person:samuel beckett

  • Dans les Cévennes, où il fait froid en ce début de mai, il n’empêche on déguste les pleurotes élevées en cave par une chouette voisine, sont-ce les champignons mais cela donne de nouvelles idées de reconstruction pour Notre Dame (pour le concours d’architecture du Terrier), je continue de travailler sur Le Rapport sexuel existe en ayant quelques idées pour la couverture du livre, Valérie peint le portrait de Zoé, un soir je regarde Film de Buster Keaton et Samuel Beckett, dans une pièce isolée de la maison je tombe sur une ancienne photographie de Berlin, pensée pour @peweck, et au retour de nos Cévennes glacées, on traverse la Margeride et Haute-Loire enneigées, concert du Surnat’ (Tallman, la version concert) à l’Echangeur avec en première partie deux formations issues du Collectif 2035, Where is Mr R.? Et Morgane Carnet, le lendemain Emile et moi tombons sur un vieux cadre de piano, je ne verrai donc pas Simone Barbès ou la vertu de Marie-Claude Treilhou, Au Tracé provisoire, concerts de Burkhard Stangle en duo avec dieb13, puis eRikm et Anthony Pateras, le 22 à Asnières c’est pas forcément ma tasse d’oolong, je revois avec plaisir Inherent Vice de Paul Thomas Anderson, sortie du numéro 9 de La Moitié du fourbi intitulé Vite, Bruno Angelini, Michele Rabbia et Tore Brunborg accueillent les images vidéos d’Al’l (je n’en pense pas forcément grand chose, je parle des images), je maintiens une certaine idolâtrie pour Jim Jarmusch dont je vois chaque film à sa sortie depuis Stranger Than Paradise, j’ai remis la main sur le numéro de Palettes qu’Alain Jaubert a consacré à la Grande Jatte de Pierre Georges Seurat (et auquel j’avais contribué au millénaire dernier), Monrovia, Indiana de Frédéric Wiseman nous montre la première puissance mondiale en son centre et son coeur (par ailleurs cardiaque le coeur), je pars à la recherche du troisième point de fuite avec Marilou et cela devient toute une aventure en html, je remets la main sur des archives personnelles pas toutes avouables, comme ma contribution à Bonne idée de Jean-Jacques Goldman, c’est l’anniversaire de Julia, je suis époustouflé par Passion de Ryusuke Hamaguchi, je revois Carnaval de Thomas Vincent, Printemps de Sylvaine Hélary à l_Echangeur_ est une joie sans mélange, Elena, Christian Wallumrod et Kim Myhr nous laissent un peu sur notre faim et Chris Corsano est un batteur extraordinaire, tout ce au travers de quoi je passe d’archives personnelles à la recherche du troisième point de fuite, très belles toiles de Bernard Frize à Beaubourg, quelques oeuvres du musée découvertes par Zoé, un peu scotchée dit-elle par Giuseppe Penone, Louis Sclavis invite trois violoncellistes, quel dommage que cela ne se passe pas dans une bonne salle de concert !

    http://www.desordre.net/photographie/numerique/divers/201905.htm

    Quel joli mois de mai !

  • au pays du dub et du silence
    http://www.radiopanik.org/emissions/le-couloir-sans-fin/au-pays-du-dub-et-du-silence-2

    Couloir sans fin n°4

    Au pays du dubien et du silencieux

    Kangding Ray

    Cotti

    Aoki Takamasa

    Matta

    Scanner

    Saoulaterre

    Alec Empire

    Tester feat red rat

    oVe NaxX

    Hassan K

    Torque

    Interlope

    Dj Scud

    Twinhooker

    DJ Floorclearer

    Ebola

    Kill Joy

    someone from cock rock disco

    Istari lasterfahrer

    Circuit parallele

    Aoki takamasa

    Saoulaterre

    alphacut Jack Mc govan reading a text from Samuel Beckett text for nothing#8 +lock grooves

    http://www.ubu.com/aspen/aspen5and6/audio5A.html

    Vinny Roma

    #dubstep #electronic #jungle #lock_grooves #dubstep,electronic,jungle,lock_grooves
    http://www.radiopanik.org/media/sounds/le-couloir-sans-fin/au-pays-du-dub-et-du-silence-2_06112__1.mp3

  • au pays du dub et du silence
    http://www.radiopanik.org/emissions/le-couloir-sans-fin/au-pays-du-dub-et-du-silence

    Couloir sans fin n°4

    Au pays du dubien et du silencieux

    Kangding Ray

    Cotti

    Aoki Takamasa

    Matta

    Scanner

    Saoulaterre

    Alec Empire

    Tester feat red rat

    oVe NaxX

    Hassan K

    Torque

    Interlope

    Dj Scud

    Twinhooker

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    Ebola

    Kill Joy

    someone from cock rock disco

    Istari lasterfahrer

    Circuit parallele

    Aoki takamasa

    Saoulaterre

    alphacut

    Jack Mc govan reading a text from Samuel Beckett text for nothing#8 +lock grooves

    http://www.ubu.com/aspen/aspen5and6/audio5A.html

    Vinny Roma

    #dubstep #electronic #jungle #dubstep,electronic,jungle
    http://www.radiopanik.org/media/sounds/le-couloir-sans-fin/au-pays-du-dub-et-du-silence_06038__1.mp3

  • Un bon petit dialogue de temps en temps, ça fait du bien
    (Samuel Beckett in Molloy )

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Monsieur De Jonckheere ?

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Oui

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Nicolas Machin de la banque, votre conseillère m’a demandé de vous signaler l’arrivée d’un tout nouveau produit que nous mettons sur le marché et qui pourrait intéresser votre fils Émile, votre fils s’appelle bien Émile ?

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Je vous arrête tout de suite, je ne suis pas intéressé

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Mais attendez Monsieur De Jonckheere, je ne vous ai même pas dit quels étaient les avantages de ce produit

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Je vous arrête tout de suite, je ne suis pas intéressé

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― C’est un tout nouveau produit pour les jeunes majeurs et comme nos fichiers montrent que votre fils Émile vient d’avoir 18 ans...

    PHILIPPE DE JONCKHEERE (ingénieur informaticien, employé à la banque en question, un hasard)

    ― Nicolas Machin, vous avez mon dossier sous les yeux ?

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Oui Monsieur De Jonckheere

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Vous avez donc accès aux données qui sont habituellement celles qui s’affichent à l’écran quand j’ai rendez-vous avec Madame Chose, ma conseillère ?

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE (se rembrunissant)

    ― Oui, oui et donc, comme Émile vient d’avoir dix-huit ans...

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Monsieur Machin, lisez pour moi à haute voix les informations relatives à Émile

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE, hésitant

    ―Euh…

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Je ne vous entends pas

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE (récitant)

    ― Émile est un jeune garçon autiste

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Et qu’est-ce que vous ne comprenez pas dans cette phrase ? Le mot autiste vous donne de la difficulté ? Il s’agit pourtant d’un handicap mental, hélas assez courant

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Oui mais justement…

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Il n’y a pas de justement, continuez de lire

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE (reprenant, d’assez mauvais, gré sa récitation)

    ― Monsieur De Jonckheere reprendra rendez-vous quand une décision de justice pour la protection des intérêts de son fils aura été rendue

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Vous comprenez ce que cela veut dire Monsieur Machin ?

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE (hésitant)

    ― Euh…

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Cela veut dire que quand je vous dis que je ne suis pas intéressé, cela veut dire que je ne suis pas intéressé et que ce n’est pas la peine d’insister, et même que c’est un peu blessant

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE (soudain courroucé)

    ― Mais faut pas me parler comme ça.

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Je vous ai dit que je n’étais pas intéressé, vous avez insisté, cela finit par me blesser pour des raisons que vous êtes plus ou moins en train de comprendre par vous même

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Je ne pouvais pas savoir

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― C’est inscrit sur votre écran n’est-ce pas ? Ce sont des données personnelles que vous avez le droit d’interpréter intelligemment, ce dont vous ne semblez pas capable

    NICOLAS MACHIN DE LA BANQUE

    ― Monsieur De Jonckheere, je ne vous permets pas

    PHILIPPE DE JONCKHEERE

    ― Nicolas Machin, je m’en moque un peu, il y a deux mois, mes parents m’ont fait un chèque d’un peu plus de 4000 euros pour m’aider à faire face à des dépenses pour réparer mon toit ― vous notez dans mes données personnelles que je suis âgé de 53 ans, mes parents sont encore contraints de m’aider financièrement pour une nécessité absolue, quelles sont les chances pour que je sois par ailleurs intéressé par quelque produit financier que ce soit) et deux jours plus tard un de vos collègues m’appelait pour me dire qu’en vertu de je ne sais quelle nouvelle gouvernance vous deviez vous assurer de la légitimité des rentrées d’argent inhabituelles (ce qui n’étaient quand même pas très malin de la part de votre collègue le nom de l’émetteur sur le chèque en question étant le même que celui du dépositaire), j’avais même demandé si vous appeliez celles et ceux de vos clients dont les noms figurent par ailleurs dans les Panama Papers ? Donc un coup vous savez exploiter des données et une autre fois non. Nous ne sommes pas des machines. Votre procédure vous indique que vous devez m’appeler, vous m’appeler sans réfléchir, vous agissez comme un robot, je vous parle comme à un robot. Donc maintenant vous allez additionner deux et deux et ne plus jamais m’appeler, sinon je change de banque. Ce que j’aurais déjà dû faire et j’espère que vous allez passer une (très) mauvaise journée.

    Philippe De Jonckheere raccroche (se maudissant de n’avoir pas eu la présence d’esprit de passer Emile à Nicolas Machin de la banque et de le laisser se débrouiller avec lui).

    Rideau.

    #pendant_qu’il_est_trop_tard

    • Madame Chose (que j’aime beaucoup, elle et moi avons des tas de choses en commun et nos rendez-vous à l’agence sont toujours l’occasion de discuter de tout plein de choses qui n’ont rien de bancaire) a appelé, elle était catastrophée, s’est excusée alors qu’elle n’avait elle-même rien fait de mal, m’a donné cent fois raison, a insisté pour me passer le directeur de son agence pour que je lui explique les raisons de mon mécontentement, j’ai prévenu ce monsieur que j’étais d’humeur noire et que si jamais il utilisait la moindre formule dilatoire procédurée pour prendre en compte un client mécontent, je raccrochais, ça n’a pas raté, j’ai raccroché.

      Est-ce trop demandé, apparemment oui, que l’on puisse se parler entre être humains ?

      41% du personnel de cette banque ne recommanderait pas sa propre banque à un tiers.

  • Les plantes ont une personnalité et une vie sociale
    https://reporterre.net/Les-plantes-ont-une-personnalite-et-une-vie-sociale

    Les plantes sont-elles intelligentes ? Oui, et bien plus que nous ne pourrions l’imaginer, nous répond Stefano Mancuso. Savant de renommée mondiale, fondateur de la #neurobiologie_végétale, il est le premier à avoir démontré que, comme tous les êtres vivants, les plantes discernent formes et couleurs, mémorisent des données, communiquent. Elles ont une personnalité et développent une forme de vie sociale fondée sur l’entraide et l’échange.

    Véritable manifeste écologique, ce #livre pionnier, qui a bénéficié d’une reconnaissance internationale, nous plonge dans un incroyable voyage au cœur du monde #végétal. Un monde qui, en formant plus de 99 % de la #biomasse, s’avère aujourd’hui indispensable pour l’humanité. Car si les #plantes peuvent très bien vivre sans nous, nous ne survivrions pas longtemps sans elles !

    À l’heure où l’on recherche d’autres modes de vie, où les ressources naturelles s’épuisent, nous avons tout à apprendre du monde végétal dont dépendent la survie et l’avenir de l’homme.

