• #Prostitution : oui, on peut être #féministe et non #abolitionniste | Slate
    http://www.slate.fr/tribune/60175/abolition-prostitution-feminisme
    Je pense qu’il y a une grosse faille dans leur raisonnement et je la trouverai.

    En tant que féministes non abolitionnistes, nous refusons de laisser le débat sur la prostitution s’enfermer dans le choix entre le modèle abolitionniste suédois et le modèle réglementariste néerlandais ou allemand. Tous deux ont en effet des conséquences très négatives pour les prostituées, soit en les envoyant dans la clandestinité totale, soit en encourageant le proxénétisme.

    Nous sommes convaincues qu’il est possible d’emprunter une troisième voie, de développer un nouveau système, un modèle français, basé sur les principes de liberté et d’égalité, et plaçant les prostituées, leur protection et leurs intérêts, au cœur de son dispositif.

    • J’avoue que j’ai du mal à me positionner là-dessus, ce n’est pas le sujet que je connais le mieux ; mais leurs arguments sont un peu comparables à ceux des pro-légalisation du cannabis, sujet que je, euh, connais un peu mieux.
      C’est pas non plus tout à fait transposable, mais là aussi, pour vertueuse qu’elle puisse sembler, je doute quand même que « l’abolition » pure et simple règle vraiment grand chose à la question ...

    • Tout l’article vise à comparer l’activité prostitutionnelle aux autres métiers, afin de pouvoir dire « mais dans cet autre métier aussi il y a ce problème 1 et dans tel autre il y a ce problème 2 » et donc de conclure que c’est une activité comme une autre.

      À partir du moment où on ne veut jamais raisonner en terme de morale ("nous pensons que pour vivre bien ensemble, il y a telle et telle chose qui sont mauvaises : l’inceste, le meurtre, vendre un organe, louer son intimité, etc") et bien il est impossible de se battre contre ces arguments libéraux. Totalement impossible à mon avis.

    • Moi j’y trouve une position dont je me sens proche, n’étant ni abolitionniste ni réglementariste.
      @rastapopoulos : raisonner en terme de morale n’implique pas un accord sur tout ce que tu cites : on peut clairement estimer que certains des points de ton énumération posent des problème moraux que la société doit refuser (et que les lois doivent donc sanctionner), et d’autres non (estimer que le meurtre est moralement condamnable mais pas la libéralisation des drogues). Il y a, de plus, des sous catégories dans ce que tu cites (meurtre = action d’un individu sur un autre, qui n’a rien demandé ≠ usage de drogue par exemple). Tout ne me semble pas pouvoir être mis sur le même plan.

    • Si la prostitution est un métier comme un autre, alors un proxénète devient un employeur comme un autre. Il pourra d’ailleurs même passer ses annonces à Pôle Emploi, qui devrait donc les fourguer aux chômeurs et radier ceux qui refusent, non ?
      D’ailleurs, on devrait alors pouvoir envisager des formations de prostitution, comme pour n’importe quel boulot. D’ailleurs ça ne posera de problème à personne que sa mère, sa femme ou sa fille exerce ce métier comme un autre, non ?

      Je ne vois donc pas pourquoi il ne serait pas possible de battre cette argumentation : dès qu’on entre dans la banalisation réelle de la prostitution, on se rend bien compte qu’il ne s’agit absolument pas d’un problème de morale, mais de conventions sociales. Dans une société polygamique dont le couple ne serait pas l’unité de base, on pourrait envisager la prostitution comme un métier comme un autre, éventuellement, mais ce n’est pas le cas.

    • Cet argument est adressé par les auteures :

      L’abolitionnisme tend à montrer que la prostitution ne peut être une activité comme les autres. Nous répondons que toute activité non réglementée –c’est-à-dire non soumise au droit du travail– ne sera jamais une activité comme les autres. Les travailleurs au noir dans le BTP (Bâtiment et Travaux Publics) sont eux aussi corvéables à merci. Toute activité où l’un des deux contractants a plus de droits que l’autre entraîne automatiquement des situations d’exploitation.

