• Qui pollue notre #eau_du_robinet ?

    #Hugo_Clément a enquêté sur la pollution et la #dépollution de l’eau du robinet en #France. Ainsi, que fait-on quand une #eau_potable dépasse les #seuils_de_pollution ? Elle est tout simplement mélangée avec une autre source, plus pure, et renvoyée dans le réseau. L’enquête révèle également que l’eau est de plus en plus contaminée par des résidus de #pesticides, des polluants de l’industrie ou même des restes des guerres. La conséquence directe en est que le #traitement_de_l'eau coûte plus cher. Certains citoyens se battent pour réduire les sources de pollution en amont plutôt que de financer des usines toujours plus perfectionnées et hors de prix.

    https://www.france.tv/france-5/sur-le-front/6668603-qui-pollue-notre-eau-du-robinet.html

    voir aussi :
    https://mamot.fr/@n1k0/113545804575956333

    #pollution #contamination #seuils #vidéo #chlorothalonil_dégradé #eau_en_bouteille #taux_de_pollution #conformité #santé_publique #supermarchés #Fiée_des_lois #puits #cancers

    • Alerte : #Déclassement d’un #métabolite du chlorothalonil par l’#Anses, un #pesticide très présent dans l’eau potable !

      Générations Futures s’inquiète des conséquences d’un tel déclassement et d’un déni de l’application du #principe_de_précaution.

      D’après un avis de l’Anses publié hier (https://www.generations-futures.fr/wp-content/uploads/2024/05/eaux2023sa0142.pdf), mercredi 22 mai, le métabolite du #fongicide interdit chlorothalonil #R471811, considéré pertinent jusqu’alors, est maintenant jugé par l’agence comme non pertinent. Une fois de plus, la façon dont l’Anses gère les incertitudes et la non application du principe de précaution dans cette évaluation interroge.

      Quelles sont les conséquences d’un tel déclassement ?

      Suite à ce nouveau classement, la norme de qualité, la #concentration_maximale tolérée pour juger l’eau “conforme”, est relevée de près de 10 fois : elle passe de 0,1 µg/L à 0,9 µg/L. Conséquence directe, toutes les situations pour lesquelles le R471811 se trouvait dans l’eau potable à des concentrations comprises entre 0,1 µg/L à 0,9 µg/L redeviennent “conformes”. D’après le dernier bilan de la qualité de l’eau potable vis à vis des pesticides publié par le ministère de la Santé, ces situations concernaient seulement 0,3% des unités de distribution. Toutefois, en 2022, les recherches de ce métabolite dans le cadre du contrôle de l’eau potable étaient encore très limitées. Dans le cadre d’une campagne de mesures menée par l’Anses en 2020/2022, le R471811 était le métabolite le plus souvent quantifié (dans plus d’un échantillon sur 2) avec la plus grande fréquence de dépassement de 0,1 µg/L (34% des échantillons). Dans tous les cas, ce nouveau classement permettra d’avoir de meilleures statistiques sur les taux de conformité de l’eau potable, tout comme le permettra également le déclassement des métabolites du #S-métolachlore.

      Outre ce relèvement de la norme de qualité, cette classification en tant que non pertinent a pour conséquence que le R471811 ne sera plus retenu dans le calcul du total pesticides, censé prendre en compte l’effet cocktail dû à la présence simultanée de plusieurs substances actives et métabolites. La norme de qualité pour la somme des pesticides (substances actives et métabolites) est fixée à 0,5 µg/L mais ne sont pris en compte dans ce total uniquement les métabolites jugés pertinents. Le métabolite R471811 ne sera donc plus intégré dans le calcul du total pesticide même s’il est présent dans l’eau.

      Enfin, ce passage en non pertinent entraînera une perte d’information pour les citoyens qui ne seront plus informés qu’un métabolite de pesticide classé #cancérigène probable se retrouve dans l’eau potable dès lors que sa concentration reste inférieure à 0,9 µg/L.

      Une évaluation très incertaine

      En 2022, l’Anses avait jugé le métabolite R471811 comme pertinent (https://www.anses.fr/fr/system/files/EAUX2021SA0020-b.pdf) en considérant le classement du chlorothalonil en tant que cancérigène probable (catégorie 1B) proposé par l’EFSA et “le manque de données pour démontrer que le métabolite R471811 ne partage pas le mode d’action de la SA parente aboutissant à des #tumeurs_rénales

      Cette nouvelle évaluation de l’Anses publiée hier s’est basée sur de nouveaux éléments fournis par Syngenta, le principal fabricant de chlorothalonil.

      Cependant, beaucoup de zones d’ombres persistent :

      Concernant la cancérogénicité :

      D’après la méthodologie (https://www.anses.fr/fr/system/files/EAUX2015SA0252.pdf) utilisée par l’Anses pour évaluer la pertinence des métabolites, “si la substance active (SA) mère est classée cat 1A ou 1B au titre du règlement 1272/2008 et ses ATP pour les effets cancérogènes, le métabolite est classé en « pertinent dans les EDCH » sauf à démontrer le contraire, essais à l’appui, en particulier sur les « endpoints » critiques de la SA”.

      L’EFSA ayant proposé de classer le chlorothalonil en cancérogène de catégorie 1B, des essais sur le métabolite sont donc nécessaires pour le classer non pertinent. Est-ce que des essais de cancérogénicité ont été réalisés sur le R471811 ? Pas du tout ! A la place de toute étude, Syngenta a fourni à l’Anses un argumentaire visant à montrer que le métabolite ne possède pas les mêmes propriétés que la substance mère. Cet argumentaire se base essentiellement sur une analyse de la structure chimique du R471811 et sur des études mécanistiques réalisées in vitro par Syngenta selon un protocole inconnu, non détaillé dans l’avis de l’Anses. Nous ne pouvons donc juger de la fiabilité de ces études in vitro. Aucune étude de toxicité chronique réalisée in vivo avec le R471811 n’a été réalisée.

