Toute l’actualité société avec Libération

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    • Ça parle de l’incendie du collège Pailleron en 1973 qui a fait 20 morts (j’avais complètement oublié alors que j’avais des cours de musique là-bas dans les années 90).

      Pailleron, un feu mal éteint
      https://www.liberation.fr/societe/2003/02/06/pailleron-un-feu-mal-eteint_430071

      Dans la nuit, les bulldozers sont entrés en action. Ils appellent leur avocat, lequel appelle le juge. « Dans l’heure, il a fait stopper les travaux. Sans ça, les preuves auraient disparu », se souvient Jean-Max. Il n’est pas le seul à aider. Un commissaire prévient l’association des familles de victimes, créée le lendemain du drame et que préside Jean-Max : « Attention, vous êtes sur écoute. » Une femme transmet les photos qu’elle a prises de chez elle au début de l’incendie ; elles permettront de comprendre comment le feu a circulé entre les faux plafonds pour enflammer le quatrième étage quelques instants après le premier ­ prenant les étages intermédiaires en tenaille. Un député communique le rapport d’enquête sénatoriale dont la version publique a été caviardée ­ « On voyait les blancs : ils n’avaient même pas pris la peine de retaper le texte pour masquer les coupes ! » La presse suit, « y compris la télévision, pourtant très liée au pouvoir », se souvient Jean-Max. En Angleterre, le Sunday Times indique cinq jours après l’incendie que des sinistres comparables ont eu lieu outre-Manche. L’info vaut de l’or : la société qui a bâti Pailleron est une filiale de l’entreprise anglaise Brockhouse. Le lien est établi entre la nature de la construction et l’ampleur du drame. « Et puis l’Education nationale nous a rendu beaucoup de services tellement elle a été odieuse, ironise Jean-Max. Ils sont mal tombés. Beaucoup de collèges de ce genre étaient construits dans des zones défavorisées. Nous, on avait le temps et l’argent pour nous battre. »

      A l’époque, tout est fait pour réduire le drame à la folie de jeunes pyromanes. Haro sur Patrick, qui a mis le feu à une bouteille de White Spirit. L’ancien ministre Christian Fouchet accuse Mai 1968 : « Voilà où mènent l’absence d’élévation morale, l’abdication des adultes, le déferlement de la violence et de la pornographie. » Le ministère, qui nie jusqu’aux évidences, accuse l’association des familles de « manipulations » forcément « politiques ». La preuve : un de ses avocats défend aussi le PCF. L’association porte plainte contre une dizaine de responsables, jusqu’au n° 2 de l’Education nationale, et démonte, pièce après pièce, le cynisme de l’Etat. En ce début des années 70, chaque année, 300 collèges sortent de terre. Il faut accueillir les enfants du baby-boom. Trop cher, trop long, avec les procédures habituelles. L’Education nationale s’affranchit des contraintes : la construction des établissements, peu à peu, sort du droit commun. On lui crée un droit spécifique. Autant que les malfaçons, c’est une logique qui a tué.

      Que reste-t-il de Pailleron ? Dès 1973, les règles de construction scolaire sont revues. En 1979, trois hauts fonctionnaires, le constructeur et l’architecte sont condamnés à des peines de prison avec sursis. Puis amnistiés. Mais c’est déjà une victoire dans la France postpompidolienne.

      On parle aussi des #toilettes : le fait qu’un enfant sur deux se retient et qu’il n’y a pas de normes à ce sujet (nombre, niveau d’hygiène, etc.).

      Et des #souris. J’en ai croisé une cette semaine dans une classe, assez mignonne. Mais quand une petite de 3 ans en a ramassé une morte dans le dortoir en demandant à qui était ce doudou, c’était moins sympa.

  • Covid-19 : la mémoire immunitaire laisse entrevoir la fin de la pandémie – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/sante/covid-19-la-memoire-immunitaire-laisse-entrevoir-la-fin-de-la-pandemie-20

    A la une de l’un des plus gros journaux allemands, le virologue allemand Christian Drosten, figure emblématique de la gestion sanitaire du pays, suggère que l’Allemagne serait en train de vivre la première vague endémique de Sars-Cov-2.

    Le nouveau marronnier de l’épidémiologie depuis 3 ans. Une fois par an, on te dit que le stade endémique est atteint.

  • #Précarité hygiénique : « Ça compte pour moi d’être vue comme une personne propre » – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/precarite-hygienique-ca-compte-pour-moi-detre-vue-comme-une-personne-prop
    https://www.liberation.fr/resizer/_5SJu5vX197ZD5jWBgvZWd-FcVI=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/IP5DOT77BZE7TCBO5IDUEMNDMU.jpg
    Tu comprends, l’urgence, c’est d’envoyer ces gens bosser gratuitement  !

    #RSA = #STO

    Au fond de son panier de courses, un lot de déodorants Dove, deux boîtes de tampons Nett et du produit anti-poux. Des objets du quotidien, inestimables pour Céline (1), 46 ans, mère de trois enfants. « Ça fera 4,32 euros », lui glisse-t-on à la caisse. Céline sort son billet de cinq. Le visage pétillant de soulagement. En grande surface, au milieu des rayons où sa carte bleue « fume fort » et les prix la « mettent à deux doigts du malaise », elle aurait probablement payé une vingtaine d’euros. Seulement ici, dans cette épicerie sociale tenue par l’association Du miel sur mes tartines, située à Lallaing dans le Nord, le prix des produits hygiéniques vendus ne dépasse pas 20% ou 30% de leur valeur marchande. « Sans le magasin de l’association, on serait au fond du trou, je ne vois pas comment le dire autrement, expose cette femme au regard azur venue du Frais-Marais, quartier pauvre et historiquement minier de la ville voisine de Douai. Je ne pourrais pas traiter les cheveux de mon fils, je ne pourrais pas offrir une protection digne de ce nom à mes filles pendant leurs règles. Enfin si, je pourrais, on peut toujours. Mais faudrait peut-être faire sauter un repas aux petits. »

  • A Briançon, les migrants laissés sans Refuge  ?

