• Enquête vidéo : comment un commissaire de police a blessé plusieurs journalistes lors d’une Marche des libertés

    https://www.youtube.com/watch?v=QiTbNZ925kM

    https://www.lemonde.fr/police-justice/video/2021/03/11/enquete-video-sur-le-commissaire-de-police-qui-a-blesse-plusieurs-journalist

    Grâce à l’analyse de dizaines d’heures d’images, « Le Monde » est parvenu à identifier un commissaire responsable de plusieurs coups portés à des journalistes le 28 novembre 2020, dont l’un a sévèrement blessé au visage le reporter syrien Ameer Al-Halbi.

  • Culte de l’Ordre, culture du viol : état des lieux

    Avertissement / Trigger Warning : certains passages de cet article font la description de féminicides, de viols, d’incestes, de violences sexuelles et sexistes et racistes. Nous préférons prévenir afin de ne pas heurter la sensibilité de certain.e.s.

    | Désarmons-les ! https://desarmons.net/2021/03/08/culte-de-lordre-culture-du-viol-etat-des-lieux
    https://desarmons.net/wp-content/uploads/2021/03/danseacab.bmp

    Tout d’abord il y a les chiffres qu’on se prend à chaque fois en pleine face : 9 viols par heure, soit 205 par jour. En France, on estime à 198 000 le nombre de tentatives de viol, 75 000 le nombre de viols par an et 10 % des agressions sexuelles qui donnent lieu à un dépôt de plainte.

    Puis il y a la violence d’un passage au commissariat pour celles qui en font le choix et la sidération quasi rituelle de faire face à des OPJ hommes, qui induisent un rapport de force et suscitent des incompréhensions.

    Enfin, il y a les requalifications, les confrontations avec l’agresseur, les 3/4 des plaintes classées sans suite et toutes celles qui se taisent pour ne pas “faire de vagues”.

    À l’heure où certaines féministes en appellent à une police “mieux formée”, il est bon de rappeler différents exemples qui démontrent combien les forces de l’ordre profitent de leur fonction pour soumettre définitivement celles qu’ils considèrent, dans leur for intérieur, comme inférieures.
    Les violences du corps policier à l’encontre des femmes sont avant tout autoritaires, alliage entre un pouvoir universel et socialement admis de contrôle et de punition de la part des hommes, qui les amène à s’arroger le droit de jugement, mais également de vie ou de mort sur la victime, moyen de contrôle absolu et définitif démontrant la toute puissance de la sauvagerie masculine.

    Les femmes doivent être à la disposition des hommes et doivent être soumises à leurs injonctions, à leurs désirs, et ce qu’elles refusent de donner, les hommes peuvent le prendre par la violence. Ce qui est vrai pour les hommes en général l’est vrai pour les hommes de l’Ordre en particulier. Il est nécessaire de rappeler que les violences policières sexistes sont interdépendantes de la structure et de l’histoire de l’institution policière, mais aussi du systeme judiciaire et carcéral.

    Pour analyser cette domination, nous proposons de partir des violences individuelles des hommes de l’Ordre, puis de l’affirmation de leur toute puissance au sein de l’appareil d’Etat, pour aboutir sur les violences dans les lieux de privation de liberté et élargir sur cette question éminemment contemporaine : comment s’affranchir des forces de l’ordre dans nos luttes ?

  • 11 musicien-ne-s palestinien-ne-s indépendant-e-s que vous devez écouter sans attendre
    Said Said, The National, le 1er février 2021
    https://agencemediapalestine.fr/blog/2021/03/08/34826

    Je note en particulier une version fantastique, live au Danemark, de près de 9 minutes de Everyland par #47Soul :
    https://www.youtube.com/watch?v=YUmeUdLMpxQ

    Et un rappeur de Jérusalem Est que je ne connaissais pas, #Shabjdeed - Amrikkka
    https://www.youtube.com/watch?v=pnQUKgturj0

    #Palestine #Musique #Musique_et_politique

  • En ce 8 mars, que l’universalisme se décline au féminin !
    8 mars 2021 Par Paul B. Preciado
    https://www.mediapart.fr/journal/culture-idees/080321/en-ce-8-mars-que-l-universalisme-se-decline-au-feminin

    Célébrons la Journée des droits des femmes en brisant la logique binaire et hiérarchique qui fait des femmes des sujets politiques subalternes. Luttons pour la réversibilité des genres et pour l’abolition des inscriptions administratives de la différence sexuelle et de genre.

    Si vous êtes un homme cisgenre, si on vous a assigné le genre masculin à la naissance et que vous croyez encore en votre masculinité comme si c’était quelque chose de naturel, célébrez la Journée des droits des femmes en renonçant à vos privilèges cis et binaires et sortez habillé en femme.

    Procurez-vous une jupe et des talons. Si vous êtes plutôt du genre streetwear, portez votre pantalon jogging et vos baskets habituelles et concentrez-vous sur les détails : mascara noir, rouge à lèvres et vernis à ongles. Donnez-vous du temps, appréciez le processus de transformation, recherchez la beauté et la délicatesse qui autrement vous sont interdites.

    Ne faites pas comme les autres hommes lorsqu’ils se déguisent en femme pour les enterrements de vie de garçon et les bizutages à l’université. Ne cherchez pas à ridiculiser, à agresser ou à exorciser. Que s’habiller en femme ne soit pas une tradition patriarcale dégradante, mais un rite d’émancipation exaltant. Incarnez avec amour et respect ce code historique que vous avez appris à la fois à désirer sexuellement et à mépriser politiquement. Honorez la féminité.

    Abjurez votre privilège masculin binaire et sortez dans la rue, avec joie et curiosité, habillé en femme. Soyez, à un carrefour, une travailleuse du sexe à côté de la travailleuse du sexe, soyez l’infirmière qui normalement s’occuperait de vous et occupez-vous d’autres femmes, soyez une caissière de supermarché à côté d’une autre caissière de supermarché, soyez une adolescente parmi des adolescentes à la sortie de l’école, soyez une vieille femme parmi des vieilles femmes.

    Aimez les femmes, non pas comme des objets sexuels, mais comme des sujets politiques. Faites de la position féminine une position socialement et politiquement désirable.

    Célébrons la Journée des droits des femmes en mettant fin à l’interdiction de choisir, pour une personne à qui on a assigné le genre masculin à la naissance, la position sociale de femme et l’esthétique féminine dans le cadre de conventions et de rituels historiques binaires. La Journée des droits des femmes est aussi le jour du travesti.

    Que toutes les institutions de la nation honorent les femmes invisibles qui assurent les processus culturels de production et de reproduction. Que le président de la République, un homme cis, binaire et hétérosexuel, fasse le discours de la Journée des droits des femmes habillé en femme et qu’il le fasse avec le même respect avec lequel il pourrait s’habiller en militaire pour honorer les soldats « tués pour la patrie ».

    Laissez le ministre de la justice, un homme cis, binaire et hétérosexuel, entrer dans la prison des femmes habillé en femme. Laissez DSK donner une conférence au FMI habillé comme une femme de ménage, non pas pour la ridiculiser, mais pour l’honorer. Laissez Polanski lui-même jouer dans son prochain film habillé comme une adolescente en jupe d’école, chaussettes courtes et petites chaussures en cuir verni. Mais qu’il le fasse non pas pour se moquer d’elle ou pour être ridiculisé à son tour, mais pour apprendre à aimer ce qu’il a détruit.

    Laissez le boucher, l’avocat, le pompier, le banquier, le médecin, le chauffeur de taxi, le chauffeur de bus, le pharmacien, le policier, le médecin, l’électricien, le facteur, l’enseignant, le psychanalyste, le présentateur du journal télévisé, le DJ, l’écrivain, le directeur de théâtre, les membres de l’Académie française… sortir dans la rue habillés en femme.

    Que tous les petits machos qui gardent les entrées des bâtiments pour bien vérifier que leurs sœurs et leurs cousines sortent dans la rue « décemment habillées » s’habillent eux-mêmes avec les vêtements de femmes qui à la fois les attirent et les effraient.

    Que les rues de toutes les villes soient remplies de femmes et seulement de femmes pour que, pendant un jour, l’égalité entre les corps règne. Que l’universalisme se décline au féminin.

    Un véritable féminisme commence par la reconnaissance de la féminité comme une position sociale et politique souhaitable et accessible pour un corps auquel on a assigné le genre masculin.