      Concernant le caractère perturbateur endocrinien :

      Là encore, aucune donnée sur le métabolite n’est disponible. Selon la méthodologie de l’Anses, il est donc nécessaire de se baser sur les données disponibles sur la substance active. L’EFSA ainsi que l’Anses considèrent qu’il est “peu probable que le chlorothalonil présente des propriétés susceptibles de perturber le système endocrinien”. Cependant, cette évaluation n’a pas été réalisée selon la méthodologie la plus récente adoptée en 2018. De plus, comme indiqué par Le Monde (https://www.lemonde.fr/planete/article/2024/05/22/eau-potable-les-risques-lies-a-un-metabolite-de-pesticides-revus-a-la-baisse), des chercheurs chinois estiment dans une revue de la littérature (https://linkinghub.elsevier.com/retrieve/pii/S0045653524011342) que le chlorothalonil peut avoir une action toxique perturbant le système endocrinien chez plusieurs espèces.

      Concernant la transformation du R471811 par les traitements de l’eau potable.

      Un autre aspect pouvant conduire à classer un métabolite pertinent est l’impact des traitements de l’eau si les éléments mettent en évidence la possible transformation du métabolite en un produit dangereux pour la santé humaine dans les filières de traitement EDCH, le métabolite est classé pertinent”. Selon l’Anses, “ il est très probable que la chloration d’eau contenant du métabolite R471811 conduise à la formation lente de N-chloroamides et de N,N dichloroamides” mais comme il reste des incertitudes et que les données sont insuffisantes, le classement comme pertinent n’a pas été retenu.

      Une approche pas suivie par l’agence de sécurité sanitaire #Suisse

      Ironie du calendrier, nos voisins Suisses, également concernés par des contaminations de leurs eaux par les métabolites du chlorothalonil ont, au contraire de l’Anses, confirmé le fait que la norme de 0,1 µg/L doit s’appliquer à ces métabolites, y compris au R471811.

      L’approche Suisse contraste nettement avec celle française. En effet, l’agence de sécurité sanitaire Suisse OSAV (https://www.blv.admin.ch/blv/fr/home/lebensmittel-und-ernaehrung/lebensmittelsicherheit/stoffe-im-fokus/pflanzenschutzmittel/chlorothalonil.html), estime qu’ “en cas de classification dans la catégorie 1B, tous les métabolites du chlorothalonil sont automatiquement considérés comme pertinents, comme le prévoit le guide européen sur l’évaluation de la pertinence des métabolites” En conséquence, l’#OSAV recommande de “respecter la valeur maximale de 0,1 µg/l afin de garantir, à titre préventif, la protection de la santé en limitant de manière générale la présence, dans l’eau potable, de métabolites de substances actives aux propriétés toxicologiques préoccupantes”.

      « Ce nouvel exemple de déclassement d’un métabolite en non pertinent illustre une fois de plus la façon dont l’Anses gère les incertitudes liées aux évaluations : même si les données sont clairement insuffisantes pour affirmer qu’un métabolite “n’engendre pas (lui-même ou ses produits de transformation) un risque sanitaire inacceptable pour le consommateur” selon, l’Anses passe outre ces incertitudes et fait le choix de ne pas appliquer le principe de précaution dans ces situations, » déclare Pauline Cervan, toxicologue chez Générations Futures. « En attendant cette façon de faire « simplifie » la tâche du gestionnaire qui aura de moins en moins de cas de non-conformité de l’eau à traiter. Peut-on s’en réjouir ? Nous pensons que non… » conclut-elle.
      Avis de l’ANSES chlorothalonil : https://www.generations-futures.fr/wp-content/uploads/2024/05/eaux2023sa0142.pdf

      https://www.generations-futures.fr/actualites/alerte-metabolite-chlorothalonil

      #industrie_agro-alimentaire

    • #Strasbourg : l’UFC Que Choisir fait analyser l’eau du robinet et retrouve huit #polluants_éternels

      L’UFC Que Choisir du Bas-Rhin a fait analyser l’eau du robinet de Strasbourg par un laboratoire indépendant. Huit polluants éternels, les #PFAS, ont été retrouvés, dont certains interdits d’utilisation depuis plusieurs années, sans que les normes ne soient dépassées.

      C’est une étude qui vient confirmer ce que Ici Alsace (à l’époque, France Bleu Alsace), vous révélait en septembre dernier. L’eau du robinet de Strasbourg contient bien plusieurs PFAS problématiques. Il y a quelques mois, Ici Alsace avait fait analyser l’eau et avait retrouvé 8 de ces polluants éternels interdits ou cancérogènes dans l’eau strasbourgeoise.

      L’UFC Que Choisir vient de faire exactement la même chose. Et la fédération d’association a aussi retrouvé 8 PFAS dont plusieurs interdits à l’utilisation depuis 6 ans. Parmi eux, des TFA, à raison de 80 nano-grammes par litre. Ce TFA à chaîne ultra-courte fait pourtant partie des molécules de dégradation de la quasi-totalité des pFAS de plus grande taille et, en particulier, des pesticides fluorés comme le Flufenacet.

      Or, l’ANSES vient de déclarer le Flufenacet comme reprotoxique en septembre dernier. Voici les relevés exacts de l’UFC Que Choisir :

      PFOS : 1,5 ng/l (PFAS interdit à la production et l’utilisation depuis 2019 en Europe

      PFHxS : 1,9 ng/l

      PFBA : 1,8 ng/l

      PFBs : 4,5 ng/l

      PFHxA : 2,1 ng/l

      PFPeA : 3,2 ng/l

      PFPrA : 6 ng/l

      TFA : 80 ng/l

      Si l’on prend en compte la norme applicable à partir de 2026, les prélèvements ne dépassent jamais les normes autorisées. Mais si ’l’on prend en compte les normes utilisées dès 2026 par le Danemark, qui sont beaucoup plus strictes, alors l’eau du robinet strasbourgeoise ne serait plus dans les normes.