    En cinq ans, le centre associatif d’#accueil_d’urgence de la ville, point de passage depuis l’Italie, a hébergé plus de 20 000 migrants. Faute de #financement public, ce lieu, qui fonctionne grâce à la ténacité de ses bénévoles, pourrait avoir des difficultés à passer l’hiver.

    Franck arrache ses bottes, ses chaussettes et plonge ses pieds frigorifiés dans une bassine d’eau tiède teintée de Bétadine. Dehors, dans les rues enneigées de Briançon, il gèle en ce début de soirée de décembre. Avec deux compagnons guinéens, l’Ivoirien de 24 ans vient de débarquer au Refuge solidaire, centre associatif d’accueil d’urgence des migrants de la ville. Franck a des engelures aux orteils et des crampes dans les cuisses. Il arrive d’Italie, par la montagne et le col de Montgenèvre : « On est passé par la forêt, pour éviter les policiers. On a marché cinq heures, de la neige jusqu’aux genoux… C’était difficile. » La frontière passée, les trois Africains ont rejoint la route. Un automobiliste les a embarqués et déposés au Refuge.

    Franck pianote désespérément sur son téléphone. Son ami Félix, resté derrière lui dans la montagne, ne répond pas : « Je suis inquiet pour lui. » Submergé par le stress accumulé, il craque. Il pleure en silence, le visage entre les mains. Les bénévoles et salariés du Refuge le réconfortent, attentifs et graves, avec une efficacité remarquable. En moins d’une heure, Franck aura englouti un plat chaud, pris une douche, reçu des vêtements secs, avant de rejoindre un lit aux draps et couvertures propres. Il apprendra un peu plus tard que son ami Félix a fini par faire demi-tour. Le lendemain, à tête reposée, il sera écouté, soigné si besoin, conseillé et orienté pour la suite de son périple ou une demande d’asile. L’équipe du refuge est rodée : depuis 2017, début du passage des migrants par les cols du Briançonnais, elle a accueilli plus de 20 300 d’entre eux…

    Si au départ, il s’agissait presque exclusivement de jeunes Africains, les quelque 4 000 migrants passés cette année par le refuge sont à 39 % afghans, à 22 % marocains et à 18 % iraniens. Leur accueil, exemplaire, n’est assuré que par la solidarité citoyenne, locale aux débuts, et devenue nationale. La mairie de Briançon et la communauté de communes du Briançonnais (CCB) ont lâché les solidaires : après son élection en 2020 à la mairie et à la tête de la CCB, #Arnaud_Murgia, ex-LR rallié à Emmanuel Macron, a décidé d’expulser le refuge de l’ancienne caserne de CRS, trop petite et vétuste, mise à disposition par l’ancien maire ex-PS Gérard Fromm.

    Pour #Murgia, c’est à l’Etat de mettre les moyens pour l’accueil des migrants. Mais les demandes d’aides répétées du refuge sont toujours restées lettre morte. La préfecture des Hautes-Alpes tranche auprès de Libération : « Chacun se trouve dans son rôle : l’Etat doit veiller à la sécurité du territoire et donc assurer le contrôle des frontières ; les associations œuvrant dans l’humanitaire apportent une aide aux personnes en situation de grande précarité. »

    « On fait un travail que personne ne veut faire »

    La préfecture souligne qu’elle offre 239 places d’hébergement aux demandeurs d’asile et finance 180 places en hébergement d’urgence, accessibles via le 115. Les solidaires rient jaune : les migrants qui descendent de la montagne en pleine nuit et ont besoin d’être pris en charge immédiatement sont encore loin du statut de demandeur d’asile, tandis que le 115, avec au mieux 10 places toujours occupées à Briançon, n’est en rien une solution lorsque 20 ou 30 exilés débarquent en quelques heures… « On fait un travail que personne ne veut faire et qui est éminemment nécessaire : répondre à un appel au secours, abriter les gens en urgence et sans condition, tranche Jean Gaboriau, guide de haute montagne et l’un des administrateurs de l’association qui gère le refuge. La #mise_à_l’abri défendue par l’Etat et le Président pour les SDF s’arrête aux migrants… »

    Les solidaires de Briançon ont pris le taureau par les cornes pour trouver un nouveau local et les fonds pour le faire tourner. Une SCI créée début 2021 a été dotée d’1,24 million d’euros grâce à l’engagement de grands patrons philanthropes (900 000 euros, amenés via le fonds de dotation Riace France, la fondation Arceal et la société Herovara) et de centaines de citoyens. Un projet ambitieux, dans un ancien centre de santé pour enfants de la commune voisine de Villar-Saint-Pancrace, visait à réunir au sein d’un tiers-lieu le refuge, des chantiers d’insertion, du maraîchage, un restaurant associatif, une radio locale, une maison médicale… La municipalité a préféré préempter le bâtiment avant de le brader à un promoteur.

    Les solidaires ont en urgence trouvé un bâtiment plus petit mais disponible, les Terrasses, ancien sanatorium aux allures de navire, accroché à la pente dans la partie haute de Briançon, qu’ils ont pu acquérir et remettre aux normes sur les deux tiers de ses 1 600 m². Une association, les Terrasses solidaires, a été créée pour gérer le lieu qui accueille depuis l’été 2021 le refuge mais aussi Médecins du monde, partenaire de longue date, qui assure avec l’hôpital de Briançon une précieuse permanence d’accès au soin quotidienne sur place, le mouvement citoyen Tous Migrants, le collectif Maraudes et EKO ! association d’insertion des réfugiés autour d’ateliers de savoir-faire techniques, manuels et écologiques. Les ambitions de #tiers-lieu sont en berne : un tiers du bâtiment restant non utilisable, faute de moyens, l’essentiel des surfaces disponibles a dû être mis à disposition du refuge.

