http://abonnes.lemonde.fr

  • La mort par asphyxie d’Adama Traoré confirmée par une contre-expertise
    http://abonnes.lemonde.fr/police-justice/article/2017/07/04/le-deces-par-asphyxie-d-adama-traore-confirme-par-une-contre-experti

    Adama Traoré, jeune homme de 24 ans mort le 19 juillet 2016 à Beaumont-sur-Oise (Val-d’Oise), lors de son interpellation par des gendarmes, a succombé à une asphyxie. C’est ce que montrent les résultats de la contre-expertise demandée par sa famille, révélés par Le Parisien et confirmés au Monde par une source proche du dossier.

    Ces éléments contredisent les explications de l’ancien procureur de Pontoise, Yves Jannier. Le 21 juillet, le magistrat avait ainsi déclaré qu’Adama Traoré « avait une infection très grave », « touchant plusieurs organes » ; il précisait en outre que son autopsie n’avait pas relevé de « trace de violence significative ».

    #Violences_policières #France

  • Suivi des utilisateurs déconnectés : victoire judiciaire pour Facebook aux Etats-Unis
    http://abonnes.lemonde.fr/pixels/article/2017/07/04/suivi-des-utilisateurs-deconnectes-victoire-judiciaire-pour-facebook

    Le tribunal de San Jose, en Californie, a donné raison à Facebook, contre lequel plusieurs utilisateurs avaient porté plainte pour violation de la vie privée. Ce groupe d’utilisateurs reprochait plus précisément au réseau social de continuer à enregistrer des informations sur leur navigation après que ces derniers se furent déconnectés de Facebook. Ils s’appuyaient sur la loi californienne encadrant les écoutes téléphoniques.

    Dans sa décision, le juge a estimé que les plaignants n’avaient pas apporté la preuve du préjudice subi, et que les utilisateurs auraient pu utiliser des fonctions de navigation privée pour éviter cet enregistrement de données personnelles. Il estime également que la pratique n’entre pas dans le cadre d’une interception de communication.

    #Facebook #vie_privée #humour_juridique

  • Perturbateurs endocriniens : la France capitule
    http://abonnes.lemonde.fr/pollution/article/2017/07/04/perturbateurs-endocriniens-la-france-cede-a-l-allemagne_5155485_1652

    Après des mois de discussion, nous avançons vers le premier système réglementaire au monde pourvu de critères légalement contraignant, définissant ce qu’est un perturbateur endocrinien, s’est félicité Vytenis Andriukaitis, le commissaire européen à la santé. C’est un grand succès. Une fois mis en œuvre, ce texte assurera que toute substance utilisée dans les pesticides et identifiée comme perturbateur endocrinien pour les humains ou les animaux pourra être évaluée et retirée du marché. »

    Ce n’est pas l’avis du Danemark, qui a voté contre la proposition. « Le niveau de preuves requis pour identifier les substances chimiques comme perturbateurs endocriniens est bien trop élevé », a déclaré le ministère danois de l’environnement au Monde.

    « Nous regrettons que la Commission n’ait pas écouté la grande inquiétude du Danemark, de la Suède et d’autres, soulignant que les critères proposés exigent, pour pouvoir identifier un perturbateur endocrinien, un niveau de preuve jamais exigé jusqu’à présent pour d’autres substances problématiques comme les cancérogènes, les mutagènes et les reprotoxiques, précise au Monde Karolina Skog, la ministre suédoise de l’environnement. Cela ne reflète pas l’état actuel du savoir scientifique. Au total, ces critères ne remplissent pas le niveau de protection attendu par les co-législateurs. »

    Au total, M. Hulot a néanmoins salué l’adoption de ces critères comme « une avancée considérable », ouvrant « une brèche qui ne va pas se refermer ». Cruelle ironie, la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme, elle, évoque « une définition au goût amer », à l’unisson de plus de 70 ONG européennes, qui « regrettent le caractère insuffisant des critères » et appellent le Parlement européen à les rejeter.

    #Environnement #Agriculture #Perturbateurs_endocriniens

  • Définition des perturbateurs endocriniens : la France cède à l’Allemagne

    http://abonnes.lemonde.fr/pollution/article/2017/07/04/perturbateurs-endocriniens-la-france-cede-a-l-allemagne_5155485_1652

    La majorité qualifiée a été obtenue à la Commission européenne grâce à un revirement de la France. Elle s’opposait pourtant depuis plus d’un an, aux côtés du Danemark et de la Suède, à un texte jugé trop peu protecteur de la santé publique et de l’environnement par les sociétés savantes et les organisations non gouvernementales. Berlin, favorable à une réglementation peu contraignante pour l’industrie, a eu gain de cause.

    Les scientifiques demandaient qu’une échelle graduée soit mise en place, distinguant les perturbateurs endocriniens « suspectés », « présumés » et « avérés » – à la manière de la classification des substances cancérogènes. Cette échelle, qui aurait permis une réponse réglementaire graduée, en fonction du niveau de preuve disponible pour chaque substance, n’a pas été incluse dans les critères adoptés. En l’état, selon les scientifiques, le niveau de preuve requis pour identifier une substance comme perturbateur endocrinien est trop élevé pour garantir au texte son efficacité.

    En outre, le texte adopté conserve une clause, ajoutée à la demande expresse de Berlin, permettant, en contravention avec les objectifs du texte, d’empêcher un retrait des pesticides « conçus spécifiquement pour perturber les systèmes endocriniens des insectes ciblés ». Et ce, alors qu’ils sont aussi susceptibles d’atteindre ceux d’autres espèces animales, dont les humains.

    Cruelle ironie, la Fondation Nicolas Hulot pour la nature et l’homme, elle, évoque « une définition au goût amer », à l’unisson de plus de 70 ONG européennes, qui appellent le Parlement européen à rejeter les critères adoptés.

  • Accusée par des complotistes, la NASA nie avoir envoyé des enfants-esclaves sur Mars
    http://abonnes.lemonde.fr/big-browser/article/2017/07/03/accusee-par-des-complotistes-la-nasa-nie-avoir-envoye-des-enfants-es

    Il se met donc rapidement à évoquer un trafic de grande ampleur : on enverrait des enfants sur Mars qui, au terme d’un voyage de vingt ans, deviendraient esclaves d’une colonie installée sur cette planète. « Nous pensons qu’il existe une colonie sur Mars, peuplée d’enfants kidnappés et envoyés dans l’espace, explique Robert David Steele. Une fois sur Mars, ils n’ont pas d’autre alternative que de devenir esclaves de la colonie. » M. Jones renchérit en affirmant que la NASA, l’agence spatiale américaine, ne « souhaite pas qu’on regarde de plus près » ce qui se passe sur Mars, preuve qu’il s’y passe des choses pas très nettes.