      Globalement l’UFC Que Choisir estime que les citoyens ne sont pas assez informés du danger potentiel des PFAS dans l’eau. Elle demande des normes plus sévères et d’interdire la fabrication et les rejets de PFAS. « A Strasbourg même, sur les 33 PFAS recherchés, on en a retrouvé 7 qui font partie de la liste des 20 PFAS qui seront officiellement recherchés par l’ARS dès 2026, plus un qui s’appelle le TFA qui est un PFAS à chaîne ultra courte, qui est problématique dans la mesure où c’est un métabolite du Flufenacet qui est un pesticide reconnu comme étant dangereux pour la santé humaine » explique Pierre-Jean Dessez, administrateur à l’UFC Que Choisir du Bas-Rhin.

      « Cela nous inquiète dans la mesure où nous n’en savons pas assez. Nous demandons de mener des études pour améliorer la connaissance que nous avons des PFAS, sur leur éventuelle toxicité. Un projet de loi a été adopté en première lecture à l’assemblée nationale et au Sénat avant la dissolution. Depuis nous attendons que cette loi passe en seconde lecture pour être adoptée. Elle aurait l’avantage de réguler beaucoup plus qu’aujourd’hui l’usage de ces PFAS, pour nous c’est très important » poursuit le responsable. L’UFC enjoint donc les parlementaires alsaciens d’adopter sans délai la proposition de loi.

      https://www.francebleu.fr/infos/sante-sciences/strasbourg-l-ufc-que-choisir-fait-analyser-l-eau-du-robinet-et-retrouve-h

    • #Tritium dans l’eau potable : synthèse du dossier

      Depuis 2005, le contrôle du tritium dans les eaux potables est obligatoire.

      Les résultats des analyses réglementaires des eaux potables sont bien mis à disposition du public, mais soit sur le site Orobnat très fastidieux à consulter, soit, sur data.gouv.fr, sous forme de bases de données brutes ne pouvant être consultées telles quelles.

      La CRIIRAD a extrait de ces bases et compilé l’ensemble des données relatives aux mesures de tritium effectuées entre janvier 2016 et février 2023. Elle les met à la disposition du public, sous forme de fichiers globaux et de cartes interactives.

      https://www.criirad.org/tritium-dans-leau-potable-la-criirad-publie-les-donnees
      #cartographie

    • Paris, Lille, Rouen… Ce que l’on sait sur le polluant éternel qui contamine l’eau du robinet de nombreuses villes

      Un polluant éternel très compliqué à éliminer de l’eau, l’#acide_trifluoroacétique (#TFA), pouvant avoir des effets sur la fertilité ou favoriser certains cancers, a été retrouvé dans l’eau du robinet d’une large majorité des villes où il a été recherché. Les deux études distinctes à l’origine de ces découvertes, publiées jeudi 23 janvier, ont été menées d’une part par le laboratoire Eurofins et d’autre part par les associations UFC-Que Choisir et Générations futures.

      L’Europe devrait débourser 2 000 milliards d’euros sur vingt ans pour supprimer les « polluants éternels » (PFAS, pour substances per- et polyfluoroalkylées) des eaux et des sols. Et l’un d’eux, très compliqué à éliminer, l’acide trifluoroacétique (TFA), est présent dans l’eau du robinet de nombreuses communes de France, et dans la grande majorité des cas à des taux excédant le seuil théorique de qualité.

      C’est ce que révèlent deux campagnes de mesures, rendues publiques ce jeudi 23 janvier par le journal Le Monde, et conduites séparément par l’association de consommateurs UFC-Que Choisir et l’ONG environnementale Générations futures d’une part, et par le laboratoire d’analyse Eurofins d’autre part. La substance a été retrouvée dans l’eau de 24 communes sur 30 par la première campagne, et dans 61 des 63 échantillons lors de la seconde.

      (#paywall)

      https://www.humanite.fr/societe/cancer/paris-lille-rouen-ce-que-lon-sait-sur-le-polluant-eternel-qui-contamine-lea

  • La « Terre des feux » italienne consume la santé des habitants

    L’enfouissement et l’incinération de déchets en toute illégalité empoisonnent la région de Naples depuis plus de vingt ans. Pour la première fois, un rapport établit officiellement un lien entre ces déchets et la forte prévalence de tumeurs et de maladies.

    Cela commence souvent par une fumée épaisse, noire, qui semble éteindre le jour et peine à se fondre dans l’obscurité de la nuit. Les volutes s’épaississent, l’air devient lourd, irrespirable. Les voisins ferment les fenêtres, inquiets. Quels déchets sont cette fois dévorés par les flammes ?

    Au mois de juillet, 147 feux de déchets ont été comptabilisés par les autorités dans la province de Naples, 57 dans la province de Caserta. C’est soixante de plus qu’il y a un an, à la même période. Sur les terres autrefois fertiles qui s’étendent au nord de Naples, la « Terre des feux » brûle depuis plus de vingt ans. Sans trêve.

    « Notre juridiction compte 38 communes et 34 d’entre elles sont touchées par un phénomène de pollution importante », résume en guise de préambule Carmine Renzulli, procureur de la République adjoint du tribunal de Naples Nord. Derrière son grand bureau situé au troisième étage du tribunal, il s’est fait un Post-it pour être sûr de ne rien oublier des chiffres vertigineux qu’il énonce : « On a recensé un total de 2 267 sites qui sont des décharges illégales et 653 touchés par des incendies illégaux de déchets. »

    Ces chiffres se trouvent dans le rapport publié en début d’année par l’Institut supérieur de santé et le bureau du procureur de Naples Nord. Au moment même où il les prononce, le procureur sait qu’ils sont déjà obsolètes : « C’est une bataille continue que l’on mène, il est évident qu’à partir du moment où l’on ferme un site illégal, ceux qui enfouissent les déchets n’en démordent pas pour autant et cherchent juste un autre endroit où le faire. » Le rapport prévoit une mise à jour des chiffres tous les deux ans.
    Surmortalité par cancers du sein

    D’un point de vue symbolique, l’avancée de ce rapport est notable. Pour la première fois, la magistrature et les autorités sanitaires nationales établissent un lien de cause à effet entre la pollution de la Terre des feux et les chiffres alarmants de la santé des habitants de la région. Le rapport met en évidence la surmortalité par cancers du sein dans les communes les plus touchées, la forte prévalence de leucémies chez les 0-19 ans, d’asthme, de malformations congénitales, de naissances prématurées.