    50 000 euros pour passer l’hiver

    En passant des 35 places de l’ancien refuge à 65 places, voire 81 en utilisant le réfectoire comme dortoir, le refuge a gagné en espace, en salubrité (avec plus de sanitaires et une vraie cuisine) et en sécurité. Il reste pourtant régulièrement bondé. « Cet été et cet automne ont été tendus : pour 70 % des nuits, nous étions entre 65 et 81 personnes, et pour 20 % au-dessus », confirme Jean Gaboriau. Ces soirs de grande affluence, salariés et bénévoles sont sous pression. Emma Lawrence, Briançonnaise d’origine irlandaise, salariée chargée de l’accueil au refuge, insiste : « C’est très inconfortable pour les exilés, il y a beaucoup de stress. On fait appel aux 25 familles locales qui se tiennent prêtes à accueillir chez elles personnes vulnérables et femmes enceintes ou avec des enfants, on remplit la salle paroissiale, on encourage les exilés à repartir dès que possible… »

    Budgétairement et humainement, le refuge est en permanence sous tension. Il tient grâce aux sept indispensables salariés, notamment les pros de l’accueil de nuit, poste le plus éprouvant, aux 16 bénévoles permanents logés dans une annexe des Terrasses, volontaires venus de tout le pays qui se relaient – plus de 400 sur la seule année 2022 – et enfin aux dizaines de bénévoles locaux, Briançonnais mobilisés pour certains depuis des années… Si denrées et vêtements ne manquent pas grâce à la générosité des locaux, particuliers, commerçants, Secours catholique, Secours populaire, le bâtiment peine à être entretenu et le #budget de fonctionnement 2022-2023 du seul refuge, 500 000 euros, n’est pas assuré. Près d’un quart du financement est pérenne, ce sont les dons des particuliers, le reste est assuré par convention avec Emmaüs France, la Fondation de France, la fondation Abbé-Pierre, Caritas et bien d’autres, mais il manque 50 000 euros au refuge pour passer l’hiver.

    L’association s’apprête à intégrer le mouvement Emmaüs, pour gagner en solidité et en perspective de #financements_publics, et réfléchit à développer une activité d’hébergement de tourisme social dans les étages des Terrasses… Il le faut bien. « On est là, on est indispensable, conclut Jean Gaboriau. Nous n’avons d’autre choix que de trouver les moyens de continuer. »

    https://www.liberation.fr/societe/a-briancon-les-migrants-laisses-sans-refuge-20221228_IU3HFCVUQJFPXFCYVH5Z

    #Refuges_solidaires #Refuge_solidaire #Terrasses_solidaires #Briançon #Hautes-Alpes #réfugiés #migrations #asile #accueil #solidarité #frontière_sud-alpine

    –—

    ajouté à la métaliste sur la situation dans le #Briançonnais :
    https://seenthis.net/messages/733721
    et plus précisément ici : https://seenthis.net/messages/733721#message983461

  • Le désastre du système de #santé français, symptôme des politiques libérales – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/sante/le-desastre-du-systeme-de-sante-francais-symptome-des-politiques-liberale
    https://www.liberation.fr/resizer/qlNUQ5YlhGnPKtRo9Zuqft6Ov5k=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(3655x2085:3665x2095)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/3PXKZKJMS5HHTNCGJZOGITSMA4.jpg

    En France, fin 2022, le système de santé est à la merci d’une grippe. En France, fin 2022, le système de santé est à la merci de la bronchiolite. En France, fin 2022, le système de santé est à la merci de… De tout, en réalité.

  • La préfète protège les bois ? L’État la vire
    https://reporterre.net/La-prefete-protege-les-bois-L-Etat-la-vire

    La préfète d’Indre-et-Loire Marie Lajus a été limogée car elle voulait... faire respecter la loi. Elle s’opposait à un projet immobilier destructeur de terres. Ses soutiens, dont moult élus, dénoncent une « injustice ».

    « Vive la presse... vive la presse libre ! » C’est une vidéo publiée sur le réseau social Twitter et massivement relayée qui a contribué à mettre en lumière cet événement. On y voit l’ex-préfète d’Indre-et-Loire Marie Lajus brandir un article du Canard enchaîné mis sous verre et offert par ses collègues. Cette enquête parue le 14 décembre dans le journal satirique révèle les conditions obscures pour lesquelles Marie Lajus a été évincée de son poste de préfète une semaine plus tôt. On y apprend qu’une banale affaire d’urbanisme aurait provoqué sa chute et que ce sont certains élus locaux qui auraient fait pression pour démettre l’ex-préfète de ses fonctions. (...)

  • Dix ans après la fausse fin du monde à Bugarach, « c’est plus facile de trouver un chaman qu’un rendez-vous avec un médecin » – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/dix-ans-apres-la-fausse-fin-du-monde-a-bugarach-cest-plus-facile-de-trouv
    https://www.liberation.fr/resizer/sZtp8n69Q3UtnNi7Q96AC_1CJZ0=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(1169x1160:1179x1170)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/43CQTFPP7JGVRKC6FLS3NJ5VP4.jpg

    La haute vallée de l’Aude appartient à l’un des départements les plus pauvres de France, désindustrialisé, avec un fort taux chômage, que les jeunes quittent. C’est vrai que les médecines alternatives attirent beaucoup de gens de la région, mais la réalité sociale est qu’il s’agit d’un énorme désert médical. C’est plus facile dans le secteur de trouver un chaman ou un guérisseur qu’un rendez-vous avec un médecin sur Doctolib. Quand le cabinet d’un généraliste ferme, il y a des gens pour proposer un remède. Et puis si certaines personnes choisissent l’accouchement à domicile, c’est aussi que les hôpitaux sont très éloignés. C’est un peu pareil pour l’information : les journalistes sont très loin de la zone, les gens s’informent plutôt sur Internet et diffusent certains discours complotistes sur lesquels personne ne revient pour leur dire que ce sont des fake news.

