Pour revenir sur le problème des déserts médicaux en France (qui va s’accentuer avec le temps), vu du côté médical c’est très dérangeant, je m’explique avec ma vision des choses (4e génération de médecins dans ma famille, je me sens concerné)
Le médecin d’autrefois qui travaillait 24/24 7/7 façon humanitaire (ou amasseur de capital), ça ne peut plus exister sauf décision individuelle de même type qu’une vocation religieuse.
Pourquoi ?
– le médecin a vu arriver les 39h00, puis les 35h00 et son « modèle » professionnel est praticien des hôpitaux.
– les praticiens des hôpitaux se sont soumis au régime du fonctionnariat : vacances, RTT, salaire, et calculs de bout de chandelle pour comptabiliser ce que l’hôpital vous doit. Dans le domaine médical c’est une révolution : les anciens PH que j’ai connu travaillaient 24/24 7/7 à l’hôpital sans réclamer plus que leurs salaires mais étaient capables de partir trois mois consécutifs en « vacances » (ou autre projet) une année de temps en temps (sans aucune autorisation ni formulaire administratif) pour nourrir leur passion.
Ce n’était pas « mieux » c’était différent.
– aujourd’hui le médecin est un individu comme les autres : il a une famille et partage les tâches domestiques avec son conjoint (d’autant plus que la plupart des médecins sont aujourd’hui des femmes).
– le médecin ne fait plus que rarement la course au profit (il y a quelques exceptions mais elles sont justement des exceptions)
Ces éléments énoncés le sont pour pour présenter le médecin comme je le vois aujourd’hui au travers de mes confrères des diverses spécialités.
Maintenant, imaginez le couple : l’un est médecin, l’autre pas et ils envisagent de fonder une famille. C’est banal.
Vous leur demandez de s’installer en zone désertifiée : banlieue « à risque », campagne étendue, etc.
Ils n’iront pas : le conjoint doit avoir son travail pas trop loin, les enfants doivent pouvoir être scolarisés, les centres de formation (CHU) doivent être accessibles facilement, le médecin doit pouvoir ne pas se faire déborder par son métier (la plupart des médecins femme travaillent à temps partiel) et le revenu (paiement à l’acte) doit être à peu près assuré.
Si d’aucun souhaite imposer l’installation quelque part, ce sera d’une part illégal en l’état et d’autre part contre productif car aujourd’hui de nombreux médecins formés décident de ne pas s’installer du tout, de ne pas exercer leur métier, celui pour lequel ils viennent de consacrer dix années d’études au moins.
Tout ça pour dire que je conçois très bien que l’on souhaite avoir une jolie répartition homogène des médecins sur tout le territoire français tel le bel alignement d’une peupleraie le long de la rivière, mais c’est impossible.
Quelle solution ?
Si demain, une commune ou une communauté de communes, souhaite faire venir des médecins. Elle doit créer des emplois médicaux à temps partiel salariés, s’assurer d’avoir des services routiers/ferrés/aériens accessibles ainsi qu’un système scolaire local suffisant.
Là il y aura des candidats et ça ne coûtera pas plus cher à la société.