    « Nous sommes la région la plus malade d’Italie en matière de maladies chroniques chez les jeunes, celle où les femmes ont le plus fort taux d’endométriose, celle où l’infertilité des jeunes est la plus forte, avec le risque ensuite que cela se transforme en cancer », s’indigne le docteur Antonio Marfella, responsable napolitain de l’association Médecins pour l’environnement.

    Depuis l’été 2004, ce médecin qui travaille au sein de l’Istituto Nazionale dei Tumori de Naples, spécialisé en oncologie, alerte les autorités sanitaires régionales et nationales sur les pathologies de ses patients. Sans succès. Au fil de son combat solitaire, le docteur Marfella est passé dans le camp des victimes de la pollution, atteint lui aussi d’un cancer. Année après année, sur les murs des communes de la Terre des feux, les avis de décès de trentenaires, puis d’adolescents et d’enfants se sont multipliés, inlassablement. Cet été, les dernières victimes de la Terre des feux avaient 19, 15 et 7 ans.

    Le fils de Marzia Caccioppoli, Antonio, n’avait pas encore fêté ses 10 ans quand il est décédé d’un glioblastome multiforme, un cancer du cerveau qui touche normalement des patients à partir de 55 ans. « Aucun médecin ne m’a jamais dit officiellement que c’était une tumeur liée au risque environnemental mais officieusement, si », se souvient-elle.

    Après la naissance de son fils, elle avait préféré quitter Naples, son bruit et sa pollution, pour s’installer à Casalnuovo di Napoli, une petite ville située à une quinzaine de kilomètres au nord-est, au cœur d’une région qui fut longtemps appelée la « Campania Felix » pour ses terres fertiles : « Je ne savais pas que je l’emmenais alors sur la terre qui le tuerait, qu’il deviendrait l’une des victimes de l’écocide de la Terre des feux. »
    Mobilisation citoyenne

    Pour ces victimes et leurs proches, le rapport est une preuve de plus que leurs dénonciations n’étaient pas celles de « folles, d’illuminées », comme Marzia Caccioppoli et les autres mères l’ont entendu répéter lors de leurs mobilisations pour alerter sur la situation. « Mais, comme d’habitude, on essaie de cacher la poussière sous le tapis, déplore-t-elle. Ici, on peut mourir de cancer à 20 ans mais on ne reçoit pas de fonds supplémentaires pour faire du dépistage, de la prévention, proposer des examens médicaux spécifiques aux habitants. »

    En 2013, après le décès de son fils, Marzia Caccioppoli fonde l’association Nous, les parents de tous, avec d’autres mères ayant perdu leur enfant sur la Terre des feux. Ensemble, elles ont créé un réseau de soutien pour les familles d’enfants malades, une vingtaine pour le moment, obligées de multiplier les « voyages de l’espoir vers les hôpitaux du Nord ». Elles organisent leurs propres journées de dépistage du cancer du sein dans les communes de la Terre des feux après avoir récupéré un échographe portable et avec l’aide d’un sénologue.

    Surtout, elles tentent d’obtenir justice pour la perte de leur enfant et pour éviter d’autres victimes. En 2015, après un long combat mené par de nombreuses associations, dont Nous, les parents de tous, une loi sur les écocides est adoptée par le Parlement italien. Une demi-victoire pour les militants : la loi n’est pas rétroactive. Les entreprises clairement identifiées comme ayant exporté leurs déchets toxiques sur la Terre des feux n’ont jamais été condamnées. « Certaines entreprises sont venues empoisonner nos terres et aujourd’hui elles sont encore ouvertes, leurs crimes restent impunis et ça, c’est une réalité que je n’accepte pas », fulmine Marzia Caccioppoli.

    C’est là que le bât blesse : hormis quelques entreprises identifiées au cours de ces vingt dernières années, désigner les coupables relève du casse-tête. « Comment savoir avec exactitude quel déchet a provoqué quelle maladie ?, interroge le procureur adjoint Renzulli, et comment savoir qui a enfoui ce déchet-là en particulier ? On peut avoir d’un côté quelqu’un qui porte plainte mais ensuite, pour qu’il y ait condamnation, il faut que la cause de la mort soit certaine. Identifier les coupables n’est pas l’ambition de ce rapport. »

    Il faudrait commencer par tracer les déchets, or, en Italie, nous avons encore un système papier avec une carte d’accompagnement qui est facilement falsifiable.

    Antonio Marfella, responsable napolitain de l’association Médecins pour l’environnement

    L’accord scellé entre la magistrature et l’Institut supérieur de santé en juin 2016 vise surtout à identifier les sites les plus touchés pour commencer à les dépolluer. La tâche est lourde : près de 37 % des 350 000 habitants de la zone concernée vivent à moins de cent mètres d’un ou plusieurs sites de stockage de déchets. « Commencer la dépollution maintenant comme le demande la magistrature, c’est commencer à reconstruire des immeubles alors qu’on est encore sous les bombes », s’emporte le docteur Marfella.

    Car le ballet des camions venus décharger leurs déchets ne connaît aucun répit. Ni les incendies et leurs fumées toxiques. Lorsque la Terre des feux a commencé à faire parler d’elle, les coupables étaient tout trouvés : les « camorristes », les mafieux locaux, qui ont empoché de coquettes sommes pour « enterrer » à plusieurs mètres de profondeur des déchets spéciaux et toxiques d’entreprises, essentiellement lombardes et vénitiennes.

