• « Ce qu’annonce l’éclatement irakien » par Peter Harling 07/2014
    https://www.monde-diplomatique.fr/2014/07/HARLING/50615

    L’offensive de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) n’a surpris que ceux qui se désintéressaient de l’évolution du pays depuis le retrait des troupes américaines. L’incompétence du pouvoir central et sa politique favorable aux chiites ont créé les conditions d’une insurrection sunnite.

    La récente montée en puissance d’une force djihadiste sunnite dans le nord-ouest de l’Irak est spectaculaire, au sens propre du terme. Elle relève du mauvais vaudeville : il y a dans le pays, pour ainsi dire, un terroriste dans le placard. Lorsqu’il fait irruption sur la scène, le premier ministre chiite Nouri Al-Maliki joue la surprise, crie à l’assassin et appelle ses amis à la rescousse pour le chasser de la maison. Pourtant, ce djihadiste, c’est lui-même qui lui a ouvert la porte et qui l’a nourri. Ses amis, notamment iraniens, le savent, mais trouvent un intérêt à se prêter au jeu. Car le terroriste est l’excuse toute trouvée pour éclipser les errements de celui qui, après tout, reste leur homme.

    En juin 2014, donc, des djihadistes sunnites opérant sous le nom d’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL, également connu sous son acronyme arabe, Daash) s’emparent presque sans combattre de Mossoul, deuxième ou troisième ville du pays selon les chiffres auxquels on se réfère. D’autres localités, dans cette zone à dominante arabe sunnite, tombent rapidement, à mesure que l’appareil de sécurité se désintègre. L’Etat irakien abandonne ses équipements militaires, dont des véhicules fournis par les Etats-Unis, laisse derrière lui ses nombreux prisonniers — généralement détenus de façon arbitraire — et livre à l’adversaire des prises de choix : près d’un demi-milliard de dollars entreposés dans une succursale de la banque centrale, notamment. Des groupes armés moins radicaux se joignent au mouvement, s’attribuant une part vraisemblablement exagérée de ces victoires. Parmi les habitants qui ne fuient pas, certains célèbrent ce qu’ils appellent une « libération », un « soulèvement », ou même une « révolution »...

    Pour compléter les archives sur #Peter_Harling un excellent article du #Monde_Diplomatique.

  • Collectively failing Syrian society
    https://peterharling.com/2012/01/24/collectively-failing-syrian-society

    C’est une archive :
    Originally published in Foreign Policy, 24 January 2012

    FOR MONTHS, neither the Syrian regime, the international community, nor the opposition in exile have offered much hope in a dangerously deteriorating crisis. Increasingly, they seem to be unintentionally conniving in bringing about a civil war although it will serve no one’s interests, destabilize Syria for years, and suck in the rest of the region. Their enduring pursuit of maximalist demands may sabotage what chance still exists for a negotiated transition.

    The regime’s vision consists in cracking down decisively against residual pockets of foreign-backed trouble-makers, then opening up politically within sensible boundaries — similar to Jordan’s or Bahrain’s promise of limited reforms. Outside players currently bent on its demise, it wagers, ultimately will realize it cannot be destroyed; already hesitant for lack of good options and fear of ensuing chaos, they will grudgingly move to softer forms of pressure and, in time, even resume engagement. The regime’s sympathizers and allies are all too keen to believe that it is strong, that the reach of the protest movement is wildly exaggerated by hostile media, that the foreign conspiracy is both all-encompassing and impotent, and that Syrian society is so disease-ridden — a hodgepodge of fundamentalists, thugs, and third party proxies — that it cannot but deserve the security services’ tough medicine.

    #syrie #peter_harling

  • « Moi, le Coran, je m’en tape » : les jeunes djihadistes français dirigés par une révolte personnelle et l’ultraviolence, pas par l’islam - RTL Info

    http://www.rtl.be/info/monde/france/-moi-le-coran-je-m-en-tape-les-jeunes-djihadistes-francais-diriges-par-une-revol

    Qui sont ces jeunes qui deviennent djihadistes et se radicalisent en quelques mois voire quelques semaines ? Selon Peter Harling, ce n’est pas l’islam qui est leur point commun, mais bien leur soif de violence.

    Ils invoquent Allah à chaque phrase mais pour les jihadistes d’un genre nouveau, comme ceux qui ont ensanglanté Paris le 13 novembre, l’islam est un prétexte permettant surtout de canaliser une révolte intime et une soif de violence, estiment des experts.

