La rentrée des luttes écologistes : « Il y a quelque chose qui est de l’ordre de la lame de fond »

/la-rentree-des-luttes-ecologistes-il-y-

  • J’y étais, aux Résistantes 2023
    http://lesresistantes2023.fr

    Incroyablement génial ! (je réédite un peu au fur et à mesure)

    Nous étions 5 à faire le voyage par covoiturage : un couple de 70 ans de fauchereuses volontaires (les propriétaires de la voiture), un éducateur de 65 ans très impliqué dans des actions militantes, une toute jeune ingénieure low tech qui a décidé de prendre la route vers l’Asie centrale dès le début de l’année prochaine, et moi.
    Les covoitureures ne voulaient prendre l’autoroute payante par principe, on a suivi les nationales, traversé les villes, rencontré de jolis villages, notamment dans le Lot.

    Arrivée mercredi vers minuit par temps pluvieux et surtout venteux, pas idéal pour monter sa tente dans le noir. Et au petit matin tu découvres le site. Deux grands champs mis à disposition par une éleveuse, l’un pour le pâturage, l’autre pour la nourriture d’hiver. Le climat est un peu rude au Larzac. Rien qu’à l’évocation de ce mot, Larzac. Un truc à faire papillonner l’imaginaire sur la bataille qui s’est menée là sans en connaître toutes les ficelles. Et pourtant !

    Le programme était d’une richesse exceptionnelle et si l’on ressentait une frustration, c’était celle de ne pouvoir assister à tout ! D’autant que quelques propositions alléchantes se sont greffées au tronc initial et ont prises. Je ne vais pas énoncer le programme, il est là : http://lesresistantes2023.fr/programme

    À l’assemblée générale du jeudi matin, l’organisation nous raconte qu’elle pensait accueillir environ 1 500 personnes. Nous étions au plus fort de l’événement 5 000. Un espoir secret fit que le lieu et la logistique permit de recevoir tout le monde. Un monde composé d’individus de tous âges, dont 10 % d’enfants s’éclatant dans les animations qui leur étaient destinées.

    Quand même, chapeau bas à l’organisation. Un des champs, celui du bas, était dédié au parking 1 (sur 3), au camping, à l’accueil, aux organisations militantes, et aux chapiteaux où se déroulaient les assemblées, tables rondes, ateliers, des chiottes sèches un peu partout, des poubelles, des cendriers, des réserves d’eau potable et des douches… écrit comme ça, ça fait un peu compact mais en réalité tout cela était dispersé sur plusieurs hectares et très aéré.

    Sur l’autre parcelle, un peu en surplomb, on trouvait les cantines de l’orga (assiettes complètes végétariennes à prix libres), un stand viande et fromage de la Conf (Confédération paysanne, partie intégrante de l’événement), et d’autres points de restauration locale. Au milieu de vaste espace, un chapiteau où se sont déroulées pièces de théâtre, cirque, baluche et autre manifestation culturelle. Et tout au fond, la scène pour les concerts.

    Dimanche matin, pour le petit déj à la cantine (super pain, confitures délicieuses (et cookies mais il n’y a rien à faire, je préfère le pain)), je contemplais l’espace où après le méga concert qui a duré une bonne partie de la nuit, l’espace était nickel : pas un papier parterre, ou de bouteille, cannette ou je ne sais quoi. Aussi propre qu’avant l’arrivée des festivalier·es. Décidément ces écoterrorismes ne font rien comme chez les civilisé·es qu’on rencontre, par exemple, aux 24 heures du Mans, lesquelles laissent des tonnes d’immondices sur leur passage (dont nombre de bouteilles d’eau à moitié bues).

    Chacun chacune des participant·es étaient invité·e à donner un peu de son temps pour l’organisation. Quand je me suis pointée à la cantine pour aider, on était déjà trop. Je suis repartie, mangé un truc et allée au cinéma (oui, il y avait un chapiteau dédié aux projections).

    Pour faire court, j’ai partagé mon temps entre l’expérience du Larzac, la forêt et les Insolubles, sans oublier une randonnée le samedi matin pour observer quelques rapaces : vautours, milans et circaètes. J’ai appris au passage que des aires d’équarrissages étaient prévues pour permettre aux éleveurs d’y déposer les bêtes mortes. Bon appétit les vautours. Assisté aussi à une table ronde sur l’"agrivoltaïsme".

    Par rapport à l’histoire du Larzac, je suis allée à une représentation théâtrale (recueil de témoignages drôles et émouvants) et à la projection d’un documentaire (historique). J’ai appris beaucoup de choses mais je veux juste évoquer le statut foncier particulier du territoire, qui a suivi l’abandon de l’extension du terrain militaire.

    Le territoire (6 300 ha) appartient à l’État. Les locaux ont monté une société civile des terres du Larzac qui engage l’état et l’organisation sur une durée de 60 ans (prolongée depuis peu de 30 ans) durant lesquels un droit d’usage de valeur est appliqué. Pas de propriété privée ni de location. Sur le principe cela signifie que celle où celui qui s’installe pour exercer une activité agricole (obligatoirement), investit le lieu pour son activité agricole, met (ou non) le lieu en valeur (restauration des bâtiments agricoles, construction de nouveaux locaux, maison, terres) et au moment de la retraite, quitte les lieux pour laisser la place à de plus jeunes. S’il est estimé qu’il y a eu mise en valeur du site, les nouveaux arrivants versent une somme d’argent équivalente à cette mise en valeur. C’est un statut unique en France. Le Larzac enregistre le plus grand nombre d’installation et compte de plus en plus de femmes parmi elles. C’est un statut que les occupant·es de Notre-Dame-des-Landes ont voulu adopter mais que le département a refusé : Il n’y aura pas de second Larzac. Le rejet de la propriété privée sur le foncier fait peur. Tu m’étonnes !
    Plus sur l’histoire du site
    https://fr.wikipedia.org/wiki/Lutte_du_Larzac

    Pour finir ce petit billet, une courte vidéo hilarante vue dimanche matin avant le docu sur Abracadabois de NDDL : La bataille de forêt du Chat.
    https://vimeo.com/789756584

    Je suis remontée avec un insoluble via Clermont-Ferrand par l’autoroute. On a rencontré des champs de panneaux solaires et des méga bassines clotûrés. Des paysages qui ne font pas particulièrement rêver. Retour à la civilisation.

    Et ben moi je dis que si à 62 ans t’as pas participé à un festival d’écoterroristes, t’as raté ta vie.

    Grand merci aux Résistantes.