’enrage de trouver sur une même affiche, encore en 2019, les mots « liberté », « égalité », et « beau fessier », qui plus est sur une publicité d’une marque qui ose s’appeler « Le temps des Cerises ».

    #sexisme #femme_tronc #pub #rage

  • #1083_km, et pas un de plus !

    #1083 km séparent les 2 villes les plus éloignées de l’hexagone : Menton au sud-est et Porspoder un petit village au nord de Brest. Depuis le début de l’aventure 1083, nous découvrons à quel point la disparition de filières entières dans l’industrie textile française est une puissante réalité.

    Songez qu’il y a 20 ans, Romans, capitale de la chaussure, rassemblait plus de 2 000 emplois dans ce secteur… contre 300 aujourd’hui.

    Grâce aux ateliers encore en place, nous avons éco-conçu à Romans les chaussures 1083 : des sneakers unisexes, urbaines, confortables, et résistantes grâce à leur semelle cousue.

    L’histoire du jeans en France est encore plus saisissante puisque malgré l’invention du denim, à Nimes, les jeans 1083 sont les premiers à être de nouveau entièrement teints, tissés et confectionnés en France !
    Ainsi, sur un prix de vente de 89 €, près de 86 € irriguent l’#économie_locale. Seul le coton biologique ne pousse pas en France, et les rivets et boutons viennent de voisins italiens faute de fabricant français.

    Trois ans après le lancement de 1083 grâce au financement participatif, vous avez commandé plus de 30 000 jeans et #chaussures, qui nous ont permis de créer 30 emplois en France. Mesurons ainsi le potentiel d’emplois des 88 millions de jeans et 360 millions de chaussures vendus chaque année en France…

    De Menton à Porspoder, faisons le choix de « #relookaliser », ça change tout !

    #Thomas_HURIEZ


    https://www.1083.fr

    #industrie_textile #made_in_France (100%) #France #textile #habillement #mode #jeans #c'est_possible #alternatives #développement_local

    https://www.youtube.com/watch?v=o8dLfGMLkTk

  • S’habiller à la mode durable pour être éthique et chic
    https://www.franceinter.fr/emissions/des-idees-pour-demain/des-idees-pour-demain-21-juillet-2018

    Les catalogues printemps/été et automne/hiver ont laissé la place à une collection par mois, voire par semaine. On appelle cela la #fast_fashion... et cela répond à une équation simple et dévastatrice : vite, beaucoup, pas cher.

    En résulte que l’#industrie_textile est devenue la seconde plus polluante au monde, derrière le pétrole. Chaque année, 600.000 tonnes de vêtements, linges et chaussures sont consommés en France. Pourtant 70% de notre garde-robe reste en moyenne au placard, et seulement un tiers de nos vêtements sont recyclés

  • Inside Italy’s Shadow Economy

    #Home_work — working from home or a small workshop as opposed to in a factory — is a cornerstone of the #fast-fashion supply chain. It is particularly prevalent in countries such as India, Bangladesh, Vietnam and China, where millions of low-paid and predominantly female home workers are some of the most unprotected in the industry, because of their irregular employment status, isolation and lack of legal recourse.

    That similar conditions exist in Italy, however, and facilitate the production of some of the most expensive wardrobe items money can buy, may shock those who see the “Made in Italy” label as a byword for sophisticated craftsmanship.

    Increased pressure from #globalization and growing competition at all levels of the market mean that the assumption implicit in the luxury promise — that part of the value of such a good is that it is made in the best conditions, by highly skilled workers, who are paid fairly — is at times put under threat.

    Though they are not exposed to what most people would consider sweatshop conditions, the homeworkers are allotted what might seem close to sweatshop wages. Italy does not have a national minimum wage, but roughly €5-7 per hour is considered an appropriate standard by many unions and consulting firms. In extremely rare cases, a highly skilled worker can earn as much as €8-10 an hour. But the homeworkers earn significantly less, regardless of whether they are involved in leatherwork, embroidery or another artisanal task.