    Aujourd’hui, le procureur adjoint Renzulli décrit un phénomène bien plus banal et profondément ancré dans les mentalités locales. « Traiter une grosse quantité d’amiante, ça coûte beaucoup d’argent. Donc les gens s’en moquent un peu si, en abandonnant ces déchets, ils peuvent provoquer des dégâts sur la santé des autres. Ils pensent d’abord à leur propre intérêt, à économiser ce qu’ils peuvent, c’est le cas des petites usines du coin », détaille-t-il.

    Parmi les centaines de dossiers que traite chaque année sa juridiction, nombreuses sont les amendes infligées à des particuliers qui font des travaux dans leur maison et se débarrassent des déchets, ou à de petits entrepreneurs locaux qui ne se présentent même pas à l’audience.

    « Il faudrait commencer par tracer les déchets, or, en Italie, nous avons encore un système papier avec une carte d’accompagnement qui est facilement falsifiable, regrette le docteur Marfella. C’est un problème que nous pourrons résoudre lorsque l’État décidera de se comporter en tant que tel en faisant appliquer ses règles sur le territoire, à commencer par la lutte contre l’évasion fiscale. »

    En Italie, l’évasion fiscale des entreprises est estimée à 30 % en moyenne. Si ces chiffres sont souvent associés au manque à gagner pour l’État, le responsable napolitain de Médecins pour l’environnement souligne un autre aspect, fondamental : « Dès lors que cela concerne l’industrie manufacturière, cela signifie aussi que pour 100 millions de tonnes de déchets légaux, j’en ai 30 millions qui sont illégaux. Où vont-ils finir ? »

    Du Nord au Sud, il tente d’alerter les autres régions sur le phénomène de l’enfouissement de déchets toxiques. Le docteur Marfella est catégorique : il n’y a plus une, mais des terres des feux en Italie.

    https://www.mediapart.fr/journal/international/130921/la-terre-des-feux-italienne-consume-la-sante-des-habitants

    #terra_dei_fuochi #santé #Italie #déchets #camorra #mafia #cancers #tumeurs #feux #incendies #Caserta #décharges #décharges_illégales #surmortalité #leucémies #endométriose #infertilité #maladies_chroniques

    Pour télécharger le #rapport :

    https://www.procuranapolinord.it/allegatinews/A_42657.pdf

  • L’#Inserm met en évidence de nouvelles #pathologies liées aux #pesticides

    Les liens sont de plus en plus évidents entre usage des pesticides et certains #cancers, en particulier chez les agriculteurs et chez les enfants. C’est ce que montre une nouvelle étude de l’Inserm, huit ans après celle qui faisait référence jusqu’à présent.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/070721/l-inserm-met-en-evidence-de-nouvelles-pathologies-liees-aux-pesticides
    #santé #maladie #industrie_agro-alimentaire #agriculture #rapport

    • Pesticides et santé – Nouvelles données (2021)

      Ce document présente la synthèse issue des travaux du groupe d’experts réunis par l’Inserm dans le cadre de la procédure d’expertise collective pour répondre à la demande de cinq directions de l’État, la Direction générale de la prévention des risques, la Direction générale de la santé, la Direction générale du travail, la Direction générale de la recherche et de l’innovation, ainsi que le secrétariat général du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation. Ce travail s’inscrit dans le cadre de l’actualisation du rapport d’expertise collective Inserm intitulé Pesticides : Effets sur la santé, publié en 2013.

      Ce travail s’appuie essentiellement sur les données issues de la littérature scientifique disponible en date du premier trimestre 2020. Plus de 5 300 documents ont été rassemblés à partir de l’interrogation de différentes bases de données (PubMed/ Medline, Scopus, Cairn...) et des recherches complémentaires ont été effectuées par les experts ou en collaboration avec le Pôle expertise collective. Le Pôle expertise collective de l’Inserm, rattaché à l’Institut thématique Santé publique, a assuré la coordination de cette expertise.

      Les pesticides regroupent l’ensemble des produits utilisés pour lutter contre les espèces végétales indésirables et les organismes jugés nuisibles. Qu’il s’agisse de pesticides autorisés aujourd’hui ou utilisés par le passé (dont certains sont rémanents), ils suscitent des inquiétudes concernant leurs effets possibles sur la santé humaine et plus largement sur l’environnement. Afin de mieux apprécier leurs effets sanitaires, l’Inserm a été saisi en 2018 par cinq directions générales ministérielles en vue d’actualiser l’expertise collective intitulée « Pesticides : Effets sur la santé » publiée en 2013.

      L’expertise collective de 2021 dresse un bilan des connaissances dans le domaine au travers d’une analyse critique de la littérature scientifique internationale publiée depuis 2013. Plus de 5 300 documents ont été rassemblés et analysés par un groupe d’experts multidisciplinaire. L’expertise commence par une analyse sociologique de la montée des préoccupations concernant les pesticides et une présentation des connaissances sur l’exposition aux pesticides de la population française, puis elle aborde une vingtaine de #pathologies dont les #troubles_du_développement_neuropsychologique_et_moteur de l’enfant, les #troubles_cognitifs et anxio-dépressifs de l’adulte, les #maladies_neurodégénératives, les cancers de l’#enfant et de l’adulte, l’#endométriose et les #pathologies_respiratoires ainsi que thyroïdiennes. Une dernière partie est consacrée à des pesticides ou familles de pesticides particuliers : le #chlordécone, le #glyphosate et les #fongicides_inhibiteurs_de_la_succinate_déshydrogénase (#SDHi). La présomption d’un lien entre l’exposition aux pesticides et la survenue d’une pathologie est appréciée à partir des résultats des #études_épidémiologiques évaluées et est qualifiée de forte, moyenne ou faible. Ces résultats sont mis en perspective avec ceux des #études_toxicologiques pour évaluer la plausibilité biologique des liens observés.