    La transphobie d’État, la transphobie institutionnelle et la transphobie féministe essentialiste sont des formes de féminicide cognitif : des pratiques qui perpétuent la haine des femmes en refusant à une personne à laquelle on a assigné le genre masculin à la naissance la possibilité de se situer, politique et sexuellement, dans une position sociale féminine. La Journée des droits des femmes est aussi la journée de la femme trans.

    Tant que tous les enfants auxquels on a attribué le genre masculin à la naissance par des diagnostics normatifs et binaires ne pourront pas s’habiller en rose s’ils le souhaitent dès l’école maternelle et se donner des noms féminins s’ils le souhaitent sans être agresse·é·s, pathologise·é·s ou criminalise·é·s, il n’y aura pas de liberté de genre et sexuelle. La Journée des droits des femmes est aussi la journée de la petite fille trans.

    Détruisons le binarisme normatif et hiérarchique d’abord par la reconnaissance de la liberté d’incarner tout code social de genre indépendamment du genre qui nous est attribué à la naissance et, ensuite, immédiatement après, par le rejet des processus administratifs d’attribution de genre qui commencent à la naissance et se perpétuent tout au long de la vie jusqu’à leur inscription sur l’acte de décès.

    Que tous les garçons du monde puissent être des filles. Que tous les hommes puissent être des femmes. Que toutes les femmes puissent être ce qu’elles auront envie d’être.

    Bonne journée trans du 8 mars. Et bonne journée de la fin du binarisme du genre normatif.

    Je voie ici une grande invisibilisation des femmes. Le 8 mars est la journée de lutte pour les droits des femmes et pas la fête du déguisement pour les hommes sous la houlette du groupe LVMH. Il y a tellement de paradoxes et d’incohérence dans ce texte.
    Le fait qu’un homme (Paul B.Préciado se revendique etre un homme) prenne la parole au nom des femmes.
    Le fait qu’il s’adresse aux hommes cis en leur demandant de se déguisé, car ces hommes sont cis, et même si il se défend de l’effet carnavale il est impossible de ne pas le prendre comme tel. C’est d’ailleur insultant pour les trans puisque leur transgenrisme est réduit à un déguisement que pourrait adopté des hommes cis pour des manifestations et je trouve que son idée de Polansky travesti en gamine est inopérante. C’est comme si elle demandait aux blanc·hes de se peindre la face en noir en hommage aux victimes de la negrophobie. Comme si les racistes n’utilisaient pas largement cet argument de l’hommage pour enfoncer des stéréotypes racistes. Ceci met plutot à jour que le travestissement est une appropriation et une humiliation pour les dominées, comme si les hommes qui se disent se sentir être des femmes avaient la moindre idée de ce qu’est se sentir etre une femme.

    Le fait de renommé la journée de lutte pour les droits des femmes, la journée trans et du non binarisme, est une incroyable invisibilisation et une négation des femmes et de leurs besoins. Qu’est ce que ca apporte aux femmes que DSK se fétichise en cliché de femme de ménage et comment serait il possible de différencié une « véritable hommage aux travailleuses » d’une exhibition de fétichisme sexuelle ou d’une caricature injurieuse de Naffisatou Diallo ?

    Le fait de croire qu’un petit garçon qui aime le rose est une petite fille trans et appartiens de fait au groupe des femmes, comme si les femmes avaient le gout du rose, comme si c’etait le fait de porté du rose qui faisait la féminité.

    Le fait de réduire la lutte pour les droits des femmes à une cause cosmétique alors qu’on fait de la pub pour le groupe LVMH. D’ailleurs les droits ici défendus sont ceux des hommes à porter des jupes et du maquillage, comme si les hommes n’avaient pas le droit de faire cela et comme si le capitalisme dont fait partie le groupe LVMH ne produisait pas déjà des mannequins hommes en jupe, maquillées.

    Le fait de réclamer la totale indifférenciation selon les sexes pause aussi une infinité de problèmes aux femmes. Abolition de toute statistique, toute politique spécifique, impossibilité de soins médicaux appropriés...
    –---

    Les femmes sont discriminées en raison de leur sexe, pas de leur genre. Les hommes dans le patriarcat cherchent à s’approprier la puissance reproductive des femmes, c’est à dire leur capacité à enfanter. Le genre est une technique d’oppression mais il n’est pas la raison de cette oppression. L’oppression des femmes trouve son origine dans la biologie, dans leur uterus, potentiellement porteur de progéniture. Contrairement à l’oppression raciste qui elle ne repose sur aucune réelle différence biologique car si il n’y a qu’une seule espèce humaine, l’humanité est par contre bien une espèce sexuée. Le genre est la forme que prend l’expression de la différence de valence des sexes. Lorsque les jupes, talons et maquillages étaient des attributs masculins ils étaient jugés virils et n’avaient rien de féminin en soi. Les hommes jugés pas assez viriles, subissent les effets de la misogynie, du fait que ce qui est associé aux femelles humaine est de faible valeur. Il ne s’agit pas de nié ces souffrances, mais elles ne sont pas centrales dans le féminisme qui est la lutte pour la cause des femmes et pas la lutte pour la cause des individus féminisés, même si parfois ces causes peuvent se joindre et s’entendre. Il ne s’agit pas de nié les discriminations subit par les trans. Les femmes trans, les hommes homosexuels, et les hommes mal classé sur l’échelle de la virilité subissent eux aussi la misogynie, mais pas parcequ’ils sont des femmes, parcequ’ils ressemblent à ce que le patriarcat attribut aux femmes. Pour le patriarcat, les hommes trans, les lesbiennes et les femmes mal classées sur l’échelle de la féminité restent des femmes et subissent aussi la misogynie, par exemple par la négation de leur sexualité, des viols punitifs et leur invisibilisation.

    Le vocabulaire « assigné » est aussi une récupération et une invisibilisation des luttes des intersexes qui ne sont pas des trans et n’ont pas les mêmes problématiques qui se rapprochent aussi des questions liées au validisme.

    Ce que propose P.B.P ici est une révolution cosmétique sans profondeur et totalement individualiste. Ce n’est ni émancipatreur pour les femmes, ni pour les homosexuels, ni pour les intersexes qui sont invisibilisées et instrumentalisées quand ielles ne sont pas enjoint à se conformé à des stéréotypes sexistes qui se trouvent renforcés.

    Preciado ne croit d’ailleurs par réellement à son discours car si il est vraiment un homme comme le revendique les trans, alors il aurai pu avoir la décence de ne pas mansplanner le 8 mars.

  • Appel interassociatif et intersyndical du 9 mars 2021 : Il faut dissoudre l’Ordre des médecins - SMG, Syndicat de la Médecine Générale


    https://smg-pratiques.info/appel-collectif-du-9-mars-2021-il-faut-dissoudre-l-ordre-des-medecin

    Organisations signataires :
    Syndicat de la Médecine Générale - Syndicat National des Jeunes Médecins Généralistes - Mouvement d’Insoumission aux Ordres Professionnels - Union Fédérale des Médecins, Ingénieurs, Cadres et Techniciens—CGT - Association Santé et Médecine du Travail - Pour Une Meuf – Méchandicapés - Stop Violences Obstétricales et Gynécologiques - Touche Pas à Mon Intermi_ente - Collectif National des Droits Des Femmes - Marche Mondiale des Femmes de France - Association LaSantéUnDroitPourTous – Coopération Patients - Les Dévalideuses - CLE Autisme - Association européenne contre les Violences faites aux Femmes au Travail - UGICT CGT - Héro-ïnes 95 - Compagnie Les A_entives - Globule Noir - Parents et Féministes - A Nos Corps Résistants - Coordination des Associations pour le Droit à l’Avortement et à la Contraception – Coordination Action Autonome Noire – Le Village 2 Santé Sud Santé Sociaux.

