• COVID-19 : vers une gouvernementalité anthropocénique
    https://www.terrestres.org/2020/09/30/covid-19-vers-une-gouvernementalite-anthropocenique

    Le choix d’une mise à l’arrêt temporaire de l’économie réelle par l’adoption du confinement de masse ainsi que l’ensemble des mesures qui se sont suivies pour répondre à la propagation fulgurante de la Covid 19 semblent configurer une nouvelle forme de gouvernementalité s’appliquant à l’échelle planétaire et s’appuyant sur les technologies de contrôle numériques pour s’exercer : une gouvernementalité anthropocénique. Que les États décident de mettre quasi-simultanément sous cloche environ 4 milliards d’êtres (...)

    #technologisme #transhumanisme #domination #COVID-19 #santé

    ##santé

  • Les médecines terrestres face au coronavirus | Terrestres
    https://www.terrestres.org/2020/09/30/les-medecines-terrestres-face-au-coronavirus

    Dans la tourmente du covid-19, nous prenons légitimement la défense des personnels soignants et du système de soin, contre la dynamique néolibérale de destruction de la Santé comme service public et bien commun, enclenchée depuis une vingtaine d’années. Pourtant, n’est-il pas important, vital même, que cet événement considérable rende aussi possible un questionnement sur le monopole d’une médecine moderne dont la rationalité et l’« efficacité » toujours vantées, sont néanmoins solidaires d’un système de vie profondément pathogène ?

    Il y a près de 50 ans, Ivan Illich posait dans Némésis médicale une question simple et plus que jamais d’actualité : celle de la contre-productivité de l’institution médicale moderne. Cette médecine entretient une promesse générale de « guérison » plus que de santé et de prévention. Elle se fonde sur une coupure profonde entre le corps médical qui sait, prescrit et « prend en charge », et le « patient », hétéronome, nu et passif face au traitement. Mais cette promesse de guérison, cette quête de nouveaux traitements et vaccins n’est-elle pas vaine et sans fin, dès lors qu’elle s’avère profondément solidaire d’un système de vie industrialisé qui génère constitutivement des maladies et des nuisances nouvelles, liées aux pesticides, aux perturbateurs endocriniens, aux polluants chimiques disséminés partout, à la pollution de l’air, mais aussi à la déforestation, au braconnage d’espèces sauvages et à l’agrobusiness ?

    De fait, aucun autre horizon collectif de soin n’a encore surgi dans le débat autour de l’événement du covid-19. Notamment, aucune place positive n’aura été accordée, du moins dans l’information « grand public », aux visions, propositions et solutions des médecines dites alternatives. Or, ces autres médecines, associant plantes médicinales, travail de long terme de renforcement de notre système immunitaire et souci pour l’alimentation, sont plus enclines à penser des techniques de soin reliant les humains et leurs milieux de vie, à concevoir l’individu comme un foyer de relations, dont la santé dépend de la qualité même de ces relations. La médecine et la santé, ici, ne sont alors plus dissociables de la forme de vie que nous menons et des relations que nous entretenons avec notre milieu.

    En compagnie de Thierry Thévenin et Lilian Ceballos nous allons essayer de comprendre comment et pourquoi défendre une médecine terrestre. Renouant avec un pan de l’écologie politique des années 1970 s’interrogeant sur les conditions et les institutions du soin, nous essayons de saisir cet événement planétaire du covid-19 pour ne pas seulement en appeler à plus de moyens pour la médecine telle qu’elle se pratique dans nos sociétés industrialisées, mais aussi pour mettre en discussion les limites constitutives de cette médecine-là et poser le problème de l’unité complexe du soin des humains et du soin des milieux de vie.

  • Choses vues, Julien Coupat et alli [ alii ] | Terrestres
    https://www.terrestres.org/2020/09/04/choses-vues

    Nous avons vu abolie en un claquement de doigts la liberté la plus élémentaire des constitutions bourgeoises – celle d’aller et venir.

    Nous avons vu un président prétendant régler depuis l’Elysée les « détails de notre vie quotidienne ».

    Nous avons vu un gouvernement promulguer du jour au lendemain de nouvelles habitudes, la façon correcte de se saluer et même édicter une « nouvelle normalité ».

    Nous avons entendu les enfants traités de « bombes virologiques » – et puis finalement non.

    Nous avons vu un maire interdire de s’asseoir plus de deux minutes sur les bancs de « sa » ville et un autre d’acheter moins de trois baguettes à la fois.

    Nous avons entendu un professeur de médecine dépressif parler de « forme de suicide collectif pour eux-mêmes et pour les autres » au sujet de jeunes gens qui prenaient le soleil dans un parc.

    Nous avons vu un système médiatique parfaitement déconsidéré tenter de regagner une once de crédit moral par une entreprise de culpabilisation massive de la population, comme si la résurrection du « péril jeune » allait amener la sienne propre.

    Nous avons vu 6 000 gendarmes des unités « montagne » appuyés par des hélicoptères, des drones, des hors-bords et des 4X4, lancés dans une traque nationale aux arpenteurs de sentiers, de bords de rivières, de lacs – sans parler, évidemment, des bords de mer. [...]