  • Crise de la pédiatrie : « On repousse les opérations d’enfants tous les jours » – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/sante/crise-de-la-pediatrie-on-repousse-les-operations-denfants-tous-les-jours-
    https://www.liberation.fr/resizer/xvuLm10japN4C-q2EVE4BWh-nWs=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(1738x1251:1748x1261)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/ZIGNAIE3BFD4HNOJ5UESYWPVDE.jpg

    Il y a beaucoup de conséquences graves, mais ce n’est pas aussi clair qu’un bébé qui mourrait dans un lit en attendant de passer au bloc. C’est plus insidieux. Par exemple, si une opération cardiaque est retardée de quinze jours ou un mois, le cœur va continuer de travailler dans de mauvaises conditions. L’enfant sera plus fragile au moment de l’intervention et donc les risques augmentent. On peut aussi parler de la chirurgie du dos où les reports sont dramatiquement plus longs. Pour une scoliose, on note aussi des effets graves. D’abord, le dos va être plus déformé et l’atteinte respiratoire risque de s’aggraver. Ensuite, la chirurgie sera plus compliquée et plus risquée. Mais la plupart de ces enfants ne vont certainement pas mourir tout de suite et ne seront pas comptabilisés comme les conséquences de ces soins reportés.

  • Le collège d’à côté
    https://laviedesidees.fr/Le-college-d-a-cote.html


    Lecture : Parmi l’ensemble des paires de collèges situés à moins de 15 minutes à pied l’un de l’autre, 203 sont composées de deux collèges très défavorisés. Ces paires de collèges représentent 8 % de l’ensemble des paires de collèges situés à moins de 15 minutes à pieds. Plus la couleur des cellules est foncée, plus la distance entre la composition sociale des collèges est importante.

    En effet, il est difficile de faire en sorte que chaque #collège ait la même composition sociale à l’échelle nationale, académique, voire même départementale, du fait de la ségrégation résidentielle existante à ces échelles et des contraintes de temps de trajet pour les collégiens. En revanche, ces facteurs sont moins contraignants lorsque la ségrégation sociale s’opère entre collèges voisins l’un de l’autre. De fait, les pouvoirs publics disposent alors de plus de marges de manœuvre pour agir sur la #mixité_sociale de ces établissements.

    [...] 548 des 1371 collèges très défavorisés sont à moins de 15 minutes à pied d’un autre collège. Parmi eux, 192 sont à proximité d’un collège favorisé, c’est-à-dire que parmi les collèges très défavorisés situés à proximité d’un autre collège, 35 % sont proches d’un collège favorisé. Ainsi, à la rentrée 2021, plus de 92 000 élèves étaient scolarisés dans un collège très défavorisé situé à proximité d’un collège favorisé. L’ampleur de ce phénomène n’est donc pas négligeable puisqu’il concerne plus d’élèves que l’ensemble des collégiens scolarisés à Paris. Ce constat tend à relativiser l’idée selon laquelle les collèges les plus défavorisés le sont nécessairement, du fait de leur implantation au sein de quartiers enclavés, exclusivement peuplés de ménages pauvres.

    [...] Dans 85 % des cas, lorsqu’un collège favorisé est situé à proximité d’un collège très défavorisé, il s’agit d’un établissement privé. Ces configurations peuvent ainsi inclure un collège public au secteur de recrutement relativement mixte, mais massivement évité par les catégories sociales les plus favorisées, au profit du collège privé de proximité. Cette observation contraste avec le discours selon lequel les établissements privés les plus favorisés le sont du fait de l’absence d’élèves d’origine sociale défavorisée à proximité. À l’inverse, 15 % des configurations comprenant un collège très défavorisé et un collège favorisé concernent deux collèges publics. Là encore, il se peut que le collège le plus défavorisé le soit du fait d’un évitement vers le secteur privé. Il est également possible qu’une différence d’offre de cours optionnels crée un déséquilibre d’attractivité entre les deux collèges et facilite l’octroi de dérogations à la sectorisation scolaire de l’un vers l’autre. Enfin, la manière dont les frontières entre secteurs sont tracées est susceptible d’accroître les contrastes sociaux existants entre les quartiers. Une #sectorisation_scolaire qui consisterait à affecter les élèves venant de quartiers proches, mais au profil social différent à un même collège favoriserait ainsi la mixité sociale dans le secteur de recrutement de ce collège. À l’inverse, en assignant les élèves d’un quartier défavorisé à un collège et ceux d’un quartier favorisé à un autre collège, la sectorisation scolaire reproduit à l’identique la ségrégation résidentielle. Le tracé de la sectorisation scolaire n’est donc pas neutre et au centre de luttes politiques entre parents d’élèves et décideurs.

    #éducation #enseignement_privé

    • Hector-Berlioz, un collège sauvé par la mixité sociale
      https://www.liberation.fr/societe/education/berlioz-un-college-sauve-par-le-melange-20221230_QWYK4EEZRVGAPD6ZXCG2G4L2

      Face à la forte ségrégation dont souffrent certains collèges, l’ancienne ministre de l’Education Najat Vallaud-Belkacem lançait en 2015 une expérimentation dans 15 départements. A Paris, la mairie et l’académie se concentrent alors sur six collèges, en jumelant deux établissements géographiquement proches mais opposés dans leur composition sociale. Berlioz, qui compte près de 60 % d’élèves de milieux défavorisés, est couplé avec Coysevox, qui n’en compte que 10 à 20 %. L’extrême opposé, à 600 mètres seulement.