      Un autre argument des abolitionnistes est « si c’était un métier comme un autre, les parents le conseilleraient à leur fille ». D’une part, aucun parent responsable ne conseillerait à son enfant un métier se situant à la limite de la légalité et stigmatisé par la société. D’autre part, combien de parents conseilleraient à leur fille d’avoir des relations sexuelles désirées avec une centaine d’hommes, juste pour le plaisir, pour être sûrs que leur fille ait suffisamment d’expérience afin choisir l’homme qui lui convient le mieux ? N’est-ce pas simplement le fait que leur fille puisse librement utiliser son sexe avec des partenaires multiples qui serait dérangeant ?

      Il me semble que c’est davantage la stigmatisation accolée à la prostitution que le fait que notre société soit structurée autour du couple qui pose problème : dans ce dernier cas, toute situation échappant à cette norme, même en l’absence d’échange marchant, serait à proscrire.

    • J’ai toujours pas compris perso l’intérêt de la position abolitionniste, surtout venant de féministes ? Si quelqu’un a de la doc je suis curieux de voir pourquoi c’est si important de rendre illégal la prostitution et marginaliser les prostitué-e-s ?

    • @monolecte : Mais la morale c’est une convention sociale. La morale, par défaut, c’est un ensemble de choix « philosophique », parfois issus de l’histoire d’une culture, parfois issus d’une concertation à un moment donné de l’histoire d’une culture : c’est un mélange de tout ça. Mais ce qui est sûr c’est que ces choix sont alors relatifs à l’ensemble d’une communauté donnée (une culture, un pays, etc).

      Le principe de base du libéralisme, c’est de privatiser la morale : ainsi chacun dans son coin a sa petite morale. Mais alors, rapporté à l’ensemble de la société, la manière de « bien vivre » n’est définie que par les rapports de force devant le droit libéral (le lobbying par procès, avocat etc) ou par le marché (celui qui a la plus grosse bourse). On a plus le droit d’essayer de penser à ce qui pourrait être bon pour l’ensemble de la communauté.

      Le meurtre (ou sa condamnation) aussi est une convention @baroug, suivant les sociétés, il y a beaucoup de choses qui varient. Un des rares invariants est l’inceste, dans quasiment toutes les sociétés. Mais pour le reste c’est très variable.

      Je pense que nous ne devrions pas vendre notre temps contre de l’argent, quelque soit l’activité, donc d’autant plus lorsqu’il s’agit de l’intimité sexuelle. Le « d’autant plus » car dans notre société et dans beaucoup d’autres, la sexualité est un des points qui nous caractérise en tant que Personne : plus que l’usage de nos mains, ou telle autre compétence. Je trouve déjà Mal de vendre ses mains, alors son sexe (ou autre membre utilisé de manière sexuel) encore plus.
      Mais je ne pense pas ceci pour ma petite personne, je le pense en tant que choix valable pour l’ensemble des gens avec qui je vis.

    • Bien sur que la morale est un ensemble de conventions sociales (pas grand monde dans ce réseau de gauchistes dégénérés ne pensera ici qu’elle est naturelle, du moins je l’espère). Mais l’alternative entre une morale globale et une morale libérale privée et personnelle me semble poser un problème : la morale traditionnelle c’est aussi que l’homosexualité c’est mal, que le fait d’avoir différents partenaires sexuels hors de contrats spécifiques c’est mal, que les femmes qui sortent d’un rôle préétabli et de la cuisine, c’est mal etc. C’est celle là qu’il faudrait suivre ?
      Il me semble que le fait de rechigner à défendre une position par le biais de la morale, tient à la définition de celle-ci. La morale traditionelle, et conservatrice, du siècle dernier ? Une morale plus progressiste mais qui sortirait d’où, définie par qui, quel groupe ? La société, à un moment précis ? Donc la norme sociale de l’époque serait nécessairement la loi d’airain des relations humaines ?
      S’il s’agit de définir individuellement une morale dans l’optique qu’elle soit potentiellement applicable à toute la société, comme tu semble le faire en posant que « le travail c’est mal » et « le travail qui utilise le corps » c’est encore plus mal, pourquoi pas, mais je ne vois pas en quoi ça se différencie des morales « privées » que tu conspues. La différence c’est qu’elle implique un impératif kantien, certes, mais dans ce cas, je peux décider moralement que j’estime que vendre son corps ne me pose pas de problème et que je généralise cette loi à toute la société.