      Exposition en milieu professionnel

      En considérant les études sur des populations qui manipulent ou sont en contact avec des pesticides régulièrement, et qui sont a priori les plus exposées, l’expertise confirme la présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides et six pathologies : #lymphomeslymphomes_non_hodgkiniens (#LNH), #myélome multiple, cancer de la #prostate, #maladie_de_Parkinson, troubles cognitifs, #bronchopneumopathie chronique obstructive et #bronchite chronique. Pour les LNH, il a été possible de préciser des liens (présomption forte) avec des substances actives (#malathion, #diazinon, #lindane, #DDT) et avec une famille chimique de pesticides (#organophosphorés), et pour la maladie de Parkinson et les troubles cognitifs avec les #insecticides organochlorés et les organophosphorés, respectivement. Il s’agit essentiellement de pesticides pour lesquels les études se sont appuyées sur des biomarqueurs permettant de quantifier l’exposition. Les études toxicologiques confirment que les mécanismes d’action de ces substances actives et familles de pesticides sont susceptibles de conduire aux effets sanitaires mis en évidence par les études épidémiologiques.

      Des liens ont été identifiés pour d’autres pathologies ou événements de santé avec une présomption moyenne. C’est le cas notamment pour la maladie d’#Alzheimer, les troubles anxio-dépressifs, certains cancers (#leucémies, système nerveux central, vessie, rein, sarcomes des tissus mous), l’#asthme et les #sifflements_respiratoires, et les pathologies thyroïdiennes.

      Exposition pendant la #grossesse ou l’#enfance

      Les études épidémiologiques sur les cancers de l’enfant permettent de conclure à une présomption forte de lien entre l’exposition aux pesticides de la mère pendant la grossesse (exposition professionnelle ou par utilisation domestique) ou chez l’enfant et le risque de certains cancers, en particulier les leucémies et les tumeurs du système nerveux central.

      Les études de cohortes mères-enfants ont permis de caractériser les liens entre l’exposition professionnelle ou environnementale (c’est-à-dire en population générale) des mères pendant la grossesse et les troubles du développement neuropsychologique et moteur de l’enfant. Il est difficile de pointer des substances actives en particulier, mais certaines familles chimiques de pesticides sont impliquées, avec un niveau de présomption fort, notamment les #insecticides organophosphorés et les #pyréthrinoïdes dont l’usage a augmenté en substitution aux insecticides organophosphorés. Le lien entre les #organophosphorés et l’altération des #capacités_motrices, cognitives et des fonctions sensorielles de l’enfant est confirmé et les nouvelles études sur les #pyréthrinoïdes mettent en évidence un lien entre l’exposition pendant la grossesse et l’augmentation des #troubles_du_comportement de type internalisé tels que l’#anxiété chez les enfants. Les données expérimentales sur des rongeurs suggèrent une #hyperperméabilité de la barrière hémato-encéphalique aux #pyréthrinoïdes aux stades les plus précoces du développement, confortant la plausibilité biologique de ce lien. De plus, comme le montrent les études récentes d’expologie, ces insecticides, qui ont été à la fois utilisés en #agriculture mais également dans les sphères domestiques, induisent une contamination fréquente des environnements intérieurs.

      Exposition des #riverains des #zones_agricoles

      Les populations riveraines des zones agricoles peuvent être concernées par la dérive des produits épandus sur les cultures. En effet, des études suggèrent une influence de la #proximité aux zones agricoles sur la #contamination par les pesticides du lieu de vie, variable selon les substances, leur mode d’application et la manière d’estimer l’exposition. Des études écologiques ou cas-témoins avec géolocalisation reposant sur la caractérisation de l’activité agricole au voisinage des adresses de résidences suggèrent un lien entre l’exposition des riverains des terres agricoles et la maladie de #Parkinson, et également entre la #proximité_résidentielle à des zones d’#épandages de pesticides (rayon <1,5 km) et le comportement évocateur des troubles du spectre autistique chez l’enfant. Cependant, ces études présentent des limites importantes liées à l’évaluation fine de l’exposition ou à l’absence de données individuelles, ce qui rend le niveau de présomption faible.

      Focus sur le chlordécone, le glyphosate et les inhibiteurs de la succinate déshydrogénase

      Le chlordécone, #insecticide utilisé aux #Antilles_françaises dans le passé, persiste de nos jours dans les milieux naturels insulaires. La consommation des denrées alimentaires contaminées a entraîné une contamination de l’ensemble de la population. La présomption forte d’un lien entre l’exposition au chlordécone de la population générale et le risque de survenue de #cancer_de_la_prostate a été confirmée. En considérant l’ensemble des données épidémiologiques et toxicologiques disponibles, la causalité de la relation est jugée vraisemblable.

      Concernant l’herbicide glyphosate, l’expertise a conclu à l’existence d’un risque accru de LNH avec une présomption moyenne de lien. D’autres sur-risques sont évoqués pour le #myélome multiple et les #leucémies, mais les résultats sont moins solides (présomption faible). Une analyse des études toxicologiques montre que les essais de #mutagénicité sur le glyphosate sont plutôt négatifs, alors que les essais de #génotoxicité sont plutôt positifs, ce qui est cohérent avec l’induction d’un stress oxydantstress oxydant. Les études de cancérogenèse expérimentale chez les rongeurs montrent des excès de cas, mais ne sont pas convergentes. Elles observent des #tumeurs différentes, pour les mâles ou les femelles, qui ne se produisent qu’à des doses très élevées et uniquement sur certaines lignées. D’autres mécanismes de #toxicité (effets intergénérationnels, perturbation du microbiote...) sont évoqués qu’il serait intéressant de considérer dans les procédures d’évaluation réglementaire.