      Coysevox, c’est le collège réputé et à dominante blanche d’un quartier bobo situé plus haut, sur la butte Montmartre. Entre les deux, la rue Championnet, frontière invisible au-delà de laquelle les élèves de chaque quartier n’ont même pas l’idée de s’aventurer. Dès la rentrée 2017, le binôme Berlioz-Coysevox expérimente la « montée alternée » : le principe est de regrouper tous les élèves du double secteur au même endroit à l’entrée en 6e, une année sur deux. Les années impaires, tous les élèves qui entrent en 6e vont à Coysevox et effectuent toute leur scolarité là-bas. Les années paires, c’est l’inverse : tous les 6e vont à Berlioz. Les deux collèges ont donc seulement deux niveaux : 6e et 4e ou 5e et 3e, qui alternent d’un an sur l’autre. L’annonce du projet est accueillie comme pain bénit à Berlioz mais déclenche une levée de boucliers à Coysevox et dans les écoles autour : grève des profs, blocus et manifs des parents, pétition et campagne d’affichage.

      [...] Julien Grenet, directeur de recherches au CNRS et directeur adjoint à l’Institut des politiques publiques (IPP), fait partie du comité scientifique qui a accompagné le projet. Il en tire un bilan positif : « Les parents favorisés côté Berlioz sont revenus très massivement. Ceux du côté de Coysevox sont davantage partis vers le privé mais les flux se sont compensés. » En 2016, 24 % des élèves du double secteur allaient dans le privé, contre 16 % en 2019. « Cela montre que la ségrégation n’est pas une fatalité. Les parents sont prêts à revenir dans le public, avec plus de mixité, pourvu qu’on leur propose autre chose qu’un ghetto de pauvres », remarque le chercheur.

      Cinq ans après, les taux d’absentéisme et de décrochage ont chuté et celui de la réussite au brevet a grimpé à 89 %, dans la moyenne parisienne. « Grâce à la mixité, les élèves s’approprient les codes des classes dites favorisées – bien se tenir, enlever sa casquette – qui permettent aux meilleurs d’intégrer avec succès des lycées prestigieux », remarque Farid Boukhelifa. Terminé aussi les problèmes de violence : le quartier a retrouvé son calme.

  • Affaire Laurent Bigorgne : l’ex-patron de l’Institut Montaigne condamné à un an de prison avec sursis
    https://www.liberation.fr/societe/police-justice/affaire-bigorgne-lex-patron-de-linstitut-montaigne-condamne-a-un-an-de-pr

    Laurent Bigorgne, l’ancien directeur de l’Institut Montaigne, a été condamné ce jeudi à douze mois de prison avec sursis et 2 000 euros d’amende par le tribunal correctionnel de Paris pour avoir drogué une ex-collaboratrice. Jugé pour « administration de substance nuisible », il risquait jusqu’à cinq ans de prison et 75 000 euros d’amende. Lors de l’audience le 10 novembre, le procureur de la République avait requis une peine de dix-huit mois de prison avec sursis et 5 000 euros d’amende.

    Laurent Bigorgne condamné à un an de prison avec sursis
    https://www.huffingtonpost.fr/justice/article/laurent-bigorgne-condamne-a-un-an-de-prison-avec-sursis_211254.html

    Placé en garde à vue, Laurent Bigorgne avait rapidement reconnu avoir pris ce soir-là de la cocaïne et versé de la MDMA dans le verre de Sophie Conrad. Il a été renvoyé devant le tribunal pour administration de substance nuisible par une personne agissant sous l’emprise manifeste de produits stupéfiants.

    Une qualification contestée par Sophie Conrad qui a regretté que « le motif sexuel n’ait pas été reconnu ». « Aujourd’hui, je n’ai plus vraiment aucun doute sur le fait que son intention était, hélas, sexuelle et de me violer », a-t-elle déclaré, à l’audience. « Je n’ai jamais touché Sophie, je n’aurais jamais, jamais abusé d’elle », a répliqué Laurent Bigorgne.

    Mais dans un retournement de situation surprise, le tribunal correctionnel a considéré que Laurent Bigorgne avait bien administré cette drogue « afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle », requalifiant ainsi les faits.

    Et malgré ça, c’est du sursis et 2 000 euros d’amende ?

  • A Sète, l’île de Thau est « submergée par la misère »
    https://www.liberation.fr/societe/a-sete-lile-de-thau-est-submergee-par-la-misere-20221207_A4L6NWJB4FGINB3M

    La misère serait-elle moins pénible au soleil, sur une île léchée par les vaguelettes d’un vaste étang, à deux pas de la Méditerranée ? Pas sûr. Dans le nord de Sète (Hérault), le quartier prioritaire de l’île de Thau cumule les difficultés. Parmi les 3 500 habitants issus de deux communautés, gitane et maghrébine, plus de 63 % vivent sous le seuil de pauvreté. Moins de 10 % des ménages sont imposables sur le revenu. « On est submergés par la misère », s’insurge Sabrina Ahmed Ben Mohamed, présidente de l’Association humanitaire sétoise et languedocienne, laquelle aide ici une cinquantaine de familles et distribue chaque semaine des colis alimentaires. « La classe moyenne est devenue pauvre. Ici comme dans le centre de Sète, c’est la cata. Heureusement, dans ce quartier, les gens sont très solidaires et les communautés s’entendent bien. »

  • À Gennevilliers, les travailleurs sans papiers de RSI ont levé leur piquet de grève - Le Parisien
    https://www.leparisien.fr/hauts-de-seine-92/a-gennevilliers-les-travailleurs-sans-papiers-de-rsi-ont-leve-leur-piquet
    https://www.leparisien.fr/resizer/LFm3UjPYSUewH4zxwGH0zCtc3iA=/1200x675/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/leparisien/KOHAF5IZYZDC7JLY3AWTLC5JEQ.jpg

    Les salariés mobilisés depuis 13 mois pour obtenir leur régularisation ont quitté leur campement après avoir obtenu un titre de séjour provisoire les autorisant même [même] à travailler. Mais ils restent vigilants jusqu’à la fin de l’instruction de leurs dossiers.

