A Al-Hoceima, les blessures du Rif marocain se sont réveillées

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  • A Al-Hoceima, les blessures du Rif marocain se sont réveillées
    http://www.lemonde.fr/afrique/article/2017/06/06/a-al-hoceima-les-vieilles-blessures-du-rif-marocain-se-sont-reveillees_51395

    Les autorités, entre déclarations et répression, ne savent comment répondre à un mouvement qui mêle revendications économiques et plaies du passé encore à vif.

    L’info commence à émerger doucement… Il faut dire :

    « Personne ne s’attendait à ce que le mouvement dure aussi longtemps », reconnaît Zohra Koubia, membre de l’AMDH [Association marocaine des droits de l’homme]. Cette femme discrète a milité dans les années 1980-1990 lorsque le Maroc vivait sous la férule de Hassan II. « A notre époque, nous nous battions ensemble : les étudiants, les syndicats et la gauche », raconte-t-elle. Cette fois, le Hirak n’est lié à aucun parti ni association. C’est une tendance mondiale. Il n’y a plus de confiance dans ces organisations. En plus, au Maroc, le pouvoir a tout fait pour les affaiblir. Enfin, depuis 2011, les gens n’ont plus peur : le mouvement du 20-Février leur a donné la parole. »
    Elle ne comprend pas le manque de réponses des autorités : « Si vous comparez avec le mouvement du 20-Février [qui demandait par exemple une monarchie parlementaire], leurs revendications sont minimes. Les autorités ne les ont pas pris au sérieux au début et maintenant, c’est très compliqué. »

    Quant à la mise en perspective historique, pas un mot sur le rôle de la France dans la guerre du Rif (et du maréchal Pétain qui rencontre Franco pour la première fois à Ceuta le 28 juillet 1923)…

    Des drapeaux amazigh (berbères) ou de l’éphémère République du Rif (1921-1927) sont brandis dans les rassemblements. Certains accusent le mouvement de visées séparatistes. « C’est faux, répond Fayssal Anouar, de l’Association marocaine des droits de l’homme (AMDH). Mais cette zone a une spécificité politique, historique. C’est notre identité, notre patrimoine. Et on ne trouvera pas de solution si ce n’est pas pris en considération. »

    En 1921, le Rifain Abdelkrim Al-Khattabi était parvenu, avec ses hommes, à battre le colonisateur espagnol et à instaurer la République du Rif : la région avait alors sa monnaie et son drapeau. En 1958, un mouvement de contestation contre la marginalisation de la région est maté dans le sang par des milliers de soldats conduits par le futur Hassan II, alors prince héritier. Le même scénario se reproduit en 1984.