    • @monolecte

      Je profitai de ce séjour pour m’approvisionner en pierres à sucer. C’étaient des cailloux mais moi j’appelle ça des pierres. Oui, cette fois-ci, j’en fis une réserve importante. Je les distribuai avec équité entre mes quatre poches et je les suçais à tour de rôle. Cela posait un problème que je résolus d’abord de la façon suivante. J’avais mettons seize pierres, dont quatre dans chacune de mes quatre poches qui étaient les deux poches de mon pantalon et les deux poches de mon manteau. Prenant une pierre dans la poche droite de mon manteau, et la mettant dans ma bouche, je la remplaçais dans la poche droite de mon manteau par une pierre de la poche droite de mon pantalon, que je remplaçais par une pierre de la poche gauche de mon pantalon, que je remplaçais par une pierre de la poche gauche de mon manteau, que je remplaçais par la pierre qui était dans ma bouche, dès que j’avais fini de la sucer. Ainsi il y avait toujours quatre pierres dans chacune de mes quatre poches, mais pas tout à fait les mêmes pierres. Et quand l’envie me reprenait de sucer je puisais à nouveau dans la poche droite de mon manteau, avec la certitude de ne pas y prendre la même pierre que la dernière fois. Et, tout en la suçant, je réarrangeais les autres pierres, comme je viens de l’expliquer. Et ainsi de suite. Mais cette solution ne me satisfaisait qu’à moitié. Car il ne m’échappait pas que cela pouvait être, par l’effet d’un hasard extraordinaire, toujours les mêmes quatre pierres qui circulaient. Et en ce cas, loin de sucer les seize pierres à tour de rôle, je n’en suçais en réalité que quatre, toujours les mêmes, à tour de rôle. Mais je les brassais bien dans mes poches, avant de faire sucette, et en le faisant, avant de procéder aux transferts, dans l’espoir de généraliser la circulation des pierres, de poche en poche. Mais ce n’était là qu’un pis-aller dont ne pouvait longtemps se contenter un homme comme moi. Je me mis donc à chercher autre chose. Et tout d’abord je me demandai si je ne ferais pas mieux de transférer les pierres quatre à quatre, au lieu d’une à une, c’est-à-dire, pendant que je suçais, de prendre les trois pierres qui restaient dans la poche droite de mon manteau et de mettre à leur place les quatre de la poche droite de mon pantalon, et à la place de celles-ci les quatre de la poche gauche de mon pantalon, et à la place de celles-ci les quatre de la poche gauche de mon manteau, et finalement à la place de ces dernières les trois de la poche droite de mon manteau plus celle, dès que j’aurais fini de la sucer, qui était dans ma bouche. Oui, il me semblait d’abord qu’en faisant ainsi j’arriverais a un meilleur résultat. Mais je dus changer d’avis, à la réflexion, et m’avouer que la circulation des pierres par groupes de quatre revenait à la même chose exactement que leur circulation par unités. Car si j’étais assuré de trouver chaque fois, dans la poche droite de mon manteau, quatre pierres totalement différentes de celles qui les y avaient immédiatement précédées, la possibilité n’en subsistait pas moins que je tombe toujours sur la même pierre, à l’intérieur de chaque groupe de quatre, et que par conséquent, au lieu de sucer les seize à tour de rôle, comme je le désirais, je n’en suce effectivement que quatre, toujours les mêmes, à tour de rôle. Il fallait donc chercher ailleurs que dans le mode de circulation. Car de quelque façon que je fisse circuler les pierres, je tombais toujours sur le même aléa. Il était évident qu’en augmentant le nombre de mes poches j’augmentais du même coup mes chances de profiter de mes pierres comme j’entendais le faire, c’est-à-dire l’une après l’autre jusqu’à épuisement du nombre. J’aurais eu huit poches, par exemple, au lieu des quatre que j’avais, que le hasard le plus malveillant n’aurait pu empêcher que sur mes seize pierres j’en suce au moins huit, à tour de rôle. Pour tout dire il m’aurait fallu seize poches pour être tout à fait tranquille. Et pendant longtemps je m’arrêtai à cette conclusion, qu’à moins d’avoir seize poches, chacune avec sa pierre, je n’arriverais jamais au but que je m’étais proposé, à moins d’un hasard extraordinaire. Et s’il était concevable que je double le nombre de mes poches, ne fût-ce qu’en divisant chaque poche en deux, au moyen de quelques épingles doubles supposons, les quadrupler me semblait dépasser mes possibilités. Et je ne tenais pas à me donner du mal pour une demi-mesure. Car je commençais à perdre le sens de la mesure, depuis le temps que je me débattais dans cette histoire, et à me dire, Ce sera tout ou rien. Et si j’envisageai un instant d’établir une proportion plus équitable entre mes pierres et mes poches en ramenant celles-là au nombre de celles-ci, ce ne fut qu’un instant. Car ç’aurait été m’avouer vaincu. Et assis sur la grève, devant la mer, les seize pierres étalées devant mes yeux, je les contemplais avec colère et perplexité.

  • La nouvelle fin de Carmen et les libertés du domaine public – – S.I.Lex –
    https://scinfolex.com/2018/01/10/la-nouvelle-fin-de-carmen-et-les-libertes-du-domaine-public

    par Calimaq - Lionel Maurel

    L’idée même d’une « dénaturation de l’oeuvre » ne fait guère de sens, du moment que l’adaptation est clairement présentée comme telle et ne cherche pas à entretenir de confusion avec l’original. Les oeuvres du domaine public sont par définition « indestructibles » : Carmen restera toujours Carmen, tout comme les adaptations, souvent très libres, des Contes de Perrault par Disney n’ont pas fait disparaître le souvenir des originaux. C’est pourquoi l’analogie employée par Monsieur Poulpe à propos de cette nouvelle fin pour Carmen me paraît aussi choquante qu’absurde. Faire mourir Don José au lieu de Carmen n’a rien à voir avec un « taliban armé d’un lance-roquette qui estime que telle ou telle statue mérite d’être défoncée« . L’oeuvre – par essence immatérielle – est à l’abri des outrages irréversibles que l’on peut faire subir à la pierre. Elle s’offre sans fin aux nouvelles interprétations et c’est cette dynamique de recréation perpétuelle qui contribue à maintenir vivantes dans la mémoire les oeuvres du passé.

    #Domaine_public #Droit_moral

    • Si l’on se réfère à d’autres jurisprudences, on peut constater que cette balance des droits est loin d’être évidente à opérer. Une compagnie de théâtre a par exemple été condamnée pour violation du droit moral pour avoir monté une adaptation de la pièce En Attendant Godot de Samuel Beckett dans laquelle les personnages principaux étaient interprétés par des actrices. Jérôme Lindon, l’exécuteur testamentaire de Beckett, a réussi à obtenir gain de cause en faisant valoir que l’auteur avait laissé des instructions très claires manifestant sa volonté que le sexe des personnages ne soit pas modifié. Les juges ont donc bien retenu en l’espèce la « dénaturation de l’oeuvre », mais on notera que la pièce n’était pas encore entrée dans le domaine public et le jugement a été rendu en 1992, soit avant la jurisprudence des Misérables qui introduit la nécessité de tenir compte de la liberté d’expression et de création.

      https://books.google.fr/books?id=Bc8aBQAAQBAJ&pg=PT107&lpg=PT107&dq=en+attendant+godot+droit+mo

  • Capitaine d’un sous-marin
    Je me porte au secours d’une frégate
    Dont mon père est le capitaine

    Les discussions pleines d’intelligence
    Avec ma fille Sarah
    Sur le chemin de la gare

    Les discussions pleines de rire
    Avec ma fille Zoé
    Au petit-déjeuner

    Les discussions pleines de surprises
    Avec mon fils Émile
    Dès son réveil grognon quand même

    Circulation fluide
    Dans les petites rues
    De Montreuil

    Dans le parking (pas réveillés)
    Je croise (difficilement)
    La voiture du gardien de nuit (on se sourit)

    Le soleil
    Se lève
    Sur l’open space

    Grosse session de travail
    Sur Frôlé par un V1
    Au café, frigorifié

    Le soleil
    Se couche
    Sur l’open space

    Sortie de l’école de Zoé
    Longue discussion avec Delphine
    Une parente d’élève très investie

    Les citadins découvrent
    Que les poules ont des poux
    Tout un monde

    Une pensée pour Cécile
    Une Fuite en Égypte
    Perd une lectrice

    Hier, Tanya m’apprenait
    Que Phil lisait
    Une Fuite en Égypte

    Entente tacite
    Avec Floriane
    J’emmènerai Zoé à Rennes

    Regard de Zoé
    Qui s’illumine à mesure
    Que je lui parle de Rennes

    Avec l’irlandaise psychologue
    Accord sur l’essentiel
    Zoé va tellement mieux, il faut continuer

    Il faut continuer
    Je ne peux pas continuer, il faut continuer
    Je vais donc continuer
    (Samuel Beckett)

    Discussion libre avec Zoé
    Nous commandons des pâtes
    Par téléphone à Émile

    Pâtes au pesto
    C’est lundi
    Ce n’est donc pas raviolis

    Ce soir est un grand soir
    Un soir de ciné-club
    Step Across The Border, j’y monte

    Step Across The Border
    Nicolas Humbert & Werner Penzel
    Quelle claque cinématographique !

    Step Across The Border
    Dans la tête de Fred Frith
    Littéralement

    Step Across The Border
    Un de ces miracles cinématographiques
    Qui nous plonge au cœur du mystère

    Step Across The Border
    Nous plonge au cœur du mystère
    De la musique, de l’art

    Step Across The Border
    Quand apparait Robert Frank à l’écran
    Et je pensais à lui depuis le début du film

    Step Across The Border
    Traversé par des fantômes
    Jonas Mekkas, Robert Frank

    http://www.desordre.net/musique/bittova.mp3

    Step Across The Border
    Traversé par des anges
    Iva Bittova, John Zorn, Tom Cora…

    Step Across The Border
    Fred Frith joue du violon
    Aux mouettes

    Step Across The Border
    J’écrivais la semaine dernière de jouer
    De la contrebasse aux sangliers

    Step Across The Border
    Beauté du montage en argentique
    A couper le souffle

    Step Across The Border
    Montre le cœur même de la recherche
    Quand même Frith gratouille en faisant n’imp

    Step Across The Border
    Le son de mon réveil
    Je suis donc en train de rêver ?

    Step Across The Border
    La générosité de Nicolas Humbert
    Qui explique le montage en argentique

    Step Across The Border
    Les bobines pré montées
    Et qu’Humbert assemble à l’épaisseur

    Step Across The Border
    Nicolas Humbert, enfin quelqu’un qui a vu
    Conversations in Vermont de Robert Frank

    Je troque mon Robert Frank
    Dans les lignes de sa main
    Contre le DVD de Step Across The Border

    En partant
    Nicolas Humbert
    M’embrasse

    Tout ceci n’a pas pu avoir lieu
    A seulement cent mètres
    De ma maison ? Si !

    Avant d’aller me coucher
    Je me repasse le début de
    Step Across The Border

    #mon_oiseau_bleu

  • Pour qui est faite la ville ?

    Approche très intéressante et photos de panneaux totalement effarentes

    Notopia : who is the city for ? | Thinkpiece | Architectural Review

    https://www.architectural-review.com/rethink/campaigns/notopia/notopia-who-is-the-city-for/10007202.article

    London is becoming entirely unaffordable leading to a kind of hollowing out of the city which New Yorkers are long used to

    Recently, I met an architecture academic who’d just moved to Berlin after 23 years of living in Manhattan. Originally from Norway, she moved to the US as a young artist and seemed the epitome of a cosmopolitan, left-field New Yorker. So why the move? Manhattan was, she said, now unaffordable for her and increasingly sterile with most of the artists she’d once known long gone.

    This hollowing out of New York began a generation ago with former Mayor Rudy Giuliani’s ‘clean up’ of the city. Alongside a crackdown on homelessness, begging, graffiti and ‘squeegee merchants’, the nature of public space in the city was also changing, as genuinely public space gave way to hundreds of ‘privately owned public spaces’, the politically anodyne acronym New Yorkers know as ‘POPS.’ The other part of the jigsaw was the comprehensive roll-out of Business Improvement Districts (BIDS), throughout New York, San Francisco and other US cities, in which the control of places and security pass to private companies funded by local businesses. According to guidelines laid down by the New York Mayor’s office, BIDS pledge above all to keep areas ‘clean and safe’, in keeping with Giuliani’s vision.