    In #Ginosa, another town in Puglia, Maria Colamita, 53, said that a decade ago, when her two children were younger, she had worked from home on wedding dresses produced by local factories, embroidering gowns with pearl paillettes and appliqués for €1.50 to €2 per hour.

    Each gown took 10 to 50 hours to complete, and Ms. Colamita said she worked 16 to 18 hours a day; she was paid only when a garment was complete.

    “I would only take breaks to take care of my children and my family members — that was it,” she said, adding that she currently works as a cleaner and earns €7 per hour. “Now my children have grown up, I can take on a job where I can earn a real wage.”

    Both women said they knew at least 15 other seamstresses in their area who produced luxury fashion garments on a piece-rate basis for local factories from their homes. All live in Puglia, the rural heel of Italy’s boot that combines whitewashed fishing villages and crystal clear waters beloved by tourists with one of the country’s biggest manufacturing hubs.

    Few were willing to risk their livelihoods to tell their tales, because for them the flexibility and opportunity to care for their families while working was worth the meager pay and lack of protections.

    “I know I am not paid what I deserve, but salaries are very low here in Puglia and ultimately I love what I do,” said another seamstress, from the attic workshop in her apartment. “I have done it all my life and couldn’t do anything else.”

    Although she had a factory job that paid her €5 per hour, she worked an additional three hours per day off the books from home, largely on high-quality sample garments for Italian designers at roughly €50 apiece.

    “We all accept that this is how it is,” the woman said from her sewing machine, surrounded by cloth rolls and tape measures.
    ‘Made in Italy,’ but at What Cost?

    Built upon the myriad small- and medium-size export-oriented manufacturing businesses that make up the backbone of Europe’s fourth largest economy, the centuries-old foundations of the “Made in Italy” legend have shaken in recent years under the weight of bureaucracy, rising costs and soaring unemployment.

    Businesses in the north, where there are generally more job opportunities and higher wages, have suffered less than those in the south, which were hit hard by the boom in cheap foreign labor that lured many companies into moving production operations abroad.

    Few sectors are as reliant on the country’s manufacturing cachet as the luxury trade, long a linchpin of Italy’s economic growth. It is responsible for 5 percent of Italian gross domestic product, and an estimated 500,000 people were employed directly and indirectly by the luxury goods sector in Italy in 2017, according to data from a report from the University of Bocconi and Altagamma, an Italian luxury trade organization.

    Those numbers have been bolstered by the rosy fortunes of the global luxury market, expected by Bain & Company to grow by 6 to 8 percent, to €276 to €281 billion in 2018, driven in part by the appetite for “Made in Italy” goods from established and emerging markets.

    But the alleged efforts by some luxury brands and lead suppliers to lower costs without undermining quality have taken a toll on those on those operating at the very bottom of the industry. Just how many are affected is difficult to quantify.

    According to data from Istat (the Italian National Institute of Statistics), 3.7 million workers across all sectors worked without contracts in Italy in 2015. More recently, in 2017, Istat counted 7,216 home workers, 3,647 in the manufacturing sector, operating with regular contracts.

    However, there is no official data on those operating with irregular contracts, and no one has attempted to quantify the group for decades. In 1973, the economist Sebastiano Brusco estimated that Italy had one million contracted home workers in apparel production, with a roughly equal figure working without contracts. Few comprehensive efforts have been made to examine the numbers since.

    This New York Times investigation collected evidence of about 60 women in the Puglia region alone working from home without a regular contract in the apparel sector. Tania Toffanin, the author of “Fabbriche Invisibili,” a book on the history of home working in Italy, estimated that currently there are 2,000 to 4,000 irregular home workers in apparel production.

    “The deeper down we go in the supply chain, the greater the abuse,” said Deborah Lucchetti, of #Abiti_Puliti, the Italian arm of #Clean_Clothes_Campaign, an anti-sweatshop advocacy group. According to Ms. Lucchetti, the fragmented structure of the global manufacturing sector, made up of thousands of medium to small, often family-owned, businesses, is a key reason that practices like unregulated home working can remain prevalent even in a first world nation like Italy.