    « Leur culture musulmane est sommaire, voire quasiment nulle »

    Convertis de fraîche date, maîtrisant mal ou pas du tout l’arabe, jonglant avec des concepts qu’ils comprennent à peine ou dont ils tordent le sens, ils ont trouvé dans l’organisation Etat islamique (EI) une structure souple et pragmatique au sein de laquelle peut s’épanouir leur désir de radicalisation, ajoutent-ils. « Leur culture musulmane est sommaire, voire quasiment nulle », confie à l’AFP Peter Harling, du groupe de réflexion International crisis Group (ICG). « En fait ceux qui ont la culture musulmane la plus solide sont les moins susceptibles de se ranger du côté de l’EI ».

    #djihadisme #peter_harling

    • Directeur de l’Observatoire du religieux, professeur à l’IEP d’Aix, Raphaël Liogier a étudié les profils de dizaines de jihadistes ou aspirants-jihadistes français. « Aucun de ceux qui sont intervenus sur le sol français, de Mohamed Merah jusqu’à ceux du 13 novembre, sont passés par une formation théologique de fond ou par une intensification progressive de la pratique religieuse », dit-il à l’AFP. « Ce sont des gens qui sont dans un rapport à la violence, parce que l’islam est actuellement synonyme de violence antisociale. Ils veulent exprimer leur désir d’être antisocial ». « Ils prennent des postures de fondamentalistes, mais ce ne sont que des postures », dit-il. « Ils passent seulement dans les mosquées, prient moins que les autres. Ils cultivent un style que j’appellerais néo-afghan, à la recherche d’une espèce de romantisme néo-guerrier ».

      "Dans les années 80, ils seraient devenus punks ou entrés dans des mouvements d’extrême-gauche ou d’extrême droite"

      « Comme ils sont d’origine maghrébine et qu’on leur dit qu’ils sont potentiellement musulmans et que l’islam a une image négative, ça devient désirable pour eux. Dans les années 80, ils seraient devenus punks ou entrés dans des mouvements d’extrême-gauche ou d’extrême droite », ajoute Raphaël Liogier. « Ils sautent directement dans le jihad, parce qu’ils ont pour point commun la délinquance, des problèmes dans leur enfance et le désir d’être des caïds ».

    • « En fait ceux qui ont la culture musulmane la plus solide sont les moins susceptibles de se ranger du côté de l’EI ».

      Espérons que certains ne vont pas comprendre que les « musulmans d’origine » dont la culture musulmane est sommaire sont tous des djihadistes potentiels....

    • Musulman d’apparence, comme dirait l’autre ?

      Une autre analyse venant de Gilles Kepel qui écrit pour le site de « Atlantico », même si cette source est tendancieuse, son analyse n’est pas dénuée d’intérêt.

      http://www.atlantico.fr/decryptage/comment-france-est-devenue-principale-usine-occidentale-produire-terroristes-theorie-americaine-qui-derange-gilles-kepel-carnage-2766924.html/page/0/1

      Le carnage de Nice survenu ce jeudi révèle à nouveau que la menace terroriste pour la France se trouve au cœur même de sa société. Le politologue William McCants a conduit, il y a quelques mois, une étude préliminaire révélant que, par rapport au nombre de leur population musulmane sunnite, les pays francophones comptent le plus de cas de radicalisation. Un phénomène qui s’expliquerait par l’approche française de la sécularisation.
      Cet « effet francophone » serait exacerbé dans les pays les plus développés en matière d’éducation, d’infrastructures et de santé, parmi lesquels la France. Quels liens pourraient être établis entre le développement économique et politique de la France et la radicalisation de sa population musulmane sunnite ?

      J’insiste sur le fait qu’il faut éliminer ce terme de « radicalisation » qui n’a aucun sens. La question est celle du passage au salafisme, en rupture avec les valeurs de la laïcité et de la démocratie. Ce qui est très frappant en France, c’est que le vocabulaire salafiste s’est érigé contre la laïcité.

      (Bon après, il y a un effet #paywall sur ce site si vous avez été trop gourmand, au bout de la 3e page je crois).

    • Merci pour ce texte @mona j’en colle une partie ici

      Au-delà de la quête de sens, c’est aussi leur place dans la société qui est interrogée. Si les profils des auteurs d’attentat en Europe et des tueries de masse aux Etats-Unis diffèrent, le fait de ne pas trouver de place ou de ne pas être à la place qui leur semblerait correcte paraît être un élément récurrent. Et c’est là qu’une perspective de genre pourrait alimenter le débat. En effet, dans une société patriarcale, la « juste place » pour nombre d’hommes est une position de dominant. Or, lorsqu’on est discriminé ou exclu en raison de ses origines, peu ou pas inséré, on subit une forme de déclassement. La violence extrême pourrait alors être envisagée comme une façon de reconquérir ce qu’ils considèrent comme leur « juste place virile ». On peut donc dire qu’il s’agit de forme ultime de la violence masculine, qui dans ses types moins extrêmes est souvent peu condamnée, voire même tolérée.