    Première victoire pour les grévistes sans papiers de RSI . La lutte continue pour ceux de DPD et Chronopost !
    http://www.sudptt.org/La-prefecture-du-92-delivre-83-recepisses-aux-grevistes-de-RSI-La-lutte

    M. Rendre-la-vie-impossible-Darmanin a reçu le 29 septembre une délégation concernant uniquement la situation du piquet de RSI à Gennevilliers, suite à l’interpellation de Mme Faucillon, députée des Hauts-de-Seine. Depuis, la préfecture des Hauts-de-Seine a convoqué 83 des occupants qui ont reçu des récépissés avec autorisation de travail avec la mention « a demandé un premier titre de séjour portant la mention travailleur temporaire ». C’est une première étape importante pour les camarades en grève depuis bientôt un an !

    L’article du Parisien est sous #paywall, en revanche j’ai trouvé ça

    JO de Paris 2024 : des travailleurs sans papiers sur les chantiers
    https://justpaste.it/6j8ko

    Alors qu’une enquête préliminaire a été ouverte en juin par le parquet de Bobigny pour travail dissimulé sur le chantier du village des athlètes, « Le Monde » a rencontré plusieurs ouvriers sans papiers sur des sites des JO en Seine-Saint-Denis. De son côté, le gouvernement dit vouloir faciliter la régularisation des travailleurs dans les secteurs en tension.

    « On est là pour survivre, on n’a pas le choix ».
    C’est un chantier comme un autre. Il est embauché comme manœuvre pour « piocher, faire du béton, de la maçonnerie ou ranger le matériel ». Un de plus où il n’a « pas de contrat, pas de fiche de paye, pas de congés », 80 euros la journée, qu’il termine à 17 heures ou à 21 heures.
    Le chantier sur lequel il pointe depuis des mois, c’est celui du village des athlètes des Jeux olympiques (#JO) de 2024.

    #travail #ouvriers #sans_papiers #intérim #Jeux-olympiques

    • Sans-papiers sur les chantiers de Paris 2024 : « Les JO ne pourraient pas se faire sans nous »
      https://www.liberation.fr/societe/sans-papiers-sur-les-chantiers-les-jeux-olympiques-ne-pourraient-pas-se-f

      La préparation des Jeux olympiques donne à voir les mêmes pratiques illégales qu’ailleurs dans le bâtiment : emploi de travailleurs sans-papiers, avec des conditions de sécurité déplorables et aucun droit pour ces travailleurs de l’ombre.
      par Gurvan Kristanadjaja, le 5 décembre 2022

      En 2021, l’heure était aux belles photos. Les chantiers en vue des Jeux olympiques (JO) de Paris 2024 étaient lancés en grande pompe. « Nous accueillons normalement les Jeux olympiques et paralympiques en France tous les cent ans, il vaut mieux, mes chers amis, être au rendez-vous du monde », déclamait l’ex-Premier ministre Jean Castex, appelant de ses vœux « des Jeux olympiques réussis, à la fois inspirateurs et illustrateurs des aspirations de notre société et des politiques publiques que nous conduisons pour y répondre et pour transformer notre pays ».

      Un an plus tard, Moussa (1) et ses collègues, réunis dans les locaux de la CGT à Bobigny (Seine-Saint-Denis) qui les accompagne dans leurs démarches, réécoutent ces mots avec amertume. Ils sont dix, tous maliens et sans papiers. Depuis un, deux ou trois ans, ils travaillent pour une entreprise sous-traitante – dont le nom change souvent – de #Vinci GCC Construction ou #Spie_Batignolles, les mastodontes de la construction. « C’est du bouche à oreille, de copain à copain. Si je travaille quelque part et que je vois des amis qui ne travaillent pas au foyer, je leur donne le numéro de mon patron. Pour vivre ici quand tu n’as pas de papiers, ce n’est pas du tout facile alors on préfère travailler dans le bâtiment plutôt que de faire des choses pas bien [et risquer davantage la prison et l’expulsion] . Si le patron a du travail pour toi, il t’appelle et il t’envoie l’adresse », explique Moussa, porte-parole du groupe.

      Nébuleuse d’entreprises

      Depuis un an, les adresses ont presque toutes mené sur des chantiers des JO : l’immense village olympique à L’Ile-Saint-Denis ou la piscine Marville à Saint-Denis pour les entraînements de water-polo. Parmi les dix Maliens, il y a des manutentionnaires, chargés de porter des sacs de ciment de plusieurs dizaines de kilos sur treize étages. Il y a des bancheurs, spécialisés dans la construction en béton armé. Et puis des hommes à tout faire : ils piochent la terre, construisent les murs, font de la maçonnerie… Le tout pour un peu plus de 80 euros non déclarés par jour, peu importe les conditions météo, et sans jour de congé.

      « On n’a aucun droit. On n’a pas de tenue de chantier, pas de chaussures de sécurité fournies, on ne nous paye pas le pass Navigo, on n’a pas de visite médicale et même pas de contrat », s’indigne Moussa. « Si tu tombes malade ou que tu te blesses, le patron te remplace le lendemain », dénonce Abdou (1), un de ses collègues. Le plus souvent, ils se présentent avec les papiers d’un ami ou d’un membre de la famille en règle sur le territoire. « Les Français ne veulent pas faire ce travail. Sur le chantier, il n’y a presque que des étrangers. Des Pakistanais pour l’électricité, des Arabes pour la plomberie, des Afghans pour la maçonnerie… Les blancs, ce sont ceux qui sont dans les bureaux », détaille Moussa.

