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  • Fête à Notre-Dame-des-Landes : des milliers de personnes venues « voir ce qui se passera après »
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/02/11/notre-dame-des-landes-la-zad-se-cherche-un-avenir_5255024_3244.html

    Quand une partie des zadistes préférait rappeler l’apport dans cette lutte de ceux qui « portent l’autogestion, l’action directe, des modes de vie et des pratiques radicales ». Evoquant aussi bien les « conflits » que les « complicités » entre les composantes de la ZAD, la dizaine de personnes, masquées, qui ont pris la parole, ont martelé leur volonté de combattre « le système capitaliste, sa croissance, ses polices, ses frontières, ses armées, ses bulldozers… »

    Et si la victoire est réelle contre le projet d’aéroport, cela ne suffit pas, disent-elles. « Maintenant que notre ennemi le plus clair et le plus commun a disparu, le capitalisme vert rêverait bien d’une zone éco-bio participative, d’une intégration tranquille mais en règle (…). C’est pour éviter cela que nous resterons en lutte. » Le débat est loin d’être terminé dans la #ZAD.

  • #tabac : les cigarettiers accusés de tricher sur la teneur en goudron et nicotine
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/02/09/tobacco-gate-l-industrie-du-tabac-tricherait-sur-la-teneur-en-goudron-et-nic

    Selon la plainte du CNCT, que Le Monde a pu consulter, « la teneur réelle en goudron et nicotine serait, selon les sources, entre deux et dix fois supérieure [à celle indiquée] pour le goudron et cinq fois supérieure pour la nicotine » — des chiffres qui proviennent de la littérature scientifique ou des fabricants de cigarette eux-mêmes. — Permalink

  • Centre d’enfouissement de Bure : l’impossible preuve scientifique de la sûreté

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/02/07/centre-d-enfouissement-de-bure-l-impossible-preuve-scientifique-de-la-surete

    « Le Monde » a eu accès à la thèse d’un chercheur qui a étudié la gestion des incertitudes entourant le stockage des déchets nucléaires de la Meuse.

    C’est un document embarrassant pour les promoteurs du Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) visant à enfouir, dans le sous-sol argileux du village de Bure, dans la Meuse, les déchets nucléaires français les plus dangereux. Il décrit comment l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), faute de pouvoir démontrer de façon formelle la sûreté de cette installation pendant des centaines de milliers d’années, consacre ses efforts à convaincre les instances de contrôle du nucléaire de la faisabilité d’un tel stockage. Quitte à présenter certains de ses résultats de façon orientée ou lacunaire. Au-delà de cet établissement public, placé sous la tutelle des ministères chargés de l’énergie, de la recherche et de l’environnement, c’est aussi la chaîne d’évaluation de la sûreté nucléaire en France qui est questionnée.

    Ce document, que Le Monde a pu lire, est une thèse de 470 pages, soutenue le 11 décembre 2017 dans le cadre de l’Ecole des hautes études en sciences sociales et intitulée : « Enfouir des déchets nucléaires dans un monde conflictuel, une histoire de la démonstration de sûreté de projets de stockage géologique, en France ». Son auteur, Leny Patinaux, historien des sciences, a été pendant trois ans, de novembre 2012 à octobre 2015, salarié de l’Andra, qui a financé ce travail et lui a donné accès à ses archives. Parmi les membres du jury figure un membre de la direction de la recherche et du développement de l’agence, ce qui confère à son travail une forme de reconnaissance officielle.

    « Construire un scénario »

    L’universitaire, qui revient sur la genèse du choix de l’enfouissement pour les déchets à haute activité et à vie longue et sur les recherches engagées à cette fin, explique qu’« à partir des années 2000, l’impossibilité épistémique [c’est-à-dire au regard de la connaissance scientifique actuelle] d’apporter une preuve de la sûreté d’un stockage est reconnue par l’Andra », aucun modèle scientifique ne pouvant simuler l’évolution du site sur des centaines de millénaires.

    Dès lors, poursuit-il, « la démonstration de sûreté de Cigéo ne s’apprécie pas en fonction de sa justesse, mais en fonction de sa capacité à convaincre ses évaluateurs ». En particulier la Commission nationale d’évaluation des recherches et études relatives à la gestion des matières et des déchets radioactifs, l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) et l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN). Il s’agit pour l’Andra de produire non pas une preuve de type mathématique, mais « un faisceau d’arguments », voire de « construire un scénario comme on raconte une histoire ».

    Un scénario que, sur certains points, l’Andra semble avoir écrit à sa convenance. C’est du moins ce qui apparaît dans le compte rendu que fait le thésard de plusieurs réunions techniques, dites « revue finale des modèles et des données », auxquelles participaient une vingtaine de salariés de l’agence relevant des directions de la maîtrise des risques, de la recherche et du développement, des programmes, de l’ingénierie et du projet Cigéo. L’auteur a pu assister à plusieurs de ces sessions, entre juillet et décembre 2013, mais n’a pas été autorisé à suivre la dernière.

    Le chapitre relatant ces réunions est celui qui pose le plus question. Lors de la présentation des documents, l’Andra indique qu’« il y a un travail de “toilettage” [à faire] pour mieux expliciter certaines incertitudes, leur mettre un poids relatif et ainsi éviter toutes ambiguïtés d’interprétation ». Cela, analyse l’auteur, parce que « les responsables de la revue anticipent la possibilité d’une controverse publique », au potentiel « effet dévastateur ».

    Lors de l’examen des circulations gazeuses dans la couche argileuse endommagée par les excavations – susceptibles d’entraîner une fracturation de la roche –, un dirigeant déclare : « On a été un peu light dans les docs, volontairement. Si l’IRSN est tatillon là-dessus (…), on est limite. » Commentaire de l’auteur : « Ici, la discrétion est envisagée comme solution pour gérer l’incertitude (…) Omettre la présentation des calculs effectués doit permettre d’éviter de montrer que les salarié.e.s de l’Agence n’ont pas une connaissance très fine de l’évolution de la pression dans les ouvrages de stockage. »

    S’agissant de l’impact radiologique du stockage, un directeur adjoint redoute qu’avec les hypothèses retenues, en se plaçant dans le pire des cas (« worst case »), la limite réglementaire soit dépassée. Ce à quoi un autre responsable rétorque : « Ça se négocie ce worst case. » Autrement dit, décrypte l’auteur, « il n’y a pas lieu de s’inquiéter outre mesure que l’impact radiologique du stockage dépasse la norme autorisée : les hypothèses retenues dans la pire des évolutions possibles envisagées pour le stockage relèvent d’un choix et, de ce fait, elles peuvent être négociées ».

    A cela s’ajoute une connaissance très imparfaite des « colis » de déchets dévolus à Cigéo, qu’il s’agisse des radionucléides qu’ils contiennent ou de leur conditionnement. Ce qui oblige les chercheurs de l’Andra à affecter un « degré de confiance » aux données communiquées par les producteurs – EDF, Orano (ex-Areva) et le Commissariat à l’énergie atomique – et à déterminer des « facteurs de marge ». Il s’avère, écrit l’auteur, que « pour plus de la moitié des déchets destinés au stockage, les salarié.e.s de l’Agence estiment que les connaissances dont ils disposent sont mauvaises ou nulles ».

    Thèse à charge ? Elle est loin d’être univoque. « Les questions et les doutes présentés ne doivent pas faire oublier que l’Andra a capitalisé un nombre important de connaissances, souligne l’auteur. Il ne s’agirait pas non plus de penser que toutes les connaissances sur le stockage font l’objet d’incertitudes aussi fortes. » Le rédacteur relève du reste que, face à certaines inconnues, les ingénieurs de l’Andra ont fait le choix de « scénarios enveloppe », c’est-à-dire prenant en compte les hypothèses les plus défavorables pour la sûreté.

    « Bricolage »

    « Finalement, écrit-il, l’ensemble de ces éléments apporte des garanties que l’Andra a fait tout ce qu’elle a pu pour concevoir un stockage sûr et évaluer la sûreté de l’ouvrage. » Toutefois, ajoute-t-il, « lorsque l’Agence doit produire une analyse de sûreté globale, l’arrangement des savoirs produits en un ensemble cohérent montre néanmoins un certain bricolage ».

    Sollicité par Le Monde, Leny Patinaux n’a pas souhaité ajouter de commentaires à son travail. De son côté, l’Andra ne conteste pas les éléments rapportés dans cette étude qui, note-t-elle, « s’inscrit dans le cadre d’un travail d’histoire des sciences sur la gestion des incertitudes, qui est au cœur des problématiques et de la vie quotidienne de l’Andra, compte tenu du temps long des stockages ». Selon l’agence, « cette thèse rend compte de la démarche robuste mise en œuvre par l’Andra dans son travail de démonstration de sûreté ». Sur « de telles échelles de temps, développe-t-elle, on ne peut pas se limiter à des démonstrations purement scientifiques ». Il y faut une approche « intégrant un faisceau de connaissances scientifiques mais aussi d’incertitudes ».

    L’agence revient, point par point, sur les passages susceptibles de remettre en question la validité de son travail. « Il est nécessaire que les choix soient pris dans le cadre de débats en interne et en externe avec les évaluateurs et les autorités de contrôle (IRSN, ASN). C’est ce qu’il faut entendre par “convaincre les évaluateurs” », y explique-t-on. Quant au « toilettage » des documents préconisé, avant leur diffusion, elle est ainsi justifiée : « L’objectif des débats menés en interne est de “challenger” la robustesse des argumentaires pour bâtir une évaluation de sûreté solide, et de hiérarchiser les incertitudes au regard de leur impact (…). Cela demande un travail rigoureux d’écriture et de hiérarchisation. C’est sans doute ce qu’il y a derrière le mot “toilettage”. »

    « Certains arguments peuvent être jugés comme insuffisants (ou light), cela ne veut pas dire que l’incertitude n’a pas été traitée, mais qu’elle pourra faire l’objet de demande d’approfondissement par les évaluateurs, poursuit l’Andra. Là encore, rien n’est caché. » Enfin, au sujet des hypothèses sélectionnées dans le « pire des cas », elle affirme que tous les scénarios et hypothèses sont mis « sur la table », ceux retenus comme ceux exclus. Et de préciser : « Ce ne sont pas des scénarios probables qui permettent de dimensionner l’installation, mais des scénarios très improbables qui ont pour but de tester la robustesse, la résilience de la sûreté du stockage en allant aux limites du physiquement possible (…) Ces scénarios donnent lieu à un débat interne comme externe avec l’IRSN et l’ASN. »

    Dossier consolidé

    Reste à savoir, justement, si le contrôle exercé par l’IRSN et l’ASN a pu être pris en défaut par « l’arrangement des savoirs » – pour reprendre une formule de la thèse – construit par l’Andra. En clair, ces deux organismes vont-ils devoir instruire de nouveau le dossier de Cigéo, sachant que c’est sur l’expertise scientifique et technique du premier que s’appuie le gendarme du nucléaire pour rendre ses avis et donner ses autorisations ?

    « En première analyse, non », répond François Besnus, directeur de l’environnement à l’IRSN, qui souhaite néanmoins « prendre le temps d’étudier très attentivement » cette thèse. « Dans le processus interne de débat, il est normal que des avis contradictoires s’expriment, juge-t-il. Nous-mêmes procédons de la même façon sur l’analyse de risques, en mettant le curseur très haut et très bas, puis en retenant les hypothèses les plus raisonnables. »

    Il ajoute de surcroît : « L’IRSN ne se fonde pas seulement sur les dossiers de l’Andra. Les données et les résultats qu’elle met sur la table sont la plupart du temps cohérents avec nos connaissances propres et nos modélisations. Un grand nombre de ces données sont d’ailleurs issues de la recherche publique. » Ce qui écarte donc, a priori, la possibilité de biais délibérés, dans les résultats soumis.

    Au demeurant, la thèse fait état de réunions tenues en 2013. L’Andra a pu, depuis, consolider son « dossier d’options de sûreté », sur lequel l’ASN a rendu, le 15 janvier, son avis définitif. Son président, Pierre-Franck Chevet, a qualifié le dossier de « très bon », tout en demandant à l’Andra de « revoir sa copie » par rapport au risque d’incendie de 40 000 colis de déchets enrobés dans du bitume, et de « l’améliorer » vis-à-vis de la tenue du stockage souterrain, face aux séismes notamment.

    Les opposants au centre d’enfouissement de Bure verront sans doute, dans ce document, la preuve de la « fabrique du mensonge » que constitue, à leurs yeux, le projet Cigéo. Il dévoile, plus simplement, comment la gestion des déchets radioactifs est aussi celle – à haut risque – des incertitudes.

  • Centre d’enfouissement de #Bure : l’impossible preuve scientifique de la sûreté
    LE MONDE | 07.02.2018 | Par Pierre Le Hir
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/02/07/centre-d-enfouissement-de-bure-l-impossible-preuve-scientifique-de-la-surete

    C’est un document embarrassant pour les promoteurs du Centre industriel de stockage géologique (Cigéo) visant à enfouir, dans le sous-sol argileux du village de Bure, dans la Meuse, les déchets nucléaires français les plus dangereux. Il décrit comment l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), faute de pouvoir démontrer de façon formelle la sûreté de cette installation pendant des centaines de milliers d’années, consacre ses efforts à convaincre les instances de contrôle du nucléaire de la faisabilité d’un tel stockage. Quitte à présenter certains de ses résultats de façon orientée ou lacunaire. Au-delà de cet établissement public, placé sous la tutelle des ministères chargés de l’énergie, de la recherche et de l’environnement, c’est aussi la chaîne d’évaluation de la sûreté nucléaire en France qui est questionnée. (...)

