• L’édition déraisonnable : “Aujourd’hui, on édite des livres pour les détruire”
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    « Les Français achètent moins de livres, alors une partie de l’édition s’est dit qu’il fallait produire plus de livres. En réalité, l’édition se sert de la trésorerie des libraires pour garantir ses revenus : elle a mis en place un système très bien rodé pour distribuer, pas pour éditer », diagnostique-t-il. De plus en plus impliqués dans cette étape méconnue du grand public qu’est la distribution, les grands groupes jouent sur l’approvisionnement des libraires pour conforter leur trésorerie.

    Le système des dépôts et des retours d’ouvrages en librairie profite aux sociétés qui publient le plus : la rotation des titres sur les tables est multipliée, d’autant plus que certains groupes pratiquent « l’office sauvage », avec lequel des titres qui n’ont pas été demandés par le libraire lui sont imposés. Le commerçant, s’il veut être approvisionné, doit les accepter. Lorsqu’il récupère ses livres invendus, l’éditeur aura tendance à les détruire directement, « le plus cher étant le stockage des ouvrages, tandis que les coûts d’approche et de reprise sont faibles pour l’éditeur ».

    « On estime qu’environ 20 à 25 % de la production sont détruits, mais on atteint les 80 % en période de rentrée littéraire », souligne Gilles Colleu, qui a autrefois géré la production du groupe Actes Sud. Le cercle est vicieux : lors de la phase d’impression, les éditeurs de taille importante ont tendance à gonfler leurs tirages : cela permet de réduire le coût unitaire du livre à la fabrication, et d’éviter une réimpression, plus coûteuse, en cas de succès.

    « Finalement, on cherche à payer le prix le plus faible pour un livre que l’on va détruire plus tard. On édite des livres pour les détruire », résume Gilles Colleu, qui s’est lancé dans l’impression numérique avec sa société Yenooa : plus de flexibilité dans le choix des tirages.

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