    #architecture #espace_public #contrôle #dfs

    • @rek, ça date un peu mais : ...

      Lundi 12 janvier 2004

      Le soir, en se promenant, tomber sur des blocs de parpaings, dans une descente de garage du côté de République, s’émouvoir que tous étrangement hérissés portent une croix, les faisant en cela ressembler à des tombes, à un cimétière, cela déjà valait photo. Et puis lire le texte écrit en bas, s’approcher et lire : « On va venir chier tous les jours sur votre honteuse installation anti-sdf. Propriétaires de merde, bientôt c’est vous qui dormirez dehors. » Alors comprendre l’infâmie. Ici on ne supporte pas que des personnes à ce point démunies qu’elles doivent dormir dans la rue, que ces personnes sans logement, prennent refuge dans cette pente qui sans doute les met tout juste à l’abri du vent et de la pluie. Alors on prend des mesures, on vote, et on construit, on construit, à l’économie, des blocs de parpaings et on les assemble de telle sorte qu’il soit absolument impossible de s’allonger d’aucune façon que ce soit. Quelle honte ! Je me demande combien cela leur a coûté aux propriétaires de faire venir les maçons — ces gens-là évidemment ne savent pas manier eux-mêmes la truelle, sans doute trop salissante — et combien de repas chauds on peut acheter avec cet argent ou de sandwichs offerts la main tendue et de discuter un peu, sans offrir de solution ni d’encouragement, juste de la petite conversation qui donne un peu de chaleur. En prenant les photos s’apercevoir que les personnes chassées, mais qui apparemment savent parfaitement écrire, pas la moindre faute d’orthographe dans ces cinq lignes, de la concision à revendre en plus — je voudrais être sûr que les brutes qui habitent là sachent écrire de la sorte sans le correcteur d’orthographe-passoire de Word — s’apercevoir donc, au nez, qu’ils ont tenu parole, ça pue la pisse et quelques étrons embaument en contrebas.

      La brutalité de tout ceci.

      Je pense au Dépeupleur de Samuel Beckett, ce cylindre-hâchoir dans lequel croulent des humains qui ont à peine la place de se tenir debout les uns contre les autres, sans tout à fait se toucher, et tout, jusqu’à la température du cylindre sans cesse changeante, est conçu pour les harceller sans cesse. Les interstices laissés libres par les parpaings me font exactement penser à cela : ils sont l’augmentation de l’inconfort. Le ciment de cette descente de garage n’était pas assez dur comme cela sans doute. Les espaces que laissent les rangs de parpaings sont juste prévus pour que nul ne puisse s’y allonger, et ceux des parpaings qui sont plantés debout le sont de telle sorte qu’on ne puisse prendre aucune diagonale.

      De ce garage entrent et sortent des voitures et leurs conducteurs s’accomodent, apparemment, de voir ces parpaings, dans les phares de leurs automobiles, et comment font-ils pour oublier chaque fois à quoi servent ces parpaings ? Car c’est encore bien plus que de détourner le regard, ici c’est la pensée qu’il faut détourner.

      Je ne manie généralement pas l’insulte — parce que je trouve qu’elle renseigne davantage à propos de celui la profère qu’à propos de celui qui la reçoit — mais là, c’est bien tout ce que ces gens méritent, je vous donne l’adresse — 32, rue René Boulanger dans le dixième arrondissement, c’est juste à côté de République — allez conchier et compisser cette descente de garage. C’est tout ce qu’il reste aux gens de la rue, de pisser et de chier contre cette porte de garage, bientôt c’est tout ce qu’il nous restera aussi pour dire à ces gens bien-pensants et bien-barricadés ce que nous pensons de leur pensée étroite. Peigne-culs

  • Fragments de la vacherie universelle
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/030917/fragments-de-la-vacherie-universelle

    Se serait-il agi, pour l’auteur, un des hétéronymes d’Antoine Volodine, lui-même pseudonyme d’un écrivain caché, d’obéir à l’injonction comminatoire jadis proférée par Samuel Beckett : « Imagination morte, imaginez » ? Qu’on en juge : trois morts, une femme et deux hommes, parcourent ensemble un souterrain, sorte de tombe herpétiforme sans commencement ni fin.

    #Culture-Idées #Antoine_Volodine #En_attendant_Nadeau

  • https://www.remue.net/spip.php?article8634

    J – 84 : Une amie, proche, J. dans mes récits la concernant, écrit des livres auxquels je ne comprends pas tout, tel traité de psychanalyse à propos du deuil, tel autre à propos de la pudeur, mais je lui fais confiance, à la fois parce que c’est mon amie, à la fois parce j’ai déjà eu l’occasion de constater sa clairvoyance psychanalytique. Et d’ailleurs sur le chemin de l’écriture elle a écrit également Psy d’banlieue que j’ai dévoré passionnément, récit autofictif dans ce que l’autofiction a de noble et justement de respectueux envers les tiers qui n’ont peut-être pas tous demandé à débouler pareillement, tels des quilles dans un jeu de chiens, dans une œuvre de fiction, tout étant parfaitement voilé pour que seuls les intéressés, s’ils passaient pas là, puissent se reconnaître, et reconnaître à quel point ils ont été importants. Et dans les contributions de J. au site remue.net, souvent de belles interventions.

    Il y a quelques temps, J. se fait vandaliser son adresse de mail par je ne sais quel ostrogoth nigérian et qui du coup écrit à tous les contacts de J. un courrier assez alarmant nous demandant de lui venir en aide. Et jusqu’à recevoir ce mail qui n’était pas, pas vraiment, de J. je croyais qu’il fallait, vraiment, être couillon ou alors avoir le cœur sur la main jusqu’à en perdre le jugement pour tomber dans de telles chausse trappes si mal maquillées. J’ai déjà raconté cette histoire. Bref il s’en faut de peu que je ne sois délesté d’un petit millier d’euros au profit d’une personne se faisant passer pour J. et ce n’est qu’à l’extrême moment critique de cette arnaque que j’ai fini par renifler qu’il y a baleine sous gravier. Et j’en rirai beaucoup avec J. à mes dépens. Tout est bien qui finit bien, comme dit ce grand couillon de capitaine Haddock à la fin du Trésor de Rackham-le-Rouge .

    Ces derniers temps, avec J. on a mis au point un protocole pour se voir plus souvent, un petit restaurant chinois à mi-chemin entre chez J. et mon open space, on s’invite à tour de rôle, on parle essentiellement de nos lectures ou encore de nos émotions en sortant du noir ou d’expositions dernièrement visitées, on parle aussi d’autisme, J. étant une alliée de très longue date dans mon combat contre celui de mon grand Nathan, en fait elle a même été la première des alliés, et ils sont quelques-uns tout de même. J. m’a peu parlé de son engagement dans la réserve sanitaire suite aux attentats terroristes du 13 novembre 2015, je sais juste qu’elle et moi nous nous sommes croisés sans le savoir, elle souterrainement dans le métropolitain et moi en surface, presque présent sur les lieux mais sans m’en rendre compte, mais elle ne m’a beaucoup parlé de son travail à Nice, envoyé là-bas justement par la réserve saintaire.

    Et puis je découvre la Poussette Potemkine , dernier récit de José. Et quel ! Oui, J., c’est José.

    La Poussette Potemkine est un de ces puissants récits psychanalytiques tels qu’ils existent en tout premier dans l’Introduction à la psychanalyse de Sigmund Freud, puis dans ses autres livres — j’ai une petite préférence pour la découverte de l’auto-aveuglement à la gare de Vienne —, mais aussi dans de grandes œuvres littéraires, je pense par exemple au Lieu d’une ruse de Georges Perec qui est sans doute l’un de ses meilleurs textes (dans Penser classer ). Plus récemment j’ai reçu un tel récit dans le film La Liberté de Guillaume Massart, pas encore sorti, et de tels récits provoquent à la fois ma fascination et mon vertige, me renvoyant chaque fois à mon propre récit psychanalytique, à cette clairière, c’est comme cela que j’ai fini par la nommer moi-même à propos de cet endroit que j’ai découvert par deux reprises, le même endroit, mais les deux fois éclairés différemment. Imaginez le pouvoir de tels récits. Imaginez le pouvoir de la psychanalyse qui les rend possibles, qui les éclaire.

    De la même manière que Maurice Blanchot parlait à propos des livres de Samuel Beckett — je crois dans Le Livre à venir , mais je ne suis plus très sûr — comme provenant de l’endroit même d’où procédait le mouvement de tous les livres, j’ai le sentiment que ce récit de José a été admirablement fabriqué dans le pays même de la psychanalyse. Une sorte de noyau de fusion dur.

    Et c’est donc l’auteure d’un tel récit que j’ai confondu avec un ostrogoth nigérian, écorchant et maltraitant pareillement la langue, et aux motivations tellement rampantes. Fallait-il que je sois aveuglé par un très puissant écran. Faut-il que je dispose d’une personnalité aussi peu fine que celle du capitaine Haddock, oui, je serais ce bon gros à grande gueule, pas bien malin, mais avec un cœur gros comme ça.

    Ou, tout simplement, désireux de venir en aide à celle qui m’est venue en aide la première, avec Nathan. Cela, oui, pouvait m’aveugler. Ce qui aurait pu avoir une répercussion heureuse au Nigéria où l’on fabrique, malgré tout, en usine, des récits d’entre-aide. Et c’est là que la poussette Potemkine a fini sa course folle.

    #qui_ca

  • Tous ceux qui tombent | Le monde est tout ce qui arrive
    http://www.canalsud.net/?Tous-ceux-qui-tombent

    Première déclinaison de la radio est libre de n’être que de la radio, avec la diffusion de « Tous ceux qui tombent » de Samuel Beckett, non pas une pièce de théâtre radiodiffusée mais une pièce conçue, écrite et réalisée pour la radio. Durée : 1h47. Source : Canal Sud

    http://www.canalsud.net/IMG/mp3/tous_ceux_qui_tombent.mp3

  • « Could he not now turn back? Acknowledge his error and return to where they were once so long alone together. Alone together so much shared. No. What he had done alone could not be undone. »

    Samuel Beckett, Ohio Impromptu (J. Knowlson, Damned to Fame )

  • Nordiques & Baltes : Nobel : Bob Dylan à sa place
    http://jacobnordiques.blogspot.no/2016/10/nobel-bob-dylan-sa-place.html

    Au regard de l’histoire du prix Nobel de littérature, il était logique, inévitable même, que les académiciens suédois récompensent à un moment donné un grand poète chanteur.

    RAREMENT un prix Nobel de littérature aura inspiré autant de critiques - plus audibles que les bonnes âmes prenant sa défense. Excellente nouvelle !

    Cela prouve :

    – Que l’on s’interroge toujours sur ce qu’est/devrait être la littérature (quelques-uns vont même jusqu’à affirmer que ce prix signe l’arrêt de mort de la Littérature, ce qui revient à accorder un peu trop d’importance à un simple prix...).

    – Que le sort des vrais « grands écrivains » injustement oubliés mobilise au-delà du cercle de leurs admirateurs réguliers. A juste titre, je le conçois. Encore que les véritables « grands écrivains » oubliés du Nobel n’ont pas eu besoin de lui pour exister jusqu’à aujourd’hui.

    – Que le Nobel reste LE prix attendu qui, année après année, continue à irriter et enthousiasmer, malgré les errements, récents ou lointains, du passé.

    #bob_dylan #nobel

  • Première fois que je retourne à la piscine depuis des lustres, non pas des lustres, mais des mois, oui. La piscine ne me punit pas trop sévèrement de cette désertion, je parviens à faire mon aquatique kilomètre, un peu sans force à la fin, mais jusqu’au bout malgré tout.

    Du coup, les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs de piscine, l’idée de reprendre toutes les mentions de ces choses auxquelles je pense en faisant mes longueurs de piscine, ce qui finissait par devenir une catégorie en soi dans la rubrique Contre . http://www.desordre.net/bloc/contre/index.htm

    #40.

    Ma mauvaise humeur ne doit pas être si soluble que cela dans l’eau, ce qui est heureux, sinon tous les autres nageurs de la piscine finiraient par brasser de l’encre de Chine.

    #47.