    • #enfouissement #Bure #Meuse
      #risques #nucléaire

      Voici le lien vers la thèse de doctorat de #Leny_Patinaux:

      Le temps de la décroissance de l’activité radioactive de certains radionucléides contenus dans les #déchets_nucléaires, en dessous d’un seuil considéré comme acceptable, se compte parfois jusqu’en centaines de milliers d’années. Comment les salarié.es de l’#Agence_Nationale_pour_la_gestion_des_Déchets_Radioactifs (#Andra) montrent la #sûreté d’un #dépôt_géologique de ces déchets sur de telles temporalités ? C’est à cette question qu’entreprend de répondre cette thèse, à partir d’une étude des archives de cette agence et d’observation menées au sein de celle-ci. Cette thèse est d’abord une #histoire sociale des pratiques savantes mobilisées, depuis les années 1980 jusqu’à 2013, pour étudier l’évolution d’un #stockage (géologie, étude des matériaux, simulation numérique...) Elle analyse également le rôle de la recherche dans le gouvernement de l’aval du cycle nucléaire depuis la loi de 1991 qui, en France, encadre la gestion des déchets nucléaires. Bien que l’évacuation géologique soit la seule solution de gestion envisagée pour les déchets radioactifs, la dissociation entre les recherches menées dans le laboratoire souterrain de Bure et leur finalité a permis à l’Andra de s’implanter localement. Cependant, l’Andra se heurte à l’impossibilité épistémique d’appréhender exhaustivement l’évolution d’un stockage sur des centaines de milliers d’années. Désormais, les recherches accompagnent l’implantation du stockage, transformant sans cesse la compréhension de son comportement. Alors que la démonstration publique de la sûreté d’un stockage devient une condition d’acceptation d’un tel ouvrage, l’Andra abandonne peu à peu la prétention à produire une preuve formelle sur le modèle d’une démonstration mathématique : à partir des années 2000, la sûreté repose sur un « faisceau d’arguments » apportant la garantie d’une certaine maîtrise de l’évolution du stockage. Enfin, cette thèse montre au prix de quelles hypothèses la gestion des déchets nucléaires a été promue, durant les années 2000, comme un exemple parfait de démocratie technique.

      http://www.theses.fr/s83307

  • Perturbateurs endocriniens : le rapport-choc de l’IGAS

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/02/02/perturbateurs-endocriniens-le-rapport-choc-de-l-igas_5250660_3244.html

    Le document, que « Le Monde » a pu consulter, remis au gouvernement en janvier, est l’un des premiers textes officiels décrivant les problèmes posés par ces pesticides, plastifiants et solvants, qui interfèrent avec le système hormonal des êtres vivants.


    Deux grenouilles mâles copulent. L’une d’elle est devenue femelle à la suite d’une exposition à l’atrazine, un pesticide.

    L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) ont remis à leurs ministères de tutelle, courant janvier, un rapport d’évaluation de la stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens (SNPE) commandé en août 2017 par le gouvernement.

    Très attendu, le texte, que Le Monde a pu consulter, n’est pas encore rendu public ; il est singulièrement percutant. S’il dresse un bilan positif de l’action de l’Etat engagée depuis 2014 dans ce domaine, il en souligne de nombreuses limites au regard des enjeux, qualifiés de « majeurs pour la santé et l’environnement ». Les rapporteurs se montrent aussi, en creux, très critiques vis-à-vis de l’action conduite au niveau européen, notamment par la Commission de Bruxelles, et s’interrogent sur la « crédibilité » de l’action communautaire.

    Incidemment, le rapport des trois institutions forme l’un des premiers documents officiels résumant, dans un langage non technique, l’étendue des problèmes posés par les perturbateurs endocriniens (PE). Ces substances – pesticides, plastifiants, solvants, etc. – sont présentes dans une grande diversité d’objets ou de produits du quotidien et dans la chaîne alimentaire. Elles ont en commun d’interférer avec le système hormonal des humains et des animaux.

    Défi scientifique et réglementaire

    « Un certain nombre d’affections de la santé humaine sont aujourd’hui suspectées d’être la conséquence d’une exposition aux PE : baisse de la qualité du sperme, augmentation de la fréquence d’anomalies du développement des organes ou de la fonction de reproduction, abaissement de l’âge de la puberté, détaille le rapport. Le rôle des PE est aussi suspecté dans la survenue de certains cancers hormonodépendants, ainsi que des cas de diabète de type 2, d’obésité ou d’autisme. »

    Les rapporteurs ajoutent que les effets de ces substances dépendent de l’âge de l’exposition, les impacts majeurs étant la conséquence d’une exposition « au cours du développement foeto-embryonnaire, de la petite enfance et de la puberté ». Les effets attendus étant différés dans le temps ou le résultat d’une exposition chronique, « le lien de causalité reste souvent difficile à établir », ajoutent les auteurs.

    Mise en place en avril 2014, la stratégie nationale pour répondre aux défis scientifiques et réglementaires liés à ces substances est identifiée comme l’une des trois seules initiatives de ce type en Europe – avec la Suède et le Danemark. « Dans un contexte où l’Union européenne [UE], pourtant chargée de réglementer le risque chimique, est en manque de stratégie cohérente, [cette stratégie nationale] était très opportune pour affirmer la volonté politique française d’agir sur un sujet complexe (…) prioritaire en santé-environnement », estiment les auteurs du rapport.

    Inquiétudes quant aux moyens consacrés à la recherche

    Mesures de réduction de l’exposition des populations (en particulier au bisphénol A), formation de professionnels de santé, investissement dans la recherche scientifique, identification des substances les plus problématiques : la stratégie française, estiment les trois institutions, a donné des résultats positifs.

    Même s’ils « restent le plus souvent à amplifier ». En particulier, les rapporteurs notent que les travaux de recherche conduits en France sur les PE ont produit des résultats mais sont menacés par un tarissement des financements. « La réduction des moyens nationaux consacrés à la recherche depuis 2014, aggravée par les évolutions à l’échelon européen (…), a fragilisé la petite communauté scientifique qui s’est constituée depuis quelques années sur le thème des PE, ajoutent les auteurs. Celle-ci a tendance à se réduire par manque d’attractivité, avec un risque de pertes de compétences. »

    Les travaux de recherche fondamentale sont d’autant plus cruciaux que certains PE échappent aux principes classiques de la toxicologie, selon lesquels l’effet délétère attendu est toujours proportionnel à la dose. « La quantité d’hormones nécessaire au fonctionnement du système endocrinien étant extrêmement faible, la perturbation de celui-ci peut résulter d’une très faible concentration de substances perturbatrices, notent les rapporteurs, ce qui rend inopérante l’analyse toxicologique classique consistant à définir des seuils à partir desquels le produit devient nocif. »

    « Manque de confiance dans l’action publique »

    Quant à la surveillance de l’exposition des populations aux PE ou de l’imprégnation de l’environnement, le rapport la juge « hétérogène », soulignant que « la surveillance des sols est quasi inexistante, et la surveillance de l’air est très en retard comparée à la surveillance de l’eau, cadrée par une directive européenne ».

    Les impacts de ces substances sur les milieux et les écosystèmes ne sont pas suffisamment étudiés, plaident les auteurs, et ce alors qu’historiquement, les premiers effets des PE ont été relevés sur la faune et « ont servi de signal d’alarme pour la santé humaine ».

    Les rapporteurs le disent sans fard : la question n’est pas seulement sanitaire ou environnementale, mais concerne aussi la crédibilité des pouvoirs publics. « Le différentiel entre la vitesse des avancées des connaissances scientifiques et la capacité d’adaptation des règlements sur ce type de sujet émergents est de nature à nuire à la crédibilité de l’action communautaire », écrivent-ils. Or, relèvent-ils, « les perturbateurs endocriniens s’inscrivent parmi les situations à risques caractérisées par un manque de confiance dans l’action publique ».

    La Commission européenne condamnée

    Outre le renforcement de la recherche, la réduction des expositions pour les populations à risque, et la surveillance de l’environnement, les trois institutions enjoignent le gouvernement à peser au niveau communautaire pour faire évoluer la réglementation européenne. A ce jour, les textes réglementaires de l’UE ne permettent pas d’exclure les PE, la Commission ayant accumulé un retard de plus de quatre ans dans l’adoption des critères d’identification de ces substances (dans le cas particulier des pesticides) – les rapporteurs rappellent d’ailleurs que l’exécutif européen a, dans ce dossier, été condamné en décembre 2015 par la Cour de justice de l’UE, pour carence.

    Au total, le rapport plaide pour un renouvellement et un renforcement de la stratégie nationale lancée en 2014. Mais celle-ci doit être portée par l’ensemble des ministères concernés, au-delà de la santé et l’écologie, plaident les rapporteurs. « Il en va, écrivent-ils, de l’efficacité de sa mise en œuvre et de la crédibilité de l’action de l’Etat ».

    Stéphane Foucart

    Extrait :
    « Les travaux de recherche français récents sur les PE ont montré que :

    • les perturbateurs endocriniens (avérés ou potentiels) sont omniprésents ;
    • le spectre de pathologies est bien plus large que celles relevant du système reproducteur ;
    • les effets de molécules prises individuellement ne permettent pas de prédire l’effet du
    mélange ;
    • les méthodes développées pour analyser les substances semi-volatiles ayant
    des propriétés de perturbateurs endocriniens, contenues dans l’air et les poussières ont
    permis de démontrer que ces substances étaient très répandues dans l’habitat, notamment
    dans les poussières des logements, avec des concentrations très variables ;
    • l’exposition périnatale de souris à de faibles doses de bisphénol A (BPA) ou de l’un de ses
    substituts, le BPS, perturbe le métabolisme des lipides, source d’obésité ;
    • une revue de la littérature indique que les substituts peuvent être potentiellement aussi
    dangereux que la molécule interdite ;
    • les risques concernent aussi la faune sauvage et sont alarmants ;
    • les perturbateurs endocriniens représentent un coût énorme pour la société. »

  • La listériose cause des dizaines de morts en Afrique du Sud
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/01/29/la-listeriose-cause-des-dizaines-de-morts-en-afrique-du-sud_5248641_3244.htm

    Depuis que l’épidémie a été officiellement déclarée, le 5 décembre 2017, le nombre de décès a doublé. A mesure que les informations sur les patients concernés vont remonter, le bilan pourrait encore s’alourdir. Dans son dernier rapport sur la situation, l’Institut sud-africain de santé publique précise que les données finales sont disponibles pour seulement 29 % des cas (soit 238 sur 820), dont 34 % d’entre eux, soit 82 patients, sont décédés.

    La #listériose se transmet le plus souvent par l’intermédiaire d’aliments contaminés par la bactérie #Listeria_monocytogenes. Celle-ci peut se retrouver dans les sols, l’eau, la végétation et certaines selles animales. Principalement présente dans les produits laitiers non pasteurisés et dans certains aliments prêts à consommer, elle est capable de se développer même réfrigérée.

    #santé #contamination #alimentation #Afrique_du_Sud

  • Stockage radioactif de Bure : « Une copie à revoir », selon l’ASN

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/01/15/stockage-radioactif-de-bure-une-copie-a-revoir_5241682_3244.html

    Pierre-Franck Chevet, président de l’Autorité de sûreté nucléaire, souligne le risque d’incendie associé à certains déchets destinés au centre d’enfouissement de la Meuse.

    L’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) rend public, lundi 15 janvier, son avis sur le « dossier d’options de sûreté » du Centre industriel de stockage géologique (Cigéo). Celui-ci vise à enfouir, dans le sous-sol de la commune de Bure, dans la Meuse, 85 000 m3 de déchets hautement radioactifs et à vie longue. Sa mise en service doit débuter en 2026 ou 2027 et s’étaler jusqu’au milieu du siècle prochain.

    Tout en jugeant globalement « très bon » le dossier présenté par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra), chargée de ce projet, le président de l’ASN, Pierre-Franck Chevet, estime qu’il doit être amélioré.

    A ce stade, la fiabilité du futur site du stockage vous semble-t-elle garantie ?

    Ce dossier est une étape importante, au regard de l’enjeu majeur de sûreté que constitue la gestion des déchets nucléaires les plus radioactifs et à vie longue – on parle ici de centaines de milliers d’années. La France, et je m’en réjouis, a choisi l’option du stockage géologique à grande profondeur, qui est aussi la solution de référence au niveau international. C’est le seul choix responsable, sauf à reporter sur les générations futures la charge de gérer ces déchets sur le long terme. Pour autant, il se peut que des alternatives soient trouvées dans le futur, raison pour laquelle la loi a prévu que le stockage soit réversible pendant au moins cent ans.

    L’Andra nous a soumis un très bon dossier. Il confirme que la zone argileuse retenue possède les caractéristiques géologiques requises. Et il marque des avancées significatives en termes de sûreté. Toutefois, nous avons des réserves sur un sujet important : celui des déchets bitumés. Sur ce point, l’Andra doit revoir sa copie. Si ce sujet n’est pas traité de manière satisfaisante, le stockage de ces déchets ne sera pas autorisé par l’ASN.

    Quel risque ces déchets présentent-ils ?

    Il s’agit de boues radioactives qui, par le passé, ont été conditionnées dans des matrices en bitume. Actuellement entreposés dans les installations du CEA [Commissariat à l’énergie atomique] à Marcoule [Gard] et d’Areva à la Hague [Manche], ces produits de moyenne activité à vie longue représentent un peu plus de 40 000 « colis », soit environ 18 % des conteneurs destinés à Cigéo.

    Or, outre que le bitume lui-même peut s’enflammer dans certaines conditions, ces déchets sont aussi susceptibles, par réaction chimique, de monter en température. Avec, en cas de départ de feu, le risque d’un emballement thermique propageant l’incendie dans les alvéoles souterraines de stockage. Cette éventualité doit pouvoir être totalement écartée.

    J’insiste sur le risque d’incendie, car il est particulièrement problématique en milieu souterrain. Il existe des précédents. En France, celui de Stocamine, le centre de stockage de déchets – non radioactifs – installé dans d’anciennes mines de potasse d’Alsace, où un feu a été provoqué en 2002 par la réaction chimique de produits entreposés, ce qui a conduit à l’arrêt définitif de l’exploitation. Et, aux Etats-Unis, celui du WIPP [Waste Isolation Pilot Plant], site de déchets nucléaires militaires implanté au Nouveau-Mexique, dans une couche de sel, où se sont produits en 2014 un incendie et un relâchement de radioactivité.

    Quelles sont les solutions ?

    La première, que nous privilégions, est de demander aux producteurs de ces déchets – le CEA, Areva et EDF – de les reprendre et de les reconditionner, pour les rendre inertes. Cela exige de développer à l’échelle industrielle un procédé de neutralisation chimique. L’autre voie serait de revoir la conception d’ensemble de Cigéo, en espaçant suffisamment les colis pour éviter la propagation d’un feu, et en mettant en place des moyens de détection très précoce d’une montée de température ainsi que d’extinction d’un feu. Industriellement, c’est sans doute compliqué. En tout état de cause, nous ne transigerons pas avec la sûreté.

