• « Taylor Swift illustre le pouvoir politique de la culture populaire par le caractère explicitement moral de son soutien à Kamala Harris »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2024/09/18/taylor-swift-illustre-le-pouvoir-politique-de-la-culture-populaire-par-le-ca

    Depuis le lancement de la campagne présidentielle aux #Etats-Unis, on s’attendait à un soutien de la superstar mondiale Taylor Swift à la candidature démocrate. L’annonce, juste à la fin du débat qui a opposé, mardi 10 septembre, la vice-présidente Kamala Harris à l’ex-président Donald Trump, n’est pas une surprise : mais le timing, la tonalité et la thématique en font un geste politique particulier. Son post Instagram dépasse largement les engagements rituels d’Hollywood aux côtés des candidats démocrates : « Je vote pour Kamala Harris parce qu’elle se bat pour les droits et les causes qui exigent une guerrière pour les défendre. »

    Par le caractère explicitement moral de son soutien, Taylor Swift illustre désormais le pouvoir politique de la #culture_populaire, trop souvent décriée en France, dont le rôle est de transmettre des valeurs partageables et mobilisatrices que les politiques ont bien du mal à incarner. Il ne s’agit pas d’être un modèle à suivre – elle indique seulement ce qu’elle va faire –, mais de faire et de donner confiance aux jeunes électeurs. Elle a exhorté ses fans à s’inscrire sur les listes électorales à un moment crucial, ciblant un électorat que les démocrates peinent à faire voter.

    Ce positionnement se différencie de celui des « personnalités » qui affichent régulièrement leur soutien à des candidats démocrates : en 2016, Beyoncé, Salma Hayek, Lena Dunham, George Clooney, Robert De Niro, Meryl Streep, Pharrell Williams et bien d’autres avaient apporté leur caution à Hillary Clinton contre Donald Trump. A l’époque, il s’agissait d’utiliser à la fois un statut de star et une supériorité morale, dans la tradition d’une alliance de bon goût des démocrates privilégiés et du milieu mythique d’Hollywood. Ce qui s’était retourné alors contre Hillary Clinton, perçue injustement comme bourgeoise élitiste méprisant les « white trash  [« raclures blanches »] de Trump.

    Rôle assumé

    Taylor Swift a (parmi d’autres) soutenu Joe Biden en 2020. Mais, quatre ans après, son post et sa signature sarcastique – « Taylor Swift, Childless Cat Lady », référence aux propos, en 2021, du vice-candidat réactionnaire J. D. Vance sur les démocrates « femmes à chat sans enfants » – signalent un changement d’échelle, une mutation du rôle politique de la culture populaire. Il ne s’agit pas de vedettes individuelles apportant leur belle caution en surplomb, mais d’un empowerment [« responsabilisation »] de leurs publics ; la reconnaissance d’un champ culturel qui ne se réduit pas à ses stars ou à ses produits mondialisés, mais joue un rôle-clé (au cinéma, dans la chanson, les séries, la mode et le sport) dans la promotion et l’expression des valeurs portées par la candidate Harris.

    Bien sûr, on peut espérer que Kamala Harris, avec le post de Taylor Swift, engrange les voix supplémentaires qui pourraient la mener à une victoire tant espérée – tout comme le soutien d’Oprah Winfrey avait joué dans la victoire de Barack Obama à la primaire démocrate en 2008 (où Harris avait alors été un de ses premiers soutiens). Mais ce sont des phénomènes peu calculables, et marginaux.

    Ce qui importe ici est le rôle enfin assumé de la culture populaire dans la politique. Car le potentiel de la culture populaire comme ressource et lieu d’invention autonome est souvent ignoré et dévalué. Les industries culturelles sont souvent conçues en France comme divertissement sans valeur théorique ou politique, que les critiques saisissent toute occasion de dénigrer.

    Il aura fallu le choc esthétique et démocratique des cérémonies des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024 pour qu’apparaissent au grand jour la puissance politique du bouillonnement créatif de ces formes culturelles et leur entrelacement avec la création contemporaine. Il aura fallu les Jeux eux-mêmes, fertiles en moments d’intensité morale, d’émotions d’égalité et de dignité, pour que le sport comme culture populaire mondialisée soit soudain devenu emblématique de la dimension morale du populaire.

    Valeurs de « care »

    La popularité de Kamala Harris est inscrite dans cette dimension culturelle et elle en joue sur les réseaux, utilisant tous les ressorts de la culture pop – mèmes, danses, voire vidéos de cuisine. Toujours en inversion radicale des pseudo-« valeurs » de Trump : le racisme, le sexisme, le mépris moqueur des handicapés et des minorités sexuelles.

    Revenons sur le timing parfait de Taylor Swift : un soutien juste après ces heures de débat où non seulement Kamala Harris a dominé Donald Trump, mais l’a fait avec un positionnement moral, allant lui serrer la main à l’arrivée, signalant constamment sa vilenie (« disgrace ») intellectuelle et politique. Tout en se fichant ouvertement de lui, assumant la personnalité politique qui l’a amenée où elle est et qu’elle a parfois refoulée ces dernières années (son côté jovial et assuré, son éclat de rire aux allégations de Trump sur les immigrés), elle a défendu et exprimé des valeurs orthogonales à celles de l’ex-président.

    On a dit que Kamala Harris n’avait guère exposé de vision pour son mandat futur. Mais elle a réfuté toutes les contre-valeurs exsudées par Trump, en défendant les droits de femmes, en affichant sa préoccupation pour les vulnérables, opposant son « I care about you » (« je me soucie de vous ») au narcissisme d’un candidat toujours grotesquement préoccupé de lui-même. Sa bonne humeur rieuse contraste avec l’amertume et la violence qui émanent de la personnalité de Trump, dont témoigne encore son exploitation culpabilisatrice de ce qui pourrait être une deuxième tentative d’assassinat.