    Plenty of Puglian factory managers stressed they adhered to union regulations, treated workers fairly and paid them a living wage. Many factory owners added that almost all luxury names — like Gucci, owned by Kering, for example, or Louis Vuitton, owned by #LVMH Moët Hennessy Louis Vuitton — regularly sent staff to check on working conditions and quality standards.

    When contacted, LVMH declined to comment for this story. A spokesman for MaxMara emailed the following statement: “MaxMara considers an ethical supply chain a key component of the company’s core values reflected in our business practice.”

    He added that the company was unaware of specific allegations of its suppliers using home workers, but had started an investigation this week.

    According to Ms. Lucchetti, the fact that many Italian luxury brands outsource the bulk of manufacturing, rather than use their own factories, has created a status quo where exploitation can easily fester — especially for those out of union or brand sightlines. A large portion of brands hire a local supplier in a region, who will then negotiate contracts with factories in the area on their behalf.

    “Brands commission first lead contractors at the head of the supply chain, which then commission to sub-suppliers, which in turn shift part of the production to smaller factories under the pressure of reduced lead time and squeezed prices,” Ms. Lucchetti said. “That makes it very hard for there to be sufficient transparency or accountability. We know home working exists. But it is so hidden that there will be brands that have no idea orders are being made by irregular workers outside the contracted factories.”

    However, she also called these problems common knowledge, and said, “some brands must know they might be complicit.”

    The ‘Salento Method’

    Certainly that is the view of Eugenio Romano, a former union lawyer who has spent the last five years representing Carla Ventura, a bankrupt factory owner of Keope Srl (formerly CRI), suing the Italian shoe luxury behemoth Tod’s and Euroshoes, a company that Tod’s used as a lead supplier for its Puglian footwear production.

    Initially, in 2011, Ms. Ventura began legal proceedings against only Euroshoes, saying that consistently late payments, shrinking fee rates for orders and outstanding bills owed to her by that company were making it impossible to maintain a profitable factory and pay her workers a fair wage. A local court ruled in her favor, and ordered Euroshoes to pay the debts, which, after appealing unsuccessfully, the company did.

    Orders dried up in the wake of those legal proceedings. Eventually, in 2014, Keope went bankrupt. Now, in a second trial, which has stretched on for years without a significant ruling, Ms. Ventura has brought another action against Euroshoes, and Tod’s, which she says had direct knowledge of Euroshoes’ unlawful business practices. (Tod’s has said it played no role in nor had any knowledge of Euroshoes’ contract issues with Keope. A lawyer for Euroshoes declined to comment for this article.)

    “Part of the problem down here is that employees agree to forgo their rights in order to work,” Mr. Romano said from his office in the town of Casarano, ahead of the next court hearing, scheduled for Sept. 26.

    He spoke of the “Salento method,” a well-known local phrase that means, essentially: “Be flexible, use your methods, you know how to do it down here.”

    The region of Salento has a high unemployment rate, which makes its work force vulnerable. And although brands would never officially suggest taking advantage of employees, some factory owners have told Mr. Romano that there is an underlying message to use a range of means, including underpaying employees and paying them to work at home.

    The area has long been a hub of third-party shoemakers for luxury brands including Gucci, Prada, Salvatore Ferragamo and Tod’s. In 2008, Ms. Ventura entered into an exclusive agreement with Euroshoes to become a sub-supplier of shoe uppers destined for Tod’s.

    According to Ms. Ventura’s lawsuit, she then became subject to consistently late payments, as well as an unexplained reduction in prices per unit from €13.48 to €10.73 per shoe upper from 2009 to 2012.

    While many local factories cut corners, including having employees work from home, Ms. Ventura said she still paid full salaries and provided national insurance. Because the contract required exclusivity, other potential manufacturing deals with rival brands including Armani and Gucci, which could have balanced the books, could not be made.

    Production costs were no longer covered, and promises of an increased number of orders from Tod’s via Euroshoes never came, according to the legal papers filed in Ms. Ventura’s case.

    In 2012, orders from Tod’s via Euroshoes stopped completely, one year after Ms. Ventura first took Euroshoes to court for her unpaid bills. Ms. Ventura said that eventually put Keope on the road to bankruptcy, according to legal documents. Ms. Ventura was declared insolvent in 2014.