      Pour les fongicides SDHi, qui perturbent le fonctionnement mitochondrial par l’inhibition de l’activité SDH, un complexe enzymatique impliqué dans la respiration cellulaire et le #cycle_de_Krebs, il n’existe à ce jour pratiquement aucune donnée épidémiologique portant sur les effets possibles de ces substances sur la santé des agriculteurs ou de la population générale. Les études toxicologiques ou mécanistiques montrent que certains SDHi pourraient être considérés comme des #perturbateurs_endocriniens au moins chez les modèles animaux utilisés (poissons). Alors que les SDHi ne présentent aucune génotoxicité, certains montrent des effets cancérogènes chez les rongeurs mais ce résultat est discuté sur la base d’un mécanisme de cancérogenèse non extrapolable aux humains. Des recherches sont nécessaires pour améliorer l’évaluation du potentiel cancérogène des SDHi, et plus généralement des composés non génotoxiques, et pour combler les lacunes dans les données humaines par le renforcement de la biosurveillance et l’exploitation des cohortes existantes.

      En conclusion

      L’expertise souligne l’importance de réévaluer périodiquement les connaissances dans ce domaine. La confirmation et la mise en évidence de présomptions fortes de liens entre certaines pathologies et l’exposition aux pesticides doivent orienter les actions publiques vers une meilleure protection des populations. Ces questions relatives aux liens entre une exposition aux pesticides et la survenue de certaines pathologies s’inscrivent dans une complexité croissante, la littérature faisant apparaître une préoccupation concernant les effets indirects de certains pesticides sur la santé humaine par le biais des effets sur les #écosystèmes. L’#interdépendance en jeu mériterait d’être davantage étudiée et intégrée, au même titre que les aspects sociaux et économiques afin d’éclairer les prises de décisions lors de l’élaboration des politiques publiques.

      https://www.inserm.fr/information-en-sante/expertises-collectives/pesticides-effets-sur-sante

      Pour télécharger l’étude :


      https://www.inserm.fr/sites/default/files/2021-07/Inserm_ExpertiseCollective_Pesticides2021_RapportComplet_0.pdf

      #toxicologie #thyroïde #autisme

  • Dans le sud-ouest de Nantes, un nombre inhabituel de cancers et une enquête citoyenne
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2019/04/25/pres-de-nantes-un-collectif-citoyen-travaille-avec-les-autorites-sur-des-cas

    Depuis 2015, des #cancers_du_sang ou des #tumeurs malignes ont été diagnostiqués chez treize #enfants de #Loire-Atlantique habitant les communes rurales de Sainte-Pazanne, Saint-Hilaire-de-Chaléons, Saint-Mars-de-Coutais, et Rouans. C’est un chiffre anormal dans un secteur aussi restreint, s’alarme le collectif Stop aux #cancers de nos enfants (SCE), dans un communiqué, mercredi 24 avril.

    Créé en mars, cette association de trente adhérents, vivant dans une même zone agricole située à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de Nantes, presse les autorités sanitaires de mettre au jour les causes de ce phénomène. Et elle réitère son engagement à les y aider.

    Après que le SCE lui a signalé « au moins neuf cas » de cancers – dont six à Sainte-Pazanne (6 500 habitants) – chez des mineurs, depuis décembre 2015, l’Agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire a saisi, le 28 mars, l’agence Santé publique France (SpF, ex-InVS) afin qu’elle diligente une enquête épidémiologique.

    #paywall

    L’analyse des facteurs de risque environnementaux n’a pas montré de cause prédominante, selon l’agence, qui poursuit : « Bien que 90 % des leucémies infantiles aiguës soient aujourd’hui sans cause connue et que les facteurs de risque liés aux cancers puissent être multiples, l’ARS a décidé de poursuivre les investigations. » Elle a saisi Santé publique France pour mener l’enquête épidémiologique, dont les premières conclusions seront rendues à l’automne 2019.

    https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/sainte-pazanne-44680/cancers-sainte-pazanne-l-agence-regionale-de-sante-annonce-une-reunion-

  • Des maux et des remèdes, une histoire de pharmaciens le Devoir - Jean-François Nadeau - 21 avril 2018
    https://www.ledevoir.com/lire/525797/une-histoire-des-pharmaciens-des-remedes-de-grands-meres-a-l-apothicaire

    Lorsque le chirurgien Michel Sarrazin procède, au printemps de 1700, à l’ablation à froid du sein cancéreux d’une religieuse montréalaise, la malheureuse risque d’y passer. Soeur Marie Barbier va pourtant survivre 39 ans à cette opération, première du genre en Amérique. Pour éviter l’infection de sa plaie, on utilisera l’« #onguent divin », alors très populaire, explique en entrevue Gilles Barbeau, ancien doyen de la Faculté de pharmacie de l’Université Laval, qui vient de faire paraître Curieuses histoires d’apothicaires.

    Cet « onguent divin », les religieuses souhaitent l’utiliser en toutes circonstances. Il s’agit en fait d’un mélange de mine de plomb rouge, d’huile d’olive et de cire jaune. « Les métaux comme le plomb ou le cuivre ont une certaine propriété antiseptique », précise le professeur émérite.

    L’« onguent divin » s’inspire d’un manuel de la bibliothèque des Jésuites intitulé Remèdes universels pour les pauvres gens. Le pharmacien réservera longtemps les produits locaux aux gens de peu de moyens. Ceux qui le peuvent s’offrent des remèdes venus de loin, forcément meilleurs puisqu’on les paye plus cher…

    Peu de médicaments en vente libre sont encore tirés directement de plantes. Mais c’est bien la nature, explique #Gilles_Barbeau, qui a inspiré plusieurs médicaments. « Se soigner par les plantes, chercher à se soulager et à guérir des blessures fut non seulement un geste naturel des premiers êtres humains, mais une activité presque instinctive. » La #centaurée et la #rose_trémière étaient déjà utilisées il y a 40 000 ans pour leurs propriétés. L’#ail, l’#aloès, les graines de #pavot, l’#aubépine, la #camomille, la #mandragore, pour ne nommer qu’eux, servent aussi. « Les Nord-Américains ont pris l’habitude de prendre tout ça en pilules, alors que les effets favorables de la plante sont sous cette forme à peu près nuls », dit M. Barbeau.