    Ce sont bien ces valeurs de « care » exprimées par Kamala Harris auxquelles Taylor Swift donne son appui. Avec son colistier Tim Walz, Kamala Harris assume à la fois un changement culturel, souligné par la présence même de cette candidate (femme et racisée, comme si cela allait de soi), et un positionnement populaire, voire populiste – un terme qui ne fait pas peur aux politiques états-uniens.

    Le slogan de Harris, « We are not going back », c’est-à-dire tourner la page, aller de l’avant, pourrait s’appliquer à l’histoire culturelle du présent. Elle assume ainsi avec le progressisme radical une forme de #populisme, terme qui, en américain, n’est pas que péjoratif. Dans cette langue, il renvoie également à une défense du citoyen ordinaire comme porteur de valeurs et pouvoir démocratiques. Bien sûr, cela paraît difficile de défendre aujourd’hui le populisme dans sa version la plus néfaste, celle qui est associée à des tendances autoritaires voire fascisantes, Trump le premier. Mais n’oublions pas qu’Obama se revendiquait populiste et déniait ce titre à Trump, l’accusant de s’accaparer une étiquette qui ne lui revenait pas – et que Biden l’a assumé pour sa #politique économique.

    Accepter la puissance politique de la culture populaire nous invite à analyser notre refus du populisme. Sans tomber dans un « populisme de gauche » groupusculaire qui n’a jamais pu convaincre, ne serait-il pas temps de reconsidérer ensemble le populaire et le populisme ? Et de se demander si le rejet réflexe du populisme par la classe politique qui se veut démocratique et sa condescendance envers le populaire ne sont pas devenus des verrous pour la démocratie ?

    Sandra Laugier est professeure de #philosophie à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne. Elle a dirigé l’ouvrage collectif « Les Séries. Laboratoires d’éveil politique » (CNRS Ed., 2023).

    Lire aussi
    « Les supporteurs de Kamala Harris devraient garder la tête froide : les jeux ne sont pas faits », Françoise Coste, Professeure d’études américaines
    https://justpaste.it/bdx43
    « De nombreuses études ont démenti le mythe selon lequel Trump serait le président de la classe ouvrière », Mario Del Pero, historien
    https://justpaste.it/extv5 

    #philosophie_française #élections

    (à la décharge de l’impétrante, c’est vrai que "les blondes préfèrent les métèquees" aux roquets à mèche, c’est ba-lai-se)

    • Présidentielle américaine : le puissant syndicat des routiers renonce à soutenir Donald Trump ou Kamala Harris, après vingt-cinq ans d’appui aux démocrates
      https://www.lemonde.fr/international/article/2024/09/18/presidentielle-americaine-le-puissant-syndicat-des-routiers-renonce-a-souten

      Le Parti démocrate a pu compter sur le fidèle soutien des Teamsters depuis l’an 2000, et c’est la première fois depuis 1996 que le syndicat choisit de ne soutenir aucun candidat. Deux sondages rendus publics mercredi montrent que la base est favorable à un soutien à Donald Trump.
      Des représentants de l’organisation syndicale, fédérant 1,3 million de membres, avaient pourtant rencontré lundi Kamala Harris. Les Teamsters ont soutenu à chaque élection les candidats démocrates depuis Al Gore : John Kerry, Barack Obama, Hillary Clinton et Joe Biden. Avant, ils avaient apporté leur appui à Ronald Reagan, en 1984, et à George H. W. Bush, en 1988, puis à Bill Clinton, en 1992.

  • « Joyeux anniversaire, Karl » !

    A cette occasion, voici une liste non exhaustive d’ouvrages en anglais concernant les écrits de Marx ainsi que d’autres auteurs proposant une réinterprétation des pensées « Marxiennes » dans le but d’une adaptation à l’époque contemporaine.

    Karl Marx : a Verso Reading List | Verso Books
    https://www.versobooks.com/en-gb/blogs/news/may-5th-is-karl-marxs-birthday-verso-red-may-sale

    Parmi cette liste, un ouvrage a retenu mon attention, celui de Georg Lukács : The Destruction of Reason
    https://www.versobooks.com/en-gb/products/2695-the-destruction-of-reason

    A classic of Western Marxism, The Destruction of Reason is Georg Lukács’s trenchant criticism of German philosophy after Marx and the role it played in the rise of National Socialism. Originally published in 1952, the book is a sustained and detailed polemic against post-Hegelian German philosophy and sociology from Kierkegaard to Heidegger. The Destruction of Reason is unsparing in its contention that with almost no exceptions, the post-Hegelian tradition prepared the ground fascist thought. In this, the main culprits are Friedrich Nietzsche and Martín Heidegger who are accused, in turn, of introducing irrationalism into social and philosophical thought, pronounced antagonism to the idea of progress in history, an aristocratic view of the “masses,” and, consequently, hostility to socialism, which in its classic expressions are movements for popular democracy—especially, but not exclusively, the expropriation of most private property in terms of material production.

    The Destruction of Reason remains one of Lukács’s most controversial, albeit little read, books. This new edition, featuring an historical introduction by Enzo Traverso, will finally see this classic come back in to print.

    #Karl_Marx #philosophie_post_hégélienne #capitalisme #Nietzsche #Heidegger #fascisme #Georg_Lukács

  • Une vie de philosophe
    https://laviedesidees.fr/David-Edmonds-Parfit

    Derek Parfit (1942-2017) est l’un des philosophes anglais les plus importants de sa génération, à qui l’on doit, notamment, d’avoir posé le problème de nos devoirs à l’égard des générations futures. Une récente biographie offre un portrait nuancé de ce génie parfois considéré comme excentrique. À propos de : David Edmonds, Parfit : A philosopher and his mission to save morality, Princeton University Press

    #Philosophie #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20240325_parfit.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20240325_parfit.pdf

  • En Chine, le chômage de masse chez les jeunes embarrasse Pékin

    Le pouvoir s’inquiète particulièrement du défaitisme affiché, avec ironie, par les #jeunes internautes. Ces dernières années, tout un vocabulaire a émergé pour promouvoir une sorte de #philosophie_de_la_paresse : certains parlent de « rester couché » (« tangping »), tandis que d’autres appellent à « laisser pourrir les choses » (« bailan »). Il s’agit, à chaque fois, d’en faire le moins possible au #travail. On pense au « quiet quitting » en vogue aux Etats-Unis pendant la pandémie de Covid-19.