      Par ailleurs, les Etats occidentaux proposent des réponses empruntant au même registre de la virilité magnifiée. Combien a-t-on salué Hollande lorsqu’il a endossé sa posture de chef de guerre, rassembleur au lendemain de l’attentat contre Charlie Hebdo ! Combien les propos ont été durs envers les quelques élu-e-s et les militant-e-s français-es inquiété-e-s par les risques de dérive de l’état d’urgence, laissant les pleins pouvoirs à la police et à l’armée ! Enfin, au lendemain de cet attentat, la première réponse a été d’annoncer le durcissement des frappes en Syrie, le bras de fer viril se poursuit...

      Que dire enfin de la réponse des forces de l’ordre lors de tous ces derniers événements ? L’exécution des auteurs a été systématique. On peut comprendre que dans certaines situations, les échanges de coups de feu entraînent la mort du suspect, du tireur ou du terroriste. Mais il est devenu quasi « normal » d’entendre que le tueur, parfois le tueur présumé, a été abattu. La justice (on entend par ici le système judiciaire) ne semble plus avoir sa place. L’exécution durant les opérations devient donc la réponse, un retour à peine voilé de la peine de mort en somme. On en revient à la loi du Talion, ou à celle du Far West, dans les deux cas des illustrations de modèles virils hégémoniques : le patriarche défendant les siens.

      Aucune prétention ici à présenter les mécanismes qui conduisent des personnes, en l’occurrence majoritairement des hommes, à passer à la violence, encore moins à en excuser les origines, mais une volonté d’analyser, de trouver des pistes pour enrayer le phénomène. Si le terrorisme, quelle que soit l’idéologie qui le sous-tend, est une forme extrême de la violence masculine et donc l’expression de la domination masculine, il convient de la combattre sous toutes ses formes. Rappelons ici que le meurtrier de Nice était connu des services de police, non pour détention d’armes ou participation à une organisation terroriste, mais pour violences conjugales ! C’est pourquoi il s’agit de ne plus minimiser les violences ordinaires, quotidiennes perpétrées par des hommes au nom de leur virilité.

    • Pourquoi il ne faut pas confondre le #salafisme et le #takfirisme

      http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2015/11/25/pourquoi-il-ne-faut-pas-confondre-le-salafisme-et-le-takfirisme_4817042_4355

      Néanmoins, la plupart des salafistes appartiennent à ce que l’on appelle la branche quiétiste. Ils sont pacifistes et ne cherchent pas à changer la #loi, même s’ils n’en reconnaissent pas la #légitimité.

  • Erosion and Resilience of the Iraqi-Syrian Border
    by Peter Harling, Alex Simon :: SSRN

    http://papers.ssrn.com/sol3/papers.cfm?abstract_id=2662390

    Syria and Iraq’s accelerating fragmentation has prompted feverish speculation about the erasure of the modern Middle East’s Western-imposed borders. Such notions are not altogether divorced from reality: Syria and Iraq today are scarcely recognizable as nation-states, and their once rigid border has become increasingly porous while falling entirely from governmental control. Yet this erosion must not be mistaken for dissolution. The post-Ottoman border continues to serve an array of material and symbolic functions, and as such will remain of paramount relevance, as a resilient object of contention, for the foreseeable future. By grappling with this paradoxical state of mutation and durability — and by tracing its roots back into the late twentieth century — we can draw broader insights into the seismic changes roiling the Middle East, where brittle, centralizing power structures are increasingly giving way to a more grassroots and fluid political landscape with which Western actors have yet to come to terms.

    #syrie #irak #peter_harling

  • THE ISLAMIC STATE THROUGH THE LOOKING-GLASS | Peter Harling | LinkedIn

    http://arabist.net/blog/2015/3/3/the-islamic-state-through-the-looking-glass

    They will say, “Our eyes have been deceived. We have been bewitched.”
    Surat al-Hijr (15:15)

    One of the particularities of the movement calling itself the Islamic State is its investment in the phantasmagorical. It has an instinctive understanding of the value of taking its struggle to the realm of the imagination as the best way to compensate for its real-world limits. Even as it faces setbacks on the battlefield, it has made forays into our collective psyche, where its brutality and taste for gory spectacle is a force multiplier. Perhaps more than merely evil, the Islamic State is diabolical: like the Satan of scripture, it is a creature that is many things to many people, enjoys a disconcerting allure, and ultimately tricks us in to believing that we are doing the right thing when we are actually destroying ourselves.

    This may explain, in part, how it is increasingly resorting to crimes that are not just horrific but spectacularly staged, such as the immolation of Jordanian pilot Moaz al-Kassasbeh or the mise-en-scène of the beheading of 21 Egyptian Copts on a Libyan beach. The Islamic State is at its most dangerous in its interaction with the psyche, the fantasies, the frustrations and the fears of others, from the converts it attracts to policy-makers and analysts.

    #syrie #irak #isis #is #peter_harling