  • La petite dernière, de #Fatimaa_Daas

    #Lecture par Marion Aeschlimann, 2020 :

    Je m’appelle Fatima Daas. Je suis la mazoziya, la petite dernière. Celle à laquelle on ne s’est pas préparé. Française d’origine algérienne. Musulmane pratiquante. Clichoise qui passe plus de trois heures par jour dans les transports. Une touriste. Une banlieusarde qui observe les comportements parisiens. Je suis une menteuse, une pécheresse. Adolescente, je suis une élève instable. Adulte, je suis hyper-inadaptée. J’écris des histoires pour éviter de vivre la mienne. J’ai fait quatre ans de thérapie. C’est ma plus longue relation. L’amour, c’était tabou à la maison, les marques de tendresse, la sexualité aussi. Je me croyais polyamoureuse. Lorsque Nina a débarqué dans ma vie, je ne savais plus du tout ce dont j’avais besoin et ce qu’il me manquait. Je m’appelle Fatima Daas. Je ne sais pas si je porte bien mon prénom. (Éditions Noir sur blanc)

    https://soundcloud.com/radio-traces/la-petite-derniere-de-fatimaa-daas

    #extraits #son #livre

    Présentation du livre sur le site de l’éditeur :
    http://www.leseditionsnoirsurblanc.fr/la-petite-derniere-fatima-daas-9782882506504

  • Révélations sur une épidémie de cancers en Polynésie française
    https://disclose.ngo/fr/article/revelations-sur-une-epidemie-de-cancers-en-polynesie-francaise

    Dans un rapport confidentiel obtenu par Disclose, le gouvernement polynésien reconnaît l’existence d’un « cluster de cancers de la thyroïde » liés aux essais nucléaires français.

  • A Cléon, un enfant exclu de son collège pour avoir dénoncé son professeur de sport
    7 mars 2021 Par Rémi Yang
    https://www.mediapart.fr/journal/france/070321/cleon-un-enfant-exclu-de-son-college-pour-avoir-denonce-son-professeur-de-

    Dans la périphérie de Rouen, un élève de sixième a dû changer d’établissement après avoir relayé une accusation d’agression sexuelle de la part d’un prof de sport. Plusieurs enfants avaient pourtant témoigné. L’enseignant nie en bloc.

    Cléon (Seine-Maritime).– La famille Jaafar n’arrive toujours pas à digérer la situation. Dans le salon de leur maison à Cléon, en Normandie, Karim et Chérifa tournent l’affaire en boucle. À la colère s’ajoutent le dégoût, la tristesse, l’incompréhension et un profond sentiment d’injustice, alors que leur fils rentre tout juste de l’école. L’année dernière, après le déconfinement et la rentrée de mai, Ibrahim*, 12 ans, a dû prendre ses marques dans un nouvel établissement après avoir été définitivement exclu du collège Jacques-Brel de Cléon (Seine-Maritime).

    Cet élève aujourd’hui en cinquième, dynamique en classe, « intelligent et mature », comme l’a décrit sa professeure de français lors du conseil de discipline, est accusé par le proviseur d’avoir porté « atteinte à l’intégrité morale » de son professeur de sport, Monsieur L.

    Le 16 janvier 2020, lors d’une séance de gymnastique, Ibrahim raconte avoir vu l’enseignant tenir une élève par l’entrejambe lors d’une démonstration de parade. Après en avoir discuté avec d’autres camarades qui ont vu la même chose, il décide d’en parler à d’autres professeurs. Madame R., sa professeure de français, fait remonter l’information au principal, Monsieur C., qui déclenche une enquête interne.

    Le lendemain, l’infirmière scolaire convoque quatre élèves, dont la fille qui aurait été victime des attouchements. Dans son témoignage, que Mediapart a pu consulter, l’infirmière écrit que cette dernière nie avoir été touchée. Cependant, l’infirmière confie qu’un « autre élève [lui] a aussi dit que Monsieur L. l’avait touché au niveau des fesses pendant qu’il était sur un gros ballon de gym ».

    Pendant les jours qui suivent, le chef d’établissement recueille les témoignages d’Ibrahim et de ses amis, de la victime supposée et du professeur de sport. Il fait signer aux élèves des rapports d’incident que nous avons pu consulter. Dans cinq d’entre eux, certains collégiens affirment avoir été victimes d’attouchements ou vu le professeur « toucher les fesses » d’autres élèves.

    « Je fais ce rapport, car j’entends que Monsieur L. a fait des attouchements aux parties intimes pendant le cours de sport. Peut-être que pour les autres il n’a pas fait exprès, mais moi il me l’a fait une fois l’année dernière en cours d’UNSS [l’Union nationale du sport scolaire regroupe les associations sportives des collèges et lycées et prône une éducation sportive, humaniste et citoyenne. Les profs d’EPS doivent assurer trois heures de cours hebdomadaires – ndlr] », écrit un élève.

    Certains élèves de sixième prennent la défense de Monsieur L. et dénoncent des « rumeurs » en évoquant des « gestes mal interprétés ».

    Dans la foulée, Ibrahim, alors délégué suppléant, rédige une pétition affirmant que « Monsieur L. est un pervers », qu’il fait signer aux élèves qui le veulent. « Le proviseur nous avait dit que les accusations étaient graves et qu’on ne pouvait pas les proférer sans preuve », se souvient Ibrahim. « Pour mon fils, la pétition était une preuve qu’il allait fournir. Du côté de la direction, ça a été interprété comme une cabale contre le professeur », complète sa mère.

    Le collège Jacques-Brel à Cléon (Seine-Maritime). © RY Le collège Jacques-Brel à Cléon (Seine-Maritime). © RY

    Un petit mois plus tard, Monsieur C. convoque un conseil de discipline pour statuer sur le cas d’Ibrahim, à l’issue duquel l’élève est renvoyé définitivement. Peu de temps après, Monsieur L. dépose une plainte contre Ibrahim pour « dénonciation calomnieuse », dans laquelle il estime que les accusations d’Ibrahim lui portent préjudice « à double titre », étant donné qu’il dirige la filière gym du collège en plus d’y être professeur. « J’ai cru comprendre que le problème venait du fait que je leur demandais de se toucher », explique alors le prof, qui affirme, dans sa plainte consultée par Mediapart, avoir rappelé à ses élèves « l’intérêt des parades pour des raisons de sécurité » et que « cela faisait partie du programme des compétences travaillées ».

    Contacté par Mediapart, le prof de sport a indiqué que le rectorat ne l’autorisait pas à répondre à nos questions.

    La famille Jaafar, elle, souligne la sévérité de la sanction prononcée contre leur fils.

    « C’est un enfant ! Il peut très bien avoir mal interprété un geste, mais il aurait fallu en parler avec nous, lui expliquer avec pédagogie que c’était une démonstration pour une parade », soulève sa mère, Chérifa.

    « Renvoyer un élève de sixième, c’est extrêmement rare, commente Lydia Advenier, membre de l’exécutif du Syndicat national des professionnels de la direction de l’éducation nationale (SNPDEN). C’est d’une violence, par rapport à ce qui lui est reproché… » La syndicaliste s’étonne de la gestion interne et du « traitement disproportionné » de ce dossier.

    Dans ce genre de situation, elle juge nécessaire de recourir au proviseur de vie scolaire, un intermédiaire entre le rectorat et l’établissement dont l’un des rôles est d’apporter un point de vue extérieur. Elle estime néanmoins que le proviseur aurait agi selon son bon droit. « La manière dont on exerce ce métier dépend vraiment de notre personnalité. Chaque chef d’établissement ne va pas traduire un élève en conseil de discipline pour la même raison. »

    Des signalements antérieurs évoqués

    Le traitement du cas d’Ibrahim soulève également un débat sur les signalements des violences sexuelles. Le chef d’établissement aurait-il dû faire remonter le signalement d’Ibrahim au procureur de la République plutôt que d’enquêter en interne ?

    Dans une circulaire éditée en 2006 concernant les conduites à tenir en cas de « révélation d’un élève à un adulte de l’EPLE (établissement public local d’enseignement) concernant une agression sexuelle par une personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions », le ministère précise : « Il n’est jamais procédé à des interrogatoires ni à des investigations. »

    Contacté, le ministère de l’éducation nationale rappelle que « si, en qualité de fonctionnaire, dans l’exercice de ses fonctions, [tout personnel de l’éducation nationale] acquiert la connaissance d’un crime ou de délit, il est tenu d’en aviser sans délai le procureur de la République (article 40 du code de procédure pénale) ».

    Pourtant, le rectorat de Rouen estime que la procédure a bien été respectée. « En l’espèce, au vu des différents témoignages recueillis, les accusations portées par certains élèves ne sont pas fondées. Il n’y avait pas lieu, dans cette situation, d’appliquer l’article 40 », explique l’académie de Normandie.