    Une attitude qui suscite peu de compassion de la part de leurs aînés. « Je ne pense pas que le #chômage_des_jeunes soit un gros problème en Chine, parce que beaucoup d’entre eux pourraient trouver un #emploi_, estime Dan Wang, cheffe économiste à la banque hongkongaise Hang Seng. _C’est la génération des enfants uniques, leur famille a énormément investi dans leur éducation donc ils ne veulent pas accepter un job qui soit juste “passable”. Les 12 millions de #diplômés de l’#université en 2023 sont généralement issus de familles aisées qui peuvent se permettre de les soutenir un certain temps », explique-t-elle.

    La preuve en est que certains secteurs, comme la restauration et l’industrie, peinent à recruter. « Les jeunes n’ont pas forcément envie de travailler dans les #usines. C’est vu comme une activité dégradante, non seulement par eux, mais aussi par leurs parents », explique Nicolas Musy, patron de LX Precision, une entreprise suisse qui fabrique, en périphérie de Shanghaï, des composants pour l’industrie automobile, médicale et de télécommunication. « Jusqu’au début des années 2010, c’était beaucoup plus facile de recruter : il y avait cet afflux de travailleurs migrants des campagnes : pour eux, un travail, quel qu’il soit, c’était important. Maintenant, les gens font plus attention à quelles opportunités de carrière ils accèdent », poursuit cet entrepreneur présent en #Chine depuis plus de trente ans. Un phénomène renforcé par la baisse de la population active, qui a atteint son pic en 2010.

    Profond changement de génération

    Beaucoup de jeunes des campagnes alimentant par le passé les lignes de production chinoises préfèrent aujourd’hui travailler comme #livreurs, pour les plates-formes de #commerce en ligne ou de livraison de repas. Une concurrence directe pour les ressources humaines que représentent les #ouvriers. « C’est une difficulté pour nous : travailler à l’usine, ça veut dire être soumis à une certaine discipline, et effectuer des tâches qui peuvent être ennuyeuses. Les jeunes préfèrent souvent la liberté, reconnaît Kathy Sun, directrice des ressources humaines chez Clarion Electronics pour l’Asie chez Forvia, leader français des composants automobiles. Il revient aux entreprises de faire des efforts pour attirer les cols bleus, non seulement en jouant sur la charge de travail et les salaires, mais aussi en offrant un environnement de travail et une culture plus accueillants. »

    Le changement entre générations est profond. En 2021, 58 % des jeunes entrants sur le marché du travail sortaient de l’éducation supérieure (au-delà du baccalauréat), alors qu’ils n’étaient que 30 % en 2012. Même ceux des campagnes, moins privilégiés, ont une expérience éloignée de celle de leurs parents, qui avaient grandi à la ferme et dans la pauvreté. « Pour les générations précédentes, vous pouviez aller à la ville, travailler dur et obtenir une vie meilleure pour vous et votre famille. Les jeunes migrants d’aujourd’hui ont des parents qui ont travaillé dans les grandes villes. Leurs aspirations sont proches de celles des enfants de la classe moyenne : ils sont plus éduqués, ont une idée de leurs droits sur le marché du travail. Ils ne sont plus prêts à travailler de longues journées pour un salaire de misère, décrit Ole Johannes Kaland, anthropologue, associé à l’université de Bergen, en Norvège, qui a réalisé des études sur les enfants de migrants à Shanghaï. Pas un seul des adolescents que j’ai étudiés ne souhaitait travailler dans les usines ou dans le secteur de la construction. »
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2023/10/22/en-chine-le-chomage-de-masse-chez-les-jeunes-embarrasse-pekin_6195996_3234.h
    https://archive.ph/jnmRJ

  • Abscisses et ordonnées de la démocratie
    https://laviedesidees.fr/Olivier-Mongin-Democraties-d-en-haut

    Dans la lignée de P. Ricoeur, Olivier Mongin propose une interprétation du politique comme tension entre un « haut » du pouvoir, et un « bas » de la vie en société, dont le risque de violence réciproque menacerait la #démocratie. À propos de : Olivier Mongin, Démocraties d’en haut, démocraties d’en bas, Dans le labyrinthe du politique, Seuil

    #Philosophie #philosophie_politique
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/202307_mongin.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20230712_mongin.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20230712_mongin.docx

  • Kelsen face à la théologie politique
    https://laviedesidees.fr/Hans-Kelsen-Religion-seculiere

    La pensée politique moderne est-elle tributaire de la théologie chrétienne ? Non, protestait Hans Kelsen qui défendit le positivisme normativiste contre son ancien élève Eric Voegelin, qui voulait intégrer la #morale et la #religion dans le #droit. La traduction inédite de son ouvrage est un événement. À propos de : Hans Kelsen, Religion séculière. Une polémique contre la mésinterprétation de la #Philosophie sociale, de la science et de la politique moderne en tant que ‘‘nouvelles religions’’, éditions Kimé

    #théologico-politique #philosophie_politique

  • L’enquête sur l’être
    https://laviedesidees.fr/Sebastien-Motta-Le-Melange-des-genres.html

    À propos de : Sébastien Motta, Le Mélange des genres, Critique de l’ontologie par l’élucidation du concept d’identité, Classiques Garnier. En dépit des proclamations répétées de mort de la #métaphysique, le paysage philosophique contemporain est marqué par la floraison des ontologies. Sébastien Motta entend montrer, par une analyse logique de leurs présupposés, la stérilité de ces entreprises.