    M’élançant seul, premier arrivé, dans le grand bassin olympique de la piscine de Montreuil, je ne peux m’empêcher d’être pris d’un frisson grandiloquent, toute cette eau pour moi seul, et ce faisant je me livre à un rapide calcul 50 x 20 x 3 = 3000 mètres cubes d’eau, soit trois millions de litres d’eau tout de même. C’est souvent que je fais du calcul en nageant, ainsi le nombre de carreaux au fond de la piscine doit équivaloir au nombre de pixels du premier envoi d’images auquel j’ai assisté en 1987. Si je savais remettre la main sur ce fichier, on pourrait proposer à la piscine de Montreuil, lors de leur prochaine vidange des trois millions de litres d’eau, de repeindre chaque carreau tel un pixel. La mairie de Montreuil pourrait organiser un concours, envoyez votre image de 10 kilo-octets pour le fond de la piscine Colette Besson. Pour ma part je leur enverrais bien une photo aérienne du bassin en question, mais c’est moi bien sûr. D’ailleurs la saison prochaine, après la vidange annuelle, chacun pourra constater que j’ai gagné le concours. Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs de piscine.

    Vers la fin de mon kilomètre, l’affluence est nettement plus forte et certains dépassements occasionnent bien des tourbillons et alors, je me dis que nous sommes peut-être une petite cinquantaine de nageurs à faire des longueurs, cela fait quand même quelques remous, il devrait y avoir un moyen de récupérer un peu de cette énergie non ? Une mini centrale hydro-motrice. Sans compter l’inénarrable barbotage des mamies dans le petit bain au son d’un disco d’un autre âge. Est-ce que les remous des mamies ne pourraient pas alimenter une petite batterie laquelle prendrait en charge la dépense électrique de la sono et du disco ? Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    N’empêche dans ce groupe de femmes, majoritairement, âgées je croise le regard d’une amie de longue date, nous nous sommes rencontrés aux Arts Déco, je sais son combat récent et je la trouve bien courageuse dans sa régularité, le soir j’ironise, son sens de l’humour est intact, en lui envoyant un mail pour lui dire que depuis le temps que je rêvais de la voir en maillot de bain. N’empêche, c’est vrai, j’ai un peu de mal à me dire qu’il s’agit de la même personne que j’ai connue tellement jeune et qui désormais barbote avec les mamies du mardi midi, je crois qu’il n’y a pas de mot pour décrire mon vertige tandis que je sors de la piscine de Montreuil, entré dans l’eau en conquérant d’un bassin olympique, et sortant écrasé par la perspective fuyante du temps : je suis donc rentré aux Arts Déco il y a vingt sept ans. Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    #59.

    Pensée profonde du jour : après une matinée à faire de la feuille de calcul, le spectacle, en nageant, du carrelage de la piscine n’est pas la meilleure récréation qui soit.

    Corollaire à cette pensée, est-ce qu’avec un bon vidéo projecteur, on ne pourrait pas nous passer des films (muets, forcément muets) au fond de la piscine.

    Lot de consolation : le soleil en entrant par les larges baies vitrées crée de très beaux dessins lumineux difractés par l’agitation de la surface de l’eau, je les mémorise et l’après-midi, de retour au travail, je m’évertue de les superposer mentalement à mes feuilles de calcul.

    #201.

    Chaque année, prendre la résolution de tout écrire dans son agenda, les kilomètres parcourus à la piscine, les livres lus, les films et les spectacles vus, les concerts et les disques écoutés et les expositions visitées. Et à la fin de l’année faire le bilan comptable de cette activité contre. Oui, se dit-il, et il le note dans son agenda, dans la colonne des choses à faire.

    #203.

    Les choses auxquelles on pense à la piscine.

    Je fais vingt longueurs de cinquante mètres, mille mètres, un kilomètre. C’est une progression lente, il y a peu je faisais encore du deux à l’heure. Je suis tout juste descendu en dessous de la barre des vingt cinq minutes pour ce kilomètre. Progression lente, coûteuse aussi et il est à peine exagéré de dire que chaque mètre compte, que chaque mètre coûte. Et je compte. Et cela me coûte. Ce n’est pas seulement à chaque virage que je compte. Je compte les demies longueurs, parfois même les quarts de longueurs. Le fond de la piscine est carrelé, je suis souvent tenté d’en compter les carreaux qui défilent lentement sous moi. Ou je les identifie à des pixels. D’ailleurs en comptant longueurs et mètres je me donne des repères en pixels, 400 mètres c’est une image de 400 pixels de large, 700, 725 ce sont les pixels de large pour de nombreuses images du Désordre, 600, 800 aussi et 1000 la nouvelle largeur des images de la Vie, 1000 c’est l’objectif, si lentement atteint à l’image de ces barres de téléchargement qui progressent avec lenteur, kilo-octet à kilo-octet. Et c’est à une barre de téléchargement que je pense quand je nage et que je compte les longueurs que je fais.

    Les choses auxquelles on pense en nageant. Vraiment.

    #223.

    En faisant ses longueurs à la piscine, depuis quelques temps, cela ne lui suffisait plus de boucler la distance impartie, il se battait désormais aussi contre la pendule, l’objectif avait d’abord été de boucler le kilomètre en moins d’une demi-heure, ce samedi après-midi, il tentait de descendre en dessous de 24 minutes, ce qu’il ne parvint pas à faire en dépit d’efforts coûteux qui le laissèrent absolument haletant, peut-être pas au point de se sentir mal, mais asphyxié épuisé cela oui. Tandis qu’il tirait sur ses bras dans les deux dernières longueurs, se faisant violence, il pensa, c’est bien lui, qu’à défaut d’écrire comme Robert Musil, il allait bientôt mourir comme ce dernier d’une crise cardiaque, dans la salle de gymnastique (fin assez décevante et médiocre tout de même pour un auteur comme Musil, mais passons). Et il nageait, la dernière longueur en sprint, pensant à toutes ces figures admirées qu’il pourrait imiter à bon compte, à défaut d’en imiter, même imaprfaitement, le talent, les rides sur le front, comme celles de Samuel Beckett, la carrure de René Char, les angoisses et les crises de désespoir chaque matin comme Pablo Picasso, les bourrades dans les côtes comme Georges Perec, on laisserait de côté, assez vivement, la robe de chambre de Louis-Ferdinand Céline et les collections de papillons de Pierre Bergougnioux, se tenir au garde à vous au téléphone, comme Marcel Proust, régresser au point d’en devenir terriblement réactionnaire comme Keith Jarrett. Et mal vieillir, de façon tellement sénile et stérile, comme Woody Allen. Aller un peu trop loin dans la mise en scène de soi-même comme Edouard Levé. Tout un programme. Les choses auxquelles on pense, bien immodestement, en faisant ses longueurs à la piscine.

    Dans la même journée, tu fais un kilomètre à la piscine, tu vas écouter le concert d’Ervan Parker, et tu finis d’écrire ton article contre les photographies d’Issouf Sanogo. Dans la même journée.

    #236.

    Chaque année ta banque t’envoie deux agendas, deux exemplaires du même agenda, cadeaux commerciaux de pas grand chose. Cette année tu as pris le parti de toute noter dans cet agenda, les lectures, les films, les disques, les concerts, les spectacles, les kilomètres parcourus à la piscine, tout.

    Que tu aies besoin de tenir une comptabilité de tout ceci me dépasse un peu, qu’elle soit rigoureuse, après tout, pourquoi pas ?, mais qu’est-ce qui t’empêche d’utiliser le deuxième agenda, le deuxième exemplaire, pour y noter n’importe quoi, ce qui me passe par la tête ?, oui, pourquoi pas, que le deuxième exemplaire de l’agenda soit l’occasion de tous les débordements possibles de la fiction, tu peux t’y prêter des lectures que tu n’as pas eues, pas encore, des concerts auxquels tu as peu de chance de te rendre, trop chers ou trop loin, des spectacles auxquels tu ne peux que rêver de te rendre et des films que tu as manqués au moment de leur sortie en salle, mens, invente, fais ce que tu veux.

    Et n’oublie pas, de temps en temps, de partir de chez toi en prenant le mauvais agenda, et alors, oblige-toi à vivre ce qui est noté dans l’agenda de la fiction.

    #286.

    Régulièrement quand tu passes par la Croix de Chavaux, par exemple pour aller à la piscine, tu regardes le haut immeuble où tu sais que ton ancienne analyste continue de recevoir ses patients. Tu regardes les fenêtres du dernier étage en repensant à toutes ces photographies que tu as prises de cette fenêtre, de l’agitation de la place, dont tu fais finalement partie, d’en bas, regardant vers les hautes fenêtres.

    Et puis une fois tous les ans, tous les deux ans, tu ressens dans l’étau toujours plus serré de tes propres doutes, le besoin de reprendre rendez-vous auprès de ton analyste. Tu vas la voir pour faire fonctionner devant ses yeux les rouages que tu as découverts dans son cabinet, tu veux t’assurer que tes compréhensions contemporaines sont compatibles avec tes fonctionnements anciens.

    A la fin de cette séance, tu remontes au dernier étage de cet immeuble de sept étages et tu photographies la place de la Croix de Chavaux. Tu détailles du regard les mouvements des véhicules et des passant, le clignotement des éclairages publicitaires, les nuages qui passent, depuis ce point de vue de créateur presque.

    Parfois tu te demandes si d’avoir accès à cet escalier, de temps en temps, pour y monter au dernier étage, ne serait pas suffisant. Tu te sentirais un peu cerné par tes doutes. Tu monterais en haut de la place, photographierait l’agitation et la circulation autour de cette place, et tu te sentirais à nouveau en phase, tu pourrais reprendre ta place dans le manège.

    Et pareillement quand tu reprends contact avec ton ancienne analyste tu retrouves, avec le même plaisir, le catalogue de je ne sais plus quelle rétrospective de Jean-Michel Basquiat. Dont tu dois être, à en juger par le manque d’usure du livre, le seul lecteur. Un lecteur très épisodique.

    #307.

    Et tout d’un coup, le corps plongé dans l’eau de la piscine, c’est comme si je replongeais dans la musique de Stephen O’Malley, plus sûrement les acouphènes d’hier soir se réveillent dès que l’eau vient faire pression sur mes tympans. Dommage c’était une bonne idée, un peu de musique pendant que je nage, tellement mécaniquement, aux confins de l’ennui.

    #308.

    De retour de la piscine, je croise mon amie Daphna, et je peine à croire que cinq minutes plus tard je serais de nouveau prisonnier de l’open space. Daphna que je connais depuis 1986. Tous les deux étudiants aux Arts Décos. Je ne sais pas très bien ce que penserait le jeune homme que j’étais alors de cette situation.

    En tout cas je sais ce que l’homme d’aujourd’hui pense du jeune homme d’alors. Et le simple fait de croiser Daphna me le rappelle instantanément. Ce jeune homme n’était pas brillant. Pas tous les jours.

    Ou dit différemment, de quoi ai-je le plus honte, aux yeux du jeune homme d’alors d’être devenu un employé de banque, un Bartleby, ou à mes yeux d’aujourd’hui, du jeune homme suffisant que j’étais alors ?

    #309.

    Le virage s’est fait l’été dernier. Pendant tout le mois de juillet je suis allé à la piscine tous les jours en sortant du travail et tous les jours j’ai nagé un petit kilomètre. Et pour tout dire, j’avais le sentiment que cet exercice et cette astreinte quotidiens produisaient un affinement du corps, et même réveillaient des muscles ayant insuffisamment travaillé ces dernières années. Je me surprenais à retrouver une force dans les bras que je n’avais plus depuis tellement longtemps. Un peu plus et je contemplais dans le miroir les vaisseaux saillants de mes avant-bras et je me prenais sans doute à rêver qu’encore quelques dizaines de kilomètres et j’aurais de nouveau un corps de jeune homme.

    Et puis, naturellement, ce qui devait arriver arriva, un jour, fin juillet, je me suis fait un claquage. Finie la phase 2 de l’opération Corps de rêve.