    Une lecture des événements que Me Zadourian, l’avocate de la famille Jaafar, ne partage pas. « Ce n’est ni aux professeurs, ni aux chefs d’établissement, ni au rectorat de définir si ce que l’enfant a vu est bien constitutif d’un crime ou d’un délit. Ils ne peuvent pas se substituer au procureur de la République, fait-elle valoir. Ici, la professeure de français aurait dû signaler les faits au procureur dès que les enfants lui en ont parlé, avant même de faire remonter au chef d’établissement. »

    Surtout, les signalements émis par Ibrahim et ses camarades de classe ne seraient pas les premiers concernant Monsieur L. Pendant le conseil de discipline, Fatoumata*, déléguée des élèves, a affirmé qu’en 2018, alors qu’elle était en sixième et que Monsieur C. n’était pas encore à la tête de l’établissement, seize fiches de signalement provenant de différentes classes auraient été remises au conseiller principal d’éducation (CPE). Mais le témoignage de Fatoumata n’a pas été retenu, car elle était membre du conseil de discipline. « Lorsque j’en ai parlé, je me souviens que tous les professeurs étaient surpris, rembobine-t-elle. Le CPE [lui aussi présent au conseil de discipline – ndlr] a juste dit qu’il ne s’en rappelait pas. »

    Lorsque Ibrahim, son père et Me Zadourian sont sortis de la salle le temps de la délibération du conseil de discipline, Fatoumata raconte avoir subi des pressions. « Les autres professeurs m’ont dit de me taire, sans m’expliquer. »

    « Notre société est en pleine révolution, avec #MeToo et ce qu’il se passe avec les enfants en ce moment… Et là où l’école est censée être leur temple, la parole de l’enfant passe derrière tout. Même pire, elle est sanctionnée », déplore Lynda Advenier.

    Depuis l’exclusion du petit Ibrahim, la famille Jafaar se bat pour que la sanction soit effacée du dossier scolaire de leur fils. « On ne veut pas qu’il retourne dans ce collège, mais une exclusion définitive peut s’avérer très handicapante au moment du choix de son lycée ou sur Parcoursup, relève Chérifa. Et puis, il s’agit aussi d’obtenir justice pour Ibrahim, qu’il comprenne qu’il n’a rien fait de mal. »

    Après être passée devant le rectorat de Rouen, qui a confirmé la décision du conseil de discipline, la famille Jaafar a déposé un recours pour excès de pouvoir au tribunal administratif. En parallèle, ajoute leur avocate, Chérifa et Karim prévoient de porter plainte contre l’établissement pour harcèlement et subornation de témoin.

    • réponse de lola lafon sur instagram
      https://www.instagram.com/p/CMJsa_Vg92p/?igshid=1bms22d940jh8

      Quelle sale idée. Celle de publier la lettre d’un violeur en une. Aujourd’hui. Quelle consternante idée de remettre la balle au centre entre une victime et son agresseur : un partout. Une pleine page c’est le pouvoir. Le langage c’est le pouvoir et ça, il maîtrise, le violeur. Il a lu des livres féministes. Il a fait des études. Il sait dire.
      A elle, on laisse le flou du « ressenti ». A lui, l’analyse sociologique, psychologique. Comme c’est original.
      Aux victimes, les collages dans la rue. Ces collages arrachés, discutés, estimés trop ceci et pas assez cela.
      Aux violeurs, les unes officielles.
      Quelle banalité, cette lettre. On est des milliers à l’avoir reçue, cette lettre. Des milliers à avoir dû, après avoir été violées, endosser le rôle de celle qui écoute, qui est sommée de « comprendre » pourquoi le viol a eu lieu. Celle qui doit se partager en deux après avoir été écrasée.
      Lettre qui pleurniche et qui insinue, quand même, qu’il y a des raisons au viol.
      Sache le, @Libé, recevoir une lettre de son violeur, ça brouille tout dans la tête de la victime. Ça, n’importe quel psy, n’importe quel avocat, flic, n’importe qui d’habitué à recevoir les plaintes pour viol conjugal, le confirmera.
      Les lettres rationalisent. Elles expliquent. Subrepticement, elles mettent deux discours à égalité. Sache le, @Libé, cette lettre ressemble en tous points à celle que j’ai reçue après.
      La lettre que j’ai reçue, #Libé, m’a tenue au silence pendant deux ans. J’ai pris cher. Cher à entendre qu’il m’aimait trop, c’était pour ça. Qu’il était malheureux c’était pour ça. Que la société l’avait mal éduqué, c’était pour ça. Que sa vie était détruite.
      Cher à entendre les autres, autour de moi, compter les points :
      peut être que vous devriez discuter
      peut être que c’est un malentendu
      tu ne vas quand même pas l’envoyer en prison ?

      Aujourd’hui, je pense à celles qui ne sont pas sorties du silence et qui viennent de s’y voir renvoyer. Ce choix « courageux » ne l’est pas, pas plus qu’il n’est novateur.
      C’était l’ordre des choses et il est en train de se casser la gueule. Et c’est réjouissant et beau et inéluctable. Aujourd’hui, on est le #8Mars.

    • explication de Valérie rey robert :
      https://threadreaderapp.com/thread/1368863126133878784.html

      Puisque cela n’est pas clair pour tout le monde, essayons d’expliquer pourquoi publier la lettre d’un violeur est une mauvaise idée (thread).
      – Toutes les raisons qui poussent un homme à violer sont développées depuis de nombreuses années par les féministes. Son point de vue situé n’apporte rien.
      – L’auteur ne consacre par une ligne à s’excuser, sa lettre est consacrée à sa défense. C’est une lettre habile, bien foutue, perverse puisqu’il y explique que
      1. c’est la relation (entre lui et la victime qui a causé le viol, quasi inéluctable)
      2. c’est sa socialisation comme homme qui l’a fait violer. c’est le passage le + pervers puisqu’il dit in fin à chaque homme qui lit « allons tu sais que ca pourrait t’arriver.. c’est banal, on fait tous ca... »
      3. c’est le fait qu’il soit lui même une victime de viol.
      Il fait d’une possibilité un déterminisme absolu, définitif.
      Quand on a des regrets (jamais exprimé dans ce texte), on va voir la police, pas un grand quotidien national.
      Pourquoi publier cette lettre ? vous le dites @libe vous vouliez « complexifier » le débat alors que ce type ne fait que reciter son bréviaire féministe mais il semble que la parole d’un violeur soit + complexe que celle d’une féministe.
      Parce que vous vous vautrez vous même dans la culture du viol, en supposant que c’est étonnant qu’un violeur sache bien écrire et formuler sa défense (parce que c’est une lettre pour préparer sa défense ni + ni moins).
      vous avez offert un boulevard à une peine minime pour ce type s’i lest jugé et vous savez quoi ? ca va marcher. la justice prendra en compte ses regrets « si sincères », sa « demarche courageuse » alors qu’on est juste face à un pervers en toute puissance.
      ca m’attriste à un point..
      Peut-on publier des propos de violeurs, de sexistes ? pas sans un contexte, pas sans analyser les dits propos. pas sans offrir au lectorat des pistes de compréhension du texte.
      Pourquoi un violeur veut il être publié dans libé ? Qu’est ce que ca dit de lui ? pourquoi ce besoin ?
      Enfin je rappelle que ce garçon n’est pas jugé (la question serait -peut-être- différente s’il l’était). Là cette lettre va aussi participer à sa défense, elle sera servie à son dossier (sans aucun doute positivement).

    • Secret @jjalmad sur twitter
      https://threadreaderapp.com/thread/1368830181088051205.html

      Je vais revenir sur un autre aspect de la publication de la lettre en Une par @libe.

      Quand on juge un homme pour viol, même s’il reconnaît les faits, c’est toujours extrêmement compliqué d’appréhender sa sincérité, sa « prise de conscience », la réalité de l’empathie pour sa victime.
      Et pourtant au tribunal, on dispose du détail des récits des faits et donc on peut voir si il paraît dire la vérité sur tout, ou minimise etc.

      On dispose aussi de ses auditions à différents moments, d’expertise psychiatrique et psychologique, du récit détaillé de la victime sur son comportement notamment après les faits (a t il nié, s’est il excusé, a t’il continué de paraître dans les lieux qu’elle fréquente, etc etc)

      Et même là c’est compliqué de faire la part entre sincérité, minimisation par calcul ou mécanisme de défense psy (sachant qu’une prise de conscience peut entraîner un effondrement dépressif donc oui il y a des mécanismes de défense), ou carrément stratégie de défense intéressée et froid calcul parce que face à des preuves très solides on a capté que reconnaître est mieux pour escompter une mince peine.