    #Philosophie #identité #philosophie_analytique #ontologie
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20230112_motta-2.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20230112_motta-2.pdf

  • Jane Mansbridge, entre faits et #normes
    https://laviedesidees.fr/Jane-Mansbridge-entre-faits-et-normes.html

    La contribution de Jane Mansbridge à la théorie #Politique est majeure : soucieuse toute sa vie d’allier recherche empirique et approche théorique, elle a beaucoup apporté à la critique du choix rationnel et à une réflexion sur la démocratie comprise comme un processus permanent, toujours en mouvement.

    #Philosophie #philosophie_analytique #Portraits #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20221221_mansbridge.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20221221_mansbridge.pdf

  • Richard Rorty multipragmatiste
    https://laviedesidees.fr/Richard-Rorty-multipragmatiste.html

    Rorty a fait de la conversation un genre philosophique à part entière, qui l’a poussé à refuser toutes les distinctions stériles à ses yeux : entre l’analytique et le continental, entre les Lumières et la postmodernité, entre la #Philosophie et la littérature.

    #pragmatisme #philosophie_analytique #histoire_de_la_philosophie #Portraits
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20221129_rorty.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20221129_rorty.pdf

  • Limites de l’anarchisme

    L’anarchisme est diffus dans beaucoup de milieux, et en ce qui me concerne je fus membre de divers groupes où il allait de soi que ces groupes soient dirigés au consensus par l’ensemble des membres. Problème : le collectif où je suis le plus investi croule sous maintes contradictions et conflits, parce qu’il est fort hétérogène en même temps qu’il a de (trop) grandes ambitions. Il rencontre deux types de problèmes : soit une décision prise est contestée car elle n’est pas prise par l’ensemble des membres, soit l’action du collectif est bloquée car un ou des membres maintiennent leur désaccord et la décision n’est pas donc pas prise. On pourrait rétorquer que c’est parce qu’on s’y prend mal, et qu’il suffit de bien écrire les mandats et de prendre le temps de le faire. Bref que c’est une question de méthode et de technique. Mais j’ai l’intuition que le problème est plus profond et que ce n’est pas une question de temps (qui est souvent l’argument des personnes les plus à cheval sur l’horizontalité, à savoir qu’il faut abandonner toute forme d’impatience et que c’est normal que ça prenne du temps).

    Une solution théorique que j’entrevois est de briser le collectif en une série de plus petits groupes homogènes, les fameux groupes d’affinité, qui par leur homogénéité pratiquent facilement le consensus. Le collectif devient alors une fédération de tels groupes d’affinité, et on peut espérer qu’ils parviennent ainsi à quelque base commune. J’ai donc entamé une recherche succincte sur les groupes d’affinité, qui font partie de la tradition politique anarchiste.

    Et c’est là que je tombe sur une critique sévère, et bien argumentée, de l’anarchisme :

    Bertrand Cassegrain (2013), Le trilemme anarchiste

    https://www.erudit.org/en/journals/ateliers/1900-v1-n1-ateliers0812/1018331ar.pdf

    #critique_de_l'anarchisme #organisation-collective #dynamique-de-groupe

  • Un entretien très important avec le philosophe sénégalais Blaise Bachir Diagne, l’un des principaux représentants d’une pensée décoloniale puisant dans l’histoire africaine. Au croisement de la philosophie française (Bergson), de la négritude (cf. les références à Césaire et Senghor) et des références à des penseurs et leaders africains (Nelson Mandela), Blaise Bachir Diagne théorise un universalisme inclusif et affranchi de l’impensé des dominations coloniales. A lire en lien avec la dernière séance sur Aimé Césaire

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2022/04/01/souleymane-bachir-diagne-contre-la-pensee-tribale-qui-fragmente-l-humanite-i

    « Contre la pensée tribale qui fragmente l’humanité, il faut tenir le discours de l’universel »
    Publié le 01 avril 2022

    Le philosophe sénégalais Souleymane Bachir Diagne appelle, dans un entretien au « Monde », à ne rien céder face aux enfermements identitaires qui gangrènent nos sociétés et à toujours garder l’humanité comme horizon.
    Il est reconnu comme l’un des philosophes les plus importants de notre temps. Né en 1955 à Saint-Louis, au Sénégal, Souleymane Bachir Diagne est le premier Sénégalais à avoir intégré l’Ecole normale supérieure (Paris), où il s’est spécialisé en philosophie des sciences. Il enseigne depuis 2008 la philosophie à l’université Columbia (New York).

    Naviguant entre les trois continents, ce citoyen du monde imprégné de mystique musulmane a tissé une pensée complexe, ambitionnant de donner voix au pluriel de l’humanité sans jamais renoncer à construire un universel véritablement commun à tous les hommes. Souleymane Bachir Diagne met ainsi en garde contre « les tribalismes et les enfermements nationalistes » qui sont pour lui l’ennemi de la civilisation, et fait sienne la parole de Léopold Sédar Senghor, « l’orgueil d’être différent ne doit pas empêcher le bonheur d’être ensemble ».

    Vous êtes de passage en Europe alors que notre continent se trouve bouleversé par la guerre qui vient d’éclater en Ukraine. Que vous inspire cette situation dramatique ?