    Si, finalement, ces 40 000 colis ne pouvaient trouver place dans le centre de stockage, celui-ci ne perdrait-il pas une partie de sa raison d’être ?

    En aucune façon. Les déchets les plus pénalisants que nous avons à gérer sont ceux de haute activité, issus notamment du retraitement du combustible nucléaire. La vocation principale de Cigéo est de confiner ces produits de façon sûre et durable. Pour les déchets bitumés, il faudra trouver un autre mode de stockage.

    Vous demandez néanmoins à l’Andra d’améliorer son dossier sur d’autres aspects...

    Des questions subsistent en effet, en particulier sur la tenue de l’installation face aux aléas naturels, spécialement aux séismes, ou sur la gestion des situations post-accidentelles. En cas d’accident ou d’incident dans une galerie, quelles sont les dispositions prévues pour intervenir, pour éviter la propagation du sinistre, pour poursuivre les opérations de stockage ? Ces questions sont normales au stade d’un dossier d’options de sûreté. L’Andra devra y répondre. Nos remarques doivent lui permettre d’amender et d’améliorer son projet.

    Qu’en est-il du risque d’actes de malveillance, récemment pointé par Greenpeace pour les piscines d’entreposage du combustible des centrales nucléaires ?

    L’ASN est chargée de la sûreté des installations nucléaires, mais la sécurité n’est pas de son ressort. Cependant, l’Andra devra aussi apporter des précisions sur la façon dont elle pense se prémunir, à Bure, contre des actes tels qu’un incendie d’origine criminelle. Encore une fois, le sujet est particulièrement complexe pour un site souterrain. Et plus encore pour une installation dont l’exploitation est prévue sur cent ou cent cinquante ans.

    L’Andra prévoit de vous soumettre sa demande d’autorisation de création de Cigéo en 2019. Compte tenu de vos demandes, ce calendrier est-il réaliste ?

    Le dossier est très bien avancé. Il est tout à fait possible de tenir le calendrier. Nous jugerons sur pièces, le moment venu.

    L’Andra avait chiffré le coût du centre de stockage à près de 35 milliards d’euros, EDF, Areva et le CEA, qui le financent, à 20 milliards. L’ex-ministre de l’écologie, Ségolène Royal, a tranché pour 25 milliards. Ne lésine-t-on pas sur la sûreté ?

    La responsabilité de ce chiffrage revient au gouvernement. Le plus important est que l’arrêté signé en 2016 par Mme Royal précise que ce coût sera régulièrement réévalué, à chaque étape-clé du projet. Cigéo est une installation d’un type nouveau. Il est donc logique que l’estimation du coût évolue dans le temps.

    Compte tenu des risques et des incertitudes qui subsistent, certains opposants prônent l’abandon du projet d’enfouissement au profit d’un entreposage en surface. N’est-ce pas la voie de la prudence ?

    Au contraire. Un entreposage en surface, ou près de la surface, est certes concevable pour des déchets dont la durée de vie est de l’ordre du siècle, pas pour des déchets qui resteront radioactifs des centaines de milliers d’années. Qui peut garantir l’existence d’un contrôle humain et sociétal d’une telle installation à un horizon aussi lointain, qui dépasse toute capacité d’anticipation ? Personne. Je le redis, le stockage géologique profond est la seule solution responsable.

  • Notre-Dame-des-Landes : la gendarmerie se prépare à une opération d’ampleur (soit environ 2 500 militaires, pendant deux à trois semaines au moins)
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2018/01/12/notre-dame-des-landes-la-gendarmerie-se-prepare-a-une-operation-d-ampleur_52

    Trente à quarante escadrons de gendarmerie mobile pourraient être mobilisés (...)

    A la veille d’une décision du gouvernement sur l’avenir du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes – et de la possible évacuation de la zone –, la gendarmerie nationale se prépare à l’une des opérations de maintien de l’ordre les plus délicates de son histoire sur le sol métropolitain.

    Les difficultés qu’anticipent les militaires relèvent de plusieurs facteurs. D’ordre tactique, elles tiennent notamment à la configuration de la ZAD (« zone à défendre »). Ses occupants sont disséminés sur un espace rural étendu et accidenté, fait de champs, de bosquets, de bois et de sentiers boueux, et en partie aménagé. Les forces de l’ordre ne peuvent donc pas jouer sur un effet de surprise et sont contraintes à une progression lente – accentuée par la lourdeur de leurs équipements – et, par conséquent, plus exposée.

    « Les opérations de maintien de l’ordre en milieu rural sont complexes parce que, à la différence d’un environnement urbain très encagé, l’adversaire est mobile, dispersé et il peut avoir préparé le terrain », ajoute le général à la retraite Bertrand Cavallier, ancien commandant du Centre national d’entraînement des forces de gendarmerie de Saint-Astier (Dordogne). L’évacuation de la zone devrait se faire par une progression à pied, mais la gendarmerie n’exclut pas de mobiliser ses véhicules blindés – d’ordinaire employés pour des opérations de maintien de l’ordre outre-mer –, et de solliciter des moyens du génie de l’armée de terre pour détruire des obstacles tels que des barricades, déloger des opposants de leurs cabanes perchées ou rétablir la viabilité de certains axes. (...)

    Le journal officiel de tous les pouvoirs cultive un simulacre de pluralisme, donc un point de vue de Bruno Retailleau : « Le président doit faire évacuer la ZAD et construire l’aéroport » et un point de vue "de gauche"

    Hugo Melchior : « Les zadistes ne quitteront jamais spontanément Notre-Dame-des-Landes »
    Dans une tribune au « Monde », le doctorant en histoire à l’université de Rennes-II rappelle que quelle que soit la décision du gouvernement, les zadistes n’évacueront pas les lieux car ils ont un « monde » à défendre, une « utopie réelle » à sauvegarder.

    Tribune. Après la victoire du « oui » lors de la consultation du 26 juin 2016 en Loire-Atlantique, le gouvernement socialiste semblait ne plus vouloir perdre de temps. La date de la nouvelle tentative d’évacuation de la zone à défendre (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes fut annoncée pour l’automne 2016. Pourtant, l’horizon des zadistes demeura dégagé.

    Puis Emmanuel Macron succéda à François Hollande, charge à lui de régler le sort du projet aéroportuaire et par là même de la ZAD, cette zone libérée censée apporter la démonstration qu’il serait possible de fuir le système capitaliste et le salariat, et cela en travaillant au façonnement de nouvelles alternatives émancipatrices, sans attendre un changement antisystémique par le haut.
    Plutôt que de déclencher immédiatement la foudre, le « président jupitérien » nomma trois médiateurs, le 1er juin, pour « regarder une dernière fois les choses » et l’aider à prendre une décision définitive. Le 13 décembre, ces derniers remirent leur rapport dans lequel il apparaît que c’est bien l’abandon du projet de construction du nouvel aéroport à Notre-Dame-des-Landes qui est inscrit à l’ordre du jour. Si la roue de l’histoire devait tourner en faveur des opposants, ces derniers, après un demi-siècle d’agir ensemble contre un projet jugé « néfaste » et « inutile », ne pourraient que se réjouir de voir les décideurs accéder à leur revendication unifiante.

    Un lieu d’aimantation politique
    Mais déjà on s’aperçoit que c’est une autre question qui polarise l’attention : que faire de ceux qui occupent « illégalement » ces centaines d’hectares, certains depuis le milieu des années 2000 ? Dans ses dernières déclarations, l’exécutif a exprimé sa volonté de dissocier le dossier de l’aéroport de la question épineuse des zadistes. En effet, ces derniers auront vocation à quitter les lieux, quelle que soit l’option retenue par le gouvernement. Dans ces conditions, un renoncement au projet d’aéroport ne saurait signifier le maintien du statu quo en ce qui les concerne. Aussi, tel un Pierre Messmer ne cachant plus, en octobre 1973, son exaspération devant la combativité têtue des ouvriers de l’entreprise Lip, Edouard Philippe a fait comprendre que « la ZAD, c’est fini ! ».

    LES OBSTINÉS DE LA ZAD ONT EU LE TEMPS DE « CONSTRUIRE UNE AUTRE RÉALITÉ » DÉLIVRÉE DE LA DÉMESURE D’UNE SOCIÉTÉ CAPITALISTE AUTOPHAGE

    Toutefois, il est quelque chose d’acquis : les centaines d’opposants ne quitteront jamais spontanément les lieux qu’ils occupent, même si l’abandon du projet devait être entériné. En effet, ils ont un « monde » à défendre, une « utopie réelle » à sauvegarder, pour reprendre le titre de l’ouvrage du sociologue Erik Olin Wright. Depuis l’automne 2012 et l’échec mémorable de l’opération « César » [la tentative par les forces de l’ordre de déloger les zadistes], les obstinés de la ZAD ont eu le temps de « construire une autre réalité » délivrée de la démesure d’une société capitaliste autophage, et cela au travers de l’existence de ces 70 lieux de vie habités et ces 260 hectares de terres cultivées arrachées à la multinationale Vinci, mais aussi de ce moulin, cette épicerie-boulangerie-fromagerie, cette bibliothèque.

    Derrière la lutte contre le projet d’aéroport, ce qui se joue aujourd’hui, et qui fait que la ZAD de Notre-Dame-des-Landes est devenue un lieu d’aimantation politique et l’expression exemplaire de la nécessité de faire bifurquer l’humanité pour l’amener à prendre une autre voie, c’est l’affrontement entre différentes conceptions antagonistes du monde.

    Défense de ce précieux bien commun
    Aussi, en cas de nouvelle offensive sécuritaire d’envergure contre la ZAD, aux habituels slogans « Vinci dégage, résistance et sabotage ! » succéderont, peut-être, des « Etat casse-toi, cette terre n’est pas à toi ! » afin d’exprimer non seulement le droit de vivre du fruit de la terre partagée mise en valeur en harmonie avec la nature, mais également le droit à l’auto-gouvernement pour ceux qui la travaillent et l’habitent. Face à une entreprise de « pacification » de la zone, les zadistes, toujours soutenus par un large spectre du champ politique à gauche, et par plus de 200 comités de soutien, forts de leur alliance nouée avec les opposants historiques à l’aéroport, notamment les paysans locaux, défendront légalement l’intégrité de ce précieux bien commun.

    L’opération de police sera ressentie comme une violation de la souveraineté territoriale revendiquée de fait, sinon de droit, par ces habitants de la ZAD. Dès lors, les formes de contestation politique auxquelles recourront les zadistes seront susceptibles d’apparaître comme porteuses d’une légitimité réelle aux yeux d’une partie significative de la population. En effet, elles seront perçues comme des modes d’action essentiellement défensifs et réactifs de femmes et d’hommes défendant leur droit commun à la terre, et de facto leur droit à l’existence, face à l’action prédatrice de l’Etat expropriateur.

    Rentre la situation politiquement intenable
    Dans le cadre d’un rapport de force a priori asymétrique, avec des unités coercitives étatiques, qui seront immédiatement assimilées à des « forces d’occupation », l’enjeu pour les militants zadistes sera, comme en 2012, de rendre la situation politiquement intenable pour le pouvoir d’Etat, jusqu’à l’obliger à négocier les conditions de sa défaite en consentant à la pérennisation de la ZAD par la conclusion « d’une paix ». Celle-ci pourrait s’inspirer du modèle du quartier autogéré de Christiania à Copenhague, où les habitants ont signé un accord de « paix » avec l’Etat danois en juin 2011, après près de quarante années passées dans l’illégalité.

    Protégés derrière leurs lignes de défense, ceux formant cette « communauté ouverte » n’ont nullement l’intention de se rendre à la préfecture pour déposer leur préavis de départ. Ainsi continueront-ils à vivre autrement, prêts à réagir dans la légalité si, au nom de la restauration de « l’Etat de droit », Emmanuel Macron, postulant qu’il aura le vent de l’opinion publique dans le dos, se décide à trancher le nœud gordien de la ZAD de Notre-Dame-des-Landes.

    Notre-Dame-des-Landes. « Il faudra du temps » avant d’évacuer dit la préfète
    https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/notre-dame-des-landes-il-faudra-du-temps-avant-d-evacuer-5494384

    Nicole Klein, aussi, attend la décision sur Notre-Dame-des-Landes. La préfète laisse entendre que l’évacuation ne serait pas « totale » en cas d’abandon. Ni forcément immédiate.

    [L’annulation du projet parait toujours plus plausible, et pour économiser un dédit pharaonique,ndc] Notre-Dame-des-Landes : le gouvernement envisage de demander l’annulation du contrat avec #Vinci en raison d’une "clause bizarre"
    https://www.francetvinfo.fr/politique/notre-dame-des-landes/info-franceinfo-notre-dame-des-landes-le-gouvernement-envisage-de-deman

    #Zad #tactique #gendarmerie

    • Il a fallu cinquante ans à l’Etat français pour comprendre, grâce aux Zadistes, que cet aéroport était une vaste connerie, mais le même état, maintenant qu’il a compris qu’il ne fallait pas, s’apprête à ne se donner aucune autre alternative ni même temps de réfléchir avant de donner la troupe sur des personnes qui viennent de lui montrer qu’il s’était trompé. Mais quelle violence et quelle connerie !

    • Sur la ZAD, il reste possible que la raison gouvernementale l’emporte sur les rodomontades de la souveraineté étatique et policière, qu’il prenne le temps de diviser pour de bon ou celui de faire activement pourrir. Sinon, ils prévoient des semaines pour mener à bien une opération qui passera par un contrôle militaire du territoire, des coupures d’électricité, une guerrila plutôt que blietzkrig (l’échec de « l’opération César » les aurait instruit)... sans aucune garantie pour la suite. Quoi qu’il en soit :

      « Le gouvernement a qualifié de fausse information un article de Franceinfo citant un ministre anonyme, selon qui l’exécutif envisagerait de dénoncer le contrat passé avec Vinci en raison de clauses trop favorables au groupe de BTP. » (...) En cas d’abandon du projet, l’État devrait verser jusqu’à 350 millions d’euros d’indemnités, selon le rapport des médiateurs. Mais les anti-NDDL suggèrent une transaction avec Vinci, également exploitant de Nantes-Atlantique.