      On peut aussi imaginer qu’un agresseur qui reconnaît et s’excuse auprès de sa victime espère que ça la dissuaderait de déposer plainte.

      Bref. Même en ayant tout le détail de l’affaire, des expertises, du recul sur les faits et l’évolution de l’agresseur c’est archi compliqué de se faire une idée.
      Et il n’est pas rare que nous ayons des appréciations différentes entre collègues et/ou avec les jurés.
      Du coup publier cette lettre, telle que, sans confrontation plus avant à la réalité des faits, de son comportement, sans recul ni vérification, c’est encore une fois partir du principe que dès lors qu’il le dit, c’est que c’est sincère.

      Je ne peux pas m’empêcher de faire le parallèle de la légèreté avec laquelle cette lettre est publiée, et les vérifications et recoupements que ne vont pas manquer de faire des journalistes avant de publier le récit d’une victime.

      J’y vois en plus un biais de classe énorme : il s’exprime bien, a une belle plume, manie tous les codes et discours féministes. Donc ça passe, et c’est réinterprété comme un truc forcément puissant dérangeant, sincère etc.

      J’ajoute que du côté de la victime c’est pareil, les ressentis et attentes évoluent. On peut avoir une victime soulagée de la reconnaissance des faits initialement, qui est très affectée ensuite en se rendant compte que l’auteur minimise ou quoi.

      Donc vraiment ici non seulement la publication de cette lettre n’apporte absolument rien à la compréhension des mécanismes du viol, mais se vautre dans une analyse simpliste à base de « il le dit donc c’est intéressant en soi même sans vérification et mise en perspective critique » et « la victime est ok à l’instant T donc ça me dédouane de toute analyse et précautions vis à vis d’elle ».
      Bah non en fait.

    • La parole des violeurs et ce que la presse en fait

      « Libération » a exprimé « son profond regret » en réaction aux protestations contre la publication d’une tribune d’un jeune homme reconnaissant un viol conjugal. Au-delà de la polémique, ce choix pose une vraie question journalistique sur la couverture médiatique des violences sexuelles.

      https://blogs.mediapart.fr/lenaig-bredoux/blog/090321/la-parole-des-violeurs-et-ce-que-la-presse-en-fait

  • Erdoğan, architecte : la nouvelle fracture turque - Le Grand Continent
    https://legrandcontinent.eu/fr/2021/03/07/erdogan-architecte-la-nouvelle-fracture-turque

    Le seul contact qu’ils ont avec les classes ouvrières se fait par le biais des services qu’ils reçoivent des serveurs, des grooms, des porteurs, du personnel de sécurité et des caddies. Plus intimes et plus personnelles sont les relations qu’ils nouent avec les nourrices, les domestiques, les chauffeurs et les jardiniers. Pour les Turcs blancs, enfermés dans leurs ghettos dorés, la pauvreté est souvent associée à la criminalité. Dans un tel contexte, où le sentiment d’identité et d’appartenance est confiné et lié à un lieu sans identité, l’ordre et l’homogénéité sont les principes dominants. Les résidents de ces complexes résidentiels fermés ont non seulement des liens très faibles avec Istanbul et les différents groupes sociaux de la ville, mais ils vivent dans une bulle privatisée : une société de gestion privée organise les services nécessaires aux résidents et s’occupe de l’entretien et de la sécurité. Du point de vue de la municipalité locale, le développement de la communauté privée présente l’avantage que tous les services sont payés généreusement.

  • ❝Au Sénégal, une révolte populaire s’ébranle contre la « recolonisation économique »
    7 mars 2021 Par Fanny Pigeaud - Mediapart.fr"
    https://www.mediapart.fr/tools/print/945517


    Manifestations tournant à l’émeute, dans la quartier de Colobane, le 5 mars 2021, à Dakar, après l’arrestation de l’opposant Ousmane Sonko. © Seyllou / AFP
    L’arrestation du principal opposant Ousmane Sonko a déclenché une vague de colère inédite, avec en toile de fond une remise en cause d’un système de gouvernance favorisant les intérêts étrangers. De nombreux magasins Auchan et des stations Total ont été pillés ou saccagés. Au moins quatre personnes ont été tuées.
    Depuis plusieurs mois la tension montait. Et ce mercredi 3 mars au Sénégal, l’arrestation du député Ousmane Sonko, opposant au président Macky Sall, a eu le même effet qu’une étincelle près d’un baril de poudre : une explosion qui part dans tous les sens.

    À Dakar et dans plusieurs autres villes, des milliers de jeunes ont dit leur colère, scandant « Libérez Sonko ! », « Dëkk bi Sonko ko moom ! » (« Ce pays appartient à Sonko », en wolof) et réclamant plus de démocratie, de justice et de considération. Ces manifestations spontanées se sont rapidement transformées en émeutes. Des biens privés, dont des magasins Auchan et des stations Total, des bâtiments abritant des médias, le domicile de membres ou de proches du pouvoir, ainsi que des bâtiments publics ont été pillés ou brûlés entre mercredi et vendredi.

    Selon un bilan officiel vendredi soir, quatre personnes ont été tuées dans des affrontements avec les forces de sécurité. Amnesty International a dénoncé des arrestations arbitraires, plusieurs activistes connus font partie des personnes interpelées, et la présence d’hommes « en tenue civile, armés de gourdins » aperçus « aux côtés des forces de sécurité » qui ont « pourchassé des manifestants », ainsi que la coupure du signal de chaînes de télévision.

    Cette situation insurrectionnelle n’a pas de précédent dans l’histoire récente du Sénégal. Les derniers épisodes de violences, à la fin des présidences d’Abdou Diouf (1981-2000) et d’Abdoulaye Wade (2000-2012), n’avaient pas atteint une telle ampleur.

    Lorsqu’il a été arrêté, Ousmane Sonko, 46 ans, classé troisième à l’élection présidentielle de 2019, se rendait au palais de justice de Dakar, où il était convoqué dans le cadre d’une plainte pour « viols et menaces de mort », déposée début février par l’employée d’un salon de massage. Ses avocats et partisans considèrent cette procédure comme le résultat d’un « complot mal ficelé » visant à l’éliminer de la course pour la présidentielle de 2024.

    Dès le dépôt de cette plainte, les autorités ont fait installer un barrage filtrant autour du domicile du leader du parti Pastef (Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité) et obtenu de manière accélérée la levée de son immunité parlementaire, confortant les soupçons d’une machination politique. De fait, Ousmane Sonko dérange Macky Sall, à qui la rumeur prête l’intention de se représenter pour un troisième mandat (non prévu par la Constitution). Il est devenu son principal opposant depuis la nomination, fin 2020, de l’ex-premier ministre Idrissa Seck au Conseil économique, social et environnemental.

    Cet ancien inspecteur des impôts, radié de la fonction publique pour avoir accusé publiquement des personnalités d’avoir bénéficié d’avantages fiscaux illégaux, dont le frère de Macky Sall, tient un langage nouveau dans le champ politique sénégalais.

    Manifestations tournant à l’émeute, dans la quartier de Colobane, le 5 mars 2021, à Dakar, après l’arrestation de l’opposant Ousmane Sonko. © Seyllou / AFP
    Plaidant pour une meilleure gouvernance, dénonçant la gestion du pétrole et du gaz par les autorités, il milite aussi pour plus de souveraineté économique et monétaire – le Sénégal est membre de la zone franc, contrôlée par l’État français. Il est devenu l’un des rares hommes politiques d’Afrique francophone à demander une refonte des relations avec la France, fustigeant aussi une « bourgeoisie compradore » qui profite d’un système construit pour satisfaire l’étranger et une minorité de Sénégalais. « Il n’y a pas de sentiment antifrançais. Il y a un sentiment pro-africain, expliquait-il en 2019 à ses collègues députés. Nous n’avons rien contre la France ou les États-Unis, mais nous avons des intérêts à gérer. »

    C’est ce discours qui l’a rendu populaire auprès d’une partie de la jeunesse (les moins de 20 ans représentent plus de la moitié des 16 millions d’habitants), de plus en plus sensible à l’idée de mettre fin à un « système néocolonial », à « la domination étrangère, surtout française », comme l’a récemment redit un membre du collectif Frapp (Front pour une révolution anti-impérialiste populaire et panafricaine). Car depuis que Macky Sall est au pouvoir (élu en 2012, puis réélu en 2019 à l’issue d’un scrutin controversé), il entretient des liens étroits avec Paris et de nombreuses entreprises françaises se sont installées dans le pays, donnant l’impression d’une « recolonisation économique » de la France, certaines bénéficiant de gros contrats aux retombées faibles pour la population.