    C’est tout simplement affreux, avec ces enfants qui voient leur vie complètement chamboulée du jour au lendemain, doivent quitter l’école, sont jetés dans les rues avec leur mère. Et tous ces réfugiés. Cette situation éveille en moi de la crainte. Qu’est-ce que tout cela va donner, tant sur le plan militaire qu’économique ?
    Je n’aurais jamais pensé entendre de la bouche d’un président américain les mots « troisième guerre mondiale ». Pas plus que je n’aurais pensé entendre de la bouche d’un président russe les mots « bombe atomique » [le 24 février, Vladimir Poutine a menacé ceux qui tenteraient d’“interférer” dans son “opération militaire” d’une réponse immédiate qui conduirait à des conséquences qu’ils n’ont encore jamais connues].
    Il faut, bien évidemment, répondre à cette invasion, et les sanctions économiques sont probablement la seule option. Mais qui sait quels seront leurs effets ? On voit déjà, avec l’essence et le blé, que le monde entier est frappé. Et s’il faut absolument essayer de penser diplomatie et négociation, tout semble être fait pour saboter cette voie.
    Au-delà du conflit en Europe de l’Est, nous vivons dans un monde rongé par les inégalités grandissantes, la menace climatique, le développement des populismes et des nationalismes, la montée des obscurantismes – non seulement religieux, mais aussi liés à la science. Les intellectuels ont-ils une part de responsabilité dans cette crise mondiale ?
    Ils auront une part de responsabilité s’ils ne font pas le travail qui doit être le leur. C’est justement dans ces moments où tout est sombre qu’il faut à tout prix faire en sorte que les lumières de la pensée éclairent encore notre chemin.
    Vous avez raison de souligner que nous vivons une période d’obscurantisme. Le travail des intellectuels est de lutter contre l’obscurantisme, notamment vis-à-vis de la science, et même des simples faits. La masse de désinformation et de complotisme est telle qu’il est devenu difficile de se frayer un chemin.
    Il faut, en outre, se battre contre le nationalisme et le tribalisme. Nous sommes en train de fragmenter notre humanité en autant de tribalismes. Contre cette pensée tribale, les intellectuels doivent tenir le discours de l’universel. C’est notre responsabilité, et elle est extrêmement difficile à assumer dans la période actuelle. Le filet de voix des intellectuels est assourdi par le brouhaha, le bruit et la fureur des obscurantismes et des tribalismes.

    Qu’appelez-vous le tribalisme ? Est-il, pour vous, le plus grand ennemi de la civilisation ?

    Je le pense. J’appelle tribalisme cet enfermement, cette obsession des identités déjà théorisée par un philosophe très important pour moi, Henri Bergson [1859-1941]. Selon lui, nous sommes dominés par un instinct de tribu : nous nous sentons tout naturellement unis à ceux qui ont le même sang, la même langue, la même couleur de peau ou religion que nous. De ce point de vue, la notion d’humanité semble être une abstraction. C’est précisément pourquoi il est de notre responsabilité, en tant qu’humains, de sortir de nos tribus afin d’aller vers cette idée d’humanité.
    Pour ce faire, Bergson dit qu’il existe deux types de moteurs. Le premier, c’est la raison philosophique. Cette dernière nous enseigne que l’idée d’humanité doit être un principe moral et éthique pour nos actions. Le second moteur est la religion. Bergson pense qu’elle est même, dans le cas présent, plus efficace que la raison philosophique, parce qu’elle fonctionne sur l’émotion, qui est contagieuse. Ce que Bergson décrit ici, c’est évidemment la religion ouverte. Car il est malheureusement possible de mettre la religion au service de nos enfermements identitaires et d’en faire une machine d’exclusion, voire de guerre.
    Si j’affirme que nous sommes aujourd’hui dans une forme de tribalisme, c’est parce que tout est ramené à des questions d’identité, d’enfermements nationalistes. Pour faire une allusion à la situation de la France, je n’aurais jamais cru qu’une expression aussi absurde que « grand remplacement » serait au centre d’une élection présidentielle. Elle n’a de sens que dans le cadre d’une pensée tribaliste, où une tribu s’inquiète d’être remplacée par une autre. Mais lorsque vous pensez à la hauteur de la société humaine, cette expression n’a aucun sens. L’humanité a toujours été en mouvement, en mélange.❞
    (...)

    #philosophie_decoloniale #universalisme #tribalisme #negritude

  • Prendre modèle
    https://laviedesidees.fr/Prendre-modele.html

    À propos de : Nassim El Kabli, Soi-même comme un autre, Figures d’exemplarité, figures d’exemple, Éditions Mimésis. Nous nous construisons par les modèles que nous nous choisissons ou par ceux que la société ne cesse de produire. Le livre de Nassim El Kabli déplie toutes les dimensions de ce rapport à l’autre par lequel le soi, si singulier, advient.

    #Philosophie #Aristote #imitation #philosophie_morale

  • Dire et faire
    https://laviedesidees.fr/Vincent-Boyer-Promesse-tenue.html

    À propos de : Vincent Boyer, Promesse tenue. Agir par devoir, Classiques Garnier. Pourquoi faisons-nous des promesses ? Et une fois faites, qu’est-ce qui nous pousse à les tenir ? Y a-t-il de bonnes raisons de rompre ses engagements ? La promesse, fondement de nos relations sociales, est une énigme. Le livre de V. Boyer nous aide à y voir plus clair.

    #Philosophie #utilitarisme #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20211111_promsse.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20211111_promsse.docx

  • À bas l’autorité !
    https://laviedesidees.fr/Rorty-Pragmatism-Anti-Authoritarianism.html

    À propos de : Richard Rorty, Pragmatism as Anti-Authoritarianism, Belknap Press. Une série inédite de conférences expose le point de vue du philosophe pragmatiste Richard Rorty sur la #religion, la vérité et l’éthique, centrées sur l’absence de responsabilité des humains envers quelque autorité non humaine (telle que Dieu, la Réalité ou des obligations universelles).

    #Philosophie #pragmatisme #épistémologie #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20211021_rorty.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20211021_rorty.docx

  • Qui fraude le fisc ?
    https://laviedesidees.fr/Qui-fraude-le-fisc.html

    L’économie comportementale éclaire aujourd’hui plus finement les déterminants de la fraude fiscale. Elle suggère qu’il est dans une large mesure erroné de penser la fraude fiscale selon une grille de lecture strictement #morale.