      Dans « ND-des-Landes : Philippe boucle sa consultation avant la décision de l’exécutif »
      http://www.liberation.fr/france/2018/01/12/nd-des-landes-philippe-boucle-sa-consultation-avant-la-decision-de-l-exec

    • A mettre en relation avec l’affaire des photos bidonnées publiées par le JDD (et fournies directement par la gendarmerie).

      Le premier article fait passer les zadistes pour des vietcongs sanguinaires et prépare l’opinion publique à la baston, qui sera donc forcément légitime.
      Qui veut tuer son chien...

      Mais quelles sont ses sources ?
      « pourraient être mobilisés », « le général à la retraite »

  • Les vieux diesels, bons pour polluer l’Afrique
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/12/15/les-vieux-diesels-bons-pour-polluer-l-afrique_5230006_3244.html

    Dans quelques années, c’est ici, dans les bouchons de la capitale du Kenya, dans les rues saturées de Kampala, celle de l’Ouganda, ou dans la cohue de Cotonou (Bénin), que se déverseront les millions de diesels dont l’Europe ne veut plus pour ses citoyens. Ils continueront à recracher leurs #oxydes_d’azotes (NOx), ces #gaz_toxiques responsables de dizaines de milliers de morts chaque année et dont les constructeurs se sont évertués à dissimuler les vrais niveaux d’émission jusqu’au scandale du « dieselgate » et l’aveu du numéro un mondial du secteur, Volkswagen, en 2015.

    Ce scénario préoccupe l’Organisation mondiale de la santé. « Ce qui nous inquiète, aujourd’hui, avec cette flotte de vieux véhicules diesel, c’est où ils vont finir. Et j’ai déjà une petite idée : le marché africain va être inondé », confie Maria Neira, directrice du département santé publique et environnement. Dans un rapport inédit sur les liens entre pollution et mortalité publié fin octobre, The Lancet a classé le Kenya parmi les pays les plus touchés. Selon les décomptes macabres de la revue médicale britannique, pour la seule année 2015, la #pollution, principalement de l’#air, a provoqué près de 58 000 #morts, soit environ 20 % de tous les décès.

    #paywall #Afrique #diesel #voiture #santé

  • Glyphosate : révélations sur les failles de l’expertise européenne
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/26/glyphosate-revelations-sur-les-failles-de-l-expertise-europeenne_5220696_324

    En septembre, la défiance a atteint son paroxysme. Une ONG autrichienne, Global 2000, a révélé, documents à l’appui, que de longs passages du rapport d’évaluation officiel sur la toxicité du glyphosate étaient parfaitement identiques au dossier déposé par Monsanto pour solliciter le renouvellement de son produit. Son surlignage coloré met en évidence une centaine de pages copiées-collées par les agences européennes.

    Or ces pages sont précisément celles qui innocentent le produit : ni toxique pour la reproduction, ni cancérogène, ni génotoxique – une capacité à endommager l’ADN qui peut entraîner des cancers. C’est sur la base de cette évaluation que l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait acquitté le glyphosate à l’automne 2015. Et l’opinion de cette agence, déterminante, constitue le socle du verdict attendu lundi 27 novembre. A moins qu’il s’agisse, mot pour mot, de l’opinion d’un employé de Monsanto. C’est ce que notre enquête, en remontant la piste de ces copiés-collés, permet de démontrer.

    Devant plus de trois cents personnes, José Tarazona, le chef de l’unité des pesticides de l’agence, prend la parole dans une atmosphère pesante. Les « allégations de copié-collé et de plagiat », plaide celui qui a surpervisé le travail de l’agence sur le glyphosate, sont le fait de « gens qui ne comprennent pas le processus ». A l’assistance médusée, il explique que cette pratique relève de la routine : « Les parties qui devaient être copiées ont été copiées et celles qui devaient être modifiées ont été modifiées. » Toutes les agences, apprend-on ce jour-là, se serviraient du fichier des industriels comme point de départ puis, après vérifications, l’amenderaient. Ou pas.

    Les experts de l’Etat rapporteur doivent ainsi passer au crible les données qu’il contient ; essentiellement deux types de données de nature très différente. D’une part les résultats de tests de toxicité commandités et financés par les firmes. Protégés par le secret commercial, ils ne sont accessibles, sous le sceau de la confidentialité, qu’aux experts des agences. Autrement dit : eux seuls ont à la fois l’autorisation et la responsabilité de les vérifier.

    D’autre part, le règlement européen demande aux firmes de sélectionner les études scientifiques indépendantes les plus pertinentes, publiées dans les revues savantes, et d’en fournir des « résumés critiques ». Le pays rapporteur analyse l’ensemble, rédige un rapport préliminaire, le transmet à l’EFSA. L’agence européenne supervise ensuite la relecture par les experts des Etats membres. Enfin, après corrections et validation, elle endosse et publie le rapport définitif.

    L’article est publié un an plus tard, en 2013. Le texte est identique à celui qui figure dans le dossier fourni par la Glyphosate Task Force aux autorités européennes en 2012. Il correspond à cette fameuse sélection d’études indépendantes restituées sous la forme de « résumés critiques ». Seulement voilà : presque toutes ces études y sont si sévèrement « critiquées » qu’elles ont été jugées « non fiables », et donc écartées.

    « Les trois quarts des soixante études de génotoxicité publiées dans la littérature scientifique ont rapporté que le glyphosate ou des herbicides à base de glyphosate causaient des dégâts sur l’ADN, explique Helmut Burtscher, toxicologue de l’ONG Global 2000, et le premier à avoir relevé les similitudes entre les deux rapports. Mais elles ont été considérées comme “non pertinentes” ou “non fiables”. »

    #Glyphosate #Monsanto #Conflit_intérêt #Régulation #Manipulations_scientifiques

  • Forêt de Bialowieza : la justice européenne menace la Pologne de lourdes sanctions

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/20/foret-de-bialowieza-la-justice-europeenne-menace-la-pologne-de-lourdes-sanct

    Cette forêt, la mieux préservée d’Europe, subit des abattages d’arbres décidés par la Pologne et auxquels l’Union européenne s’oppose depuis le mois de mars.

    La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a menacé, lundi 20 novembre, la Pologne d’une astreinte « d’au moins 100 000 euros par jour » si elle ne cessait pas « immédiatement » l’abattage des arbres dans la forêt de Bialowieza, au nord-est du pays. Classée au patrimoine mondial de l’Unesco, elle est l’une des forêts naturelles les mieux conservées d’Europe.

    « Sauf cas exceptionnel et strictement nécessaire pour assurer la sécurité publique, la Pologne doit cesser immédiatement les opérations de gestion forestière active dans la forêt de Bialowieza », a ordonné la CJUE, sise à Luxembourg, dans une ordonnance.

    En septembre, la Commission et la Pologne avaient présenté leurs points de vue devant la Cour à Luxembourg lors d’une audience de référé.

    Depuis, Varsovie a accusé la justice européenne de manquer d’impartialité, affirmant procéder à des coupes « de protection » uniquement pour stopper la prolifération d’insectes xylophages, protéger le trafic routier et lutter contre les feux de forêt. Dans son ordonnance rendue lundi, la Cour confirme sa décision de la fin juillet.

  • Une fuite de pétrole entraîne la fermeture temporaire de l’oléoduc #Keystone_XL
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/17/une-fuite-de-petrole-entraine-la-fermeture-temporaire-de-l-oleoduc-keystone-

    L’opérateur canadien TransCanada a annoncé la fermeture provisoire de son oléoduc Keystone entre le Canada et les Etats-Unis en raison d’une fuite de pétrole détectée dans l’Etat américain du Dakota du Sud, dans une zone rurale située à près de 402 kilomètres à l’ouest de Minneapolis.

    Environ 5 000 barils de pétrole (environ 795 000 litres) se sont déversés à l’aube de l’oléoduc pour une raison encore inconnue, a précisé dans un communiqué TransCanada.

  • Une agriculture 100 % biologique pourrait nourrir la planète en 2050
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/14/une-agriculture-100-biologique-pourrait-nourrir-la-planete-en-2050_5214822_3

    Dans ce travail, le plus abouti sur la question, ils affirment qu’il est possible de nourrir plus de 9 milliards d’êtres humains en 2050 avec 100 % d’#agriculture #biologique, à deux conditions : réduire le gaspillage alimentaire et limiter la consommation de produits d’origine animale. Et ce, sans hausse de la superficie de terres agricoles et avec des émissions de gaz à effet de serre réduites. Un défi de taille, alors que le bio ne représente que 1 % de la surface agricole utile dans le monde – 6 % en France.

    « Un des enjeux cruciaux est aujourd’hui de trouver des solutions pour basculer dans un système alimentaire durable, sans produits chimiques dangereux pour la santé et l’environnement, avance Christian Schader, l’un des coauteurs de l’étude, chercheur à l’Institut de recherche de l’agriculture biologique, situé en Suisse. Or cette transformation inclut une réflexion sur nos habitudes alimentaires et pas seulement sur les modes de production ou sur les rendements. »

    #alimentation #bio
    https://www.nature.com/articles/s41467-017-01410-w

  • Le cri d’alarme de quinze mille scientifiques sur l’état de la planète

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/13/le-cri-d-alarme-de-quinze-mille-scientifiques-sur-l-etat-de-la-planete_52141

    « Le Monde » publie le manifeste signé par 15 364 scientifiques de 184 pays, à paraître lundi dans la revue « BioScience ».

    Il y a vingt-cinq ans, en 1992, l’Union of Concerned Scientists et plus de 1 700 scientifiques indépendants, dont la majorité des lauréats de prix Nobel de sciences alors en vie, signaient le « World Scientists’Warning to Humanity ». Ces scientifiques exhortaient l’humanité à freiner la destruction de l’environnement et avertissaient : « Si nous voulons éviter de grandes misères humaines, il est indispensable d’opérer un changement profond dans notre gestion de la Terre et de la vie qu’elle recèle. »

    Les responsables politiques étant sensibles aux pressions, les scientifiques, les personnalités médiatiques et les citoyens ordinaires doivent exiger de leurs gouvernements qu’ils prennent des mesures immédiates car il s’agit là d’un impératif moral vis-à-vis des générations actuelles et futures des êtres humains et des autres formes de vie.

    Pour éviter une misère généralisée et une perte catastrophique de biodiversité, l’humanité doit adopter une alternative plus durable écologiquement que la pratique qui est la sienne aujourd’hui. Bien que cette recommandation ait été déjà clairement formulée il y a vingt-cinq ans par les plus grands scientifiques du monde, nous n’avons, dans la plupart des domaines, pas entendu leur mise en garde. Il sera bientôt trop tard pour dévier de notre trajectoire vouée à l’échec, car le temps presse. Nous devons prendre conscience, aussi bien dans nos vies quotidiennes que dans nos institutions gouvernementales, que la Terre, avec toute la vie qu’elle recèle, est notre seul foyer.

  • French institute suspects nuclear accident in Russia or Kazakhstan in September
    https://www.reuters.com/article/us-russia-nuclearpower-accident/french-institute-suspects-nuclear-accident-in-russia-or-kazakhstan-in-septe
    https://s2.reutersmedia.net/resources/r/?m=02&d=20171109&t=2&i=1209160788&w=&fh=545px&fw=&ll=&pl=&sq=&r=LYN

    A cloud of radioactive pollution over Europe in recent weeks indicates that an accident has happened in a nuclear facility in Russia or Kazakhstan in the last week of September, French nuclear safety institute IRSN said on Thursday.

    #nucléaire #accident #tout_va_bien

    • ​Du ruthénium-106 a été détecté dès fin septembre 2017 par plusieurs réseaux européens de surveillance de la radioactivité dans l’atmosphère, à des niveaux de l’ordre de quelques millibecquerels par mètre cube d’air. Les investigations de l’IRSN permettent d’apporter des éléments sur la localisation possible de la source de rejet ainsi que l’ordre de grandeur des quantités rejetées.

      http://www.irsn.fr/FR/Actualites_presse/Actualites/Pages/20171109_Detection-Ruthenium-106-en-france-et-en-europe-resultat-des-investigat


    • La zone de rejet la plus plausible se situe entre la Volga et l’Oural (en rouge sur la carte). L’échelle de couleur va du plus probable (rouge) au moins probable (blanc).

      A partir des données météorologiques de Météo France (sur les déplacements des masses d’air notamment) et des résultats des mesures des autres pays européens, l’IRSN a réalisé des simulations afin de localiser et de quantifier le rejet. Il en ressort que « la zone la plus plausible se situe entre la Volga et l’Oural, sans qu’il soit possible de préciser la localisation exacte du point de rejet ». Celui-ci « aurait eu lieu au cours de la dernière semaine du mois de septembre ».

      Quant à la quantité de ruthénium 106 relâchée dans l’atmosphère, elle est « très importante », entre 100 et 300 térabecquerels, un térabecquerel équivalant à mille milliards de becquerels.

      EDIT : le point rouge est dans la région de Perm.

    • la quantité de ruthénium 106 relâchée dans l’atmosphère […] est " très importante "

      si je ne me trompe pas dans mes calculs (relativement élémentaires), on est autour de 2 grammes de Ru 106 :

      • prenons 200 TBq, le milieu de la fourchette, soit 2.10^14 désintégrations par seconde
      • demi-vie T = 373,59 jours, soit 3,2.10^7 s
      => constante de temps, λ = ln(2)/T = 2,15.10^-8 s^-1

      => nombre d’atomes soumis à désintégration :
      2.10^14 / 2,15.10^-8 ≈ 1.10^22
      => nombre de moles 1.10^22 /N =1.10^22 /6,02.10^23 = 1,6.10^-2
      => masse molaire 106 (en fait, 105,9 g) => masse = 1,6 g

      Allez, je vous le fait à 2 grammes.

    • D’après google news, des articles sont sortis dans la presse et médias FR aujourd’hui.
      Avant ça, rien à part deux articles sur le figaro les 8 et 22 octobre.

      L’incident date quand même de fin septembre !!