    Il y a quelques années, cette théorie conspirationniste aurait sans doute été reléguée au rang des affabulations proférées par quelques hurluberlus dans des zones lointaines de l’Internet, là où elles n’auraient eu aucune chance d’avoir un impact sur le réel. Mais la NASA a démenti les propos de M. Steele sur la supposée colonie d’esclaves. Un porte-parole interrogé par le site Daily Beast a coupé court aux fantasmes en affirmant :

    « Il n’y a pas d’êtres humains sur Mars. »

    Dans cette histoire, c’est moins le contenu farfelu de la théorie qui pose question que le fait que l’agence spatiale américaine ait pris le temps de répondre. Pourquoi une institution de cette ampleur se donne-t-elle la peine de réfuter de tels propos ?

    Ce démenti semble montrer la place qu’occupent désormais M. Jones, son émission et son site Web dans le paysage médiatique américain. Bien sûr, les théories conspirationnistes existent depuis longtemps. Mais elles sont aujourd’hui considérées plus sérieusement dans un espace médiatique où les fausses informations se mélangent aux vraies, non plus seulement sur Internet mais jusque dans la communication présidentielle.

    #fake_news #complotisme

  • Donald Trump s’en prend de nouveau à des journalistes sur Twitter
    http://abonnes.lemonde.fr/international/article/2017/07/01/donald-trump-s-en-prend-de-nouveau-a-des-journalistes-sur-twitter_51

    Depuis jeudi, les éditoriaux et les débats sur ces commentaires présidentiels ont quasiment éclipsé toute autre actualité. Samedi le New York Times y a encore consacré son éditorial, revenant sur le caractère misogyne et insultant des attaques. « Apparemment, il ne se rend pas compte qu’il est une gêne pour lui-même », écrit le quotidien, qui se demande si la « vulgarité » de M. Trump servira désormais de modèle pour les futurs présidents.

    Seuls la garde rapprochée de M. Trump et ses partisans sur Twitter ont défendu cette attitude vindicative. « Les Américains ont élu un combattant. Il combat le feu avec le feu », a affirmé la porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Huckabee. Même Melania Trump, qui s’est engagée à combattre le harcèlement sur Internet, a cru bon de rappeler dans un communiqué que « quand son mari est attaqué il rend les coups au centuple ».

    Pour ses plus fidèles partisans, la guerre que l’administration Trump a déclenchée avec la presse relève d’une stratégie. Elle aurait pour objectif de conforter la base trumpiste dans l’idée que les médias généralistes ont une couverture partiale du président. Et qu’il est donc en droit de les critiquer.

    #Twitter #Trump #Médias

  • Dans un tweet, Donald Trump se met en scène en train de tabasser CNN
    http://abonnes.lemonde.fr/international/article/2017/07/02/dans-un-tweet-donald-trump-se-met-en-scene-en-train-de-tabasser-cnn_

    Jusqu’où ira Donald Trump dans ses attaques contre les médias ? Dimanche 2 juillet, le président des Etats-Unis s’en est à nouveau pris à la chaîne d’information américaine CNN, cette fois dans un tweet d’une rare violence publié tôt dans la matinée, comme il en a l’habitude.

    Dans ce message, le républicain détourne une fameuse mise en scène télévisée datant de 2007 durant laquelle il apparaît au pied d’un ring de catch. On y voit Donald Trump – qui n’est alors que magnat de l’immobilier et star de la téléréalité – prétendre (catch oblige) tabasser Vince McMahon, fondateur de la WWE (World Wrestling Entertainment, Inc).

    Dans la version de 2017, c’est un personnage avec le logo de la chaîne CNN à la place de la tête que M. Trump prend par le cou et met au sol. Il lui assène ensuite plusieurs coups de poing avant de se relever et de partir. Le tweet est légendé avec les hashtags : #FraudnewsCNN et #FNN pour « Fraud News Network ».

    La diffusion de cette scène de bagarre marque aussi un nouveau cap dans l’usage débridé de Twitter par le président des Etats-Unis. La veille, celui-ci s’est également illustré en s’en prenant au réveil aux deux animateurs de « Morning Joe », l’émission matinale de la chaîne MSNBC, Joe Scarborough et Mika Brzezinski. Se moquant de leurs « mauvaises audiences » et s’indignant de leurs critiques à son égard. M. Trump s’en était alors pris une nouvelle fois à CNN, qualifiée de « fake news et de journalisme de caniveau ».

    #Twitter #Trump #Médias

  • Pourquoi la décision de Bruxelles concernant Google est historique
    http://abonnes.lemonde.fr/economie/article/2017/06/28/pourquoi-la-decision-de-bruxelles-concernant-google-est-historique_5

    « On s’est longtemps demandé si le mode de fonctionnement de ces sociétés de l’Internet était si complexe, que les autorités de la concurrence ne pouvaient pas agir. La Commission vient de prouver l’inverse, ajoute Mme de Silva. Sa démarche analytique crée un cadre de référence très fort pour agir, elle nous a permis de faire un pas de géant. »

    L’institution a voulu prouver que le moteur de recherche « général » de Google était en position dominante et qu’il en a abusé sur un marché connexe, Google Shopping. Elle a voulu démontrer ce qui se passait sur le moteur avant et après les changements dans son logiciel ; elle s’est fondée sur la manière dont les autres agents économiques avaient été impactés pour montrer qu’ils étaient discriminés.

    Même la méthode choisie pour obliger Google à changer de comportement est jugée novatrice. Le géant californien ne dispose que de 90 jours pour faire « respecter le simple principe d’égalité de traitement entre les services concurrents de comparaison de prix et son propre service », selon la Commission.

    L’institution ne lui impose aucune solution technique, juste une obligation de résultat. En cas de non-respect, le groupe s’expose à une astreinte journalière très sévère : jusqu’à 5 % du chiffre d’affaires moyen réalisé quotidiennement au niveau mondial par Alphabet, la société mère de Google.