    #Économie #impôt #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20210622_fraudefiscale.pdf
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20210622_fraudefiscale.docx

  • À propos de Stratégies anticapitalistes pour le XXIe siècle, d’Erik Olin Wright. Laurent Jeanpierre : « Former un engrenage socialiste »
    https://www.revue-ballast.fr/laurent-jeanpierre-former-un-engrenage-socialiste

    (...) Laurent Jeanpierre n’est pas le porte-parole de Wright, il s’avance toutefois comme l’un de ses introducteurs dans le champ francophone. Il publie et signe ainsi la postface de Stratégies anticapitalistes pour le XXIe siècle , dans la collection qu’il dirige aux éditions La Découverte. En prolongeant sa pensée, Jeanpierre invite à réinvestir la notion matricielle de « socialisme » en vue d’en finir avec la domination capitaliste. Le socialisme comme lieu de cohabitation, fût-elle houleuse, et de combinaison des trois courants historiques de l’émancipation : le communisme, l’anarchisme et la social-démocratie originelle.

    « Déjà essayé. Déjà échoué. Peu importe. Essaie encore. Échoue encore. Échoue mieux. » Cette célèbre phrase de Samuel Beckett résume, dites-vous, un certain état d’esprit de la gauche radicale. Erik Olin Wright n’y adhérait pas. Qu’est-ce qui l’en distingue ?

    Si j’ai employé cette phrase dans le commentaire que j’ai proposé en postface de son ouvrage, c’est en effet parce que les élaborations de Wright depuis 20 ans tranchent avec une constellation mentale ou affective qui me semble pesante dans la gauche anticapitaliste — et qui s’est, donc, parfois manifestée en empruntant à Cap au Pire de Samuel Beckett. Cette méditation sur l’échec est effectivement apparue ces dernières années sous diverses plumes, pourtant assez éloignées idéologiquement les unes des autres : aussi bien, par exemple, chez Slavoj Žižek qu’autour du Comité invisible. Wright ne part pas de ce fond commun partagé de la « mélancolie de gauche », qui entrave bien souvent, même si elle a aussi sa puissance, la possibilité d’une réflexion stratégique au sujet des conditions actuelles et réelles, et non pas idéales ou passées, d’un dépassement bénéfique du capitalisme.

    • Des utopies possibles aux utopies réelles. Entretien avec Erik Olin Wright
      https://journals.openedition.org/traces/5672

      Erik Olin Wright : Ce projet se situe au croisement de préoccupations intellectuelles anciennes et d’un moment historique bien particulier. Au départ de ma carrière universitaire au début des années 1970, mes recherches se sont focalisées sur la reconstruction du marxisme en tant que tradition théorique solide de recherche en sciences sociales. Au cours des deux premières décennies, je me suis particulièrement concentré sur l’analyse des classes sociales et la critique du capitalisme. Bien que j’aie écrit quelques essais sur le problème du socialisme et des alternatives au capitalisme, ces thématiques n’étaient pas la préoccupation centrale de mon travail. Ensuite, au début des années 1990, l’effondrement des économies autoritaires fondées sur le modèle de la planification semblait valider l’aphorisme de Margaret Thatcher selon lequel « il n’y a pas d’alternative ». Dans ce contexte historique, il m’a semblé impératif de déplacer mes efforts d’une recherche principalement tournée vers le diagnostic et la critique du capitalisme, vers le problème de la transformation et des alternatives. C’est ainsi que le projet Real Utopias est né.

      3Il fut à l’origine de toute une série d’ouvrages construits autour de propositions spécifiques d’alternatives aux institutions et aux structures sociales existantes. Parmi les thèmes qui ont (jusqu’à présent) été abordés, on compte le socialisme par le marché, la démocratie associative, l’allocation universelle, la gouvernance participative et l’égalité entre les genres. Dans chaque cas, l’enjeu est de clarifier les fondements normatifs et les principes centraux des dispositifs institutionnels de mise en œuvre de ces alternatives. Le livre le plus récent de ce projet, Envisioning Real Utopias (2010), tente de créer un cadre général reliant ces différentes propositions entre elles.

      #Erik_Olin_Wright #sociologie #marxisme_analytique

    • Il est aussi un théoricien. Il a une formation de philosophie sociale et politique solide, bien qu’elle soit sans doute assez peu continentale. Certains s’étonneront peut-être, par exemple, que son programme autour des « utopies réelles » — qui a été pour moi le point d’accroche central avec son œuvre — fasse si peu référence au traitement de la question utopique dans la tradition critique européenne, et notamment à l’œuvre de Bloch, mais aussi aux développements de Mannheim, Lukács, Adorno, Horkheimer et de nombreux autres. Mais c’est aussi une force, car Wright s’épargne ainsi toutes les impasses théoricistes de ce que Perry Anderson a appelé le « marxisme occidental ». L’ancrage du sociologue étasunien dans le marxisme est, d’une certaine manière, opposé à cette tradition puisqu’il a pris part à partir des années 1980 au Groupe de Septembre, en quête de « non-bullshit marxism » : il rejetait l’idée de dialectique et est à l’origine de ce que l’on appelle aujourd’hui le « marxisme analytique ». Ce courant1 a été très peu reçu et discuté en France — ce qui a eu des effets sur la réception et la lecture de l’œuvre de Wright lui-même.

      Des courants dont je n’ai jamais entendu parlé effectivement.