      J’appelle bien ça aucun écho dans la presse (jusqu’à ce soir).

    • Techniquement, le réseau de détection fonctionne plutôt bien : l’incident a été détecté dès l’arrivée de la radioactivité aux stations de mesure qui publient leurs résultats, hors Russie, donc. Il n’a pas été détecté par le réseau de balises aériennes géré par la Criirad dans la Drôme.

      C’est ce qui se passe après (rien !) qui n’est pas rassurant. En France, la transparence est plutôt bonne, conséquence évidente de la vigilance citoyenne attentive de la Criirad. Ainsi, je regardais pour comparaison le suivi des incidents de dépassement de seuil de rejet par la Socatri au Tricastin en juillet 2008 (p. ex. là : http://www.lyoncapitale.fr/Journal/Lyon/Actualite/Environnement/Fuite-d-uranium-au-Tricastin-apres-des-dysfonctionnements-la-CRIIRAD-de ) on dispose d’une information le lendemain, voire le jour même (pour l’activité, on est de l’ordre du GBq). Pour cet incident russe, activité 10 000 fois plus forte, il faut attendre presque 2 mois pour avoir confirmation, par l’émetteur et sans aucun détail de l’existence de l’incident.

      Sans parler de la reprise dans la presse, inexistante dans la presse française, alors en Russie… Déjà, il faut chercher un peu pour découvrir que #RosHydroMet n’est pas que l’organisme fédéral de météo mais qu’il a également en charge le suivi de l’environnement (d’où la remarque d’un des commentateurs).

      Federal Service for Hydrometeorology and Environmental Monitoring of Russia, WP[en], https://en.wikipedia.org/wiki/Federal_Service_for_Hydrometeorology_and_Environmental_Monitoring_of_R , rien d’équivalent en français, ce qui en approche le plus est la mention de ce service comme maison mère de la météo en Russie
      Centre hydrométéorologique de Russie, WP[fr] https://fr.wikipedia.org/wiki/Centre_hydrométéorologique_de_Russie

      Bien évidemment, on peut chercher (obligatoirement en russe, la version anglaise est « en construction »…) sur le site de RosHydroMet, rigoureusement pas un mot sur une quelconque radioactivité où que ce soit (j’ai été vérifier par acquit de conscience, les 100 dernières dépêches, (rapidement avec gg:translate), ce qui nous met au 16/08/2017).
      http://www.meteorf.ru/press/news

    • Dans la presse russe :

      • le 11 octobre, Rossiyskaya Gazeta (et d’autres) reprend un communiqué de Rosatom : tout va bien, d’ailleurs RosHydroMet ne détecte rien, il y a du Ruthénium en Europe, mais ce n’est pas nous. Le sous-titre affirme même que l’AIEA et Rosatom savent déjà d’où et de qui provient le ruthénium (non repris dans l’article, sauf une phrase qui dit que Rosatom n’a pas pour habitude de dénoncer qui que ce soit…)

      «Росатом» опроверг информацию о выбросе рутения-106 в России — Российская газета

      https://rg.ru/2017/10/11/rosatom-oproverg-informaciiu-o-vybrose-ruteniia-106-v-rossii.html

      titre et sous-titre (pour la traduction par gg)

      «Росатом» опроверг информацию о выбросе рутения-106 в России
      В МАГАТЭ и «Росатоме» уже знают, откуда и чей над Европой рутений

      la conclusion

      Поэтому общий вывод в заявлении сдержанный: «Предприятия атомной отрасли России не могут рассматриваться в качестве источника выброса Ru-106. Версия о, якобы, российском происхождении загрязнения несостоятельна».

      • le 20 novembre, Nastoyashee Vremia (transcription française, Nastoyachtcheïé vremia, çàd Temps Présent), site et chaîne télé filiale de Radio Free Europe et Voices of America signale la détection (en septembre…) par RosHydroMet de ruthénium 106 dans la région de Tchéliabinsk et notamment, proche de Maïak.

      Росгидромет подтвердил рост загрязнения рутением в Челябинской области в сентябре - Настоящее время

      https://www.currenttime.tv/a/28865007.html

      Наибольшая концентрация радиоактивного рутения-106 (Ru-106) в сентябре наблюдалась в Челябинской области, в стокилометровой зоне ПО «Маяк»

      Федеральная служба по гидрометеорологии и мониторингу окружающей среды России опубликовала бюллетень о радиационной обстановке на территории России в сентябре 2017 года. В нем прямо сказано о содержании радиоактивного рутения-106 (Ru-106) в пробах, отобранных в сентябре в Челябинской области, в стокилометровой зоне производственного объединения «Маяк».

    • Report : Russia Confirms Radioactivity Emanating From Southeastern Urals (20/11/2017)
      https://www.rferl.org/a/report-russia-confirms-radioactivty-ruthenium-106-emanating-southeastern-urals/28865773.html

      Russia’s meteorological service has confirmed there were “extremely high” concentrations of the radioactive isotope ruthenium-106 in several parts of the country in late September, Agence France-Press reported on November 20.

      The reported findings from Russia appear to confirm reports from Europe earlier this month that a cloud containing the radioisotope Ru-106 drifted over Europe last month which European meteorological agencies had said likely originated in either the southeastern Urals region of Russia or Kazakhstan.

      “Probes of radioactive aerosols from monitoring stations Argayash and Novogorny were found to contain radioisotope Ru-106” between September 25 and October 1, Russia’s Rosgidromet service said, according to AFP.

      si je ne m’abuse, il s’agit de la version anglaise du même article sur RFE/RL, complété d’éléments de cadrage provenant de l’AFP.

      Rosatom later said in response to the French agency’s report [IRSN report] that “radiation around all objects of Russian nuclear infrastructure are within the norm and are at the level of background radiation.

      But Rosatom suggested that a discharge from an installation linked to the nuclear fuel cycle or which produces radioactive materials could be the cause of the radioactive cloud.

      Greenpeace Russia on November 20 called on Rosatom to open “an in-depth inquiry and publish the results about the incidents at Mayak.

      Greenpeace will send a letter asking prosecutors to open an inquiry into potential concealment of a nuclear incident,” it said in a statement.

    • Le titre du 20 minutes (La Russie reconnaît avoir détecté une pollution radioactive sur son territoire http://www.20minutes.fr/monde/russie/2172799-20171121-russie-reconnait-avoir-detecte-pollution-radioactive-terr) me semble plus proche du communiqué non ? Ils n’expriment pas qu’ils sont « à l’origine » ou responsables de cette pollution ? Un satellite ou une malveillance étrangère pourrait être encore possible. C’est fou qu’ils ne disent pas précisément de quelle usine cela vient, ils devraient le savoir maintenant même si le rejet était involontaire et passé inaperçu (gasp). Je vois pas vraiment ce qu’ils leur en coûterait…

      Quelle confiance peut on accorder à leurs dires (« dans les échantillons relevés du 25 septembre au 7 octobre, y compris dans le sud de l’Oural, aucune trace de ruthénium-106 n’a été découverte à part à Saint-Pétersbourg ») alors même qu’ils ont menti en disant les jours précédents qu’ils n’avaient pas vu signe de pollution (ou alors ils disaient déjà ne pas être à l’origine de la pollution sans préciser qu’ils l’avaient bien détecté) ?

      C’est absurde et tellement inconscient…

    • http://www.20minutes.fr/planete/2173303-20171121-hallucinant-mystere-possible-incident-nucleaire-fin-septe

      [...]

      Les regards tournés vers Maïak, le site militaire russe secret
      Il reste alors la troisième piste : celle d’un problème survenu dans un site de retraitement du combustible nucléaire usagé. « 
      Ces sites extraient et séparent de ces combustibles le plutonium et l’uranium, qui pourront servir à des fins militaires ou à la production d’électricité, des autres radionucléides, dont le ruthènium 106, explique Yves Marignac. Ces autres éléments radioactifs, encore très chauds, sont des déchets et vont être conditionnés en colis vitrifiés. »

      Cette fois-ci, cette hypothèse d’un couac dans le processus de retraitement colle bien. Arguaïach, le village où l’agence météorologique russe a relevé des concentrations très élevées de ruthénium 106, est à 30 km du complexe nucléaire Maïak, un site militaire secret et marqué en 1957 par un grave accident nucléaire. « On sait que le complexe sert aujourd’hui de site de retraitement au combustible nucléaire usé », précise Yannick Rousselet.

      [...]

      Voilà ce qui fait dire à Yves Marignac que cette histoire est « sidérante ». « Nous sommes face à un incident nucléaire majeur et il demeure caché. » « En France, il aurait très certainement été classé au niveau 5 sur une échelle qui en compte 7, renchérit Yannick Rousselet.

    • Nuage de ruthénium 106 : toute la lumière doit être faite sur un possible accident nucléaire en Russie !
      http://sortirdunucleaire.org/Nuage-de-ruthenium-106-toute-la-lumiere-doit-etre

      Sur le site en pdf, un témoignage très détaillé de Nadejda Kutepova
      http://sortirdunucleaire.org/IMG/pdf/te_moignage_de_nadezda_kutepova_19.11.17-2.pdf

      Je m’appelle Nadezda Kutepova. Je suis réfugiée politique en France depuis juillet 2015.Pendant seize ans (1999-2015), en tant qu’avocate et directrice de l’ONG « La Planète des Espoirs », j’ai défendu des habitants contaminés par les usines de Mayak qui vivent dans la ville fermée d’Ozersk dans la région de Tcheliabinsk. C’est pourquoi mon ONG a été reconnue comme étant un « agent de l’étranger » et accusée d’espionnage. Ainsi, j’ai été contrainte de quitter la Russie pour éviter la prison.

      Je suis née et j’ai grandi dans la ville fermée Ozersk, tandis que ma grand-mère, comme mon père, travaillaient à Mayak.
      Je suis toutes les nouvelles en provenance d’Ozersk et de Mayak parce que je voudrais y revenir et continuer à travailler dans cette région dès que je serais sûre d’obtenir des garanties pour ma sécurité. J’ai suivi de près l’évolution des données sur la contamination par le ruthénium 106, dès l’instant où le Ministère allemand en charge de la Sûreté Nucléaire a publié son premier communiqué de presse.

      Ses hypothèses :

      D’où peut provenir cette émission de ruthénium, à Mayak ?
      1. De l’usine de retraitement
      2. De l’usine de vitrification de déchets nucléaires de très haute activité.

      C’est l’hypothèse qui est privilégiée dans cette interview.

      Выброс рутения-106 на Урале : что произошло и что делать ? — Новости политики, Новости России — EADaily
      https://eadaily.com/ru/news/2017/11/21/vybros-ruteniya-106-na-urale-chto-proizoshlo-i-chto-delat

      «Я предполагаю, что в ночь с 25 на 26 либо днем 26 сентября на электрической печи остекловывания радиоактивных отходов завода по переработке ядерных отходов 235, который работает круглосуточно, во время технологического процесса остекловывания высокоактивных ядерных отходов произошел аварийный выброс рутения-106», — написала в Facebook Надежда Кутепова.

    • Dans cette autre version du communiqué de N. Kutepova, cette hypothèse sur la source.

      Nuage de Ruthénium-106 sur l’Europe : que s’est-il réellement passé ?
      http://sortirdunucleaire.org/Nuage-de-Ruthenium-106-sur-l-Europe-que-s-est-il

      6. L’IRSN estime à 300 ou 400 TBq la quantité relâchée à la source, soit la quantité contenue dans une dizaine de tonnes de combustibles retraités (environ 20 assemblages combustibles).. C’est une quantité compatible avec une opération de vitrification.

    • Sur Euronews, hier (21/11) des hypothèses (essentiellement les mêmes : accident dans un four lors de la vitrification).

      Что такое изотоп рутения-106 ? | Euronews
      http://ru.euronews.com/2017/11/21/russia-ruthenium-what-it-is

      Другая точка зрения у Игоря Смирнова, доктора химических наук, профессора, ученого секретаря ФГУП НПО Радиевый институт им. В.Г. Хлопина.

      «В печке остекловывания предусмотрены меры по предотвращению летучести всех летучих соединений. Там добавляют восстановитель, который оксид рутения в том числе превращает в металл абсолютно не летучий. Поэтому из этой печки выбросов рутения не может быть в принципе просто по технологии. Там все сделано так, чтобы ничего не было», – говорит профессор в интервью euronews.

      En français sur le même site, à la même date, aucun détail de ce genre.

      Pollution radioactive : les hypothèses de Greenpeace | Euronews
      http://fr.euronews.com/2017/11/21/pollution-radioactive-les-hypotheses-de-greenpeace

      Selon plusieurs réseaux de surveillance européens le complexe nucléaire russe Maïak pourrait être à l’origine de la pollution radioactive détectée au mois de septembre sur le Vieux continent. Le site sert de retraitement de combustible nucléaire. Pour Jan Vande Putte, qui suit ces questions pour Greenpeace, les risques pour la santé demeurent assez faibles au sein de l’Union. “C’est dangereux localement disons autour de Maïak, mais il y a une dilution importante de la radioactivité sur une telle distance et cette dilution réduit évidemment les risques pour les personnes dans l’ouest de l’Europe”, assure-t-il.

      Les agences de surveillance ont détecté des taux élevé de ruthénium-106, un élément particulièrement employé “par le secteur médical, c’est pour cela qu’il est connu, pour le traitement de cancers”, précise Jan Vande Putte.

    • En lien avec le sujet, l’impact de la qualification, en 2012, d’#agent_de_l'étranger pour les ONG russes les plus actives en particulier pour la défense de l’environnement. Parmi les ONG impactées, celle de Nadejda Kutepova.

      HRW Calls Russian ’Foreign Agent’ Law ’Devastating’ For Environmental Groups
      https://www.rferl.org/a/russia-hrw-says-foreign-agent-law-devastating-environmental-groups/28868194.html

      It cites the case of Planeta Nadezhd (A Planet of Hope), an NGO based in the city of Ozersk, near the Mayak nuclear complex in the Chelyabinsk region. The group, which has ceased its activities, was active in defending the rights of radiation victims.

      The organization’s director, Nadezhda Kutepova, left Russia for France in 2015 after the authorities branded it a “foreign agent” and a local television channel accused her group of espionage. She received political asylum in France last year.