    Le vieux métier
    Depuis les profondeurs du temps existe ce métier qui consiste à préparer des #médicaments, auquel nous identifions aujourd’hui le #pharmacien. « L’histoire des pharmaciens est obscurcie par la place qu’a prise l’histoire de la médecine », regrette Gilles Barbeau.

    L’apothicaire est l’ancêtre du pharmacien. Il se trouve à cette jonction mal éclairée où se rencontrent le botaniste, l’alchimiste, l’épicier, le chimiste et le charlatan. Au Québec, le mot « #apothicaire », présent aussi en Angleterre, reste accolé à la pharmacie jusqu’au début du XXe siècle.
     
    Des plantes
    Gilles Barbeau se souvient d’une journée passée à marcher avec son grand-père. L’homme, né en 1875, amenait son petit-fils près de la rivière cueillir de la #savoyane, une plante qu’il utilisait pour contrer les ulcères de bouche. « Ma grand-mère ramassait aussi des #plantes_médicinales. Ce fut mon premier contact, sans le savoir, avec la #botanique médicale. » Parmi les plantes dont Barbeau parle pour traiter de l’histoire des pharmaciens, on trouve l’#achillée_millefeuille, très commune dans les campagnes québécoises, utilisée en infusion pour ses vertus gastriques.

    L’histoire a gardé dans ses replis des savoirs anciens que Gilles Barbeau révèle au hasard de sa volonté première, qui est de faire connaître l’histoire de pharmaciens, des savants à qui nous devons parfois beaucoup.

    Vin et cocaïne
    Au nombre des historiettes passionnantes que narre le professeur, on trouve celle d’Angelo #Mariani, médecin d’origine corse. Mariani développe un vin fait à base de coca. « Ce vin va être très populaire pour soigner les acteurs et les actrices. Zola, Massenet, même le pape Léon XIII, vont aussi chanter la gloire du vin Mariani. Aux États-Unis, plusieurs caisses de vin Mariani sont importées. Un pharmacien va les distiller pour produire un sirop. Et c’est avec de l’eau et ce sirop qu’on va produire les premières bouteilles de Coca-Cola. »

    Que doit-on à Louis Hébert, premier apothicaire sur les rives du Saint-Laurent ? « Il va envoyer une quarantaine de plantes nouvelles en France, sans doute grâce aux #Amérindiens. » Dans les biographies édifiantes de cet apothicaire, on retiendra souvent qu’il suggérait de manger une pomme par jour. Pas de pommes pourtant en Nouvelle-France… La confusion viendrait de sa découverte d’une plante surnommée « #pomme_de_mai », déjà connue chez les #Hurons. Le frère botaniste Marie-Victorin la nommera Podophyllumn peltatum. Cette plante possède des propriétés purgatives puissantes. C’est un de ses dérivés qui est utilisé dans les célèbres pilules Carter’s pour le foie, commercialisées jusqu’en 1992. Au XIXe siècle, observe Gilles Barbeau, cette plante se trouve à la base de presque tous les médicaments censés traiter les maladies inflammatoires. Les observations d’un pharmacien britannique, Robert Bentley, vont montrer qu’une résine fabriquée à partir de cette plante possède un effet favorable au traitement des #tumeurs cutanées. « Et cela a donné un #anticancéreux puissant, toujours utilisé pour les traitements du cancer du sein », raconte M. Barbeau.

    On trouve de tout chez les pharmaciens, mais par forcément des amis. Dans la Grèce antique, #pharmakon veut d’ailleurs tout aussi bien dire poison que remède. Ces commerces sont souvent des lieux où le marchand est vu comme un menteur, un voleur, un empoisonneur, un malhonnête, un charlatan.

    Mauvaise humeur
    La théorie antique dite des #humeurs va longtemps dominer les usages de la pharmacie. On trouve une formidable illustration de ces théories fantaisistes dans Le malade imaginaire de Molière, où un « clystère insinuatif, préparatif, et rémollient » est d’entrée de jeu présenté comme une nécessité « pour amollir, humecter, et rafraîchir les entrailles de Monsieur »… En fonction d’un principe d’équilibre des liquides du corps, tous les maux sont à soigner à partir de simagrées, de saignées ou de purgatifs injectés dans le corps par un instrument appelé clystère.

    Encore au XIXe siècle, l’un des inventeurs du cinéma, #Auguste_Lumière, trouve dans ses usines chimiques des #hyposulfites qui, croit-il, permettent de dissoudre les « floculations », des cellules mortes qui en viennent à se précipiter dans le système, ce qui selon lui serait à la base de tous les ennuis de santé. On nage encore dans la théorie des humeurs.

    L’irrationnel s’avale bien. « Au XIXe siècle, en médecine populaire, le traitement de maladies comme la #teigne s’envisage avec un sirop fait d’écorces de #tremble qu’on prendra soin de couper à la pleine lune », souligne M. Barbeau, le concours des astres étant apparemment aussi important que celui des dieux sur l’effet des médicaments…

    Ainsi le développement de la pharmacie a-t-il longtemps donné la main à une science de l’à-peu-près dont la puissance tenait beaucoup à des effets de langage. Des esprits sensibles à la rigueur de l’analyse vont lui imposer une autre direction. La maladie, selon les enseignements de #Paracelse, est éventuellement envisagée comme un phénomène biochimique.

    Dans son #histoire des pharmaciens, Gilles Barbeau estime tout particulièrement la découverte faite par Friedrich Sertüner, un jeune stagiaire. « C’est lui qui a pour ainsi dire découvert la #morphine. C’est universel aujourd’hui. Elle permet d’aller plus doucement vers la mort », dit-il. De toutes les découvertes faites par le passé, la morphine a encore beaucoup d’avenir, croit M. Barbeau.

    #herboristerie