      […]

      D’un point de vue politique ou scientifique actuel, il faut certainement poser la question des utopies fascistes et de leur essor. Mais, pour Wright, elles peuvent rester en dehors d’une enquête sur la sortie du capitalisme car il a forgé, pour orienter l’enquête, une définition normative de ce qu’il appelle « socialisme ». Elle renvoie à l’épanouissement de tous, à l’augmentation du bien vivre, aux valeurs d’égalité, d’autonomie et de solidarité. Mais il est vrai qu’une manière de prolonger et peut-être d’enrichir son programme de recherche consisterait à penser les « utopies réelles » en général, et les alternatives anticapitalistes en particulier : elles ne sont pas, il est vrai, sur le terrain de l’Histoire effective, uniquement « socialistes » — même au sens large où il entend ce qualificatif. Penser, aussi, qu’un travail sur ce qu’il identifie comme le mode de transformation « interstitiel » du capitalisme — c’est-à-dire sur ce changement graduel et de petite échelle en direction de certaines valeurs socialistes dans les interstices des institutions dominantes, notamment économiques — doit prendre en compte des utopies qui nous sembleraient indésirables : utopies pour d’autres, mais dystopies pour nous… Si l’on observe, comme je le fais depuis quelque temps, les utopies communautaires écologiques, il n’est pas impossible de « tomber » sur des propositions de type nativiste ou néofasciste. Comment interagissent-elles avec les communautés écologiques plus fidèles aux valeurs socialistes ? Espérons ne pas avoir à nous poser vraiment la question…

      […]

      La catastrophe écologique est déjà là. Les maux du capitalisme s’intensifient et le tournant autoritaire actuel du néolibéralisme, à l’échelle mondiale, ne devrait pas favoriser les résistances futures. Face à ça, l’alternative est peut-être la suivante : ou bien on dit que le temps court relève de la tactique et le temps long, de la stratégie (c’est une réponse classique et, d’une certaine manière, de facilité : les tactiques des socialismes s’élaborent dans l’horizon de l’urgence, mais ça laisse entier la question de leurs effets à plus long terme, dont la connaissance relève de la pensée stratégique) ; ou bien — mais c’est peut-être la même chose — on sépare l’horizon analytique proposé par Wright, qui implique, en effet, un travail de longue haleine et une réflexion difficile, collective, sur l’Histoire passée et présente, et l’horizon de l’engagement politique. Il faut souligner qu’il n’y a aucune prescription militante chez Wright, aucun appel à la conversion, aucune prédilection affichée entre les manières d’être socialiste. C’est comme ça que je le lis. Chacune et chacun de ses lecteurs déjà anticapitalistes peut rester dans son milieu ou sa « famille » politique tout en intégrant les vues que propose l’ouvrage. En définitive, le livre propose d’ajouter à l’expérience militante ou intellectuelle anticapitaliste une exigence supplémentaire de réflexivité et de tolérance vis-à-vis des autres traditions héritées du socialisme. Sans une telle évolution au sein des gauches, le risque de leur décomposition augmentera. Comme c’est le cas aujourd’hui, chacun brandit ses pratiques militantes, ses fétichismes politiques, comme une identité figée, il ou elle y trouve un confort subjectif et finit par faire de la morale plutôt que de la politique. Pour fréquentes qu’elles soient, de telles attitudes définissent ce que nous pourrions appeler un « demi-socialiste ».

      […]

      Mais il en a conclu, après plusieurs décennies d’observation, que la fragmentation des exploités est devenue trop grande pour qu’une telle subjectivation émerge, que les conditions sociales d’un partage de l’expérience vécue au travail ne sont pas ou plus remplies. Dès lors, se demande-t-il, quelles sont les autres conditions éventuelles de formation d’une force sociale anticapitaliste ? Pour lui, et c’est peut-être discutable, c’est dans l’ordre de l’imaginaire et surtout de l’éthique que cette unité peut apparaître. C’est-à-dire autour d’un système de valeurs et de dispositions partagé.

      => rejoint la #common_decency

      La sociologie du socialisme passe donc par une sociologique des dispositions éthiques. Ce serait, en tout cas, une manière de prolonger le programme de Wright en adjoignant à une enquête sur les utopies réelles, une recherche sur l’ethos socialiste.

      #Erik_Olin_Wright #Laurent_Jeanpierre #socialisme #révolution #transition #capitalisme #anti-capitalisme #œcuménisme #œcuménisme_socialiste #sociologie #marxisme #sociologie_marxiste #philosophie_analytique #marxisme_analytique

  • Elizabeth Anscombe, philosophe radicale
    https://laviedesidees.fr/Elizabeth-Anscombe-philosophe-radicale.html

    Penser les problèmes à la racine : c’est ce qu’Elizabeth Anscombe s’est proposé de faire, considérant que les questions philosophiques, particulièrement en #Philosophie pratique, devaient être traitées pour elles-mêmes et non à travers leur réception érudite.

    #philosophie_analytique #Portraits #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20210223_anscombe.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20210223_anscombe.pdf

  • A-t-on #raison d’être rationaliste ?
    https://laviedesidees.fr/Engel-Manuel-rationaliste-de-survie.html

    À propos de : Pascal Engel, Manuel rationaliste de survie, Agone. Sans diviniser la raison mais sans rien rabattre de ses exigences, Pascal Engel construit avec prudence un rationalisme ambitieux, qui ne justifie pas simplement l’enquête scientifique mais a aussi son mot à dire en morale et en politique.

    #Philosophie #démocratie #polémique #délibération #philosophie_morale
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/20210128_ducray.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/20210128_ducray.pdf

  • « #Covid_19 / Le monde de demain - Se libérer de l’imaginaire capitaliste ? » - Isabelle Stengers, entretien filmé à Bruxelles en juin 2020
    https://www.youtube.com/watch?v=WTHVqvH2Bvg

    #Isabelle_Stengers, philosophe des #sciences, nous explique comment l’imaginaire capitaliste met en danger les sciences, la démocratie et l’environnement.

    " On nous force à penser contre la réalité, ce n’est plus une démocratie (...) On a vu une indifférence à tout ce qui n’était pas maintien de l’ordre public au fond. Et l’ordre public on a su qu’il allait être dévasté si les services, si tout le système sanitaire était débordé. Donc les vulnérables c’était avant tout ceux qui menaçaient de fabriquer ce scandale qui est le système sanitaire, fierté d’un pays développé, qui craque. Le reste ce sont des conséquences. " (...)