    • #damage_control (autant qu’on peut…)
      1. chez RosHydroMet

      RosHydroMet va modifier la forme de ses communiqués relatifs aux mesures environnementales, il semblerait que la forme actuelle soit mal comprise…

      Росгидромет изменит форму отчетов мониторинга в РФ после ситуации с рутением-106
      http://www.interfax.ru/russia/588721

      Росгидромет изменит форму отчетов мониторинга в РФ после ситуации с рутением-106.

      «Мы учли факт некорректной и иногда преднамеренно недобросовестной интерпретации наших данных по рутению-106 некоторыми общественными организациями и СМИ. Для однозначного понимания данных мониторинга качества окружающей среды на территории страны Росгидромет внесет изменения в форму представления соответствующих отчетов. В таблицах будут даваться данные о концентрациях обнаруженных загрязняющих веществ в сравнении с установленными предельно допустимыми концентрациями (ПДК)», - говорится в распространенном в четверг комментарии руководителя Росгидромета Максима Яковенко.

      В настоящее время данные мониторинга приводятся в сравнении с предыдущим месяцем.

      Кроме того, по словам Яковенко, в Росгидромете «обеспокоены тем фактом, что в некоторых СМИ появились утверждения о якобы сокрытии Росгидрометом информации о данных мониторинга радиационной обстановки на территории России и, в частности, о фиксации повышения уровня рутения-106 в некоторых регионах страны. Это не соответствует действительности и вводит в заблуждение население страны», - заявил он.

    • #damage_control
      2. chez Rosatom

      En gros, #TVB (article intégral)
      les journalistes vont être invités à Ozersk et pourvoir y toucher du ruthénium. J’imagine pas l’isotope 106 ni parmi ces isotopes (34 au total) ceux qui sont actifs…

      Pour Rosatom, il n’y a pas eu d’incident ou d’accident qui aurait pu avoir pour conséquence d’élever les concentrations en ruthénium.
      « Росатом » предложил блогерам понюхать и потрогать рутений : Деловой климат : Экономика : Lenta.ru
      https://lenta.ru/news/2017/11/23/rutenitour

      «Росатом» предложил блогерам понюхать и потрогать рутений

      Госкорпорация «Росатом» предложила журналистам и блогерам отправиться в рутений-тур, чтобы получить полную информацию об одноименном изотопе. Об этом «Росатом» говорится в сообщениях, размещенных в социальных сетях на странице госкорпорации.

      «"Росатом" начинает тотальный ликбез и приглашает вас в поездку по местам «боевой славы» Ru-106. В рамках пресс-тура, у вас есть возможность посетить производство ПО «Маяк» в закрытом городе Озерск, которое, по мнению зарубежных журналистов, и стало «колыбелью» рутения», — говорится в сообщении на странице госкорпорации в Facebook.

      В ходе поездки «Росатом» предлагает найти ответы на вопросы о том, что такое рутений и существует ли он вообще, как он может образоваться и как его обнаружить, «где та труба на «Маяке», откуда вылетает рутений», можно понюхать и потрогать рутений?

      Несколькими днями ранее Росгидромет сообщил, что в Челябинской области и некоторых других регионах страны в сентябре-октябре фиксировалась в аэрозольных пробах концентрация изотопа рутений-106. При этом, по данным ведомства, с 29 сентября по 3 октября Ru-106 был обнаружен в незначительных количествах на территории стран Евросоюза.

      Позже специалисты федеральной службы заявили, что уровень концентрации рутения-106 не представляет опасности. В пресс-службе Минприроды России также подтвердили, что зафиксированный на Южном Урале уровень превышения содержания рутения-106 был на несколько порядков ниже допустимой нормы.

      В свою очередь, в «Росатоме» сообщили, что никаких инцидентов и аварий, из-за которых мог бы вырасти уровень концентрации изотопа, не было.

      На повышение уровня содержания изотопа первоначально пожаловались в Европе. В конце сентября немецкое ведомство по радиационной защите обнаружило в воздухе Германии и Австрии безопасные для населения концентрации рутения-106. В ведомстве предполагали, что источник изотопа мог находиться в России на Южном Урале.

      « Росатом » предложил блогерам понюхать и потрогать рутений : Деловой климат : Экономика : Lenta.ru
      https://lenta.ru/news/2017/11/23/rutenitour

      «Росатом» предложил блогерам понюхать и потрогать рутений

      Фото: Рамиль Ситдиков / РИА Новости
      Госкорпорация «Росатом» предложила журналистам и блогерам отправиться в рутений-тур, чтобы получить полную информацию об одноименном изотопе. Об этом «Росатом» говорится в сообщениях, размещенных в социальных сетях на странице госкорпорации.

      «"Росатом" начинает тотальный ликбез и приглашает вас в поездку по местам «боевой славы» Ru-106. В рамках пресс-тура, у вас есть возможность посетить производство ПО «Маяк» в закрытом городе Озерск, которое, по мнению зарубежных журналистов, и стало «колыбелью» рутения», — говорится в сообщении на странице госкорпорации в Facebook.

      В ходе поездки «Росатом» предлагает найти ответы на вопросы о том, что такое рутений и существует ли он вообще, как он может образоваться и как его обнаружить, «где та труба на «Маяке», откуда вылетает рутений», можно понюхать и потрогать рутений?

      Несколькими днями ранее Росгидромет сообщил, что в Челябинской области и некоторых других регионах страны в сентябре-октябре фиксировалась в аэрозольных пробах концентрация изотопа рутений-106. При этом, по данным ведомства, с 29 сентября по 3 октября Ru-106 был обнаружен в незначительных количествах на территории стран Евросоюза.

      Позже специалисты федеральной службы заявили, что уровень концентрации рутения-106 не представляет опасности. В пресс-службе Минприроды России также подтвердили, что зафиксированный на Южном Урале уровень превышения содержания рутения-106 был на несколько порядков ниже допустимой нормы.

      В свою очередь, в «Росатоме» сообщили, что никаких инцидентов и аварий, из-за которых мог бы вырасти уровень концентрации изотопа, не было.

      На повышение уровня содержания изотопа первоначально пожаловались в Европе. В конце сентября немецкое ведомство по радиационной защите обнаружило в воздухе Германии и Австрии безопасные для населения концентрации рутения-106. В ведомстве предполагали, что источник изотопа мог находиться в России на Южном Урале.

    • Dans un tout autre genre, un blogueur pro-ukrainien dénommé #Michel_le_Prophète (en référence à #Nostradamus dont le portrait illustre la notice de l’auteur) et dont les autres articles sont engagés mais pas aussi délirants :
      • entre 1,5 et 2 millions de personnes de la région de Tcheliabinsk ont reçu une dose létale et vont mourir dans les 6 mois
      • 15 à 20 millions de personnes à l’ouest de Tcheliabinsk (Bachkirie, Tatarstan, Rostov-sur-le Don) ont reçu une dose très dangereuse
      • 150 millions (de Moscou au nord du Kazakhstan et de la Sibérie occidentale à l’Ukraine) ont reçu des doses importantes.

      2 млн человек в Челябинской области получили смертельные дозы рутения-106 и обречены на тотальное вымирание. Украина тоже пострадает – Экономика от Пророка
      https://www.economics-prorok.com/2017/11/2-%d0%bc%d0%bb%d0%bd-%d1%87%d0%b5%d0%bb%d0%be%d0%b2%d0%b5%d0%ba-%d

      1.Челябинск и приблизительно около 1.5- 2 миллионов человек в области получили смертельные дозы рутения-106 (последствия начнут проявляться через полгода) обречены на тотальное вымирание.

      2. 15-20 миллионов жителей ( Свердловской области, Башкирии, Татарстана, Ростова-на Дону и др. получили очень опасные дозы радиоактивного рутения.

      3. Вся остальная Европейская часть России от Урала, включая Москву, Украина, часть Западной Сибири, Северного Казахстана — более 150 млн. человек !!!!! получили опасные дозы радиоактивного изотопа.

    • Le texte de l’article traduit par une intelligence artificielle donne encore plus froid dans le dos.

      « Rosatom » commence un programme éducatif complet et vous invite à un voyage aux lieux de « gloire militaire » Ru-106.

  • La malnutrition n’épargne plus aucun pays dans le monde
    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/11/04/la-malnutrition-n-epargne-plus-aucun-pays-dans-le-monde_5210018_3244.html

    Pour la première fois, la planète entière est confrontée à une crise de la malnutrition. Selon le rapport sur la nutrition mondiale 2017, publié samedi 4 novembre, la totalité des 140 pays étudiés est confrontée à au moins une des principales formes de ce fléau : le retard de croissance chez l’enfant, l’anémie chez la femme en âge de procréer et le surpoids chez l’adulte. Et 88 % sont lourdement touchés par deux ou trois de ces troubles.

    Si rien n’est fait pour enrayer la tendance, aucun des dix-sept Objectifs de développement durable, adoptés fin 2015 par les Nations unies afin d’« éradiquer la pauvreté, protéger la planète et garantir la prospérité pour tous », ne sera atteint d’ici à 2030. En découlerait une menace pour le développement humain mondial. Voilà le constat très inquiétant livré par un panel d’experts internationaux indépendants dans la quatrième édition de cet état des lieux annuel, le plus complet sur le sujet.

    #malnutrition #faim #alimentation #santé #obésité

  • Insectes : l’hécatombe invisible

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/10/28/insectes-l-hecatombe-invisible_5207102_3244.html

    Dans sa chronique, Audrey Garric, journaliste au service Planète, rappelle que la préservation de ces êtres à six pattes devrait être une priorité absolue. Il n’en est rien.

    Un « Armageddon écologique », une « hécatombe », un « déclin terrifiant ». Aucun superlatif n’est de trop dans la presse pour qualifier l’étude sur l’extinction des insectes, parue dans la revue PloS One le 18 octobre. Il y a de quoi s’alarmer. Imaginez donc : en moins de trois décennies, les populations volantes ont chuté de près de 80 % en Allemagne, et probablement autant dans toute l’Europe.

    Pour les chercheurs, la principale cause de cet effondrement réside dans l’intensification des pratiques agricoles, et en premier lieu dans le recours accru aux pesticides chimiques. Le traitement par enrobage des semences, systématique et préventif, est le principal suspect. Il fait en effet appel aux fameux insecticides néonicotinoïdes, surnommés les « tueurs d’abeilles », qui agissent sur le système nerveux des insectes.

    Les conséquences sont dramatiques pour l’ensemble des écosystèmes, tant l’entomofaune est un socle de la chaîne alimentaire. La disparition de ces petites bestioles ne signifierait rien de moins que mettre en péril la pollinisation de 80 % des plantes sauvages et la source de nourriture de 60 % des oiseaux – sans compter celle des mammifères et des amphibiens.

    Les services écosystémiques fournis par les insectes sauvages ont été estimés à 57 milliards de dollars (49 milliards d’euros) par an aux Etats-Unis. De toute évidence, la préservation de l’abondance et de la diversité de ces êtres à six pattes devrait être une priorité absolue en matière de conservation de la biodiversité. Il n’en est rien.

    Avertissements réitérés

    Pourtant, les signaux d’alerte ne datent pas d’hier. En 2014, déjà, des chercheurs avaient fait un constat sans appel : les néonicotinoïdes sont les principaux responsables du déclin généralisé des arthropodes partout dans le monde. En 2005, une étude publiée dans Conservation Biology décrivait elle aussi les extinctions qui frappent les insectes, qualifiés de « majorité négligée ». Dès 1992, un ouvrage intitulé Insect Conservation Biology, publié par Michael Samways, pointait les menaces qui pèsent sur eux : la fragmentation des habitats et les pollutions.

    Mais ces avertissements n’ont eu que très peu d’écho. A une seule exception près : pour les abeilles. Les mises en garde des scientifiques, relayées par une large campagne médiatique des apiculteurs, ont fini par payer. Les Français, comme les citoyens d’autres pays, se sont émus du sort des butineuses, dont le catastrophique syndrome d’effondrement des colonies est démontré depuis la fin des années 1990.

    La France n’est pas restée inactive face à ce péril. En 1999, puis en 2004, les ministres de l’agriculture Jean Glavany et Hervé Gaymard ont décidé de suspendre l’usage du Gaucho – sur certaines cultures – et du fipronil, deux insecticides. En 2016, au terme d’une rude bataille, les députés ont fini par interdire la totalité des néonicotinoïdes à partir du 1er septembre 2018 sur l’ensemble des cultures – avec des dérogations jusqu’en 2020.

    Voilà qui est positif, mais insuffisant. En témoigne l’échec actuel du plan Ecophyto 2, qui vise à diviser par deux le recours aux produits phytosanitaires d’ici à 2025 dans l’Hexagone. C’est peu dire que l’objectif est loin d’être atteint : en sept ans, l’emploi de ces produits chimiques a progressé de 20 % pour les usages agricoles.

    La ferme France n’a pas amorcé son sevrage

    Pourquoi ? Parce que l’industrie agrochimique manipule certaines des données scientifiques, dans un contexte de crise de l’évaluation réglementaire. Parce que les représentants du monde agricole ne veulent pas changer de modèle. Parce que les coopératives qui leur donnent des conseils sont les mêmes qui leur vendent les pesticides et les engrais. Parce que faire primer le court sur le long terme fait perdre de vue l’essentiel : loin de sécuriser la production alimentaire, l’utilisation des pesticides met en péril la biodiversité qui la rend possible.

    Las ! Non seulement, la ferme France n’a pas amorcé son sevrage, mais de surcroît de nouvelles molécules, toujours plus toxiques, sont mises sur le marché. En témoigne la toute récente autorisation d’un nouveau néonicotinoïde qui ne dit pas son nom, le sulfoxaflor, par l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses). Après l’émoi et la colère – légitimes – suscités par cette affaire, le gouvernement a demandé à l’Anses d’« examiner de façon prioritaire des données complémentaires relatives aux risques du sulfoxaflor », tandis que l’ONG Générations futures a déposé deux recours en justice.

