Ce pourrait être un beau leitmotiv de cette année 2012 : la psychogéographie est toujours vivante. On réinterroge son histoire officielle, on renouvelle à son aune les utopies architecturales du vingtième siècle, et on ne compte plus ses dérivés technologiques (moi-même ai commis un papier là-dessus). Sur la vague des applications web à « users generated contents », MyBlockNYC propose par exemple aux new-yorkais de faire le tour de leur voisinage de façon créative ; à Birmingham, on traque le parcours aléatoire des marcheurs… Mais dans la « vie réelle », un nouveau tourisme expérimental fait florès, sur les terrils de Charleroi comme dans les endroits les plus insolites de la planète, grâce au génial LAboratoire de TOURisme EXpérimental (LATOUREX)… Le goût des villes « invisibles » gagne New York, aussi bien que Paris ou Bordeaux.
Guy Debord y tiendra mordicus : lui et ses amis ont institué les premiers la psychogéographie et la théorie de la dérive entendue comme méthode d’analyse urbaine. La dérive est le passage rapide entre les ambiances urbaines. « La dérive est une technique du déplacement sans but. Elle se fonde sur l’influence du décor », écrit Guy Debord dès 1954.
Cependant, n’en déplaise à ceux qui attribuent la psychogéographie au seul mouvement situationniste, et à Guy Debord en particulier, il y a une forte « tradition locale » londonienne de la topographie de la ville comme arrière plan psychique et soubassement d’une histoire individuelle. De Quincey, Defoe, Blake, Arthur Machen, Robert Louis Stevenson… Londres s’est prêtée à toutes les errances. La promenade digressive à Londres demeure aujourd’hui encore un corollaire d’une forme d’introspection par le récit du marcheur. Comme si ces lieux n’existaient pas vraiment, et que les faisait avoir et être lieu une fiction que je me raconte. « Le récit est une délinquance en réserve » (Michel de Certeau).