    #Google #Europe #politique_algorithmes

  • Alerte aux écrans pour les enfants
    http://abonnes.lemonde.fr/sciences/article/2017/06/26/alerte-aux-ecrans-pour-les-enfants_5151417_1650684.html

    Dans la communauté scientifique, la référence à l’autisme passe mal. « Aucune étude scientifique convaincante ne permet d’établir un lien entre autisme et écrans aujourd’hui. Des parents peuvent être culpabilisés à tort », tempère Michel Desmurget, chercheur en neurosciences cognitives à ­l’Inserm. « En revanche, ce message est pleinement fondé sur les effets délétères des écrans sur les troubles de la relation, la mémoire, les apprentissages plus tard, les habiletés sociales, comme le montre la littérature scientifique. »

    Quid des autres effets potentiels des écrans ? Ceux de la télévision sur la santé physique et mentale sont documentés de longue date dans toutes les tranches d’âge. Quant aux écrans interactifs, ils sont associés à des troubles du sommeil, de l’attention, de la vision, des difficultés d’apprentissage, un déficit d’activité physique… chez les enfants d’âge scolaire et les collégiens. Moins nombreuses chez les tout-petits, les données ne sont guère rassurantes.

    Ainsi, une étude de la Canadienne Catherine ­Birken, présentée en mai dans un congrès, menée auprès de 894 familles avec un bébé âgé de 6 mois à 2 ans, conclut que plus un enfant passe de temps avec un smartphone ou une tablette, plus il est susceptible de développer un retard de langage. Pour chaque demi-heure supplémentaire passée par jour sur un appareil portable, le risque augmenterait de 49 %.

    Récemment, des chercheurs de l’université de Londres ont mesuré l’effet des écrans tactiles sur le sommeil d’enfants de 6 à 36 mois. L’étude, publiée dans la revue Scientific Reports en avril, a été réalisée en ligne, auprès de 715 familles. Premier constat : 75 % des 6-36 mois manipulent quotidiennement des écrans tactiles, et 92 % après 2 ans. Le temps quotidien de tablette est de 9 minutes chez les 6-11 mois, et atteint 45 minutes chez les 26-36 mois.

    L’impact est net sur le sommeil : les écrans tactiles allongent le temps d’endormissement et réduisent la durée du sommeil nocturne. Chaque heure d’écran tactile correspond à une baisse de quinze minutes du temps de sommeil, selon les auteurs, qui rappellent que « le sommeil joue un rôle important dans le neurodéveloppement et la plasticité synaptique [des liaisons entre neurones] ».

    Les Américains Brandon McDaniel et Jenny Radesky ont, eux, exploré les effets de la distraction des parents par des technologies, sur leurs jeunes enfants. C’est le concept de technoférence, définie comme des interruptions au quotidien de conversations ou du temps passé avec quelqu’un par les smartphones, tablettes, etc.

    L’étude, menée par questionnaire auprès de 170 familles avec un enfant de 3 ans, a été publiée le 24 mai dans la revue Child Development. 40 % des mères et 32 % des ­pères estiment avoir un usage problématique des smartphones. Et près d’un parent sur deux comptabilise en moyenne trois technoférences quotidiennes dans le temps passé avec son enfant.

    Le taux de troubles du comportement est plus élevé quand la mère se déclare technoférente, alors que ce n’est pas le cas si c’est le père. « C’est une étude intéressante, mais les effets semblent relativement faibles, tempère le pédopsychiatre Bruno Falissard. Peut-être que la vraie question est : pourquoi ces parents regardent-ils si souvent leur téléphone ou leur tablette, y compris quand ils sont avec leurs enfants ? Est-ce que ce n’est pas cela qui explique ­ensuite le problème d’interaction parent-enfant ? »

    #Ecrans #santé_publique

  • Les mèmes sont devenus un objet d’étude
    http://abonnes.lemonde.fr/sciences/article/2016/06/06/les-memes-sont-devenus-un-objet-d-etude_4939206_1650684.html

    Pour mieux appréhender ce concept, une nouvelle collection universitaire de l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne propose ce bref ouvrage à la construction assez hétérogène. Il mêle en effet textes et images, essais et interviews, lexiques et graphiques, bibliographie et batterie de questions. L’intérêt est de croiser sur ce sujet les ­regards académiques d’anthropologues et de sociologues comme de spécialistes de sciences plus dures.

    #mèmes #culture_participative

  • Sous pression, Facebook détaille ses mesures contre l’apologie du terrorisme
    http://abonnes.lemonde.fr/pixels/article/2017/06/16/sous-pression-facebook-detaille-ses-mesures-contre-l-apologie-du-ter

    Concernant l’identification des comptes problématiques, Facebook annonce aussi avoir « commencé à travailler sur des systèmes permettant d’agir sur les comptes terroristes à travers toutes nos plateformes, y compris WhatsApp et Instagram ».

    Le réseau social précise qu’« en raison des données limitées collectées par certaines de nos applications, la possibilité de partager des données à travers toute notre famille [de services] est indispensable à notre effort ». Une phrase loin d’être anodine, car derrière celle-ci se trouvent d’importants enjeux, qui dépassent la question de la lutte contre le terrorisme.

    Concernant l’identification des comptes problématiques, Facebook annonce aussi avoir « commencé à travailler sur des systèmes permettant d’agir sur les comptes terroristes à travers toutes nos plateformes, y compris WhatsApp et Instagram ».

    Le réseau social précise qu’« en raison des données limitées collectées par certaines de nos applications, la possibilité de partager des données à travers toute notre famille [de services] est indispensable à notre effort ». Une phrase loin d’être anodine, car derrière celle-ci se trouvent d’importants enjeux, qui dépassent la question de la lutte contre le terrorisme.

    Le texte publié par Facebook laisse passer un message clair : si vous voulez que nous luttions efficacement contre le terrorisme, laissez-nous partager les données de nos utilisateurs comme nous le souhaitons.

    #Facebook #Terrorisme #Radicalisation

  • Législatives 2017 : Meyer Habib, favori de Benyamin Nétanyahou et des rabbins israéliens

    http://abonnes.lemonde.fr/politique/article/2017/06/16/meyer-habib-favori-de-benyamin-netanyahou-et-des-rabbins-israeliens_

    Benyamin Nétanyahou a un candidat favori au second tour des législatives françaises : Meyer Habib. C’est son ami de longue date, son intermédiaire privilégié auprès des dirigeants français. Le 25 mai, le premier ministre israélien a même enregistré une vidéo de soutien, tout sourire à ses côtés, diffusé sur le compte Twitter du candidat. Cela suffira-t-il ? Meyer Habib (UDI) joue gros dans la 8e circonscription des Français de l’étranger. Il a été devancé au premier tour par Florence Drory, la candidate adoubée par La République en marche (35,51 % des voix, contre 36,73 %).