    When asked for comment, a Tod’s spokeswoman said in a statement:

    “Keope filed a lawsuit against one of our suppliers, Euroshoes, and Tod’s, to recover damages related to the alleged actions or omissions of Euroshoes. Tod’s has nothing to do with the facts alleged in the case and never had a direct commercial relationship with Keope. Keope is a subcontractor of Euroshoes, and Tod’s is completely extraneous to their relationship.”

    The statement also said that Tod’s had paid Euroshoes for all the amounts billed in a timely and regular manner, and was not responsible if Euroshoes failed to pay a subcontractor. Tod’s said it insisted all suppliers perform their services in line with the law, and that the same standard be applied to subcontractors.

    “Tod’s reserves the right to defend its reputation against the libelous attempt of Keope to involve it in issues that do not concern Tod’s,” the spokeswoman said.

    Indeed, a report by Abiti Puliti that included an investigation by Il Tacco D’Italia, a local newspaper, into Ms. Ventura’s case found that other companies in the region sewing uppers by hand had women do the work irregularly from their homes. That pay would be 70 to 90 euro cents a pair, meaning that in 12 hours a worker would earn 7 to 9 euros.

    ‘Invisible’ Labor

    Home working textile jobs that are labor intensive or require skilled handiwork are not new to Italy. But many industry observers believe that the lack of a government-set national minimum wage has made it easier for many home workers to still be paid a pittance.

    Wages are generally negotiated for workers by union representatives, which vary by sector and by union. According to the Studio Rota Porta, an Italian labor consultancy, the minimum wage in the textile industry should be roughly €7.08 per hour, lower than those for other sectors including food (€8.70), construction (€8) and finance (€11.51).

    But workers who aren’t members of unions operate outside the system and are vulnerable to exploitation, a source of frustration for many union representatives.

    “We do know about seamstresses working without contracts from home in Puglia, especially those that specialize in sewing appliqué, but none of them want to approach us to talk about their conditions, and the subcontracting keeps them largely invisible,” said Pietro Fiorella, a representative of the CGIL, or Italian General Confederation of Labour, the country’s largest national union.

    Many of them are retired, Mr. Fiorella said, or want the flexibility of part-time work to care for family members or want to supplement their income, and are fearful of losing the additional money. While unemployment rates in Puglia recently dropped to 19.5 percent in the first quarter of 2018 from nearly 21.5 percent in the same period a year ago, jobs remain difficult to come by.

    A fellow union representative, Giordano Fumarola, pointed to another reason that garment and textile wages in this stretch of southern Italy have stayed so low for so long: the offshoring of production to Asia and Eastern Europe over the last two decades, which intensified local competition for fewer orders and forced factory owners to drive down prices.

    In recent years, some luxury companies have started to bring production back to Puglia, Mr. Fumarola said. But he believed that power is still firmly in the hands of the brands, not suppliers already operating on wafer-thin margins. The temptation for factory owners to then use sub-suppliers or home workers, or save money by defrauding their workers or the government, was hard to resist.

    Add to that a longstanding antipathy for regulation, high instances of irregular unemployment and fragmented systems of employment protection, and the fact that nonstandard employment has been significantly liberalized by successive labor market reforms since the mid-1990s, and the result is further isolation for those working on the margins.

    A national election in March swept a new populist government to power in Italy, placing power in the hands of two parties — the Five Star Movement and the League — and a proposed “dignity decree” aims to limit the prevalence of short-term job contracts and of firms shifting jobs abroad while simplifying some fiscal rules. For now, however, legislation around a minimum wage does not appear to be on the agenda.

    Indeed, for women like the unnamed seamstress in Santeramo in Colle, working away on yet another coat at her kitchen table, reform of any sort feels a long way off.

    Not that she really minded. She would be devastated to lose this additional income, she said, and the work allowed her to spend time with her children.

    “What do you want me to say?” she said with a sigh, closing her eyes and raising the palms of her hands. “It is what it is. This is Italy.”


    https://www.nytimes.com/2018/09/20/fashion/italy-luxury-shadow-economy.html
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    via @isskein