    Quand on mobilise « la science » pour se substituer à un processus de pensée collectif, avec les gens, on perd les trois-quart de l’intelligence et on le remplace par une bonne dose de bêtise, de satisfaction et de faire semblant.(...)

    Il y a des semi-vérités qui deviennent des non vérités parce qu’elles sont affirmées comme scientifiques. (...)

    La science était soumise en fait à la non décision politique. C’est un processus profondément vicieux et on peut perdre confiance. Et, ce qu’il y a de grave, c’est qu’on peut perdre confiance en des sciences qui pourraient avoir quelque chose à nous dire, qui pourraient être intéressantes. Mais quand on traite les gens comme des idiots et qu’on leur demande d’avoir confiance dans ce qui n’est pas fiable et bien on se retrouve devant des sceptiques généraux, et ça c’est une catastrophe culturelle (...)

    Les virus sont des machines à inventer, je parle de machines et pas de vivant parce que sont des machines dont la seule raison d’être c’est de rencontrer un hôte qui l’accueille, qui lui donne l’hospitalité. Parfois au détriment de cet hôte, mais c’est pas ça le projet du virus. Le virus ne devient avant que si il rencontre un hôte et donc, il mute à toute vitesse, il innove dans tout les sens pour maximiser ses chances (...) on peut dire que c’est un exilé de la vie qui essaie de trouver une terre d’accueil, et parfois ça se passe bien, beaucoup de choses que nous sommes en tant que mammifères nous le devons à des #virus (...) "

    #philosophie #vidéo #imaginaire_capitaliste #imagination #pandémie #crise_sanitaire #panique #confinement #entraide #solidarité #scepticisme #chômeurs #climat #réchauffement_climatique #droits_sociaux

  • #Spinoza pour préparer au roman
    https://laviedesidees.fr/Spinoza-pour-preparer-au-roman.html

    À propos de : Clare Carlisle (ed.), Spinoza’s Ethics Translated by George Eliot, Princeton University Press. Le savait-on ? La première #traduction anglaise de l’Éthique est due à l’une des plus grandes romancières britanniques : George Eliot, qui avant de se lancer dans la fiction a traduit Feuerbach, David Strauss, mais aussi Spinoza. Une traduction demeurée inédite à ce jour, et qui n’a rien à envier à celles qui ont suivi.

    #Philosophie #éthique #histoire_de_la_philosophie #literature #philosophie_morale #Books_and_ideas_originals #histoire_des_idées
    https://laviedesidees.fr/IMG/docx/en_nadler_eliot_spinoza_29062020.docx
    https://laviedesidees.fr/IMG/pdf/en_nadler_eliot_spinoza_29062020.pdf

  • Intervention de l’April dans le Master I2L le 31 aout 2020
    https://www.april.org/intervention-de-l-april-dans-le-master-i2l-le-31-aout-2020

    Start : 31 Août 2020 - 09:30End : 31 Août 2020 - 16:30

    François Poulain, administrateur de l’April, interviendra le 31 août 2020 à l’université de Calais dans le cadre du Master I2L (Ingénierie du Logiciel Libre) sur le thème : « Logiciel libre : droit d’auteur, #Licences, communautés et enjeux de société ». La deuxième partie du cours est prévue le mercredi 2 septembre. La journée de lundi est consacrée principalement à la présentation des concepts du droit d’auteur, du logiciel libre, de son histoire au travers du projet GNU. Puis des éléments autour des licences libres, des communautés du libre et de l’activité de l’April. La journée du mercredi sera l’occasion d’aborder la problématique du climat, regarder le rôle de l’informatique sur ce sujet, et la relation au logiciel libre. Il s’agira (...)

    #Le_Logiciel_Libre #L'association #Philosophie_GNU

  • Archipélisation : comment Framasoft conçoit les relations qu’elle tisse – Framablog
    https://framablog.org/2019/12/10/archipelisation-comment-framasoft-concoit-les-relations-quelle-tisse

    Mais… c’est quoi l’archipélisation ?

    L’archipélisation est une métaphore insulaire (rappelons qu’Édouard Glissant est né dans l’archipel des Antilles), ne décrivant pas des entités isolées et évoluant selon leurs propres règles, mais comme un ensemble de petites structures indépendantes dont la capacité de développement repose sur la coopération, la mutualisation.

    « J’appelle créolisation la rencontre, l’interférence, le choc, les harmonies et les dysharmonies entre les cultures. » Par ces mots, Édouard Glissant fait de la « créolisation » une décontinentalisation, qu’il nomme archipélisation, et qu’il corrèle à ce qu’il appelle le « tout-monde ». Le monde entier, pour lui, se créolise et s’archipélise.

    Une autre façon d’appréhender ce concept est de penser un réseau de petites structures agiles et flexibles reliées entre elles par des outils conviviaux.

    Cette notion, si elle est associée à celle des outils conviviaux d’Ivan Illich ou la figure du ryzhome, héritée de Deleuze et Gattari, déjoue l’opposition entre centre et périphérie. Il s’agit donc de passer d’une vision continentale, où on essaye de faire continent tous ensemble, à une « archipélisation » d’îlots de résistance émergents. L’objectif n’est donc plus de construire un mouvement unique, monolithique, mais bien d’envisager l’avancée des luttes sous forme de coopérations entre ces différents îlots, sans essayer de se convaincre de tous faire la même chose.

    Évidemment, nous n’avons pas toutes et tous la même histoire, la même capacité de résistance, les mêmes privilèges, les mêmes tempéraments, les mêmes moyens financiers… Mais il nous parait possible de se reconnaître différent⋅es, de respecter la diversité de chacun et chacune dans leurs stratégies et leurs tactiques, tout en partageant des buts communs.

    #Framasoft #Philosophie_libre