    Dans cette circonscription très éclatée, regroupant huit pays dont l’Italie, la Grèce, la Turquie et Israël, le taux de participation est si bas (9,40 % le 5 juin, sur 121 399 inscrits) que chaque voix pèse lourd. Meyer Habib, lui, mise tout sur les Franco-Israéliens, qui lui ont accordé 71 % de leurs suffrages.

    Lire aussi : Législatives 2017 : la République en marche en tête chez les Français de l’étranger

    « Implantations »

    Lors d’un débat avec sa concurrente, jeudi 15 juin, sur la chaîne i24news, il s’est montré offensif, attaquant sa concurrente, souvent désarçonnée, sur son appartenance passée au PS. « Le Parti socialiste a une obsession, ce qu’on appelle les colonies. Ce que j’appelle les implantations », a-t-il dit. Meyer Habib a aussi cité à plusieurs reprises, parmi les soutiens à Florence Drory, le journaliste Charles Enderlin, ancien correspondant de France 2 à Jérusalem, qu’il voit comme un épouvantail pour la frange la plus radicale de la communauté binationale.

    Meyer Habib affirme s’être « battu comme un lion » contre le terrorisme à l’Assemblée et appelle la France à « s’inspirer des méthodes israéliennes ». Tout en espérant la réussite d’Emmanuel Macron, qu’il prétend très bien connaître, le député sortant revendique surtout ses liens avec M. Nétanyahou.

    Il ne recule devant rien pour décrédibiliser son adversaire, quitte à brandir la Torah. Dans un courriel du 12 juin adressé aux électeurs, il assure que Florence Drory « excite le reste de la circonscription » contre lui et l’accuse d’être « une candidate propalestinienne », « chantre d’une laïcité antireligieuse ». Un comble pour cette Franco-Israélienne, vétéran du PS, engagée auprès de François Mitterrand, de Jack Lang et de Ségolène Royal, mais aussi épouse d’un ancien ambassadeur israélien à Rome.

    Dans ce même courriel, Meyer Habib appelle les Franco-Israéliens à la mobilisation : « Pour la première fois, avec moi, vous avez un député qui vous ressemble : profondément attaché à la France, sioniste, partisan de l’intégrité d’Eretz Israël et fidèle aux valeurs de la Torah. » Les références religieuses dans une élection législative française ne dérangent nullement Meyer Habib. Il a même demandé le soutien du grand rabbin séfarade d’Israël, Rav Itshak Yossef, qui apparaît à ses côtés dans une vidéo en hébreu.

    Il a aussi appelé à la rescousse les rabbins francophones de Netanya, ville côtière où la communauté française est très présente. Ils ont réclamé un sursaut des électeurs, au nom de la défense des valeurs de la Torah et de l’intégrité d’Israël. L’un d’eux estime même que le vote pour Meyer Habib est un devoir kadoch, c’est-à-dire sacré.

    « Pas une démarche normale »

    « Je suis très surprise qu’il en appelle aux rabbins, dit Florence Drory. Ce n’est pas une démarche normale en France, pays laïque, dans une élection. En outre, il méprise les électeurs du reste de la circonscription. Il fait ainsi l’aveu qu’il n’a rien fait pour eux comme député, en ne se préoccupant que d’Israël. »

    Le député sortant a lancé sa campagne en accusant le Quai d’Orsay de « biais antisioniste ». Dans un courrier daté du 3 mai, il interpellait le ministère des affaires étrangères au sujet de l’envoi des brochures électorales aux Français vivant en Cisjordanie et à Jérusalem. Le député s’élevait contre la mention sur l’enveloppe des « territoires palestiniens » comme adresse. « Il est grand temps de changer de logiciel, écrivait Meyer Habib. C’est une erreur d’analyse de se focaliser sur les frontières, d’être aveuglé par la question des “territoires” ou de prétendues “colonies”. »

    Les « prétendues » colonies font l’objet d’un consensus international depuis cinquante ans : elles sont considérées comme des implantations illégales. « Ce n’est pas un conflit de territoire, c’est, hélas, un conflit de civilisation », a-t-il renchéri pendant le débat télévisé.

    Depuis son élection en 2013, Meyer Habib a pris l’habitude de relayer, en France, les éléments de langage traditionnels de la droite nationale religieuse israélienne. Le 17 janvier, dans l’Hémicycle, le député avait dénoncé la conférence internationale organisée par la France, quelques jours plus tôt, afin d’encourager une reprise des négociations israélo-palestiniennes. A cette occasion, il avait lancé : « Jamais un juif ne sera un colon à Jérusalem, jamais un juif ne sera un colon en Judée ! Jamais ! » La « Judée-Samarie » est l’appellation biblique de la Cisjordanie, qu’affectionne la droite messianique.

  • Patrick Drahi, le patron d’Altice, cède une partie de ses journaux
    http://abonnes.lemonde.fr/actualite-medias/article/2017/06/14/patrick-drahi-le-patron-d-altice-cede-une-partie-de-ses-journaux_514

    La branche médias de son opérateur SFR a annoncé un projet de cession d’une dizaine de titres et veut se concentrer sur le développement numérique de « L’Express » et « Libération ».

    Revente des magazines pour se concentrer sur l’information : ce qui donne le plus de pouvoir.

    #Médias #concentration #Patrick_Drahi

  • Sécurité alimentaire : l’agence européenne minée par les conflits d’intérêts, selon une ONG
    http://abonnes.lemonde.fr/planete/article/2017/06/14/securite-alimentaire-l-expertise-europeenne-mise-en-cause-par-les-co

    L’ONG a analysé les déclarations publiques d’intérêts de plus de deux cents scientifiques répartis dans les dix groupes d’experts de l’agence européenne. Chacun d’eux est dévolu à un domaine précis (pesticides, OGM, additifs alimentaires, matériaux au contact des aliments…) et se trouve régulièrement amené à évaluer la sûreté des substances entrant dans la chaîne alimentaire. C’est-à-dire de tout ce qui finit, d’une manière ou d’une autre, dans l’assiette des Européens.

    « Nous avons analysé un à un tous les liens d’intérêts déclarés par ces experts et nous concluons que 46 % d’entre eux sont en conflit d’intérêts, direct ou indirect, avec des entreprises dont ils sont censés évaluer les produits », explique Martin Pigeon, chercheur à CEO et auteur du rapport – en partie fondé sur des données réunies entre janvier et avril 2016 par la journaliste indépendante Stéphane Horel, devenue depuis collaboratrice du Monde.