    Nous voyons, face à la croissante « ingouvernabilité des démocraties », se durcir un bloc social-grégaire appareillé technologiquement, financièrement, policièrement tandis que s’esquissent mille désertions singulières et de petits maquis diffus, nourris de quelques certitudes et quelques amitiés. Nous voyons la désertion générale hors de cette société, c’est-à-dire des rapports qu’elle commande, s’imposer comme la mesure de survie élémentaire sans quoi rien ne peut renaître. Nous voyons l’anéantissement comme le destin manifeste de cette société, et comme ce qu’il incombe de précipiter à ceux qui ont entrepris de la déserter – si du moins nous voulons rendre à nouveau respirable, où que ce soit, la vie sur Terre. Le mur face auquel nous nous trouvons pour l’heure est celui des moyens et des formes de la désertion. Nous avons l’expérience de nos échecs en guise de plastic pour le faire céder. Toute stratégie en découle.

    Nous nous sommes attachés à nous formuler ce dont nous avons été témoins au printemps dernier, avant que l’amnésie organisée ne vienne recouvrir nos perceptions. Nous avons vu et nous n’oublierons pas. Plutôt, nous nous reconstruirons sur ces évidences. Nous ne présupposons aucun nous, ni celui du peuple, ni celui de quelque avant-garde de la lucidité. Nous ne voyons pas d’autre « nous », en cette époque, que celui de la netteté des perceptions partagées et de la détermination à en prendre acte, à tous les étages de nos modestes et folles existences. Nous ne visons pas la constitution d’une nouvelle société, mais d’une nouvelle géographie.

    Mai-août 2020

    • Nous avons vu les grands libertaires faire l’apologie du confinement et promouvoir le port citoyen du masque et les plus gros fachos en dénoncer la tyrannie. L’anarchiste qui veut croire à quelque bonne volonté voire à quelque bienveillance de l’État nous rappelle ainsi qu’il n’y a pas de gouvernement sans auto-gouvernement, et vice-versa. Gouvernement et auto-gouvernement sont solidaires, relèvent du même dispositif. Que le pasteur soigne son troupeau ne l’a jamais empêché de mener les agneaux à l’abattoir.

      Mouais. Ya pas à croire à la bienveillance de l’État pour croire à certaines réalités bien empiriques : quand on se masque, ça fait baisser les transmissions du virus, point. C’est pour le moment un fait « scientifique » partagé à l’échelle mondial, un consensus. Que ces supra-autonomes tentent de le réfuter si ça les amuse… Mais ce n’est pas parce que c’est promu par l’État, que c’est mal, et que du coup faudrait absolument faire le contraire. Logique de CP, non ?

      Je crois toujours à la possibilité d’organisation autonome des populations. Mais pour ça faut qu’on ait envie de faire des choix pour s’auto-protéger réellement, savoir qu’on fait tel acte (mettre un masque) pour aider les plus faibles et qu’il y ait moins (beaucoup énormément moins) de morts et d’handicapés, et pas parce qu’on nous le dit de le mettre sous peine d’amende ou de réprobation sociale. Je vois pas en quoi faire le bravache aide en quoi que soit à augmenter en autonomie.

      Depuis des semaines là avec l’été, je râlais (sans dénoncer personne merci) que la tranche d’âge « entre 20 et 30 » mettait beaucoup moins le masque que les autres tranches d’âge (plus jeune et plus vieux), et qu’on voit des groupes de cet âge de 30, 50, et plus, sur les quais de la ville, à se regrouper, se faire tous la bise, et passer la soirée comme ça en groupe énorme sans masques, à boire et rigoler sur les quais. Et moi je voyais ça « à vue d’œil », à mon niveau évidemment, en ayant pris les transports en commun pas mal, en étant sorti à des concerts d’extérieur aussi (bien masqué moi). Et bien c’était pas une vue de mon esprit : l’ARS d’ici dans son point de la rentrée : 9x (pas 2, pas 3, NEUF FOIS !) plus de cas entre 20 et 30 ans que dans le reste de la population, et une augmentation de 9x sur cette tranche rien que pour les 2 dernières semaines. Dans leur texte « Julien et alli » vont dire « les autorités trouvent ça mal, c’est juste des jeunes qui profitaient de belles soirées ». Alors que ça a produit des effets très concrets de transmission du virus, et donc d’augmentation des cas et des morts ensuite.

      Et que sortir des phrases super vagues ("on a bien le droit de sortir au soleil") peut à la fois être tout à fait vrai et tout à fait faux : il y a des grosses différences d’échelle, et rester sur leurs phrases super vagues ne dit strictement rien des conséquences suivant les cas. En effet, ne pas être confinés et pouvoir faire un pique nique en famille (ou tout autre cellule d’habitation, tout petit groupe qui vit proche et sait que ces proches avec qui l’on vit n’ont pas le virus), ça n’a rien à voir du tout avec se regrouper à 50 ou plus (qu’on soit jeune de 22 ans ou une soirée politique de vieux mâles blancs), avec des gens éloignés, sans masques, à se faire la bise etc. Or avec la mentalité « moi je suis un rebelle » comme ça, et l’anti-pédagogie des bons gestes ("c’est de la délation de dire aux autres qu’il faut faire les bons gestes"), bah impossible de faire la différence et d’être du coup autonome et savoir quand sortir et quand ne pas faire.

    • Le problème, et on le voit bien ici, c’est que les milieux radicaux (anars, autonomes) sont trop souvent gangrénés par des idées fausses sur la médecine et la science en général (je pense sans trop me tromper que Coupat préfère largement étudier la littérature et faire des belles phrases plutôt que la biologie ou la physique). Il y beaucoup de confusion et ce texte en est l’exemple parfait.