• « La vraie #souveraineté_alimentaire, c’est faire évoluer notre #modèle_agricole pour préparer l’avenir »

    Professeur à l’université Paris-Saclay AgroParisTech, l’économiste de l’environnement #Harold_Levrel estime que le concept de « souveraineté alimentaire » a été détourné de sa définition originelle pour justifier un modèle exportateur et productiviste.

    Hormis les denrées exotiques, dans la plupart des secteurs, la #production_agricole nationale pourrait suffire à répondre aux besoins des consommateurs français, sauf dans quelques domaines comme les fruits ou la volaille. Or, les #importations restent importantes, en raison d’un #modèle_intensif tourné vers l’#exportation, au risque d’appauvrir les #sols et de menacer l’avenir même de la production. D’où la nécessité de changer de modèle, plaide l’économiste.

    Comment définir la souveraineté alimentaire ?

    Selon la définition du mouvement altermondialiste Via Campesina lors du sommet mondial sur l’alimentation à Rome en 1996, c’est le droit des Etats et des populations à définir leur #politique_agricole pour garantir leur #sécurité_alimentaire, sans provoquer d’impact négatif sur les autres pays. Mais les concepts échappent souvent à ceux qui les ont construits. Mais aujourd’hui, cette idée de solidarité entre les différents pays est instrumentalisée pour justifier une stratégie exportatrice, supposée profiter aux pays du Sud en leur fournissant des denrées alimentaires. Le meilleur moyen de les aider serait en réalité de laisser prospérer une #agriculture_vivrière et de ne pas les obliger à avoir eux aussi des #cultures_d’exportation. Au lieu de ça, on maintient les rentes de pays exportateurs comme la France. Quand le gouvernement et d’autres parlent d’une perte de souveraineté alimentaire, ça renvoie en réalité à une baisse des exportations dans certains secteurs, avec un état d’esprit qu’on pourrait résumer ainsi : « Make French agriculture great again. » Depuis le Covid et la guerre en Ukraine, la souveraineté alimentaire est devenue l’argument d’autorité pour poursuivre des pratiques qui génèrent des catastrophes écologiques et humaines majeures.

    Nous n’avons donc pas en soi de problème d’#autonomie_alimentaire ?

    Ça dépend dans quel domaine. Les défenseurs d’un modèle d’exploitation intensif aiment à rappeler que notre « #dépendance aux importations » est de 70 % pour le #blé dur, 40 % pour le #sucre, et 29 % pour le #porc. Mais omettent de préciser que nos taux d’auto-approvisionnement, c’est-à-dire le rapport entre la production et la consommation françaises, sont de 123 % pour le blé dur, 165 % pour le sucre, et 99 % pour le porc. Ça signifie que dans ces secteurs, la production nationale suffit en théorie à notre consommation, mais que l’on doit importer pour compenser l’exportation. Il y a en réalité très peu de produits en France sur lesquels notre production n’est pas autosuffisante. Ce sont les fruits exotiques, l’huile de palme, le chocolat, et le café. On a aussi des vrais progrès à faire sur les fruits tempérés et la viande de #volaille, où l’on est respectivement à 82 et 74 % d’auto-approvisionnement. Là, on peut parler de déficit réel. Mais il ne serait pas très difficile d’infléchir la tendance, il suffirait de donner plus d’aides aux maraîchers et aux éleveurs, qu’on délaisse complètement, et dont les productions ne sont pas favorisées par les aides de la #Politique_agricole_commune (#PAC), qui privilégient les grands céréaliers. En plus, l’augmentation de la production de #fruits et #légumes ne nécessite pas d’utiliser plus de #pesticides.

    Que faire pour être davantage autonomes ?