    Ces liens peuvent être la détention d’actions, des contrats de consultance, des financements de recherche… Ils peuvent être directs si ce sont des entreprises qui sont à l’origine des flux financiers, indirects si ces financements transitent par d’autres organisations (sociétés savantes, associations professionnelles, organismes de rattachement…).

    « Pour être clair, les intérêts financiers de tous les experts travaillant dans les panels de l’EFSA ont été minutieusement évalués, en accord avec les règles strictes d’indépendance de l’agence », se défend-on à l’EFSA.

    L’agence considère généralement comme un conflit d’intérêts une situation où l’expert a reçu des financements liés au produit qu’il est chargé d’évaluer. Schématiquement, un scientifique ayant perçu d’une entreprise un financement en rapport avec un produit A, peut conduire une expertise sur un produit B commercialisé par la même entreprise sans que le lien avec l’industriel soit considéré comme un conflit d’intérêts par l’EFSA.

    #Santé_Publique #Alimentation #Conflits_intérêt

  • Les ONG ont-elle une part de responsabilité dans la crise des migrants en Méditerranée ?
    http://abonnes.lemonde.fr/afrique/article/2017/06/14/les-ong-ont-elle-une-part-de-responsabilite-dans-la-crise-des-migran

    Sauver des vies ou contrôler l’immigration ?

    C’est dans ce contexte qu’a été publié, le 9 juin 2017, le rapport « Blaming the Rescuers » des chercheurs Charles Heller et Lorenzo Pezzani. Sur la base de données empiriques, ce rapport conteste les accusations de « Frontex » et rappelle que l’agence reprochait déjà à l’opération « Mare Nostrum » de favoriser l’immigration irrégulière.

    Or, loin de diminuer le nombre de morts, la fin de cette opération avait au contraire conduit à une augmentation de ces décès. Dans un précédent rapport, intitulé « Death by Rescue » et publié en 2016, les mêmes chercheurs avaient mesuré la mortalité liée aux traversées de la Méditerranée, en comparant le nombre de morts en mer aux nombres d’arrivées en Europe, et démontré qu’il était beaucoup plus dangereux de migrer sous « Triton » que sous « Mare Nostrum ».

    Obsession sécuritaire

    Derrière ces polémiques, c’est aussi une question de légitimité qui se joue. Qui donc a le droit d’intervenir en mer et de venir à la rescousse des migrants ?

    « Frontex » défend le droit des Etats à contrôler leurs frontières et à exercer leur souveraineté. Les associations défendent, elles, une autre vision : étant donné l’incapacité des Etats à faire respecter certains droits fondamentaux (à commencer par le droit à la vie), il est nécessaire que la société civile intervienne.

    Le raisonnement n’est pas nouveau : c’est également au nom de l’insuffisance de l’action des Etats que des associations se sont impliquées dans la lutte contre la pauvreté ou la défense des minorités, par exemple. Ce qui est nouveau, en revanche, c’est l’application d’un tel raisonnement à un domaine régalien, jusque-là réservé à l’Etat.

    #Migrants #ONG #Politique_Europe

  • Vers une mise à plat du dispositif des instituts français de recherche au Moyen Orient
    A l’heure où l’IFPO (donc en fait le ministère des Affaires étrangères) licencie dans l’ingratitude une partie de ses salariés en Syrie (http://abonnes.lemonde.fr/proche-orient/article/2017/06/08/l-institut-francais-du-proche-orient-dans-la-tourmente_5140966_3218.), un rapport de l’IREMMO appelle à une remise à plat du dispositif français de recherche en SHS au Moyen Orient

    La région Maghreb-Moyen-Orient, priorité de politique étrangère pour le nouveau quinquennat ? - iReMMO
    http://iremmo.org/rencontres/controverses/region-maghreb-moyen-orient-priorite-de-politique-etrangere-nouveau-quinquen

    Les Instituts Français de Recherche à l’Etranger
    Plus spécifiquement encore, une réflexion poussée doit enfin être conduite, avec une large remise à plat, sur l’outil remarquable, mais aujourd’hui malmené que constituent les Instituts Français de
    Recherche à l’Etranger (IFRE). Bénéficiant souvent d’une ancienneté, d’une image, d’une notoriété inhérente à la longue tradition de présence de notre pays dans cette zone, ces acteurs constituent des
    atouts stratégiques à redécouvrir. On compte aujourd’hui le Centre Jacques Berque à Rabat, le CEDEJ (Centre d’études et de documentation économiques, juridiques et sociales) au Caire et à Khartoum, le Centre français d’archéologie et de sciences sociales de Sanaa (CEFAS, actuellement au Koweït), le Centre de recherche français à Jérusalem (CRFJ), l’Institut de recherche sur le Maghreb contemporain (IRMC, à Tunis), l’Institut français de recherche en Iran (IFRI) à Téhéran, l’Institut français du Proche Orient (IFPO) à Beyrouth, Amman, Erbil et les territoires palestiniens en attendant peut-être de
    retourner en Syrie, l’Institut français d’études anatoliennes Georges Dumézil (IFEA) à Istanbul. Après avoir subi des baisses de crédit et de personnels, après avoir été trop légèrement pointés comme
    dispendieux et comme proies faciles pour des réductions budgétaires, ces instituts qui continuent d’effectuer un travail difficile dans des zones en crise, au contact direct d’une population très demandeuse, permettent en réalité à coût réduit une connaissance importante des sociétés, un échange avec leurs analystes les plus pointus, des publics intéressés, et maintiennent la présence d’une France ouverte, telle qu’elle est encore souhaitée par des segments entiers de ces sociétés.
    Ils doivent faire l’objet désormais d’une attention soutenue. Il convient qu’ils soient considérés directement dans la perspective de notre ambition affichée, mais rarement explicitée, de développer
    une politique d’influence, au sein d’une diplomatie publique qui s’adresse aux forces vives des sociétés civiles. Une réflexion sur leur gouvernance et sur leur inscription directe dans le processus de
    connaissance de la région est indispensable en combinant d’une part respect de la liberté universitaire, et d’autre part utilité politique et sociale des recherches menées. Il importe d’ouvrir, de diversifier
    considérablement le recrutement des cadres dirigeants et chercheurs qui les animent, et qui tournent trop souvent, au fil des dernières années, autour du même vivier. Pour ce faire, une politique attractive
    des élites de la recherche doit être imaginée. Il importe surtout de les doter des moyens décents de développer une politique d’influence (missions, invitations, colloques, revues, sites internet,
    diplomatie publique, voire pourquoi pas une journée annuelle de rendez-vous stratégique telle que d’autres pays en proposent via des think tanks, comme la Grande-Bretagne avec le Manama Dialogue
    organisé par l’IISS de Londres). A cette fin, une clarification/ rationalisation de la présence intellectuelle française dans certains pays est indispensable (pour éviter les doublons entre filières francophones universitaires, université française à part entière, antennes, centres de recherche variés ou autres entités, comme au Caire par exemple).