    Et pourtant j’ai besoin d’aller à la piscine faire des longueurs, j’en ai besoin pour rester maître de mes difficultés respiratoires. Et c’est déjà nettement moins glorieux. Quand je sors de l’eau, on ne dirait pas Sean Connery dans James Bond contre le Docteur No ou Daniel Craig dans le même appareil, dans Casino Royal, non c’est plutôt au personnage secondaire de l’Autofictif d’Eric Chevillard qui est l’occasion d’haikus mordants que je pense, le Gros Célibataire.

    Le Gros Célibataire sort de l’eau
    à bout de souffle
    avec une échelle.

    Sur l’arrête du nez, la marque rouge des caoutchoucs de mon respirateur.

    Donc ne plus s’illusionner sur l’opération Corps de rêve, et comprendre que la phase 2 a effectivement commencé, c’est la phase dans laquelle il faut faire de l’exercice pour retarder l’arrivée de la grande faucheuse et d’ailleurs il faut que j’arrête de m’illusionner, les baigneuses quand elles me regardent admiratives, ce n’est pas pour la largeur de mes épaules qu’elles ont ont des regards aimables, mais, au contraire elles sont pleines de commisération pour un ce qu’elles prennent, à juste titre, pour un vieil homme (encore) bien conservé.

    Ainsi va la vie à bord du Redoutable.

    #329.

    Chaque fois que je reprends latéralement ma respiration en nageant, je déchiffre, je ne peux m’en empêcher, tout ce qui est écrit sur les murs, les défense de, les ville de Montreuil, les numéros de couloir, tout ce qui est écrit, je finis par le lire, comme d’ailleurs je peux le faire de tout ce qui est écrit sur une boîte de céréales au petit déjeuner, sans doute pour rompre avec l’ennui des longueurs de piscine.

    Ils attendent quoi exactement à la piscine de Montreuil pour couvrir les murs de Haïkus ?

    #332.

    Ca y est, ils m’ont enfin entendu à la piscine de Montreuil, ils ont tendu un immense écran de toile. En revanche je doute beaucoup que ce sera pour projeter des haïkus ou encore Film de Samuel Beckett, en tout état de cause, la prochaine fois que j’irai à la piscine le projecteur sera en état de marche et on devrait, en toute logique, m’entendre pester sur le fait que le programme projeté n’est pas à mon goût.

    Comment est-ce que je peux encore tomber dans de tels panneaux.

    #345.

    Tandis que les portes de la piscine ouvrent pour son public du midi, salariés qui vont faire quelques longueurs sur le temps de pause du midi et mamies du disco aquatique, reflue une petite foule de jeunes adultes handicapés, tous ou presque un immense sourire aux lèvres, on sent que cela leur fait plaisir la piscine, l’un d’eux s’égare dans les douches sa démarche chaloupée et mal habile parfaitement en rythme de la musak diffusée par la radio de la piscine.

    #347.

    A la piscine tu es dépassé dans ta ligne par un groupe de torpilles humaines, tu en prendrais presque ombrage d’être pareillement doublé, es-tu si lent ?, puis tu remarques l’étonnant équipement de ces nageurs plus rapides, des palmes et des prothèses aux mains pour augmenter la force de brassage sans doute. Et dire que tu pensais que le seul équipement nécessaire à la nage était un maillot de bain (facultatif dans les rivières des Cévennes quand on est entre soi et quel plaisir).

    Tu repenses, à ces types qui descendaient les pentes du Puy de Sancy sur leur vélo tout terrain, leur équipement était celui que tu aurais prêté à des motards tout terrain, certains d’entre eux portaient au dessus de leur casques de petites caméras et filmaient leur descente depuis ce point de vue privilégié. Nul doute que les vidéos réalisées étaient le soir-même sur les plates-formes de partage de vidéos.

    Et tu avais ri à cette idée que ces petites vidéos étaient littéralement des surmoi.

    #357.

    A la piscine, ma volonté commande à mes bras de tirer plus fort dans l’eau, pour éprouver mes poumons, lesquels tentent de se faire entendre auprès de ma volonté qui s’émousse un peu, mais tient bon, tant que le kilomètre ne sera as parcouru pas de répit pour les bras et les épaules qui à leur tout mettent les poumons à l’épreuve.

    Tenir, disais-je.

    #432.

    Je ne sais ce à quoi pensent les autres nageurs dans la piscine de Montreuil, mais s’ils sont tous occupés, comme je le suis en faisant mes longueurs, à des projets chimériques que les miens en ce moment, j’ose espérer que les Maître-nageurs sauveteurs de notre piscine ont reçu une formation spéciale pour traiter non seulement les noyés mais aussi les aliénés.

    #452.

    Je commence mes longueurs à la piscine dans l’agréable sensation de glisser sur une eau limpide et déserte, un kilomètre plus loin, je rampe dans une mer de mercure, trouble et surpeuplée.

    #453.

    C’est fréquent que nageant dans la piscine je trouve en pensée la solution pour tel projet laissé en plan la veille au soir dans le garage. Il arrive aussi, et je ne peux m’empêcher d’éprouver un léger sentiment d’injustice, que je trouve la solution d’un problème resté en plan au travail, c’est comme si j’avais gâché la récréation.

    Mais le choix de la dérive de mes pensées en nageant m’appartient aussi peu que celui des images de mes rêves.

    Et d’ailleurs est-ce que si nous avions le choix du programme de nos rêves, est-ce que ce seraient encore des rêves ?

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine, en repoussant de toutes ses forces les choses auxquelles on ne veut pas penser. Comme par exemple de repenser au rêve de cette nuit.

    #456.

    Le rêve d’une installation du futur, les pensées des nageurs d’un bassin olympique sont projetées au fond de la piscine par je ne sais quel procédé et dessinent une toile immense d’images se chevauchant avec de très beaux effets d’opacités diverses, et nager serait alors aussi beau que de se tenir fermement au bastingage de l’installation de Georges Didi-Huberman, au Fresnoy à Toucoing, ce qui tend à penser qu’on n’est sans doute pas obligé d’attendre l’avènement de la technologie qui permettrait la mise en images des pensées des nageurs, et sans attendre cette dimension interactive, d’ores et déjà, transformer les fonds des piscines en écrans géants. Je serai le premier à m’abonner à un tel service.

    Pareillement, je rêve de nager dans une piscine labyrinthique.

    Et pour les lecteurs des Idées noires de Franquin, on pourrait de temps en temps corser un peu l’affaire en introduisant un requin dans le labyrinthe. Surtout ne pas péter.

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine. Et dans la dernière longueur de me dire, je devrais créer une manière de tag pour ces choses auxquelles je pense en faisant mes longueurs à la piscine.

    #12.

    La surprise en plongeant dans la piscine, l’eau est chaude, collante, et tous les jeux d’ombres et de lumières flous qui étaient ceux de la rivière ont été remplacés par le quadrillage net des carreaux au fond de la piscine, netteté due aux lunettes dites de piscine. Et les retirer serait s’exposer à la morsure du chlore. Tandis que dans la Cèze ce sont les yeux nus que je me jette à l’eau, souvent accompagné par des myriades de vairons.

    Mais soyons juste, dans la piscine municipale je ne redoute pas la potentielle présence de couleuvres au fond de l’eau.

    #20.

    Naïvement j’ai cru ce matin, avant de partir à la piscine, que de comptabiliser les kilomètres parcourus à la piscine depuis de début de l’année allait me rendre les choses plus faciles, ainsi j’ai parcouru 32 kilomètres à la nage depuis le premier octobre 2013, soit un peu en deça de la distance qui sépare Paris de Pontoise. Bref, je ne suis rendu qu’à Saint-Ouen l’Aumône, encore un kilmomètre et j’arrive à Maubuisson, encore un autre et je suis chez B. et encore un autre et je franchis l’Oise (à la nage sans doute) et je pourrais prendre mon café dans la si bonne brûlerie sur le haut de Pontoise.

    Est-ce la perspective de nager sur un plan d’eau aussi incliné que la montée depuis les rives de l’Oise vers l’église Saint-Maclou de Pontoise ou tout simplement parce que j’avais sans doute imaginé que je devais déjà être rendu du côté de Senlis et que d’ici à la fin de l’année nul doute je parviendrais, à la nage donc, jusqu’à Bapaume, et que la comptabilité dans mon agenda de toutes les mentions de kilomètres aquatiques a révélé un chiffre très en dessous de ce que j’espérais, il n’empêche, je finis le kilomètre d’aujourd’hui, épuisé et découragé.

    En nage serais-je tenté de dire.

    #31.

    Retour des vacanciers. Cette fois-ci à la piscine, tu reconnais les corps halés dans l’eau et anticipe leur vigueur éphémère, ceux-là vont entamer leurs longueurs au quart de tour, mais vont vite s’essouffler, en novembre ils auront oublié du tout au tout le chemin de la piscine. En attendant éviter leurs mouvements vifs dans les lignes comme les croiseurs font des torpilles fourbes des sous-marins.

    Nageant tu repenses à certaines scènes de Das Boot de Wolfgang Petersen. Et dans tes rêves d’installations à la piscine de Montreuil, tu penses à ce que cela serait de nager dans une piscine aussi vaste, dans l’obscurité, poursuivi par le bruit d’un sonar.

    Les choses auxquelles on pense en faisant ses longueurs à la piscine.

    #32.

    Tu voudrais, comme cela, toute l’après-midi peut-être pas, mais davantage que ce que tu ne fais, cela sûrement, pouvoir continuer d’ouvrir une nouvelle fenêtre de mail pour t’envoyer un nouveau paragraphe de Contre. Mais cela ne fonctionne pas comme cela, ce serait trop facile. Te levant de ton petit banc abrité des regards à quelques encablures seulement de ton travail, ou, tout aussi bien, en revenant de faire ton kilomètre à la piscine, tu peux en écrire deux ou trois, parfois quatre, cinq c’est arrivé une fois, le petit banc et la piscine te donnent cet élan, mais davantage, non, ce n’est vraiment pas possible. Non que tu n’aies pas déjà essayé, ne serait-ce que par désoeuvrement, ou, plus sûrement pour distraire ton ennui, mais la source, c’est dire si elle est modeste, est vite tarie.

    Et tu sais, depuis toujours, qu’il ne faut jamais trop tirer sur les sources modestes. Sans courir le risque de les assécher définitivement.

    Va donc prendre un café dans un gobelet de plastique brun ou croque dans une pomme mais ne commets pas l’imprudence de trop essayer.

    Contre c’est ne pas trop tirer d’eau chaque jour.

    #89.

    Pour la première fois depuis tellement longtemps, le rêve d’une apnée qui n’est pas angoissante, pas synonyme d’asphyxie ; mais bien au contraire plaisante, ivresse même, je viens de plonger à la piscine et je remonte très lentement à la surface, en fait j’ai atteint une telle profondeur que c’est une vraie nage que de revenir à la surface, une nage verticale, je trouve que le cyclone de bulles que j’ai créé dans mon plongeon est admirable au regard, je mets très longtemps à remonter à la surface, mais je prends mon temps, je fais durer le plaisir. Je fais durer l’apnée. C’est une apnée de rêve à la façon de celles interminables de Johny Wesmüller dans le Tarzan de Van Dyke.

    Et si c’était dans ce rêve qu’était contenu l’espoir de ma guérison ?

    En rêve, on peut faire tellement de choses, y compris de guérir d’un mal incurable (mais pas dangereux).

    #120.

    Faisant tes longueurs à la piscine le midi sur ton temps de déjeuner, tu réalises une fois de plus à quel point tu tiens un compte serré des longueurs déjà parcourues et de celles qui restent à faire et tu voudrais que cela aille plus vite, être bientôt sorti de l’eau, arrêter d’étouffer volontairement pendant trois passages de bras, que cesse la douleur légère mais continue dans les bras, les avant-bras surtout, et les épaules, et pour te représenter tout cela, tu ne cesses de calculer le ratio des longueurs faites versus les longueurs restant à faire en des pourcentages, tout en te faisant la réflexion que la représentation graphique de tout ceci dans ton esprit est celle d’une barre de défilement sur un ordinateur, représentation que tu généralises à d’autres moments de l’existence, comme la progression des jours de la semaine.

    Tu remarques que ta progression, comme cela l’est sur un ordinateur vieillissant, voire en fin de parcours, est de plus en plus laborieuse au fur et à mesure que la barre de défilement fonce.

