Du point de vue institutionnel et matériel, les bénéfices attendus par les masculinistes du GES par exemple sont clairs. En jetant le discrédit sur la reconnaissance encore fragile de l’ampleur des violences masculines, ils souhaitent diminuer les ressources destinées aux femmes victimes de violences et les utiliser pour la mise en place de services spécialisés dans l’accueil des hommes, entre autres victimes de violences conjugales.
A cette fin, ils dénoncent sans arrêt l’absence de reconnaissance institutionnelle des « violences faites aux hommes » et l’exclusion des hommes des dispositifs publics. Suivant le mouvement amorcé au Québec ou aux États-Unis, ils souhaitent s’approprier une partie des financements étatiques attribués aux institutions de lutte contre les violences masculines pour les consacrer plus directement aux besoins et aux intérêts des hommes. Aux États Unis par exemple, certains groupes masculinistes poursuivent des centres d’hébergements de femmes pour discrimination anti-hommes, et bénéficient déjà de financements d’état pour créer des lieux médiatisés [32].
On trouve des échos de cette stratégie dans les accusations masculinistes à l’encontre de la justice aux affaires familiales comme étant une justice qui favorise les femmes [33], mais reprise dans le contexte des violences au sein du couple. Ainsi l’avocate de Maxime Gaget insiste sur le fait que les femmes victimes sont beaucoup mieux soutenues que les hommes, et que la justice est toujours plus « clémente » avec les femmes qu’avec les hommes, car selon elle, dans les audiences, « le moindre doute va profiter à la femme [34] ».
En dressant le portrait des institutions et notamment de la justice comme des lieux qui favorisent les femmes, ces discours masculinistes mettent une fois de plus le monde social sans dessus dessous, et revendiquent toujours plus de place, d’argent et de considération pour les hommes.
On peut aller un peu plus loin, en suivant le fil des propos de Maxime Gaget, qui va jusqu’à regretter une certaine « stigmatisation » des auteurs de violences conjugales :
« Si une femme battue se défend, elle va susciter l’empathie. Si j’avais touché Nadia, je serais passé pour un monstre. Ça aurait été sa parole contre la mienne. [35] »
Les masculinistes tirent un autre bénéfice de cette focalisation des débats sur le faux problème des « hommes battus ». L’enjeu ici, est de garantir l’impunité des auteurs de violences conjugales, et des violences exercées par les hommes en tant que groupe social contre les femmes en tant que groupe social. Les masculinistes défendent donc les multiples permis d’exercer des violences et de tuer que possèdent les hommes.
Cela n’a rien d’étonnant puisque le masculinisme est un mouvement de défense des privilèges des dominants. En outre, les masculinistes protègent évidemment leurs propres arrières, étant bien souvent eux-mêmes, des auteurs de violences.
En 2006, M. X, chirurgien-dentiste, 55 ans, informe sa caisse de retraite qu’il souhaite bénéficier dès 61 ans d’une pension complémentaire non minorée. Or, dans son régime, la Caisse autonome de retraite des chirurgiens-dentistes et sages-femmes (CARCDSF), la complémentaire ne peut être touchée sans abattement qu’à 65 ans pour les personnes de sa génération.
En fait, ce père de quatre enfants entend profiter d’une disposition réservée aux mères chirurgiens-dentistes : elles peuvent toucher leur complémentaire sans minoration avant l’âge normal (prévue à l’article 20 des statuts de la Caisse alors en vigueur), avec un an d’anticipation possible par enfant.
Persévérant, il réitérera sa demande début 2010 et fin 2011, sans obtenir gain de cause. Il saisira une juridiction de sécurité sociale, qui le déboutera aussi.
Discrimination à l’égard des hommes
Mais en 2015, la cour d’appel de Nîmes juge que notre assuré pouvait effectivement faire valoir ses droits à la retraite à 61 ans sans minoration, retenant que l’article 20 en cause établissait une discrimination non justifiée à l’égard des hommes.