    #ifre

  • Plongée dans la tête des kamikazes

    Après chaque attentat commandité ou inspiré par l’Etat islamique (EI), l’organisation publie un message de revendication exposant ses éléments de langage. Elle y martèle l’idée que ses opérations extérieures constituent une réponse aux bombardements de la " coalition internationale " en Syrie et en Irak, qui fragilisent son assise territoriale et la subsistance même du -" califat " autoproclamé.

    Cette lecture, parfaitement encadrée par ses organes de propagande, constitue l’argument central de l’EI pour légitimer les attentats de Paris, Bruxelles, Manchester ou Londres, et susciter de nouvelles vocations. Mais comment les candidats au martyre intègrent-ils ce mot d’ordre ? Comment justifient-ils auprès de leurs proches le mas-sacre de civils ? Quels sont les ressorts qui les convainquent, in fine, de sacrifier leur vie à cette cause ?

    Le Monde a analysé la façon dont les terroristes de Paris et de Bruxelles avaient justifié leurs missions en confrontant des lettres laissées à leurs proches, les déclarations des rares membres de cette cellule à avoir été interpellés et des éléments de propagande. Entre considérations géopolitiques, impératifs religieux et rêveries mystiques, leurs propos forment un tissu complexe décrivant le processus de fabrication d’un kamikaze.

    Un argumentaire ambigu, dans lequel le " djihad défensif " glisse insensiblement vers sa version offensive, la protection des musulmans désinhibant le désir d’une victoire finale de l’islam contre la " mécréance ". Sur cette base idéologique martelée par la propagande de l’EI se greffent des causes plus intimes : un sentiment de culpabilité qui, transcendé par la promesse d’un au-delà purificateur, achève de les convaincre de consentir au sacrifice ultime.

    Parmi les documents retrouvés par les enquêteurs figurent trois lettres manuscrites adressées par Salah Abdeslam à sa mère, à sa sœur et à sa petite amie. Les policiers ont également exhumé d’un ordinateur des fichiers enregistrés par les frères Ibrahim et Khalid El Bakraoui, qui se sont fait respectivement exploser à l’aéroport de Zaventem et dans le métro de Bruxelles, le 22 mars 2016. Là encore, les kamikazes s’adressent à des femmes : mère, sœur et compagne.

    Le " djihad défensif " : la défense des opprimés

    Le document le plus élaboré de cette correspondance est un enregistrement sonore de trente-trois minutes, réalisé par Ibrahim El Bakraoui, intitulé" Pour ma mère ". Dans ce message posthume, l’aîné de la fratrie anticipe les condamnations de responsables religieux et présente le djihad comme une réponse à l’oppression dont seraient victimes les musulmans.

    " Donc voilà, maman, tu vas entendre tout et n’importe quoi de la part des gens, donc je voudrais clarifier une ou deux situations (…). Il y a des personnes qui ont des barbes de deux mètres, qui connaissent Ie Coran par cœur, voilà, qui pratiquent, euh, l’islam on va dire ça comme ça. Mais ils mentent sur Allah et son Messager (…). Ils vont nous traiter de monstres, euh, de non-musulmans. Malgré qu’on n’a pas de science, malgré qu’on connaît pas le Coran par cœur, On a un cœur qui vit et (…) lorsqu’on voit les musulmans qui sont persécutés depuis des décennies (…) et que ces gens-là n’ont jamais déclaré le djihad dans le sentier d’Allah, mais qu’ils se permettent de critiquer les gens qui combattent, (…) notre rendez-vous avec eux le jour de la résurrection et devant Allah, exalté soit-il, on verra les arguments qu’ils vont avancer. "

    L’engagement djihadiste d’Ibrahim El Bakraoui, tel qu’il l’exprime, trouve son origine dans un sentiment de révolte et d’humiliation. A en croire les déclarations aux enquêteurs d’un de ses complices, Mohamed Abrini, cette colère sourde préexistait à la création de l’EI. " Ce genre de détermination, je l’avais déjà avant quand je voyais le massacre en Palestine ", explique le seul membre du commando à ne pas avoir déclenché sa bombe à l’aéroport de Bruxelles.

    Ce sentiment d’impuissance face aux souffrances des musulmans a atteint son acmé avec le déclenchement de la guerre civile syrienne. Il trouvera concomitamment une issue avec la proclamation du " califat ", le 29 juin 2014, perçu comme une promesse de réparation des humiliations passées.

    Dans son message à sa mère, Ibrahim El Bakraoui présente ainsi l’EI comme un espoir de revanche historique : " Maintenant, nous, gloire à Dieu, depuis des centaines d’années, on a perdu l’Andalousie, on a perdu la Palestine, on a perdu, euh, tous les pays musulmans en fait, l’Afghanistan, l’lrak, la Syrie, le Maroc, il est gouverné par un tyran, la Tunisie, l’Algérie tous les pays, gloire à Dieu, il y a un Etat islamique qui a été créé. "

    Cette fierté retrouvée de l’oumma (la communauté des musulmans), près d’un siècle après l’abolition du dernier califat ottoman, en 1924, Khalid El Bakraoui tente de l’expliquer à son épouse dans une lettre d’adieu manuscrite : " Sache Nawal qu’il y a toujours eu des Etat islamique. Le dernier a été detruit début des annes 1920, mais ensuite les gens ont abandonner le djihad et Allah depuis n’a cesser de nous humilier (…) Mais aujourd’hui nous avons un Etat islamique qui a remporter beaucoup de victoir. "

    Les promesses du nouveau " califat " seront rapidement contrariées, deux mois seulement après sa création, par la formation d’une coalition internationale visant à endiguer sa propagation. Les membres de cette offensive militaire deviennent aussitôt une cible privilégiée de l’EI. A compter de cette date, l’organisation multiplie les appels à frapper les pays occidentaux, au premier rang desquels la France.

    Cette lecture des attentats comme une réponse aux bombardements est développée devant les enquêteurs par Osama Krayem, qui affirme avoir renoncé à la dernière minute à déclencher sa bombe dans le métro de Bruxelles : " Tant qu’il y aura des coalitions et des bombardements contre l’Etat islamique, il y aura des attentats. Il y aura une riposte de la part de l’Etat islamique. Ils ne vont pas offrir des fleurs ou du chocolat ", explique-t-il.

