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De nouveaux outils pour améliorer l’identification des migrants décédés ou portés disparus en mer
Par Ana P. Santos Publié le : 17/01/2025
L’identification des migrants morts en mer reste encore très difficile. Des organisations font leur possible pour développer de nouvelles méthodes et technologies - en ne s’appuyant pas seulement sur l’ADN mais sur les « identifiants secondaires » comme les tatouages, les piercings. Le but : aider les proches des victimes à faire leur deuil plus sereinement.
Chaque année, des milliers de personnes meurent sur les routes migratoires de l’océan Atlantique, de la mer Méditerranée et de le Manche. De nombreuses victimes qui voyagent sans documents d’identité ou les ont perdus au cours de route. Lors d’une disparition en mer, l’identification des corps récupérés, qui se décomposent rapidement, est souvent impossible. Des organisations comme l’Action pour l’identification des migrants victimes de catastrophes (MDVI), militent pour mieux identifier les personnes qui perdent ainsi la vie aux portes de l’Europe. Le MDVI cherche notamment à élargir les outils et l’expertise disponibles. Une partie du travail de l’organisation repose sur les « identifiants secondaires », c’est à dire les traits du visage, les tâches de naissance, les tatouages ou les piercings, qui sont des moyens d’identification légalement reconnus.
Actuellement, les procédures d’identification se basent avant tout sur des méthodes ou des documents officiels tels que les documents dentaires, l’ADN et les empreintes digitales. Or, il arrive que la méfiance à l’égard des autorités peut décourager des familles à fournir des échantillons d’ADN. Aussi, nombre de migrants disparus n’ont pas déposé d’empreintes digitales ou ne possèdent pas de documents dentaires.Enfin, le statut administratif précaire des membres de la famille du disparu peut les empêcher de s’adresser aux autorités.
Les chercheurs du MDVI ont également recours aux photographies, en particulier celles publiées sur les réseaux sociaux ou partagées au cours du voyage. Dans une étude publiée par l’organisation et une équipe de chercheurs, la comparaison des visages à l’aide de photos est un outil précieux pour l’identification, en particulier lorsqu’il s’agit de la seule donnée disponible. « Ses faibles exigences technologiques, sa rapidité d’analyse et la facilité de transfert des données numériques la rendent particulièrement efficace dans les contextes difficiles », explique le rapport.
Le MDVI contribue également à faire avancer l’utilisation de scanners 3D mobiles conçus pour capturer des images faciales détaillées des défunts. Ces appareils, destinés à être utilisés par les premiers secours et les organisations caritatives, permettent de documenter les caractéristiques physiques avant que la décomposition du corps n’en soit à un stade trop avancé, ce qui augmente considérablement les chances d’identification.
Une autre organisation, le Marine Institute de Galway, en Irlande, a mis au point un logiciel qui vise à prédire la localisation des naufragés. Le calcul combine les données sur les courants marins avec des modèles de comportement de particules en fonction des conditions de vent. Déjà utilisée par les autorités irlandaises dans le cadre d’enquêtes, cette technologie pourrait s’appliquer aux opérations de recherche et de sauvetage des migrants au Royaume-Uni et en France.De son côté, l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), l’Université de Dodoma et l’Académie américaine des sciences médico-légales ont mis sur pied un atelier en Tanzanie pour permettre de mieux étudier les restes humains de migrants non identifiés.Il repose sur des techniques d’analyse chimique pour recueillir des informations sur le régime alimentaire des individus et l’historique de leurs déplacements géographiques. L’OIM estime que cette méthode pouvait être utile en Tanzanie, qui constitue un pays de passage pour les personnes voyageant depuis la Corne de l’Afrique vers l’Afrique du Sud ou encore l’île de Mayotte.
Le projet Missing migrants de l’OIM sur les migrants portés disparus a recensé plus de 766 décès sur la route reliant l’Afrique de l’Est et la Corne de l’Afrique à l’Afrique du Sud et Mayotte entre 2014 et le milieu de l’année 2024, mais le nombre réel de victimes est probablement beaucoup plus élevé. Le journal britannique The Guardian note que les décès de migrants sont rarement recensés dans le registre d’identification des victimes de catastrophes (IVC) d’Interpol, ce qui freine certains protocoles médico-légaux.
Selon Interpol, les IVC sont principalement conçus pour les évènements impliquant un grand nombre de victimes et résultant de catastrophes soudaines et de grande ampleur, qu’elles soient naturelles ou causées par l’homme. En revanche, les migrants font généralement naufrage seul ou en petits groupes, ce qui ne déclenche pas les procédures d’IVC. Par ailleurs, en raison de la nature clandestine des migrations, de nombreux décès ne sont pas signalés ou ne sont pas documentés pour être suivis par Interpol.
Selon le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), chaque personne disparue ou corps non identifié entraîne une situation de perte ambigüe chez les proches. Les familles qui ne peuvent obtenir une preuve officielle de la mort d’un être cher restent hantées par l’incertitude, incapables de faire leur deuil et de tourner la page.
L’absence de réponses plonge les familles dans un gouffre émotionnel et psychologique.
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