    Et, faisant tes longueurs à la piscine le midi sur ton temps de déjeuner, tu fais l’application de cette longueur, de cette difficulté accrue et du pourcentage accompli contre le pourcentage restant à réaliser, l’application de tout ceci donc, à ton existence toute entière.

    Et d’après toi, tu en es où sur ta barre de défilement ?

    #133.

    A la piscine, en pleine forme, tu nages vite et longtemps, plus vite et plus longtemps que d’habitude et tu remarques alors que la lutte que tu mènes contre toi-même n’a plus son siège dans ton souffle mais dans les bras. Ce que tu regrettes, si tu vas à la piscine pour faire des longueurs, ce n’est pas pour accentuer le côté armoire à glace, pitié !, c’est bien davantage pour travailler ton souffle, augmenter cette capacité pulmonaire qui te fait défaut, surtout la nuit, mais voilà, tu le réalises en nageant, cela fait deux ans que tu fais des longueurs à la piscine, tu t’es endurci dans cet exercice, tu as plus de souffle et aussi plus de force dans les bras, et donc, réalisation amère, si tu veux travailler son souffle, il va falloir désormais faire davantage de longueurs, tirer davantage sur les bras, au point de te faire manquer de souffle.

    Les choses auxquelles on pense quand on fait des longueurs !

    Et sans doute aussi, nageant aujourd’hui avec de pareilles pensées en tête, as-tu le sentiment de nager avec la mort aux trousses, tu nages d’autant plus vite aujourd’hui.

    Exercice #7 de Henry Carroll : comment vous sentez-vous, exprimez-le avec la lumière

    Souvenir d’une grippe carabinée, avec de remarquables pics de fièvre.

    #qui_ca

  • 35 years Backwards thru Time with Sam Klemke (Time Lapse)
    https://www.youtube.com/watch?v=K2xTBHyfOks

    cf.
    Krapp’s Last Tape https://en.wikipedia.org/wiki/Krapp%27s_Last_Tape

    Krapp’s Last Tape is a one-act play, in English, by Samuel Beckett. With a cast of one man, it was written for Northern Irish actor Patrick Magee and first titled “Magee monologue”. It was inspired by Beckett’s experience of listening to Magee reading extracts from Molloy and From an Abandoned Work on the BBC Third Programme in December 1957.[1]

    The play was first performed as a curtain raiser to Endgame (from 28 October to 29 November 1958) at the Royal Court Theatre, London, directed by Donald McWhinnie and starring Patrick Magee. It ran for 38 performances.

    Das letzte Band https://de.wikipedia.org/wiki/Das_letzte_Band
    La Dernière Bande https://fr.wikipedia.org/wiki/La_Derni%C3%A8re_Bande

    Einmalig in München: “Das letzte Band”
    http://www.iris-media.info/spip.php?article5612

    #théâtre

  • J-219 : J’y vais, je n’y vais pas ? Mettre Qui ça ? en ligne, maintenant, ou, seulement quand ce sera fini ?

    A vrai dire je m’étais déjà posé la question, il y a plus de deux ans, quand j’avais commencé à construire Ursula . Et puis, après des années et des années de Bloc-notes du Désordre , je me suis dit qu’au contraire, je ferais bien de garder Ursula bien au chaud, de l’abriter des regards, de construire patiemment, d’autant que je n’étais sûr de rien. De rien. Je ne suis jamais sûr de rien. Là, je n’étais pas sûr que cela allait donner quelque chose ― et d’ailleurs je ne suis toujours pas très sûr que cela ait donné quelque chose. Et en fait, ici, avec Qui ça ? , non plus.

    Je pense qu’il y a quelques années, je me moquais bien de telles questions. Je faisais les choses et puis je les mettais en ligne, la distance entre le moment où je pensais à ce que je voulais faire et le moment où je mettais le résultat en ligne était aussi réduite que possible, en gros, le temps de faire les choses. Et puis cela n’a plus été, j’ai senti, il y a un lustre, que cela n’allait pas, que cela ne me laissait pas le loisir d’essayer, de rater, de recommencer et de rater mieux ( Ever tried. Ever failed. No matter. Try Again. Fail again. Fail better . Samuel Beckett). C’est curieux, cette phrase de Beckett, je la trouvais déjà très belle et puis, l’année dernière, j’ai eu l’occasion de remercier, ponctuellement, un simple geste, la psychologue d’Adèle, qui est irlandaise, je voulais un petit cadeau symbolique, je lui ai offert Molloy en français ― parce que Beckett avait écrit ce livre en français et que je me doutais que si elle l’avait déjà lu, elle avait dû le lire en anglais ―, elle avait souri, en me disant que c’était befitting ― entendre par là que je ne m’étais pas trompé en soupçonnant, au-delà de ses origines irlandaises, qu’elle puisse être une lectrice de Beckett ― et avait alors tenté de traduire, à la volée, cette merveilleuse formule de Beckett à Adèle en français, ce qu’elle avait très bien fait, en utilisant le verbe échouer , Essaie, échoue, essaie encore, échoue encore, qu’importe, échoue mieux. Je lui avais alors dit que dans la traduction française, aux éditions de Minuit , c’était le verbe rater qui avait été finalement choisi, mais que c’était très beau avec le verbe échouer, surtout quand on l’entend, aussi, dans son acceptation maritime.

    Il n’empêche, il s’agit bien de rater. De rater mieux. Mais de rater quand même. Et il s’agit de rater bien. De rater comme il faut. De rater en secret. De rater sans craindre le regard, et le jugement, d’autrui. Or, pendant des années, je ne me suis pas du tout préoccupé de rater en face de tous, cela ne me faisait ni chaud ni froid, en somme. J’aimais mieux réussir, mais cela arrivait quand même drôlement souvent que je rate.

    Alors qu’est-ce qui a changé ? Qu’est-ce qui a changé en moi ?

    C’est Ursula qui m’a changé.

    Ursula . En travaillant à Ursula , je n’ai pas eu peur d’échouer, à aucun moment, et même, je m’en rendais compte, si cela devait me coûter beaucoup de tra-vail, et cela m’en a coûté beaucoup, énormément, en fait, mais c’était comme de travailler à un jardin connu de moi seul, si ce que je plantais ne poussait pas, j’étais le seul à le savoir. Et de cette façon d’ailleurs, ce n’est pas le seul projet auquel j’ai travaillé de la sorte, j’ai bricolé un petit film d’animation de trois minutes, Philippe , ce que je n’avais jamais fait jusque-là, et il y avait toutes les raisons de penser que sans doute cela échouerait, par bonheur L.L. de Mars (http://www.le-terrier.net), nettement plus aguerri que moi avec ces choses animées, m’a mis le pied à l’étrier et a pris en charge le montage, voyant bien à quel point il était difficile pour moi de jeter des séquences sur lesquelles j’avais particulièrement transpiré, et cela a fini par donner ce petit film dont je suis finalement plutôt fier, je me suis lancé dans un petit film de time lapse ― un film d’intervalles ― et j’ai connu un plaisir extraordinaire à son montage en me fiant à la musique de Jean-Luc Guionnet, j’ai essayé des trucs qui ont plus ou moins bien fonctionné, comme de monter Film de Samuel Beckett sur une musique de Hubbub , et je continue de trouver le résultat de cette expérience étonnant, mais je peux difficilement m’en prévaloir (http://www.desordre.net/bloc/ursula/2014/bouquets/017.htm), je me suis de nouveau essayé à écrire des romans ― j’imagine que l’on peut tapisser ses toilettes de lettres de refus des éditeurs en prétendant être fort détaché de ces correspondances, plein de morgue même, mais, ne plus rien écrire pendant presque dix ans n’est-ce pas le signe qu’un certain message, décourageant, est peut-être passé ―, et puis finalement, dans le giron d’ Ursula , je me suis rendu compte que je prenais beaucoup de plaisir à raconter de ces histoires, leur donner corps, j’ai d’abord écrit Raffut , puis Arthrose ― dont un jour il faudrait que je me prenne par la main pour en réaliser la version électronique, sa bande-son, ses extraits de film, notamment du Fils de Saul de Laslo Nemes, tant ce livre est une entreprise de sa destruction finalement, et cela je ne le fais toujours pas parce que je me demande si j’en ai le droit, puisque c’est l’histoire de ma chance, de ma très grande chance de ne pas être allé dîner au Petit Cambodge un 13 novembre, le 13 novembre 2015, et la dernière chose que je voudrais faire c’est quelque chose d’obscène ―, et puis J. , un livre de fantasmes, Je ne me souviens plus et, cet été, Élever des chèvres en Ardèche (et autres logiques de tableur) ― ah mon, absence de talent pour les titres, en tout cas les titres courts, je crois que j’ai tout donné avec Désordre ― et puis les ébauches de Punaise ! ou encore des Salauds ― j’aimerais tellement avoir la force d’écrire ce livre jusqu’au bout, après je peux crever, je serais définitivement vengé ―, et, depuis peu, de X. et de Qui ça ? , et puis ces derniers temps ce projet de film documentaire, la Petite Fille qui sautait sur les genoux de Céline , oui, tout cela j’ai finalement eu le courage de le faire parce que je l’avais abrité des regards, au moins le temps de la construction et je crois bien que ce sera désormais ma conduite.

    Donnez-moi le temps et l’espace pour rater encore, pour rater mieux.

    Donc Qui ça ? , pour le moment va rester dans le seul cadre de seenthis, à l’état de brouillon. Je suis content d’y avoir réfléchi par écrit, une mauvaise fois pour toutes, pour emprunter la formule, à nouveau, à Samuel Beckett.

    https://vimeo.com/48765699

    #qui_ca

    • Exercice #2 de Henry Carroll : Prenez des photographies non touristiques d’un lieu touristique.

      C’est étonnamment de cette façon que je suis devenu photographe. J’ai fait mon service militaire au Service d’Information et de Relations Publiques des Armées dans l’Armée de l’air, en tant que photographe, dans un petit service qui comptait trois sous-officiers, tous les trois parfaitement photographes, avec de sérieux bagages techniques ― je leur dois beaucoup de mes connaissances tech-niques ― et pour l’un d’eux, un véritable regard de photographe ― je lui dois beaucoup dans ma façon d’appréhender un sujet et de chercher à en faire une image, il faisait notamment de la perruque en tant que photographe de plateau de l’émission de télévision Apostrophes, il était remarquable de voir que de semaine en semaine, avec le même décor, le même arrière-plan et le même éclairage, il trouvait le moyen d’un renouvellement ―, et qui se sont d’abord montrés fort méfiants vis-à-vis du deuxième classe que j’étais. Et pour me tester, d’emblée, le chef de cette petite unité, et donc photographe de plateau sur Apostrophe , m’avait confié deux boîtiers Nikon, deux FM2 si mes souvenirs sont bons, deux ou trois optiques que j’avais eu le droit de choisir parmi pléthore d’objectifs, deux films de couleurs et trois de noir et blanc et la consigne, à la fois simple et piégeuse, d’aller photographier la tour Eiffel, qui avait l’avantage de se trouver à quelques stations de métro seulement du Ministère de l’Air. Il s’attendait à ce que je revienne de ce reportage, un bien grand mot, avec une très belle collection de cartes postales, il en fut pour ses frais, et en fus assez surpris, tant ce que je lui rapportais correspondait en rien à ses attentes, j’avais d’abord pris le parti de photographier la Tour Eiffel de plus loin possible, y compris depuis le balcon de chez mes parents à Garches, ce qui était encore possible à l’époque, puis j’avais également produit toute une série de photographies des boulons rouillés de la vieille dame d’acier et aussi quelques photographies à la dérobée des touristes serrés dans les ascenseurs ― avec le recul il est assez amusant pour moi de me dire que, si cela se trouve, ces photographies font partie des archives photographiques de l’Armée de l’Air, dûment répertoriées avec des numéros de film du genre 1985-0178 0179 et 0180, je n’avais utilisé qu’un film de couleur et deux de noir et blanc et c’était, de fait, au tout début de l’année 1985. C’est au prix de cette originalité, dont je me demande bien ce qui avait pu la provoquer à l’époque, j’avais tout juste vingt ans et une culture visuelle fort pauvre, à l’exception d’un stock d’anciens numéros du magazine Zoom que j’avais achetés aux Puces ― et comme je serais content par la suite de trouver dans la bibliothèque du labo photo du SIRPA de nombreux autres numéros de cette revue que l’adjudant tenait en grande estime, parmi lesquels un numéro spécial à propos des photographes brésiliens, dans lequel j’avais fini par isoler une image de piétons sur une rue de Sao Paolo, une vue au huitième de seconde, seuls les pieds des passants sont nets, le haut de leur corps fantomatique, et par je ne sais quel tour de magie que la vie a en stock, j’ai eu à rencontrer le photographe de cette image, qui a longtemps été punaisée dans ma chambre, étudiant lui-même de Barbara Crane à Chicago, c’est désormais le tirage qu’il m’a offert, après que je lui ai raconté l’histoire de cette image, qui orne un des murs de ma chambre ― c’est au prix donc de cette originalité que j’ai été accepté au purga-toire de ce petit labo, dans lequel j’ai appris, en tirant des centaines et des centaines de photographies d’avions, mais aussi de reportages à propos de troupes au sol, ou encore de défilés militaires et de portraits de généraux, le métier de photographe.