    " Le “djihadisme”, comme vous l’appelez, moi j’appelle cela l’islam ", insiste-t-il, avant de présenter le meurtre d’innocents comme une réponse aux victimes civiles de la coalition : " C’est triste parfois de dire qu’on peut faire la même chose à une population parce que leur gouvernement fait la même chose avec notre population. Les civils en Syrie, ce ne sont pas des combattants. C’est là que l’Etat - islamique - dit : “Œil pour œil et dent pour dent”. "

    Si le nombre de civils tués par la coalition en Irak et en Syrie est impossible à établir de façon précise, il a été estimé par l’ONG indépendante Airwars dans une fourchette comprise entre 3 530 et 5 637 victimes depuis le début de l’intervention, en août 2014. Cette réalité est abondamment exploitée par les cercles djihadistes sur les réseaux sociaux – photos de corps déchiquetés à l’appui – pour justifier la campagne d’attentats visant l’Occident.

    Le djihad " offensif " : la soumission des mécréants

    Cette approche " militaire " du djihad défensif permet aux sympathisants de l’EI de tuer sans remords : ils ne se vivent pas comme des terroristes, mais comme des soldats. A les lire plus en détail, cependant, le mobile affiché de leur combat dérive insensiblement vers une issue plus radicale : la soumission des mécréants.

    C’est là que se glissent toute l’ambiguïté et la perversité de l’idéologie de l’EI. L’argument humanitaire sert à toucher au " cœur " les nouvelles recrues ; la propagande fait ensuite son œuvre pour les transformer en armes de destruction. Dans les lettres laissées par les kamikazes, le sentiment d’une fierté retrouvée des musulmans glisse systématiquement vers un désir de conquête.

    " Donc nous les musulmans, l’islam, c’est une religion de paix, comme ils ne font que le répéter, explique Ibrahim El Bakraoui à sa mère. Mais les musulmans, c’est pas des serpillières. Les musulmans, quand tu leur donnes une claque, ils te donnent pas l’autre joue, au contraire, ils répondent agressivement ", poursuit-il, avant de conclure sur cet avertissement : " Tant que la loi d’Allah elle n’est pas respectée, les musulmans, ils doivent se lancer de toute part et combattre pour l’islam. "

    Il développe ensuite le sentiment profond qui sous-tend son engagement : " Ces gens-là,on doit avoir une haine envers eux parce que ce sont des mécréants. Ils veulent pas croire en Allah (…). Premièrement, on doit les détester, et deuxièmement, on doit leur faire la guerre (…). En fait, une fois qu’on aura le dessus sur eux, là on leur propose les trois conditions : soit ils acceptent l’islam, soit ils payent la jizya - taxe imposée aux gens du Livre - , c’est-à-dire qu’ils s’humilient de leurs propres mains, comme Allah, exalté soit-il, a dit dans le Coran, soit ils nous combattent. "

    L’extension du " djihad défensif " – initialement cantonné à la défense des terres musulmanes – à des attaques visant des pays non musulmans n’a pas toujours été de soi. Cette dérive a longtemps suscité un vif débat au sein de la mouvance djihadiste. Elle a été popularisée par Al-Qaida à la fin des années 1990, avant d’être adoptée et amplifiée par l’EI.

    " La défense des pays musulmans occupés a toujours fait consensus dans la mouvance djihadiste, explique Kévin Jackson, chercheur au Centre d’analyse du terrorisme. Les attentats hors du champ de bataille sont en revanche plus difficiles à justifier d’un point de vue théologique et stratégique, et moins mobilisateurs en termes de recrutement. Les groupes djihadistes ont donc construit toute leur propagande autour du djihad défensif, y compris lorsqu’il s’agit de justifier des attentats dans des pays en paix. "

    Cette exportation du " djihad défensif " vers l’Occident sert aujourd’hui d’alibi à un " djihad offensif " qui ne dit pas son nom, l’objectif affiché de protection de l’islam devant, à terme, mener à sa propagation. Ce glissement a été formalisé par l’EI dans un article intitulé " Pourquoi nous vous haïssons, pourquoi nous vous combattons ", publié par l’organe de propagande Dabiq, en juillet 2016.

    L’article développe son titre en six points. Les trois premiers ont trait à la nature de l’Occident : " Nous vous haïssons, d’abord et avant tout parce que vous êtes des mécréants " ; " Nous vous haïssons parce que vous vivez dans des sociétés libérales et sécularisées qui autorisent ce qu’Allah a interdit " ; " Pour ce qui concerne la frange athée, nous vous haïssons et vous faisons la guerre parce que vous ne croyez pas en l’existence de notre Seigneur ". Les trois points suivants font référence aux actions prêtées à l’Occident : les " crimes contre l’islam ", les " crimes contre les musulmans " et " l’invasion " des terres musulmanes.

    La liste se conclut sur cette clarification : " Ce qu’il est important de comprendre ici, c’est que même si certains assurent que votre politique extérieure est à l’origine de notre haine, cette cause est secondaire, raison pour laquelle nous ne l’exposons qu’en fin de liste. En réalité, même si vous cessez de nous bombarder, de nous emprisonner, de nous torturer, de nous diffamer, de prendre nos terres, nous continuerons à vous détester parce que la cause principale de cette haine ne cessera pas tant que vous n’aurez pas embrassé l’islam. "

    Le ressort psychologique : impuissance et culpabilité

    Ainsi la propagande de l’EI fait-elle insensiblement dériver ses soldats d’un combat humanitaire vers sa finalité totalitaire : l’annihilation de toute altérité. La seule paix envisagée est la Pax islamica. Ce basculement ne séduit cependant qu’une minorité de candidats, mettant en lumière les ressorts psychologiques propres au processus de radicalisation. Une dimension intime évidemment rejetée par les intéressés.

    " Quel était l’état d’esprit des El Bakraoui ?, demande à Osama Krayem la juge belge chargée de l’enquête sur les attentats de Bruxelles.