    A court terme, on pourrait juste rebasculer l’argent que l’on donne aux #céréaliers pour soutenir financièrement les #éleveurs et les #maraîchers. A moyen terme, la question de la souveraineté, c’est : que va-t-on être capable de produire dans dix ans ? Le traitement de l’#eau polluée aux pesticides nous coûte déjà entre 500 millions et 1 milliard d’euros chaque année. Les pollinisateurs disparaissent. Le passage en #bio, c’est donc une nécessité. On doit remettre en état la #fertilité_des_sols, ce qui suppose d’arrêter la #monoculture_intensive de #céréales. Mais pour cela, il faut évidemment réduire certaines exportations et investir dans une vraie souveraineté alimentaire, qui nécessite de faire évoluer notre modèle agricole pour préparer l’avenir.

    https://www.liberation.fr/environnement/agriculture/la-vraie-souverainete-alimentaire-cest-faire-evoluer-notre-modele-agricol
    #agriculture_intensive #industrie_agroalimentaire

  • Les Hauts-de-France, champions des distributeurs automatiques de légumes - Libération
    http://www.liberation.fr/france/2018/09/02/les-hauts-de-france-champions-des-distributeurs-automatiques-de-legumes_1

    Si l’investissement est lourd, ce système évite aux agriculteurs les aléas de la vente en gros, et s’avère moins chronophage que la vente directe.

    Dans les campagnes des Hauts-de-France, les #maraîchers ont adopté le distributeur automatique. Des #fruits et #légumes frais, direct de la ferme, 24 heures sur 24, les clients apprécient. Les machines ont essaimé aux ronds-points les plus fréquentés et dans les villages. « Sur les 600 présentes en France, la région en concentre 70%, tout simplement parce qu’elle a été précurseure », constate David Clemente, gérant de Providif, fournisseur des automates, qui s’est reconverti après avoir été dans les distributeurs de vidéos à louer.

    Ravitaillement deux fois par jour

    En cette fin août, à Saint-Sylvestre-Cappel, en #Flandre, on trouve derrière les vitres des tomates cerises, des fraises, du jus de pomme fermier, et tout ce qu’il faut pour une ratatouille. Pour payer, c’est le même système que les boissons fraîches et les friandises dans les gares et les métros. On entre le numéro de casier, on valide, et on règle en espèces ou en carte bleue sans contact. Une cliente hésite, un peu paumée sur la marche à suivre. Le maraîcher Benoît Denis, 35 ans, intervient. Un brin de pédagogie, et les vitrines s’ouvrent les unes après les autres, avec un petit « pop » : il suffit de se saisir ensuite des marchandises achetées. Dans ses #distributeurs automatiques, il vend sa production, cueillie le jour même. « Ma fraise est sortie de la serre maximum vingt-quatre heures avant, plus frais je ne connais pas ! », assure-t-il. Son affaire tourne rondement, et l’oblige à ravitailler jusqu’à deux fois par jour les machines. « Du côté de Dunkerque, je connais un autre agriculteur qui a installé le sien dans la zone industrielle », sourit Simon Ammeux, président des Jeunes agriculteurs des Hauts-de-France. « Les ouvriers viennent acheter à la fin de leur poste, à 2 ou 3 heures du matin, surtout pendant la saison des fraises. »

    Fluctuation des cours

    Les agriculteurs trouvent avantage au système : « Un maraîcher qui ne fait pas de vente directe s’en sort moins bien, explique Simon Ammeux. Il est bien plus soumis aux aléas du marché quand il vend en gros. » Car les cours fluctuent : la pomme de terre, par exemple, 30 euros la tonne l’année dernière et 300 euros cette année. Benoît Denis la vend au consommateur à 1 euro le kilo, soit 1 000 euros la tonne, et le prix est stable.

    Le problème de la vente directe, c’est qu’elle est chronophage et empiète sur le temps passé aux champs. Le distributeur automatique résout en partie ce dilemme. Benoît Denis assume son choix : vendre au détail et cultiver de petites quantités, avec des variétés choisies pour leur qualité, plutôt que de la monoculture en gros pour les industriels. « Je ne pourrais pas vendre des fruits ou des légumes qui n’ont pas de goût », s’excuse-t-il presque. Mais l’investissement est lourd : 25 000 euros pour l’achat des distributeurs, 5 000 euros pour l’aménagement du chalet qui les abrite. Avant de se mettre à son compte, il y a trois ans, il a été dix ans salarié agricole, et il vit aujourd’hui sur ses économies. Un salaire ? Ce ne sera pas cette année, avec la sécheresse.
    Stéphanie Maurice correspondante à Lille

    Ça fait cher l’investissement quand même !

    #agriculture #nord #automates

    • L’essentiel, c’est qu’il n’y ai plus de contact avec un être humain.
      Cela se fait depuis longtemps, en Flandres (Belgique), et il y a la bas des distributeur de pain. On ne va quand même pas demander à libé de faire un vrai reportage.