      La même histoire de l’origine en somme racontée différemment, dans Arthrose :

      J’ai appris le métier de photographe pendant mon service militaire au Service d’Informations et de Relations Publiques des Armées (SIRPA) au sein d’une petite équipe de photographes, trois sous-officiers et moi-même, l’Aviateur De Jonckheere, deuxième classe donc, homme du rang. Les trois sous-officiers étaient des photographes de reportage tout à fait accomplis, certes cantonnés dans ce travail de représentation, glorieuse si possible, de l’armée de l’air, il n’en est pas moins qu’ils avaient de robustes compétences de photographes de terrain, l’un d’eux, par ailleurs, en dehors de ses heures de travail, était passionné de littérature et était le photographe de plateau de l’émission de télévision Apostrophes et j’ai beaucoup appris de lui, notamment sur la nécessité de réfléchir à l’image que je voulais faire avant de braquer mon appareil-photo, d’en réfléchir aux paramètres techniques, son enseignement était que la plupart du temps on disposait tout de même d’une trentaine de secondes de réflexion avant de prendre une photographie de reportage. Ces trois sous-officiers photographes étaient des passionnés et parlaient de photographie du matin jusqu’au soir, ils étaient abonnés à toutes sortes de magazines spécialisés et un de leur jeu préféré, qui devenait rapidement une joute amicale, était de deviner les circonstances d’une image, ses paramètres et ses astuces techniques et ce qui avait sans doute été produit au laboratoire pour parvenir à une telle image. J’ai beaucoup appris de ces discussions auxquelles j’étais parfois invité à participer en fin d’année de service militaire, ayant désormais acquis un vrai bagage technique. Parmi les nombreuses revues de photographie il y en avait une qui avait ma prédilection, il s’agissait de la revue Zoom , depuis défunte, et dans laquelle on trouvait les photographies les plus esthétiques comparées aux autres magazines, notamment les photographies de mode, sans compter quelques photographies à l’érotisme très esthétisant dont je ne pourrais jamais dire que, jeune homme, elles ne m’aient pas questionné et, si je devais les retrouver aujourd’hui, à quel point elles me feraient sourire. Et une bibliothèque occupait le couloir central de cet atelier de photographie dans laquelle se trouvaient de pléthoriques archives de toutes ces revues. Je me souviens d’un numéro spécial de Zoom consacré à la photographie brésilienne. Dans ce numéro une photographie avait particulièrement retenu mon attention, il s’agissait d’une photographie de rue, carrée, au 6X6, en noir et blanc qui représentait des passants flous à l’exception de leurs pieds qui étaient restés à peu près nets, flou de mouvement qui avait été particulièrement heureux pour permettre la création de ces fantômes aux pieds nets posés sur un pavé dont le piqué était remarquable. J’avais demandé à l’adjudant Rullaud. ce qu’il pensait de la vitesse d’obturation de cette image, 1/15ème ?, avais-je hasardé, plutôt 1/8ème avait-il répondu, donc l’appareil est sur un trépied ?, et, comme toujours, l’ironie avait fusé, avec une petite trace d’accent du Sud-Ouest, et bien si vous tenez le 1/8ème de seconde à main levée avec un Hasselblad, vous pouvez revendre votre trépied. Cet après-midi les tâches en cours étaient peu nombreuses et je lui avais demandé la permission de me servir du banc de reproduction pour me faire un tirage de cette image que j’aimais beaucoup. Fait inhabituel, il avait montré de l’enthousiasme pour cette perruque et m’avait même proposé de me servir de l’Hasselblad pour un meilleur rendu, homothétique qui plus est. J’ai longtemps eu ce tirage au-dessus de ma table de dessin quand j’étais étudiant aux Arts Déco, dans mon appartement de l’avenue Daumesnil. Ce qui est étonnant c’est que je n’avais pas pensé à noter le nom du photographe brésilien qui avait pris cette photographie. Trois ans plus tard je partais étudier à Chicago. J’ai fait des pieds et des mains pour suivre les cours de Barbara Crane sur le bon conseil de mon ami Halley. J’avais fini par obtenir d’intégrer le groupe d’étudiants en Master qu’elle prenait en tutorat ce qui était beaucoup plus que je ne pouvais espérer. Au début de l’année scolaire nous avons eu une réunion de ses étudiants de Master au cours de laquelle nous devions apporter quelques images de nos travaux en cours, pour ma part j’avais montré ma série sur Berlin, dont je ne peux pas dire, qu’en dehors de Barbara Crane, elle ait beaucoup enthousiasmé les autres étudiants. Puis ce fut le tour des deux Gregs. Les deux Gregs c’était un peu une autre limonade. Après eux, un autre étudiant étranger présentait un portfolio de photographies en noir et blanc, toutes prises à l’Hasseblad, les tirages étaient somptueux et en grande majorité montraient des paysages urbains de nuit avec cette particularité intéressante que sur aucune de ces images nocturnes on ne pouvait voir la source d’éclairage public qui pourtant éclairait ce paysage urbain de São Paulo. Barbara Crane n’était pas avare de compliments pour cet étudiant un peu plus âgé que nous et qui, comme moi, s’exprimait dans un anglais maladroit. Lorsqu’il est arrivé à la dernière image de son portfolio de photographies nocturnes, il était sur le point de remettre tous ses magnifiques tirages dans leur boîte quand je remarquai au fond de la boîte cette image que je connaissais si bien des fantômes sombres sur le pavé net. J’ai eu du mal, dans mon anglais encore balbutiant à l’époque, à raconter à quel point il était extraordinaire que je me retrouve en présence de cette photographie qu’un mois auparavant je décrochais du mur de ma chambre avenue Daumesnil à Paris, empaquetant mes affaires pour les stocker dans la cave de mes parents à Garches, avant de prendre le départ pour Chicago où je me trouvais désormais en face de son photographe en chair et en os. Carlos Fadon Vicente. Qui le jour de son départ de Chicago, en fin de premier semestre, m’avait cherché dans le labo pour me remettre un tirage de cette image, j’étais très ému de ce cadeau et avait balbutié le seul mot de portugais que je connaisse, Obrigado , nous nous étions embrassés dans l’éclairage inactinique du laboratoire collectif des étudiants en Master ― parfois internet ce n’est pas si pratique que cela, ainsi j’avais oublié du tout au tout le nom de Carlos, d’ailleurs dans un premier temps je me souvenais de Ricardo, et pourtant je voulais absolument que son nom figure en toutes lettres dans ce texte, pas juste son prénom, dont justement je me rends compte que ce n’était même pas le sien, j’ai passé beaucoup de temps à tenter toutes sortes de recherches pour retrouver Carlos-Ricardo, j’ai fouillé dans des listes et des listes de noms dans les anciens étudiants de the School of the Art Institute of Chicago (parmi lesquels j’ai été très déçu de ne pas trouver le mien), ce qui ne risquait pas beaucoup de réussir si je continuais d’appeler Carlos Ricardo, j’ai tenté de faire des recherches sur les archives du magazine Zoom sur internet, dont force est de constater qu’il n’en reste pas grand-chose, ce que je trouve regrettable, j’ai tenté des recherches sur les projets d’urbanisme de São Paulo parce que je savais que cette photographie faisait partie d’un ensemble de photographies qui avaient été commandées par un des urbanistes d’un grand projet de cette mégapole bré-silienne, j’ai fait des recherches de plus en plus larges à propos de photographes brésiliens contemporains, j’ai découvert une multitude de photographes aux travaux admirables, mais je ne retrouvais toujours pas Carlos-Ricardo, j’ai sorti la photographie du sous-verre posé sur ma table de travail et sous lequel j’ai composé un pêle-mêle parmi lequel se trouve la photographie de Carlos (mais aussi une lithographie de L.L. de Mars, une sérigraphie de Doug Huston, un polaroid agrandi de Jennifer Pilch, dont j’étais fou amoureux, une petite photographie de Natalie Bookchin, une photographie de Karen Savage, un tract de Formes d’une guerre , une lithographie sur papier kraft d’un étudiant portoricain à Chicago dont je me souviens seulement du prénom, mais de façon certaine, Alejandro, l’affichette de la lecture de @mona à la librairie Mille Pages à Vincennes, un tirage numérique de Barbara Crane, un petit collage photographique de Hanno me représentant à la Garde de Dieu en 1989, des billets de un dollar sur lesquels John Pearson, un autre étudiant de Chicago, avait imprimé des cyanotypes, une ancienne publicité pour le pneus Dunlop, pour ses couleurs qui me rappellent des tas de souvenirs d’enfance, un dessin de L.L. de Mars, une photographie de Mouli et moi chez nous, 943N Wolcott avenue à Chicago, une de mes photographies de la Très Petite Bibliothèque et une autre de la série 20040322.txt , un collage de quatre photographies représentant B. et moi nous embrassant à la Garde de Dieu, et enfin la photographie de Carlos) dont je pensais toujours qu’il s’appelait Ricardo, dans l’idée de la scanner de tenter une recherche en utilisant l’option de recherche par image du moteur de recherche, et c’est à ce moment-là que je me suis rendu compte, comment n’y avais-je pas pensé plus tôt ?, surtout quand on connaissait un peu Carlos, le genre de photographe sérieux, que naturellement, non seulement son nom figurait au crayon à papier au dos du tirage, mais aussi toutes sortes d’indications, Da Paulista, 1983, (Sao Paulo) © Carlos Fadon Vicente ƒ8 1/8 93˝ D 288/12 , pas toutes compréhensibles même par un autre photographe, le D majuscule souligné voulait-il signifier que le film avait développé dans du D76 ?, en revanche je remarque, trente ans plus tard, que le pronostic de l’adjudant Rullaud. était juste, c’était bien au huitième de seconde qu’avait eu lieu cette affaire : c’est fi-nalement là qu’internet est le moins pratique, quand on y cherche des choses que l’on a sous le yeux. J’ai toujours peine à me dire que ce jeune homme que j’étais devenu, presque 24 ans d’arrogance et de sûreté de soi, parti conquérir rien moins que l’Amérique, s’imaginant rien moins que le nouveau Robert Frank, n’était distant que de trois années de celui peu assuré qui s’arrangeait surtout pour ne pas trop déplaire aux trois sous-officiers photographes du SIRPA, ce faisant, tirant le meilleur de leurs connaissances techniques fort sûres, mais surtout ne les contredisant pas sur tant et tant de sujets, surtout politiques, mais aussi à propos de certaines des légendes courantes dans le monde de la photographie de reportage et notamment ces histoires abracadabrantes de scoops qui constituaient pour eux une manière de Saint Graal, se trouver sur les lieux d’une catastrophe, d’un événement historique, d’un attentat, d’un accident, sur le chemin d’un homme politique pris la main dans le sac, d’être le témoin photographiant de toutes sortes de malversations, de délits, de petits scandales minables écla-boussant à peine des personnalités du monde du spectacle, que sais-je encore, toutes sortes de situations dans lesquelles je rêvais moi de ne surtout pas me trouver, quand bien même, et c’était cela qui me désolait de la part de ces instructeurs chevronnés, cette attirance, de tels scoops pourraient mériter toutes sortes de rétributions de la part des grands hebdomadaires de la presse. Et à ce sujet les légendes urbaines qui émaillaient leurs conversations étaient à la fois nombreuses et invraisemblables, tel organe de presse, en cas de grande catastrophe aérienne, capable d’acheter en liquide, pour de fortes sommes, des films qui n’étaient pas encore développés et c’était tout un monde qui miroitait dans les yeux de ces photographes pourtant aguerris mais crédules de ces histoires dont au contraire, moi, si jeune, tellement en attente de leur validation, de leur reconnaissance comme un des leurs, alors je lisais Ultramarine de Malcom Lowry, et comme tout cela résonnait fort en moi, moi, leur deuxième classe de corvée des trucs pas toujours très drôles à faire, de ces batchs de films à déve-lopper dans la journée avec des planches-contacts, nettoyer les cuves, faire les mélanges et les tirages en cinquante exemplaires, c’était finalement moi qui était le moins crédule de telles fables. D’ailleurs quand j’entends le mot scoop, dans tout ce qu’il ne contient pas, c’est souvent à ces lointaines discussions en prenant le café que je tenais prêt au moment où les sous-officiers rentraient du mess des sous-offs, que je repense, pour moi le scoop ce serait toujours ces effets de récit d’une vie, ces spaghetti ramassés en désordre dans une assiette, mais que l’on tire sur un seul et cela bouge de l’autre côté de l’assiette, disparaît sous la masse des autres spaghetti, pour réapparaitre, ces moments de vie souterraine à l’intérieur de la vie-même, la photographie du magazine Zoom isolée, reproduite, accrochée sur le mur de ma chambre et dont je rencontre le photographe à l’autre bout du monde, ces photographies d’une jeune ivoirienne ramassée dans un bar et qui reparaît en Alsace, cette chambre en Espagne où je séjourne chez l’Oncle de mon amie Laurence, juge, et dont la fille, qui est en photographie de mariée sur la table de chevet de cette chambre et qui un jour devient mon avocate, ceux-là sont les vrais scoops de l’existence. Passer tout près de l’explosion d’une bombe, d’un accident ou d’un attentat terroriste, quelle que soit la manière dont ensuite on tente de donner du sens à ce frôlement continue d’être, par définition, un non-événement, le contraire même d’un scoop.