    Il faudra aller bien plus loin. Changer de mode de production, mais aussi de regard sur les insectes, ces êtres que l’on ignore ou que l’on méprise alors qu’ils représentent les deux tiers de toutes les espèces du monde. Des biais qui se retrouvent jusque dans la recherche : la grande majorité des études concerne les vertébrés, pourtant beaucoup moins nombreux que les invertébrés. Ces derniers, perçus comme moins « sexy », engrangent moins de financements. Ce qui signifie moins de spécialistes, moins de connaissances, et donc moins de protection.

    Faire des choix politiques et sociétaux forts

    Une étude à paraître dans la revue Biological Conservation de novembre a procédé à une analyse amusante : elle s’est penchée sur les 123 espèces d’insectes protégées en Europe, soit 0,12 % des 105 000 répertoriées sur le Vieux Continent…

    Les résultats sont nets : les insectes protégés sont les plus gros, ceux qui présentent le plus de contrastes (couleurs surtout bleues et vertes, rayures, etc.) et un corps lisse. Certains groupes sont surreprésentés (les papillons, les libellules ou les sauterelles), tandis que d’autres ne figurent même pas sur les listes (les mouches, les moustiques, les bourdons, etc.). En gros, les insectes considérés comme les plus moches ou les plus nuisibles par les humains n’ont pas droit de cité. Et ce, en dépit de leur rôle dans les écosystèmes.

    Il est urgent de faire des choix politiques et sociétaux forts pour enrayer le déclin de la biodiversité. Ne plus choisir telle ou telle espèce, mais les préserver toutes, avec leurs interactions et leur habitat. Qui se trouve également être le nôtre.

  • L’affaire Séralini ou l’histoire secrète d’un torpillage

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/10/05/l-affaire-seralini-ou-l-histoire-secrete-d-un-torpillage_5196526_3244.html

    La parution de l’étude controversée du biologiste français Gilles-Eric Seralini, prétendant avoir montré des effets nocifs du Roundup, a provoqué une onde de choc chez Monsanto. Qui n’a eu de cesse de faire désavouer la publication par tous les moyens.

    Le cauchemar de Monsanto. C’est ce qu’est devenu Gilles-Eric Séralini, professeur de biologie à l’université de Caen, le 19 septembre 2012. Cette évidence transparaît de la nouvelle livraison des « Monsanto papers » — ces documents internes de la multinationale de l’agrochimie rendus publics dans le cadre d’une action collective menée à son encontre aux Etats-Unis. Ils montrent que des cadres de la firme ont manœuvré en coulisse, pendant plusieurs semaines, pour obtenir la rétractation de l’étude controversée du biologiste français. Et qu’ils sont parvenus à leurs fins.

    On s’en souvient : ce jour-là, M. Séralini publie, dans la revue Food and Chemical Toxicology, une étude au retentissement planétaire. Des rats nourris avec un maïs transgénique et/ou au au Roundup (l’herbicide de Monsanto à base de glyphosate) avaient développé des tumeurs énormes, aussitôt exhibées en « une » des journaux. La couverture médiatique, considérable, est un désastre pour l’image de Monsanto et de ses produits, même si l’étude est jugée non concluante par tous les cénacles scientifiques — y compris le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) des Nations unies. Puis, en novembre 2013, survient un événement inédit dans l’histoire de l’édition scientifique : l’étude est rétractée par la revue, c’est-à-dire désavouée a posteriori, sans aucune des raisons habituellement avancées pour justifier une telle mesure.

    Manque de « conclusion probante »

    De nombreux chercheurs expriment alors leur malaise : le travail des chercheurs français n’a pas été épinglé pour fraude ou erreurs involontaires, d’ordinaire les seules raisons de retirer une publication de la littérature scientifique. Dans un éditorial publié plus tard, en janvier 2014, le rédacteur en chef de la revue, Wallace Hayes, justifiera cette décision personnelle par le fait qu’« aucune conclusion définitive n’a pu être tirée de ces données non concluantes ». L’étude de M. Séralini sera donc la première – et à ce jour l’unique – à avoir été supprimée des archives d’une revue savante pour son manque de « conclusion probante ».

    Mais ce que Wallace Hayes ne mentionne pas, c’est qu’il est lié par un contrat de consultant à Monsanto. Bien connu dans le monde de la toxicologie, chercheur associé à l’université Harvard, il a mené l’essentiel de sa carrière dans l’industrie chimique ou auprès du cigarettier R. J. Reynolds dont il fut l’un des vice-présidents. Les « Monsanto papers » révèlent que M. Hayes était consultant pour la firme agrochimique depuis la mi-août 2012. Sa mission était de développer un réseau de scientifiques sud-américains pour participer à un colloque sur le glyphosate, et ses honoraires étaient fixés à « 400 dollars de l’heure », dans une limite de « 3 200 dollars par jour et un total de 16 000 dollars ». A aucun moment, ce conflit d’intérêts entre Monsanto et le responsable éditorial de la revue ne sera divulgué.

    « Si c’est vrai, c’est une honte », déclare au Monde Jose Luis Domingo, professeur à l’université Rovira i Virgili (Tarragone, Espagne). Ce toxicologue de renom a remplacé M. Hayes à la tête du comité éditorial de la revue en 2016. C’est lui, qui, à l’époque rédacteur en chef adjoint (managing editor), avait publié l’étude controversée.

    Plusieurs courriels internes de Monsanto le montrent : dès sa publication, des cadres de la firme considèrent la rétractation de l’étude comme un objectif cardinal. Mais pour justifier une mesure d’une telle gravité, la revue doit pouvoir se prévaloir d’une forte indignation dans la communauté scientifique. Le 26 septembre 2012, David Saltmiras, l’un des toxicologues de Monsanto, écrit à des collègues : « Wally Hayes m’a appelé ce matin en réponse à mon message d’hier. Il s’est inquiété de ne recevoir que des liens vers des blogs ou des billets publiés en ligne, des publications de presse, etc., et aucune lettre formelle à l’éditeur. »

    Formulées comme « lettres à l’éditeur », les charges contre le travail de l’équipe Séralini pourraient être publiées dans la revue. Elles sont donc d’une « importance critique », ajoute David Saltmiras. De fait, en affichant le mécontentement, elles pourraient justifier une rétractation. Sauf qu’une semaine après la publication de l’étude aucune lettre de protestation n’a encore été adressée à Food and Chemical Toxicology. Le rédacteur en chef « a donc un besoin urgent de lettres formelles à l’éditeur, objectives, rationnelles et faisant autorité », poursuit David Saltmiras avant de conclure : « Je pense qu’il aimerait recevoir ces lettres aujourd’hui. » Dans les échanges suivants, les toxicologues de Monsanto suggèrent les noms de chercheurs qu’ils pourraient solliciter pour ce faire. Ils parient sur la plus grande crédibilité de critiques qui seraient formulées par des « tierces parties » — des scientifiques du monde académique sans liens apparents avec Monsanto.

    Au reste, ces stratégies sont décrites explicitement par les salariés de Monsanto eux-mêmes. Dans sa fiche d’évaluation interne, David Saltmiras écrit ainsi qu’il a « cherché activement à élargir un réseau de scientifiques reconnus sur le plan international et non affiliés à Monsanto », permettant « des échanges informels d’idées et d’information scientifique » mais aussi de « les influencer pour mettre en œuvre les stratégies de Monsanto ». Pendant l’affaire Séralini, écrit-il, « j’ai mis à profit ma relation avec le rédacteur en chef de Food and Chemical Toxicology et j’ai été le seul point de contact entre Monsanto et la revue ».

    Affaire ultrasensible

    Début novembre, une demi-douzaine de lettres individuelles et une lettre collective signée par 25 chercheurs sont publiées par le journal. Cette lettre collective est mentionnée dans les documents internes à Monsanto, mais… dans un message du 28 septembre, soit plus d’un mois avant sa publication. Alors qu’un employé de la compagnie prépare un topo qu’il doit présenter en public, l’un de ses collègues lui suggère d’ajouter « des munitions » à sa présentation en évoquant « la lettre à l’éditeur des 25 scientifiques issus de 14 pays ». Mais l’intéressé rétorque. La lettre n’étant pas encore publique, il se dit « mal à l’aise » à l’idée de divulguer l’initiative lors de sa présentation : « Cela impliquerait que nous sommes impliqués, sinon comment serions-nous au courant ? », explique-t-il. L’affaire est ultrasensible. Au point qu’il ajoute : « On nous demande de cesser les communications internes à ce sujet. » Son correspondant prend soin de clore la conversation en précisant que ce ne sont pas les employés de Monsanto qui ont écrit le texte, ou sollicité eux-mêmes les signatures des auteurs.

    En définitive, le tour est joué. Dès le premier paragraphe de son éditorial de janvier 2014, Wallace Hayes justifie la rétractation de l’étude Séralini par « les nombreuses lettres exprimant de l’inquiétude quant à la validité de [ses] conclusions ».

    Ces lettres étaient-elles écrites pour durer ? Le biologiste Kevin Folta (université de Floride), qui écrivait dans la sienne « soutenir pleinement la rétractation », a déclaré sur les réseaux sociaux en avril 2015 : « J’ai toujours dit que l’étude n’aurait pas dû être rétractée. » Surprenant revirement. Un autre auteur, Andrew Cockburn, a de son côté demandé… la rétractation de sa propre lettre quelques mois plus tard. Pourquoi ? Comme Wallace Hayes, il n’a pas répondu aux sollicitations du Monde. Interrogée, la maison d’édition Elsevier, propriétaire de la revue, affirme, pour sa part, avoir lancé une enquête.

    • Avec toutes les révélations sur Monsanto en ce moment, je me disais bien que cette étude allait repoindre le bout de son nez.

      J’avais lu l’article en question à l’époque et ça m’avait assez choqué que ça soit publié dans une bonne revue ; statistiquement, il n’y avait pas de quoi conclure — des rats qui sont faits pour développer des tumeurs ont en effet développé des tumeurs. La belle affaire. D’ailleurs j’étais pas le seul à l’époque, beaucoup de blogueurs scientifiques s’étaient montré aussi surpris par la pauvre qualité de l’article. (Et si je me souviens bien, le traitement des animaux laissait aussi beaucoup à désirer. Les tumeurs étaient bien trop grosses et les animaux auraient dû être sacrifiés bien plus tôt. Ça avait l’air d’être fait pour avoir des photos bien choquantes.)

      Ah mais l’expérience utilisait des produits de Monsanto ! Forcément, ils sont du côté du bien et donc incritiquables !

      Parenthèse amusante : puisqu’on parle des manigances de Monsanto, on pourrait aussi parler de celles de Séralini et al.. Juste avant la publication de l’article, ils avaient mis en place une opération de com’ bien huilée avec site web dédié, tweets prêts à l’emploi en copier-coller et contact de journalistes. Et tout ça, en faisant bien gaffe à ce que l’article lui-même soit sous embargo jusqu’à sa publication ; les journalistes se trouvant dans l’impossibilité de vérifier leurs dires et dans le risque de peut-être manquer un scoop. Les bons journalistes se sont abstenus mais les autres ont répété ce qu’ont leur a dit. Et le tour était joué.

      (ah j’ai écrit une tartine, désolé)

  • « Monsanto papers », les agences sous l’influence de la firme

    http://www.lemonde.fr/planete/article/2017/10/05/monsanto-papers-les-agences-sous-l-influence-de-la-firme_5196332_3244.html

    Pour contrer le soupçon qui entoure le glyphosate, son produit-phare classé « cancérogène probable », la firme américaine interfère auprès des organismes de réglementation.

    En quatre décennies, la version officielle n’a jamais changé : le glyphosate n’est pas cancérogène. C’est ce que concluent avec constance les expertises des plus grandes agences réglementaires, chargées d’évaluer la dangerosité d’un produit avant et après sa mise sur le marché : l’Agence de protection de l’environnement (EPA) américaine et, sur le Vieux Continent, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) et l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA).

    Il a fallu attendre mars 2015 pour qu’une autre organisation, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) des Nations unies (ONU), parvienne à la conclusion inverse. Pour cette institution de référence, l’herbicide – produit-phare de Monsanto et pesticide le plus utilisé au monde – est génotoxique, cancérogène pour l’animal et « cancérogène probable » pour l’homme.

    Comment expliquer cette spectaculaire divergence ? La plupart des observateurs invoquent une raison majeure : pour rendre leurs conclusions, les agences se sont largement fondées sur des données confidentielles fournies par… Monsanto, alors que le CIRC, lui, n’a pas eu accès à ces données. En d’autres termes, la décision favorable au glyphosate est essentiellement basée sur les conclusions de l’entreprise qui le fabrique.

    Une expertise « scientifiquement erronée »

    Un toxicologue de renom va bientôt dénoncer cette situation : Christopher Portier, ancien directeur de diverses institutions fédérales de recherche américaines et associé, en 2015, aux travaux du CIRC. Grâce à des eurodéputés écologistes et une ONG qui en ont exigé copie auprès des autorités européennes, il est le seul scientifique indépendant à avoir pu ausculter les fameuses données ultra-secrètes.

    Il s’est alors aperçu que celles-ci recelaient des problèmes passés inaperçus. Le 28 mai 2017, il jette un pavé dans la mare en écrivant à Jean-Claude Juncker, le président de la Commission européenne : pour lui, pas de doute, l’expertise des agences européennes, menée essentiellement sur la base des éléments transmis par Monsanto, est « scientifiquement erronée ». Ces dernières, assure-t-il, seraient passées à côté de huit cas d’augmentation d’incidence de certaines tumeurs, associés au glyphosate. Les agences ont beau réfuter en bloc, la polémique est lancée.

    Qui croire ? Pour tenter de répondre à cette question-clé, Le Monde s’est plongé dans les « Monsanto papers », ces dizaines de milliers de pages de documents internes que la firme a dû rendre publics dans le cadre d’une action collective menée aux Etats-Unis par près de 3 500 plaignants.

    La lecture de ces documents apporte de troublants éléments de réponse. Elle jette une lumière crue sur la manière dont les agences réglementaires tiennent compte des études secrètes – et parfois suspectes – de l’industrie. Elle conduit surtout à s’interroger sur l’intégrité et l’indépendance des expertises officielles sur le glyphosate.

    Une étude « indûment écartée »

    A Bruxelles, certains élus prennent la question au sérieux. En mai 2017, l’eurodéputé tchèque Pavel Poc (Socialistes et Démocrates) organise une réunion publique sur le sujet, sous les ors du Parlement européen.