    – Ce sont des gens ordinaires. D’ailleurs lbrahim me disait que sans cette coalition, ces musulmans qui se font opprimer là-bas, il aurait eu une vie ordinaire avec des enfants. Je crois qu’à un certain moment il a changé de comportement. (…) Khalid El Bakraoui, sa femme, était enceinte. (…) Le terrorisme n’est pas une personnalité, en fait. Vous pouvez lire l’histoire des musulmans, à aucun moment ce sont les musulmans qui ont pris l’initiative d’attaquer ou de faire du mal. "

    Osama Krayem affirme que le terrorisme n’est pas " une personnalité ". Mais qu’est-ce qui a finalement convaincu Ibrahim El Bakraoui de renoncer à sa " vie ordinaire " et son frère Khalid d’abandonner sa femme enceinte pour se faire exploser ? Comme nombre de candidats au djihad, les frères El Bakraoui étaient des délinquants, très éloignés de la religion, avant leur conversion à l’islam radical.

    " Beaucoup de délinquants se sentent en réalité coupables, explique le psychanalyste Fethi Benslama, auteur d’Un furieux désir de sacrifice. Le surmusulman (2016, Seuil). Or, les religions monothéistes jouent sur la culpabilité. En arabe, religion se dit din, qui signifie “dette”. Leur entrée dans le djihad peut atténuer ce sentiment en leur offrant une cause. Il s’opère ensuite ce qu’on pourrait appeler un renversement moral de culpabilité : l’hostilité intérieure se transforme en hostilité extérieure et autorise l’agression d’autrui dans un sentiment de toute-puissance. "

    A travers ses publications, l’EI ne cesse de jouer sur ce ressort à l’intention des musulmans vivant en Occident, leur reprochant de préférer le confort de leur vie matérielle au combat sur le sentier d’Allah. Une culpabilisation qui porte parfois ses fruits : " Maintenant, nous, comment on peut rester chez nous à la maison, manger et boire alors que les musulmans n’ont pas trouvé un morceau de pain, explique Ibrahim El Bakraoui à sa mère. Comment est-ce qu’on peut rester chez nous à la maison en train de dormir, faire comme si de rien n’était ? "

    Devant les enquêteurs, Mohamed Abrini a analysé, avec une distance étonnante, l’évolution de ses amis de quartier qui se sont fait exploser à Paris et à Bruxelles. Il explique comment une réalité perçue – l’injustice faite aux musulmans – s’articule avec des causes plus intimes dans l’engagement djihadiste.

    " Concernant leur changement d’attitude, je pense qu’une chose se passe chez beaucoup de jeunes avec tout ce qui se passe dans le monde. Ces gens-là n’ont jamais prié de leur vie, ils n’ont jamais été à la mosquée et ils ont perdu tout un temps à faire des péchés (…). Quand ilsrentrent dans la religion, pour moi ces gens-là veulent se rattraper. Ils veulent être plus musulmans que les vrais musulmans. Il y en a, ça leur travaille la conscience. Ils voient tous les péchés commis. Et ils savent que le martyre efface tous les péchés à partir de la première goutte de sang qui tombe sur le sol. "

    La voie du martyre : une place au paradis

    Parmi les membres de la cellule des attentats de Paris et Bruxelles, seuls trois candidats au martyre ont renoncé ou ont échoué à se faire exploser : Salah Abdeslam à Paris, Mohamed Abrini à l’aéroport de Zaventem et Osama Krayem dans le métro bruxellois. A en croire ce dernier, c’est leur plus faible religiosité qui serait susceptible d’expliquer ces échecs :

    " Salah Abdeslam et Abrini, ils ne sont pas au même niveau que les frères El Bakraoui, explique-t-il à la juge.

    – Que voulez-vous dire par “pas le même niveau” ?, demande la magistrate.

    – Je parle de la foi. C’est la foi qui pousse les gens à résister. Les gens qui atteignent un certain niveau dans la foi sont prêts à rentrer dans l’ennemi sans peur, et je crois que les frères El Bakraoui y étaient. Salah et Abrini je ne crois pas. Les frères El Bakraoui avaient atteint un certain degré dans la foi et étaient prêts à mourir. "

    Dans son message à sa mère, Ibrahim El Bakraoui évoque, avec force détails, l’histoire d’un compagnon du Prophète tué lors d’une bataille contre les " mécréants ". Ce récit mystique vise à lui faire comprendre que le martyr est " le bien-aimé d’Allah " et gagnera sa place au paradis : " Y a encore plein d’autres compagnons, on pourrait rester des heures à parler d’eux, mais pour que t’as un exemple, Hamza Abou Taleb, on l’appelle le lion d’Allah, Jafar Ibn Abou Taleb, on l’appelle l’homme aux deux ailes. Allah, exalté soit-il, va le doter de deux ailes au paradis car il a perdu ses deux bras dans une bataille et ainsi de suite, on en a plein, je te jure, on a en plein. "

    Si Salah Abdeslam ne s’est pas fait exploser à Paris, les trois lettres découvertes dans une planque du quartier bruxellois de -Forest, le 15 mars 2016, attestent de son intention de mourir en martyr. Nettement moins élaborés que ceux des frères El Bakraoui, ses courriers sont empreints d’un mysticisme rudimentaire. A sa sœur, il -explique que " cette vie d’ici-bas est un test " visant à départager le croyant, promis au paradis, de l’incroyant, voué à l’enfer : " Comment pourrai-je échanger cette vie d’ici-bas contre l’au-delà ? Le paradis est meilleur ", conclut-il.

    La lettre adressée à sa mère, longue de deux pages, comporte dix-sept mentions du mot " Allah "ou " Dieu " : " Si tu crois au destin tu comprendras qu’Allah m’a guidée et choisie parmi ses serviteurs, écrit-il. Dieu a acheté des croyants, leur personne et leurs biens, en échange du paradis (…) Allah dit aussi : “Et ne dites pas de ceux qui sont morts dans le sentier d’Allah qu’ils sont morts, au contraire ils sont vivants mais vous en êtes -inconscients.” J’ai moi aussi pris ce chemin car il est celui de la Vérité. Qui s’en écarte aura pour refuge l’enfer. "

    La peur de l’enfer apparaît ici comme un levier décisif du passage à l’acte : c’est en payant de sa vie que le martyr s’acquitte de sa " dette " (" Dieu a acheté des croyants ") et accède à l’au-delà. Par son sacrifice, l’ancien pécheur devient l’élu. Loin de se réduire à un nihilisme, le djihadisme est une aspiration inquiète : le kamikaze ne désire pas tant le néant qu’une autre vie, augmentée, soulagée de l’angoisse du châtiment. En traversant une mort qui n’est qu’apparente, il accède à la " vérité ".

    Soren Seelow

    http://abonnes.lemonde.fr/societe/article/2017/06/07/dans-la-tete-des-kamikazes_5139774_3224.html?h=11