      Avec le recul, j’en viens à réaliser qu’en matière de photographie j’aurais eu deux professeurs assez dissemblables, l’adjudant Rullaud et Barbara Crane.

  • 9月20日のツイート
    http://twilog.org/ChikuwaQ/date-160920

    My Tweeted Times tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=rgp - top stories by @johnmoe, @johnrobinson posted at 12:00:10

    Top story: Donald Trump Jr. on Twitter: “This image says it all. Let’s end the … twitter.com/donaldjtrumpjr…, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp posted at 11:40:09

    Top story: The Washington Post is wrong: Edward Snowden should be pardoned | Tr… www.theguardian.com/commentisfree/…, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp posted at 09:44:59

    The latest Papier! paper.li/ChikuwaQ/13277… Thanks to @youtopos @KinoScript @GilesDuke posted at 09:18:08

    RT @holdengraber: “I am not interested in living in a city where there isn’t a production by Samuel Beckett running” Edward Albee pic.twitter.com/gI2dRrXzmo posted at 08:24:09

    RT @Telanova_: Twitten Apparition..., Photo by Nigel (...)

  • Donc hier soir je suis allé voir la Bataille d’Algérie au ciné-club (voir du coup dernier commentaire dans une ancienne joute seenthis http://seenthis.net/messages/455385 ), film qui décidément ne remporte pas mon adhésion, mais dans lequel j’isole volontiers l’interprétation de Jean Martin, genre de comédien des seconds rôles que l’on voit dans tout plein de films et dont on a toujours le nom sur le bout de la langue. Du coup ce matin, ni une ni deux, je prends toutes sortes de renseignements sur le bonhomme et je découvre qu’il était nettement plus qu’un second couteau, notamment au théâtre où on lui doit la première interprétation de Lucky dans En Attendant Godot de Samuel Beckett, et d’être, tellement naturellement, finalement, signataire du Manifeste des 121 ce qu’il eut à payer fort cher d’ostracisation.

    Et chose que je trouve prodigeisue entre toutes finalement c’est que c’est lui qui donne sa voix, sa très belle voix, à l’Oiseau, dans le roi et l’oiseau de Paul Gruimault.

    Je m’excuse, c’est un peu ma chornique le saviez-vous (ce que je ne savais pas), mais je trouve cela très émouvant de constater à quel point cet acteur a eu une carrière peu voyante mais d’une très grande richesse.

    La chronique de sa disparition dans le Monde est finalement la page la plus synthétique qui soit pour ce grand bonhomme sans vacarme.

    http://www.lemonde.fr/disparitions/article/2009/02/07/jean-martin_1152247_3382.html

  • 4月23日のツイート
    http://twilog.org/ChikuwaQ/date-160423

    Top story: @sevelaurent: ’La passion des étoffes chez un neuro-psychiatre #DeCl… pic.twitter.com/Zxlb183j9K, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp

    posted at 10:38:03

    Papier is out! paper.li/ChikuwaQ/13277… Stories via @GenKnoxx @samvega_pasada @FloraViguie posted at 09:16:13

    Top story: Sony World Photography Awards 2016 Winners Revealed petapixel.com/2016/04/22/win…, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp posted at 08:04:01

    Top story: Virginia Governor Restores Voting Rights to Felons www.nytimes.com/2016/04/23/us/…, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp posted at 05:21:24

    Top story: Koumiko, interroger l’habituel, comme un Samuel Beckett www.actualitte.com/article/livres…, see more tweetedtimes.com/ChikuwaQ?s=tnp posted at 01:52:48

    うちのポプリは鼻風邪をひいたのか、元気がない。 posted at (...)

  • Très beau texte !
    Non, les migrants ne sont pas un fardeau !

    C’est parce que l’extrême droite a réussi à imposer l’idée que l’immigration était un problème que les migrants sont rejetés par les Européens. Et si l’on changeait d’angle et qu’on y voyait plutôt une force ?

    L’arrivée massive de migrants s’impose comme l’une des questions majeures dans l’Europe des années à venir. Les journaux s’affolent, les compteurs explosent, les bureaux d’études s’inquiètent : cette année, le nombre de migrants traversant la Méditerranée pour rejoindre l’Europe pourrait même atteindre le chiffre de 100 000. Cent mille personnes qui arrivent sur un territoire peuplé de 500 millions d’habitants… Et ce serait un problème que d’accueillir une personne pour 5000 habitants, dans l’Europe d’aujourd’hui ?

    Si nous percevons cette question comme un problème, c’est parce que nous sommes aveuglés par les thèses des partis d’extrême droite. Depuis plusieurs décennies, ils ont réussi à instiller dans tous les esprits - y compris hélas dans ceux des hommes politiques de tous bords aveuglés par l’enjeu de court terme de la prochaine élection - une vision faussée des migrants, nourrie par la #peur.

    Que s’est-il donc passé au cours des trois dernières décennies pour que notre regard change à ce point ? Avons-nous oublié la mobilisation pour les boat people et la démarche conjointe, en juin 1979, des philosophes Sartre et Aron, réconciliés autour de cet enjeu, lorsqu’ils vinrent demander au président Giscard d’Estaing un accueil décent pour les réfugiés du Vietnam ?

    Certes, la situation économique a bien changé depuis les années 70, et la montée du chômage de masse a contribué à alimenter la peur de l’immigration. Pourtant, craindre ainsi l’arrivée des migrants, c’est ignorer que, dans les sociétés modernes, les ressources ne sont pas un gâteau à partager, mais qu’elles sont bien plutôt créées par les hommes, à partir de leurs propres idées, de leurs propres inventions, de leurs propres besoins : les terres d’immigration sont bien souvent des terres d’avenir - que l’on songe à la Californie.

    Non, les migrants ne viennent pas nous envahir, ni manger notre pain, ni prendre notre travail, ni piller nos ressources. Ce sont des êtres humains dignes, extraordinairement courageux, qui ont dû abandonner leur pays d’origine, face à la situation désespérée qui y a été créée par la guerre ; ce sont donc très majoritairement des hommes et des femmes confiants dans nos démocraties, et des adversaires résolus de ces obscurantistes qui, chez eux, alimentent les conflits qui les font fuir. De plus, à l’instar des précédentes générations de migrants qui ont enrichi notre pays au cours des siècles précédents, ils représentent, pour l’Europe de 2050, un immense #potentiel d’idées, de volontés, d’énergies et de ressources. Est-il besoin de rappeler le nom de tous ces immigrés qui ont construit la France d’aujourd’hui et dont la liste prendrait des volumes ? On y trouve des scientifiques comme Marie Curie, Georges Charpak, Alexandre Grothendieck, des écrivains tels que Samuel Beckett ou Milan Kundera, des artistes comme Pablo Picasso ou Marc Chagall, sans parler des chefs d’industrie, des sportifs, des hommes politiques, et tous ceux qui, sans faire la une des journaux, ont su créer leur propre territoire d’insertion.

    Les chercheurs le savent bien : face à une question difficile, c’est bien souvent grâce à une modification radicale de l’angle d’approche que commence à naître une voie vers la solution. Ainsi, modifier le #regard que nous portons sur ces migrants, et considérer qu’ils ne sont pas un fardeau à subir ou à partager, mais bien plutôt une force pour l’Europe, tel me semble être le point de départ indispensable aujourd’hui. Alors, seulement, pourra être initiée la complexe mise en place de structures d’#accueil pour ces hommes et ces femmes, en leur faisant confiance, en les laissant travailler et s’organiser. C’est en éliminant cette vision faussée sur l’immigration - tel un poison qui a pénétré à notre insu au cœur des pays européens - que nous ouvrirons un futur à nos sociétés. Ainsi peut-être parviendrons-nous alors à leur donner à nouveau un sens et redeviendrons-nous également un peu plus humains. Il y a urgence.

    http://www.liberation.fr/societe/2015/07/13/non-les-migrants-ne-sont-pas-un-fardeau_1347380
    #migration #asile #fardeau #réfugiés #force #problème

  • Samuel Beckett’s biographer reveals secrets of the writer’s time as a French Resistance spy

    As this year’s Samuel Beckett festival opens in Enniskillen, James Knowlson, recalls how the Irish writer risked his life for liberty and narrowly escaped capture by the Gestapo .

    Réseau Gloria — Wikipédia
    fr.wikipedia.org/wiki/Réseau_Gloria

    Ce réseau qui fut fondé par Jeannine Gabrielle Picabia (fille du peintre ... Samuel Beckett et sa compagne Suzanne Deschevaux-Dumesnil, prévenus par la ...
    inédits: Beckett à vrai dire 1/4 - Verdier
    www.editions-verdier.fr/banquet/n45/inedits3.htm

    Terrorisées, parce que Samuel Beckett voyait mal, conduisait très vite et avait ... C’était un groupe formé essentiellement d’intellectuels : Jeannine Picabia, fille ...
    Samuel Beckett: A Biography

    Deirdre Bair - 1990 - ‎Biography & Autobiography
    211-212.) Beckett, with his interest in astronomy, was no doubt familiar with the work of both men. ... Gabrielle Buffet-Picabia, Jeannine Picabia, Kay Boyle. 28.
    Jeanine Picabia et le réseau Gloria SMH - Musée de la ...
    www.museedelaresistanceenligne.org/media.php?media=2761&popin...
    Légende : Photographie de Jeanine Picabia, fondatrice du réseau Gloria SMH, l’une ... Péron, professeur au lycée Buffon, et l’écrivain irlandais Samuel Beckett.

    Samuel Beckett’s biographer reveals secrets of the writer’s ...
    www.independent.co.uk › ... ›
    23 juil. 2014 - “Nothing to be done” is the opening line of Samuel Beckett’s best-known play, ... Other interviews with Jeannine Picabia are more revealing.