    Le projet d’un train express régional (TER) devant relier Dakar à l’aéroport international Blaise-Diagne illustre bien ce à quoi assistent les Sénégalais. Conçu pour un prix exorbitant (1,3 milliard d’euros pour 55 kilomètres), il a été construit et doit être exploité par des entreprises essentiellement françaises, dont Engie, Thales, Eiffage, la SNCF, la RATP, Alstom, etc.

    Le Sénégal s’est, de surcroît, endetté auprès de la France pour 230 millions d’euros afin de financer cet ouvrage, dont la construction a bouleversé le quotidien de milliers de personnes. Prévu pour rouler à partir de 2019, ce train, qui ne sera vraisemblablement accessible financièrement qu’à une infime partie des citoyens, n’est toujours pas en service. Pendant ce temps, la pauvreté touche près de 40 % de la population.

    Sans perspectives, des milliers de jeunes tentent d’émigrer : les départs par l’océan vers les îles Canaries ont beaucoup augmenté ces derniers mois. Le nombre de morts aussi : plus de 500 personnes se sont noyées dans des naufrages entre octobre et novembre 2020. Un chiffre record, probablement en deçà de la réalité. Les populations ne font qu’emprunter « le même chemin que suivent leurs ressources », soulignait Ousmane Sonko en 2019 dans un discours à l’Assemblée nationale. Tant que des intérêts étrangers viendront « piller nos ressources avec la complicité de nos élites complexées, de nos leaders, on ne pourra jamais régler cette question » de l’émigration clandestine, avait-il ajouté.

    Ce n’est donc pas un hasard si des magasins Auchan, des boutiques Orange et des stations Total ont été prioritairement visés par les émeutiers. Déjà, en décembre 2020, des centaines de pêcheurs manifestaient leur détresse après le renouvellement des accords de pêche avec l’Union européenne, estimant qu’ils leur étaient défavorables.

    En 2018, l’économiste Ndongo Samba Sylla avait prévenu dans une interview à la radio privée Sud FM : « Les contradictions s’accumulent. On a une jeunesse qui est là, de plus en plus nombreuse, et on a un système politique qui dit à ces jeunes : “Vous n’avez pas d’avenir.” Cette jeunesse ne va pas pouvoir rester là, à ne rien faire. Tôt ou tard, si on ne va pas vers des réformes audacieuses pour plus de démocratie, plus de souveraineté, plus de libertés, le système va imploser. » Ainsi, le « modèle démocratique sénégalais », tant vanté, révèle aujourd’hui ses nombreuses failles. Les mesures répressives prises dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19, avec l’instauration d’un couvre-feu, ont fissuré un peu plus l’édifice : pénalisant les nombreux travailleurs du secteur informel, elles ont renforcé les frustrations.

    Pour l’instant, le pouvoir maintient sa ligne. Le ministre de l’intérieur, Antoine Félix Abdoulaye Diome, a blâmé, vendredi soir, les manifestants, évoquant des « actes de nature terroriste » et accusant Ousmane Sonko d’être responsable des violences. Ce dernier était toujours en garde à vue dimanche matin, après avoir été inculpé vendredi pour « participation à une manifestation non autorisée » et « troubles à l’ordre public », en lien avec les échauffourées qui ont eu lieu avant son arrestation entre ses partisans et les forces de l’ordre.

    Les partis d’opposition et mouvements de la société civile ont prévu de nouvelles manifestations lundi.
    #Sénégal #Néocolonial #freesenegal

  • L’affaire Chénier. Sommaire
    Publié le 07/07/2019 par Malaises dans la lecture
    https://malaises.hypotheses.org/1003

    La publication d’une lettre ouverte par des agrégatifs⋅ves de Lettres à propos d’un poème de Chénier au programme du concours a suscité des réactions et réponses qui se sont quelque peu multipliées sur une période de deux ans. Les textes se répondent généralement et sont tous en ligne : nous en proposons donc un sommaire pour une meilleure lisibilité. Celui-ci sera actualisé si de nouveaux textes sont publiés.

    https://www.youtube.com/watch?v=itAiliOWewc

    #littérature #culture_du_viol #backlash #inversion_patriarcale

  • Au vieux pays de mes pères

    Il y a milles histoires de #collaborations qui sont terriblement françaises, mais celle-ci, à première vue, est plutôt bretonne. C’est celle de Mathieu Cabioch, cultivateur, homme pieux, père, grand-père, arrière-grand-père. Et collabo, aussi ?

    Cette histoire, c’est une histoire de #transmission. De ce que l’on se passe, de génération en génération, pour construire le #récit_familial.

    C’est l’histoire d’une quête, aussi. Celle du journaliste #Thomas_Rozec, pour trouver la vérité dans ce que ses parents et grand-parents lui ont raconté de ses ancêtres. C’est tout l’enjeu de cette série documentaire en 5 épisodes, réalisée par #Quentin_Bresson.

    « Au vieux pays de mes pères » est une enquête à travers le #Finistère, le temps, et les souvenirs.

    https://binge.audio/podcast/programme-b/au-vieux-pays-de-mes-peres

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Breiz_Atao
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Marie_Perrot

    #Breiz_Atao #ww2 #seconde_guerre_mondiale #nazisme #eglise_catholique #Jean-Marie_Perrot

  • https://www.youtube.com/watch?v=d4mwwFsfYvI

    La collaboration entre McFly et Carlito et Emmanuel Macron pour « promouvoir les gestes barrières » s’inscrit dans la campagne du président pour briguer un deuxième mandat en 2022.
    Mais derrière l’évidente opération de communication, de multiples zones d’ombres.
    Pourquoi des dizaines de milliers de commentaires ont permis d’augmenter artificiellement le nombre de vues de la vidéo ? Quelle est la nature du syndicat étudiant qui bénéficiera des fonds levés ? Comment sont financées les vidéos de partenariat avec des influenceurs ? Quelle est la limite entre information gouvernementale et propagande partisane ? Quel est le rôle de Google dans ces partenariats ?
    Derrière la vidéo « divertissante » de Mcfly et Carlito, Blast et Le Vent Se Lève décryptent les rouages d’une opération politique historique, qui pose des problèmes démocratiques majeurs.

  • C’est une première dans l’histoire judiciaire et politique française. !

    #Bismuth #Sarkozy : Ils sont déclarés coupables de corruption et de trafic d’influence. « Ils avaient parfaitement conscience du caractère frauduleux de leurs agissements. » « Nicolas Sarkozy était le garant de l’indépendance de la justice. Il s’est servi de son statut d’ancien PR pour gratifier un magistrat ayant servi son intérêt personnel. Au surplus, Nicolas Sarkozy est avocat. » a estimé la présidente de la chambre.

    La présidente de la 32e chambre précise que la partie ferme de la peine pourra être aménagée à domicile, lors d’un placement sous surveillance électronique.

    source : Vincent Vantighen service justice 20minutes.fr

    Malgré l’énergie qu’il a déployé à influencer la justice, Sarkozy prend 3 ans dont 1 ferme. Ce n’est pas cher payé pour des millions, une guerre et un éventail de magouilles plus large que l’Atlantique mais il reste plein d’affaires...

    En passant, ça ne dérange personne que le ministre de la justice ait porté plainte pour protéger un délinquant qui vient d’être reconnu coupable de corruption de magistrat ?
    #DupondMoretti #Sarkozy

    Ah et c’ est le moment de passer de la théorie à la pratique...

    https://twitter.com/realmarcel1/status/1366377716140941312

    Ah oui, mais non.

    • La France : une prison à ciel ouvert

      Sarkozy va pouvoir passer tranquillement son année de prison chez lui avec un bracelet électronique. Quant à l’ensemble des français, nous subissons une peine équivalente. Depuis un an nous sommes assignés à un régime de prisonnier : libres de travailler mais privés de vivre, de sortir, de nous déplacer, de nous réunir... Notre crime ? faire partie des riens, des invisibles, des esclaves indispensables pour créer de la valeur mais dont la vie n’a aucune importance. Nos aspirations et nos besoins restent inaudibles, nous sommes les invisibles, la ressource humaine sans visage, sans volonté, sans avis, les Untermenschen du XXIe siècle.