    Ce jour-là, à la tribune, Peter Clausing, un toxicologue allemand associé à l’ONG Pesticide Action Network (PAN), lâche une bombe : d’après lui, une étude soumise par les industriels, qui montrait une augmentation d’incidences de lymphomes malins chez les souris les plus exposées au glyphosate, a été indûment écartée par l’EFSA, l’Autorité européenne de sécurité des aliments. Considérant que cette étude n’était pas fiable, l’agence n’a pas pris en compte ses résultats, pourtant susceptibles de l’alerter sur les dangers de ce produit.

    Dans son rapport d’expertise de novembre 2015, l’EFSA justifiait ainsi ce choix : « Au cours de la seconde téléconférence d’experts (TC 117), l’étude a été considérée comme non acceptable en raison d’infections virales qui ont pu influencer la survie [des animaux] ainsi que les incidences de tumeurs – en particulier les lymphomes. »

    Certains virus dits « oncogènes » peuvent en effet provoquer des tumeurs chez les animaux de laboratoire. Les souris utilisées pour cette étude dénommée « Kumar, 2001 » auraient contracté un virus de ce type (sans lien avec le glyphosate), brouillant ainsi les résultats.

    « Le gros problème est qu’aucun document ne mentionne le fait qu’une infection de ce genre a effectivement touché les animaux, assure le toxicologue Peter Clausing. Ce qu’on trouve dans les rapports préliminaires d’évaluation du glyphosate, c’est que ce type d’infection est possible, mais pas qu’elle s’est produite. Ce qui est d’abord décrit comme une possibilité devient, à l’issue de la “téléconférence 117”, un fait avéré. »

    Que s’est-il passé lors de cette « téléconférence 117 » ? Le 29 septembre 2015, à quelques semaines de la finalisation de l’expertise européenne, ce grand rendez-vous téléphonique réunit les experts de plusieurs agences. L’objectif est, d’une certaine manière, d’accorder les violons. Parmi les participants, figure un représentant de l’Agence américaine de protection de l’environnement, l’EPA, Jess Rowland. C’est lui qui supervise la réévaluation du glyphosate aux Etats-Unis. Et c’est lui, assure Peter Clausing, qui, au cours de la discussion, fait état d’une infection virale qui invaliderait l’étude « Kumar, 2001 ». Interrogée par Le Monde, l’EFSA confirme. Mais elle assure que « l’information présentée par l’EPA au cours de cette téléconférence a été vérifiée de manière indépendante » par ses propres experts.

    Un article sponsorisé par Monsanto

    Ni une ni deux, l’ONG bruxelloise Corporate Europe Observatory dépose, courant mai, une demande d’accès aux documents internes de l’EFSA pour le vérifier. La réponse tombe le 21 juin : il n’existe aucune trace, dans les archives de l’agence, d’une quelconque vérification des affirmations de Jess Rowland.

    Plus embarrassant, l’Agence européenne des produits chimiques, l’ECHA, écrit dans son propre rapport sur le glyphosate que l’étude « Kumar, 2001 » ne signale « aucune suspicion d’infection virale » des souris et que « le fondement réel de la décision de l’EPA n’est donc pas connu ». Dans une lettre au vitriol adressée le 22 mai à l’agence européenne, Peter Clausing fait un constat plus perturbant encore. « La première spéculation sur une infection virale en lien avec l’étude “Kumar, 2001” provient d’un article de 2015 sponsorisé par Monsanto et signé de Greim et collaborateurs. »

    Reste à savoir si les interventions d’un expert de l’agence américaine ont pu influencer l’expertise européenne. Les « Monsanto papers » montrent en tout cas que la firme est informée presque en temps réel, le lendemain même de la TC 117. « J’ai parlé du gly[phosate] avec l’EPA, écrit l’un de ses cadres dans un texto, à 14 h 38. Ils ont le sentiment d’avoir aligné l’EFSA pendant le coup de fil. »

    Ce n’est pas tout. Au siège de Monsanto, Jess Rowland n’est pas un inconnu : son nom surgit régulièrement dans les « Monsanto papers », en particulier en avril 2015, bien avant la fameuse réunion téléphonique. Alors que le glyphosate vient d’être classé « cancérogène probable » par l’agence de l’ONU (CIRC), et que sa réévaluation est en cours à l’EPA, une autre organisation fédérale américaine, l’Agence des substances toxiques et de l’enregistrement des maladies (ATSDR), vient à son tour d’annoncer avoir enclenché sa propre expertise.

    Le 28 avril 2015, deux cadres de Monsanto échangent des courriels. Le premier raconte avoir reçu un appel inopiné de Jess Rowland au sujet des velléités investigatrices de l’ATSDR. Le cadre le cite en ces termes : « Si je peux dézinguer ça, je mérite une médaille », aurait plastronné M. Rowland au bout du fil. « Mais il ne faut pas trop y compter, poursuit le responsable de la firme à l’adresse de son interlocuteur, je doute que l’EPA et Jess [Rowland] puissent dézinguer ça, mais c’est bon de savoir qu’ils essaient de se coordonner à la suite de notre insistance, et qu’ils partagent notre inquiétude de voir l’ATSDR parvenir aux mêmes conclusions que l’EPA. » « Wow ! C’est très encourageant », réagit son correspondant.

    Promiscuité

    Incidemment, l’échange montre que les employés de la firme sont déjà au courant des conclusions du panel d’experts présidé par Jess Rowland. Celui-ci ne finalisera pourtant son travail que… cinq mois plus tard.

    Les efforts promis par M. Rowland ont-ils payé ? L’évaluation du glyphosate par l’ATSDR a-t-elle été « dézinguée » ? Des informations de la presse américaine l’ont récemment donnée pour morte. Cependant, interrogée par Le Monde, l’agence assure que son évaluation est en cours, mais n’est pas achevée : « Nous prévoyons la finalisation d’un premier jet, soumis aux commentaires du public, d’ici à la fin de l’année. »

    Les « Monsanto papers » prouvent sans ambiguïté que Jess Rowland est considéré par la firme agrochimique comme un atout stratégique au sein de l’EPA. « Jess se mettra en retraite de l’EPA dans cinq à six mois, écrit un employé dans un mémo interne du 3 septembre 2015. Et il pourrait encore nous être utile dans la défense en cours du glyphosate. »

    M. Rowland partira en effet à la retraite début 2016. Une retraite loin d’être oisive. Dans l’action collective en cours aux Etats-Unis, les avocats des plaignants ont bataillé ferme pour obtenir cette information : Jess Rowland exerce désormais une activité de consultant pour l’industrie chimique. Ils n’ont, pour l’heure, pas réussi à connaître les noms de ses employeurs, les conditions de son embauche, la nature de son travail ni le montant de ses émoluments. L’inspecteur général de l’EPA a lancé, fin mai 2017, une enquête interne afin d’éclaircir l’affaire. Sollicité par l’intermédiaire de son avocat, M. Rowland n’a pas donné suite à nos demandes.

    Cette promiscuité entre l’agence américaine et Monsanto remonte à bien plus loin, au début des années 1980. C’est l’Américaine Carey Gillam, ancienne journaliste à l’agence Reuters et désormais directrice de recherche pour l’association U.S. Right to Know, qui a, la première, épluché la correspondance de l’époque entre l’agence et la firme. Elle en a extrait une chronologie plus que significative, qu’elle retrace dans un livre intitulé Whitewash (« Blanchiment »), à paraître en octobre aux Etats-Unis.

    Un expert payé par Monsanto

    De premiers soupçons à l’égard du glyphosate se font jour en 1983. Cette année-là, Monsanto soumet à l’EPA les données d’une étude de toxicité qu’un laboratoire externe a menée pour la firme pendant deux ans sur plus de 400 souris.

    Le toxicologue de l’agence qui les examine en conclut que le glyphosate est « oncogène » : des souris exposées ont développé des adénomes tubuleux aux reins, une forme de tumeurs rarissime. Monsanto conteste énergiquement, avance qu’il s’agit de « faux positifs ». Mais les toxicologues de l’EPA sont catégoriques : « L’argumentation de Monsanto est inacceptable, consignent-ils dans un mémo de février 1985. Le glyphosate est suspect. » Ils décident donc de classifier l’herbicide « oncogène de catégorie C », soit « cancérigène possible pour l’homme ».

    Monsanto décide alors de fournir des données supplémentaires à l’EPA en faisant réexaminer les lames où sont conservés les « carpaccios » de reins de ces 400 souris. Mais cette fois par un expert de son choix, payé par ses soins. « Le Dr Marvin Kuschner passera en revue les sections de rein et présentera son évaluation à l’EPA dans le but de convaincre l’agence que les tumeurs observées n’ont pas de rapport avec le glyphosate », écrit un responsable de la compagnie en interne. A l’en croire, le résultat de cette analyse semble couru d’avance.

    Quelques jours tard, le Dr Marvin Kuschner reçoit les 422 rondelles de petits reins par colis. Et en octobre 1985, il consigne dans son rapport avoir découvert une tumeur, jusqu’ici passée inaperçue, dans le rein de l’une des souris contrôle – non exposée au glyphosate. Armée de cette conclusion, Monsanto bâtit auprès de l’EPA un argumentaire autour d’une « maladie chronique spontanée des reins » qui serait répandue chez les souris de laboratoire et fait basculer les conclusions. Autrement dit, si tumeur il y a, elle n’a rien à voir avec le glyphosate. Exactement comme pour l’étude « Kumar, 2001 », deux décennies plus tard.

    En 1991, le glyphosate disparait du radar

    Si cette seule et unique tumeur est bien réelle, pourquoi n’a-t-elle pas été remarquée auparavant ? Couvertes par le secret commercial, les lames n’ont jamais pu être examinées par des experts indépendants.

    En 2017, les avocats des plaignants réclament que cela soit fait. En attendant, ils relèvent que l’EPA a par la suite fait marche arrière toute, en faisant preuve d’une souplesse de plus en plus flagrante à l’égard du glyphosate.

    Les toxicologues « maison » ne sont pas en cause ; ils étaient unanimes à trouver le produit « suspect ». C’est en fait un panel constitué à la fois d’agents de l’EPA et d’autres agences fédérales qui, en février 1986, rétrograde le glyphosate dans le groupe D – « inclassable quant à sa cancérogénicité pour l’homme ». En 1989, l’agence cesse même de demander de nouvelles données à Monsanto. En 1991, le glyphosate est encore rétrogradé, dans le groupe E cette fois – « preuves de non-cancérogénicité ». Bref, il disparaît du radar.

    Qui sont ces fonctionnaires du panel de l’EPA qui ont initié son déclassement en 1986 ? Leurs parcours révèlent de singuliers points communs, et un talent indéniable pour utiliser leur carnet d’adresses dans le secteur commercial, notamment chez Monsanto.

    Ainsi, trois ans après le revirement de l’agence, le chef du panel, John Moore, prend la présidence d’un « institut pour l’évaluation des risques pour la santé » financé par l’industrie pétrolière, les banques et la grande distribution. Sa successeure, Linda Fischer, deviendra pour sa part l’une des vice-présidentes de Monsanto, dès son départ de l’EPA en 1993. Son adjoint, James Lamb part, lui, en 1988 rejoindre un cabinet d’avocats qui compte Monsanto parmi ses clients. Une demi-douzaine de fonctionnaires fédéraux quitteront également l’EPA pour ce cabinet. Quant à leur chef, le directeur du bureau des programmes pesticides, Steven Schatzow, il sera lui aussi recruté par un cabinet d’avocats pour y représenter des fabricants de… pesticides. David Gaylor, enfin, membre du panel en tant que représentant du Centre national pour la recherche en toxicologie, quittera la fonction publique pour être consultant privé. Lui aussi aura Monsanto comme client.

    Une fraude mortifère

    Reste une question cardinale : pourquoi Monsanto a-t-elle donc entrepris de réaliser cette étude et de la soumettre à l’EPA en 1983 alors que le glyphosate était autorisé sur le marché américain depuis déjà près de dix ans ? Un courrier de Monsanto de 1985 l’explique : cette étude fait partie d’un « programme de remplacement des études de toxicologie d’IBT ».

    IBT ? Pour ceux qui le reconnaissent, ce sigle évoque des visions à vous glacer le sang. L’histoire est connue : aux Etats-Unis, les plus grandes firmes confiaient autrefois les études de toxicologie de leurs produits à Industrial Bio-Test, ou IBT.

    En 1976, des inspecteurs sanitaires fédéraux avaient découvert que le succès de ce prestataire extérieur était fondé sur une fraude mortifère. Ce n’est qu’équipés de masques qu’ils avaient pu explorer le hangar, surnommé le « marais ». Là, des milliers d’animaux de laboratoire infusaient dans une puanteur et une touffeur insoutenables. Des conditions incompatibles avec des études de toxicité.

    Dans les carnets des techniciens, une abréviation récurrente, « TBD », signifiait « Too Badly Decomposed » (« Trop méchamment décomposés ») pour qu’on puisse en tirer quelque donnée que ce soit. Les tests d’IBT parvenaient rarement à des conclusions négatives : elles étaient souvent inventées.

    Des centaines de produits chimiques, dont pas moins de deux cents pesticides, ainsi que l’Aroclor, un PCB redoutablement toxique mis au point par Monsanto, avaient été homologués en Amérique du Nord sur la base des tests « effectués » par IBT. Roundup compris ? Questionnée, Monsanto se contente aujourd’hui de répondre qu’« aucune donnée générée par IBT n’est utilisée pour soutenir une homologation du glyphosate ».

    Le pesticide le plus utilisé dans le monde provoque-t-il le cancer ? L’agence de l’ONU, le CIRC, a-t-elle vu en 2015 ce que l’EPA américaine aurait dû voir il y a quarante ans ? Certains mémos internes de Monsanto suggèrent que ses toxicologues eux-mêmes craignaient de longue date une expertise indépendante de leur best-seller. Comme ce courriel d’une scientifique de la firme qui écrit, en septembre 2014, à un collègue : « Ce que nous redoutions depuis longtemps s’est produit. Le glyphosate doit être évalué par le CIRC en mars 2015. »

    Le 23 octobre, les Etats membres décideront en qui l’Union européenne doit placer sa confiance.