      « On retrouve sur les chantiers des JO des pratiques qu’on retrouve par ailleurs » dans le secteur du bâtiment, reconnaît #Bernard_Thibault, membre du comité d’organisation. « Mais on a un dispositif de surveillance un peu plus développé, avec un comité présent sur les chantiers, doté d’une permanence. Ça nous permet de repérer des cas », assure-t-il. L’ancien leader de la CGT fait aussi valoir que les syndicats ont été intégrés au conseil d’administration de Paris 2024 : « Des JO en France, ça ne s’organise pas comme une Coupe du monde au Qatar. » Des garde-fous qui n’empêchent pas certaines « entreprises de passer entre les mailles du filet », admet-il.

      La société qui emploie Moussa et les autres Maliens est gérée par un ressortissant turc via une nébuleuse d’autres entreprises. Elles prospèrent grâce à la #sous-traitance. « Celle qui paye n’est pas forcément celle qui est sur le chantier. A tel point qu’il est impossible de s’assurer de quelle est la boîte qui les embauche vraiment », explique Jean-Albert Guidou, secrétaire général de l’union locale CGT de Bobigny. Contacté, le patron n’a pas répondu à nos sollicitations.

      « On les prend au mot »

      En juin, une enquête a été ouverte par le parquet de Bobigny pour « emploi d’étrangers sans titre », « recours au travail dissimulé » et « exécution en bande organisée d’un travail dissimulé ». Plusieurs contrôles ont aussi été menés par la Direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités Ile-de-France. Depuis le début de l’année, hormis Moussa et ses collègues, seize autres travailleurs sans papiers se sont plaints de leurs conditions de travail sur des chantiers des Jeux olympiques. Ils ont obtenu la régularisation, ce qu’espèrent aussi Moussa et les autres. « Le gouvernement français veut des Jeux olympiques propres, on les prend au mot », avance Jean-Albert Guidou à la CGT.

      Les cas de ces travailleurs font écho au débat qui s’ouvre à l’Assemblée nationale ce mardi. Dans son projet de loi immigration prévu pour « début 2023 », le gouvernement envisage d’intégrer la possibilité pour les travailleurs sans papiers des « métiers en tension » d’obtenir un titre de séjour. Ce qui pourrait favoriser les conditions de régularisation de ces personnes. En attendant, quand il est question d’immigration, le débat se porte plus sur la question des expulsions que sur celle des régularisations. « Nous sommes sans papiers car la France ne veut pas nous régulariser mais les Jeux olympiques ne pourraient pas se faire sans nous », regrette Moussa, qui a vu plusieurs de ses demandes d’asile refusées. « Nous sommes venus ici comme tous les jeunes Africains qui rêvent d’Europe. On a vécu des choses horribles en Libye et on a traversé la Méditerranée. On ne pensait pas qu’ici on profiterait de nous. » Ni le parquet de Bobigny ni la Dreets n’ont répondu à nos sollicitations.

      Respectabilité. Ici, un Thibault notabilité semble se porter garant d’un simulacre de mieux disant social

      #BTP

  • Des septuagénaires jugés pour avoir menacé de mort une enseignante « islamo-gauchiste »

    Lors de la polémique qui visait Sciences Po Grenoble en mars 2021, certains journalistes à l’instar de Pascal Praud et Caroline Fourest, avaient accusé à tort une enseignante. Après avoir subi une vague de #cyber-harcèlement, celle-ci avait porté #plainte contre dix personnes.

    « Je vais tenter de parler bien fort », prévient le président de la 24e chambre du tribunal judiciaire de Paris. L’audience a en effet quelque chose de peu banal. Les prévenus présents ce vendredi et poursuivis pour « #harcèlement au moyen d’un service de communication » et « #menaces_de_mort » sont majoritairement très âgés. Il fallait donc s’imaginer des personnes de plus de 70 ans saisir leur clavier, se connecter à leur compte Facebook et lâcher des #insultes et des menaces d’une extrême violence. Leur cible ? Une enseignante-chercheuse accusée de n’être rien d’autre qu’« une islamo-gauchiste ». 

    « Pour bien situer le contexte », le président résume la situation en lisant un article de presse. Il rappelle le début de cette affaire médiatisée en mars 2021 lorsque deux enseignants, #Klaus_Kinzler et #Vincent_T, sont la cible d’affiches placardées sur la façade de l’#IEP de Grenoble : « Des fascistes dans nos amphis Vincent T. […] et Klaus Kinzler démission. L’islamophobie tue. » Le syndicat étudiant Unef relaie l’action sur les réseaux sociaux, avant de tout supprimer. 

    Comme le racontait Mediapart (https://www.mediapart.fr/journal/france/110321/accusations-d-islamophobie-la-direction-de-sciences-po-grenoble-laisse-le-), ce #collage, condamné unanimement, venait après d’intenses tensions entre ces deux professeurs et une autre enseignante, Claire M., autour d’une journée de débats nommée « Racisme, antisémitisme et islamophobie » et organisée dans le cadre d’une « semaine pour l’égalité et la lutte contre les discriminations ». Rapidement, Klaus Kinzler fait le tour des plateaux télé pour livrer une version comportant de nombreuses omissions. Il affirme, à tort, avoir été viré de ce groupe préparatoire pour s’être opposé à l’utilisation du terme « islamophobie ». En plus de l’enseignante, il accuse Anne-Laure Amilhat Szary, patronne du laboratoire Pacte, rattaché à l’IEP, d’avoir livré son nom en pâture et d’avoir contribué à ce que des gens placardent des affiches sur les murs de l’institut. 