      La dérive arrogante et autoritaire des élites peine à se cacher. Jusqu’à quand vont-ils exercer leur entre soi de caste privilégiée, étaler leur corruption éhontée, répandre leur insolence, répondre aux questions légitimes par une vague de répression policière disproportionnée, sans déchaîner une saine et juste colère ?

      135 euros d’amende, voilà la seule réponse, le leitmotiv qui résume toute tentative de dialogue ! Une folie répressive, irrationnelle s’est abattue sur une population réduite au silence, dont on traque les moindres faits et gestes !

      J’en appelle à observer ce qui se passe en Inde en ce moment : des centaines de millions de paysans en colère, des conseils populaires partout dans le pays, et la détermination de monter au Parlement démettre le pouvoir néolibéral pour décider au nom du peuple, ce qui est bien pour la population, loin de toute logique de l’argent roi !

      Cette initiative populaire semble de plus en plus la seule issue possible face à un Macron bunkérisé qui décide seul, un gouvernement d’incapables, falots et arrogants, et un pouvoir préfectoral qui s’enferme dans une intransigeance coupable !

      Les gilets jaunes ont été un avertissement ; la vague qui se prépare risque de ressembler davantage à un tsunami !

      Avis aux surfeurs !

      https://blogs.mediapart.fr/le-moine-copiste/blog/010321/la-france-une-prison-ciel-ouvert

    • La partie ferme doit être purgée à domicile sous surveillance électronique, stipule le jugement.

      Les trois condamnés ont annoncé leur intention de faire appel du jugement.

      En décembre, le PNF avait requis 4 ans dont 2 fermes.

  • Travail associatif | Autoradio
    http://autoradio.dawaband.net/index.php?saison=spcial&emission=FAG-TravailAssociatif

    Cette émission est née d’un atelier autour du travail associatif aux Rencontres de Radios Libres de l’été 2020. Vous y trouverez : un compte-rendu de l’atelier. un témoignage. des interviews de Lily Zalzett, co-autrice du livre « Te plains pas, c’est pas l’usine ! », et Rom, membre du syndicat ASSO de Solidaires une fausse pub pour le travail associatif. de la musique : 9 to 5 de Dolly Parton, Classe ouvrière de Zbeb, et Under Pressure de Queen et David Bowie. Durée : 1h. Source : Radio Dio

    http://autoradio.dawaband.net/medias/sons/spcial/mp3/2021-02-08-fag-travail-associatif.mp3

  • Quand la musique sert l’#émancipation des peuples

    Que ce soit au #Maroc, en #Algérie ou en #Tunisie, #chants et #chansons s’imposent comme des outils au service des #luttes politiques, sociales, contre l’oppression coloniale et postcoloniale. Passage en revue de quelques emblèmes avec les historiennes #Hajer_Ben_Boubaker et #Naïma_Yahi.

    Le champ des musiques contestataires étant immensément vaste, notre émission Maghreb express revient sur quelques-uns des symboles connus ou moins connus.

    Yal Menfi par exemple (qui signifie « Le Banni ») est l’une des chansons les plus emblématiques de la contestation durant la colonisation de l’Algérie par la France. Ce vieux chant d’exil kabyle, composé au lendemain de l’insurrection de 1871 et de la condamnation à la déportation en Kanaky (renommé Nouvelle-Calédonie par le colonisateur) de la plupart des meneurs, est devenu un hymne culte qui fait l’objet de multiples reprises.

    Emblème des souffrances endurées par les immigrés algériens de toutes les époques, il est ici repris par le grand Akli Yahiaten en 1962 passé par les geôles coloniales : Qulu l-umm-i Ma tbki… (« Dites à ma mère : “Ne pleure pas…” »)

    https://www.youtube.com/watch?v=DVKBelWpbzQ&feature=emb_logo

    Il a aussi été repris par 1, 2, 3 Soleils, le trio formé le temps d’un album par trois ténors du raï de l’Hexagone qui ont l’Algérie dans le sang et qui ont marqué la fin des années 1990 : Rachid Taha, Khaled et Faudel.

    https://www.youtube.com/watch?v=vhPz7h3UOHo&feature=emb_logo

    En Tunisie, la contestation de l’ordre colonial est passée par la création de la Rachidia, une association culturelle qui luttera pour la préservation des genres musicaux tunisiens contre l’influence française et s’imposera comme un espace pro-indépendance et nationaliste. L’ensemble de ces artistes deviendront l’élite culturelle de la Tunisie indépendante.

    Les femmes ne se sont pas tenues à l’écart. Elles ont pris le parti de défendre l’indépendance et la décolonisation, à l’image de l’une des plus grandes stars marocaines, une voix féminine incontournable : Hajja Hamdaouia, qui en 1953 compose Waili ya chibani, Ayta se moquant de la vieille gueule de Ben Arafa, illégitime remplaçant du roi Mohammed V.

    https://www.youtube.com/watch?v=B26vji-mguk&feature=emb_logo

    On ne peut pas ne pas évoquer aussi le mythe de Kharboucha, repris dans le chaabi marocain. Kharboucha, qui aurait réellement existé, s’est opposée avec courage au pouvoir central et à l’autorité du caïd Aïssa ben Omar en 1895, un homme très fortuné qui sera ministre puis collaborateur du protectorat français. Personnage devenu mythique, figure des luttes paysannes contre la tyrannie des gouverneurs locaux et des pouvoirs coloniaux au Maroc, elle continue de fasciner.

    https://www.youtube.com/watch?v=GhEUz5rFXeM&feature=emb_logo

    Paris sera une base arrière du vedettariat et une place forte de la dissidence, même après les indépendances. Pour pouvoir critiquer, et le fait colonial et l’autoritarisme des régimes post-coloniaux, la capitale française demeure un refuge pour faire caisse de résonance avec une chanson engagée y compris féminine. Plusieurs parcours de chanteuses en témoignent telles ceux de Naâma pour la Tunisie, Noura, Chérifa, Cheikha Remitti pour l’Algérie, Hajja Hamdaouia pour le Maroc, etc.

    https://www.youtube.com/watch?v=MQndYND2s9M&feature=emb_logo

    Les indépendances de la Tunisie, du Maroc en 1956 puis de l’Algérie en 1962 n’ont pas été synonymes d’ouverture démocratique. Dans les trois pays du Maghreb, des régimes autoritaires ont été instaurés. Les musiques sont alors devenues plus que jamais un outil de contestation, à l’image des créations du groupe Nass el Ghiwane, les Rolling Stones du Maroc. Né dans les années 1970 à Casablanca dans le quartier Hay Mohammadi, l’un des plus pauvres de la ville, Nass el Ghiwane va révolutionner la musique marocaine et maghrébine par son talent et son engagement à dénoncer toutes les oppressions, dont celles qui maintiennent les peuples dans la misère.

    https://www.youtube.com/watch?v=ntkLq_6eKmE&feature=emb_logo

    Dans des pays où les manifestations sont violemment réprimées, quand elles ne sont pas interdites, la musique est un langage, un relais des revendications sociales et politiques.

    Ces dernières années, des chants tels la Casa d’el Mouradia d’Ouled El Bahdja, des supporters ultras du club de football algérois l’USMA en Algérie, ont été annonciateurs de soulèvements populaires comme le « Hirak » algérien, qui a chassé l’ancien président Abdelaziz Bouteflika du pouvoir.

    https://www.youtube.com/watch?v=kHZviPhZQxs&feature=emb_logo

    Les stades, derniers lieux de rassemblement massif (avant que le Covid n’arrête tout), sont devenus des tribunes politiques par défaut, des lieux de contestation du pouvoir en place.

    Avec Fi bladi dhalmouni (« Dans mon pays frappé par l’injustice »), les ultras du Raja Casablanca au Maroc ont réalisé l’une des chansons contestataires qui s’est le mieux exportée ces dernières années, car elle peut s’appliquer aux situations des trois pays. Elle a été reprise durant le Hirak algérien, ainsi que durant des manifestations en Tunisie.

    https://www.youtube.com/watch?v=g8kT2_ktY2w&feature=emb_logo

    Au Maghreb, on peut d’ailleurs finir en prison pour une chanson contestataire. En mars 2013, le Tunisien Weld el 15, symbole de la liberté d’expression pour la jeunesse de son pays, est condamné à deux ans de prison ferme pour sa chanson Boulicia Kleb (« Les policiers sont des chiens »).

    https://www.youtube.com/watch?v=T_VYwkZmGIQ&feature=emb_logo

    Au Maroc, la liste est longue de ceux qui finissent dans les geôles pour une chanson. Ceux qui peuvent fuient le pays, à l’instar du rappeur El Haqed, membre actif du Mouvement du 20 février 2011, auteur d’un tube déchirant, Walou (« Rien »).

    https://www.youtube.com/watch?v=dT4yOKnT52I&feature=emb_logo

    https://www.mediapart.fr/journal/international/010121/quand-la-musique-sert-l-emancipation-des-peuples
    #musique #Maghreb #colonialisme #post-colonialisme #musique_et_politique
    #vidéo #interview #entretien

    ping @sinehebdo

  • L’anarcho-indigénisme
    Entrevues avec Gerald Taiaiake Alfred et Gord Hill

    Benjamin Pillet, Francis Dupuis-Déri,
    Gerald Taiaiake Alfred, Gord Hill

    https://lavoiedujaguar.net/L-anarcho-indigenisme-Entrevues-avec-Gerald-Taiaiake-Alfred-et-Gord-

    Au moins depuis la publication du livre L’Entraide de Pierre Kropotkine, au début du XXe siècle, les anarchistes s’intéressent aux sociétés autochtones qui offrent des exemples de sociétés plus égalitaires et moins autoritaires. En 2005, le Mohawk Gerald Taiaiake Alfred, originaire de Kahnawá:ke, a proposé le terme « anarcho-indigénisme » pour désigner cette dynamique de convergence entre les idées et les pratiques des autochtones traditionalistes et des anarchistes altermondialistes. Nous avons lancé, voilà quelques mois, un projet de livre sur ce thème, dont chaque chapitre sera une entrevue avec un ou une autochtone qui livrera ses réflexions au sujet de la politique, du pouvoir, de l’égalité et de la liberté, en se référant à ses expériences et à celles de sa communauté. Nous vous présentons ici des extraits de deux des entrevues déjà réalisées.

    Francis Dupuis-Déri et Benjamin Pillet
    Possibles, Montréal, hiver 2016

    Le livre L’Anarcho-Indigénisme, entretiens réunis et présentés par Francis Dupuis-Déri et Benjamin Pillet, a été publié en 2019 par les éditions Lux dans la collection « Instinct de liberté ».

    #autochtones #Canada #Québec #Mohawks #résistance #anarchisme #Kropotkine #Clastres #Graeber

    • https://www.luxediteur.com/catalogue/lanarcho-indigenisme

      Dès la fin du XIXe siècle, des anarchistes comme les géographes Pierre Kropotkine ou Élisée Reclus se sont intéressés aux peuples autochtones, qu’on a aussi qualifiés de sociétés sans État ». Au début des années 2000, un peu partout sur le continent américain, des Autochtones ont modelé la notion d’« anarcho-indigénisme » pour attirer l’attention des anarchistes sur l’histoire et, surtout, sur l’actualité de leurs luttes.

      Ce livre se veut une invitation à l’écoute, au dialogue et à l’engagement solidaire et complice. Dans leurs entretiens, Roxanne Dunbar-Ortiz, Véronique Hébert, Gord Hill, Freda Huson, J. Kēhaulani Kauanui, Clifton Ariwakehte Nicholas et Toghestiy révèlent ce que pensée et traditions autochtones et anarchisme ont en commun, sans nier les séquelles que le colonialisme a laissées jusque dans ce mouvement pourtant anti-autoritaire. Une vision du monde qui allie anticolonialisme, féminisme, écologie, anticapitalisme et anti-étatisme.

  • Français, quand vous parlez de laïcité, il s’agit en fait d’autre chose - EUROPE
    https://leblogcosmopolite.mystrikingly.com/blog/francais-quand-vous-parlez-de-laicite-il-s-agit-en-f

    Je suis né à Bruxelles et j’y habite depuis toujours. Comme la plupart des Bruxellois, comme les Wallons, les Suisses romands et les Québécois, je fais partie de cette francophonie périphérique dont la France est l’incontestable métropole culturelle. Mais nous avons entre nous un autre point commun : nous vivons dans des États – la Belgique, la Suisse, le Canada – structurellement multiculturels et dont la majorité de la population appartient au monde anglo-saxon ou germanique. Et c’est de ce point de vue, cosmopolite par nature et donc culturellement désenclavé, que j’envisage la société française. Souvent avec sidération.

    Notamment sur un point : depuis des années, l’espace public français est saturé par les polémiques autour de la #laïcité. Tout tourne autour de la place de la religion – en fait d’une #religion en particulier, la religion musulmane – dans l’#espace_public. On interprète en sens divers la fameuse loi de 1905, acte de naissance de la laïcité à la française. S’opposent les tenants d’une lecture libérale de cette loi qui anime l’Observatoire de laïcité dans la foulée de Jean Baubérot et les partisans d’une laïcité de foi civile qu’on retrouve au Printemps républicain et qui semble avoir désormais les faveurs d’Emmanuel Macron. Le président se profile désormais sur cette question en héritier de Manuel Valls, ce que rien ne laissait présager au moment de son élection.

    Or, je ne vois aucun autre pays où la gestion de la diversité culturelle, tant historique que produite par les flux migratoires contemporains, se pose en de tels termes. Car, fondamentalement, ce n’est pas de religion et de laïcité qu’il s’agit. Ce débat en cache un autre.

    Auteur : #Henri_Goldman

    • Par rapport aux autres pays développés, la France se signale par une attitude particulièrement intolérante à l’égard de l’expression publique des convictions religieuses, sommées d’être rigoureusement privatisées en contradiction avec la Convention européenne des droits de l’Homme qui postule la liberté de manifester sa religion « tant en public qu’en privé » (article 9). Ainsi, la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de signes religieux dans les lycées et collèges n’a d’équivalent dans aucun autre pays. Mais la singularité française va bien au-delà, puisqu’elle s’en prend à toute forme d’affirmation culturelle minoritaire considérée comme contradictoire avec l’éthos national d’une République réputée « une et indivisible ». C’est pour cette raison que la France est un des 4 États sur 47 du Conseil de l’Europe, en compagnie de la Turquie, d’Andorre et de Monaco, à ne pas avoir signé la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales (1994).

  • « En thérapie ». La malédiction du policier Adel Chibane | Hassina Mechaï
    https://orientxxi.info/lu-vu-entendu/en-therapie-la-malediction-du-policier-adel-chibane,4526

    Un psychanalyste parisien suit cinq patients au lendemain des attentats du 13 novembre 2015, entre traumas individuels et choc collectif. Adel Chibane, l’un des personnages de la série En thérapie, est un policier qui est intervenu au Bataclan. Sa différence crève l’écran, et pose quelques questions. Source : Orient XXI

    • Excellent ! L’article ; la série aussi.

      C’est sans doute le personnage du policier qui traduit le mieux cette irruption du « réel qui cogne ». Dès le premier plan, le ton est donné par Adel Chibane, magistralement porté par Réda Kateb. C’est lui qui mène un entretien qui tourne vite à l’interrogatoire. « Y’a des règles ? » ; « Pardon ? » ; « Un protocole d’action ? ». Chibane s’impose, prend possession de l’espace en cuir noir, lunettes tout aussi noires, démarche chaloupée, regard scrutateur, tout en corporalité qui s’impose face au psy recroquevillé dans son fauteuil. Chibane est ainsi ramené à l’organique, l’épidermique, la fonctionnalité, l’irrationnel. Le « ça » dirait un psy, là où les autres patients sont en quête d’un moi et Dayan tout entier contenu et policé dans son sur-moi. D’où cet échange :

      je vous vois venir, y’a malentendu […], mais je fais pas ça, moi.
      — Ça ?
      — Vous raconter des trucs, ma petite enfance, le tralala...

      Puis suit un dialogue où Chibane demande à Dayan de « deviner » son métier. Face au mutisme du psy, il explose : « J’suis flic, putain ! ». Chibane est policier de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI). Et il entend être reconnu comme tel. Par son langage, ses vêtements, son oscillation entre impassibilité et agressivité, il aurait pu tout aussi bien être de « l’autre bord », voyou et délinquant. Pire, il aurait pu être confondu avec ceux qui viennent d’endeuiller la France. C’est donc dans le regard de Dayan qu’il demande à ne pas être vu pour ce qu’il n’est pas et à être adoubé pour ce qu’il veut être : flic et héros. Adel guette et quête dans le regard des autres sa place. Il est l’être conditionné jusqu’au bout...