    Une victime ciblée par #Pascal_Praud et #Caroline_Fourest 

    L’accusation est rapidement reprise par Marianne, BFMTV et par l’essayiste Caroline Fourest. « D’après ce témoignage, c’est une enseignante et le laboratoire de recherche Pacte (CNRS) qui ont excité les étudiants contre ces deux professeurs et lâché la meute contre le droit de questionner un mot qui a tué. Affligeant. Elle a bon dos la “liberté académique” », tweete cette dernière le 6 mars 2021. Tout est faux comme l’a révélé Mediapart, mais qu’importe, l’accusation se propage en même temps que naît l’emballement médiatique. 

    Sur CNews, Pascal Praud va beaucoup plus loin et tient à être le premier à donner le nom et le prénom de la patronne du labo. « Puis intervient ce laboratoire Pacte avec cette dame, je vais citer son nom, Anne-Laure Amilhat Szary. Cette dame-là, c’est la directrice du laboratoire, cette dame c’est une militante […] qui avance avec le sentiment d’impunité, et c’est très révélateur parce qu’on voit le #terrorisme_intellectuel qui existe dans l’#université à travers leurs exemples », déclare-t-il le 9 mars 2021. 

    Il n’en fallait pas plus pour que la directrice en question reçoive des centaines de messages d’insultes et de menaces de mort. Entre le 12 et le 17 mars 2021, on veut « la buter », « l’éliminer » ou lui « trancher la gorge ». 

    Première invitée à la barre, Anne-Laure Amilhat Szary veut d’abord laver son honneur en rappelant les vérités bafouées par certains journalistes. Non, elle n’a jamais publié un communiqué officiel pour livrer le nom des deux enseignants mentionnés sur les affiches de l’IEP. Il s’agissait d’un simple courrier pour défendre une membre du laboratoire prise pour cible par ces deux professeurs. « Je suis intervenue pour assurer le respect de la laïcité et défendre une collègue », explique-t-elle tout en précisant avoir immédiatement « affirmé sa solidarité » avec ces deux enseignants lorsqu’elle a pris connaissance des affiches. Klaus Kinzler s’attaquait violemment à Claire M. et n’hésitait pas à fustiger les musulmans et hiérarchiser les religions en disant préférer le christianisme. 

    Très émue, elle détaille ensuite les conséquences de cette haine virtuelle. « Je craignais pour ma sécurité et d’être suivie dans la rue, raconte-t-elle. Je me suis mise à passer mes nuits sur les réseaux sociaux pour voir ce qui tombait. » Dans le même temps, plusieurs posts Facebook la ciblent directement et reprennent l’idée amorcée par Caroline Fourest. « L’islamo-gaucho Anne Laure Amilhat Szary est une instigatrice de la “fatwa” lancée contre deux professeurs à Sciences Po Grenoble ! Comme elle a trouvé normal de diffuser les photos des professeurs… rien ne va déranger à ce que l’on diffuse la sienne », peut-on lire dans un post accompagné de la photo de la directrice et publié le 12 mars par un certain Jean-Luc.

    Dans les commentaires, on peut lire un flot de #haine et d’#insultes. Et les messages des dix personnes poursuivies ce vendredi. 

    - Jacques L., 79 ans : « Quand ils la violent elle aura compris à moi que ça lui plaise !! […] Déjà pour la violer, il faut vraiment le vouloir beurk !! »
    - Alain B., 73 ans : « Qu’elle crève le cul bourré de chiffon rouge et la gueul ouvert. »
    - Annick L., 73 ans : « Horrible nana !! Le caillou rasé ! Pauvre tâche. Un jour viendra où tu devras te repentir ! »
    - Jean-Marie C., 60 ans : « Saloupe à butté »
    - Dominique B., 74 ans : « Il faut lui trancher la gorge »
    - Wilfrid B, 65 ans : « A l’échafaud (…) Regardez la gueule de la bavure. A expédier au pays du Maghreb »
    - Christian D., 58 ans : « Pauvre conne ton tour viendra »
    - Ronan M., 56 ans : « Grosse connasse on va te butter »
    - Dominique V., 56 ans : « Il faut tondre cette collabo de merde. »

    Seul Maxence D., 32 ans, se démarque en lâchant sur Twitter : « Potence + corde pas trop épaisse pour lui lacérer le coup à cette p*** ». 

    Des prévenus âgés et amnésiques 

    Très sûrs d’eux sur les réseaux sociaux, les quatre prévenus présents à l’audience sont désormais beaucoup moins fiers. Presque tous se disent amnésiques et affirment ne pas se souvenir de toute la polémique liée à Sciences Po Grenoble. Certains minimisent aussi la teneur de leur propos. « J’ai vu le post Facebook, j’ai lu deux trois commentaires et j’ai mis le mien, mais c’est juste une insulte, pas une menace de mort », lâche Alain B, qui contraint le tribunal à se répéter du fait de ses graves problèmes d’audition. « Qu’elle crève », ne serait pas une menace de mort selon cet ancien plombier aujourd’hui retraité. Tout juste « une connerie ». 

    Les mains dans les poches, il considère que « ce qui est fait est fait » et tarde à s’excuser, sans vraiment penser à la principale intéressée. « Je regrette bien sûr, si j’avais su que ça allait me ramener des ennuis comme ça… » Et d’insister face à une assemblée quelque peu médusée : « Je n’ai pas dit “je vais la crever”, j’ai dit “qu’elle crève”. Comme si elle tombait et que je la laissais par terre sans la ramasser. »

    Dominique B, secrétaire de direction à la retraite, qui voulait « trancher la gorge » d’Anne-Laure Amilhat Szary, aurait tout oublié. « C’est parti de mon ordinateur, mais je ne me rappelle pas avoir marqué ces propos », justifie-t-elle tout en expliquant ne pas vraiment maîtriser Facebook. Wilfrid B, 65 ans et ancien ouvrier, tente d’expliquer en quoi « À l’échafaud » n’est pas une menace de mort « puisque cela n’existe plus ». 

    « Je débutais avec Facebook et je ne savais pas comment ça fonctionnait », avance-t-il avant de reconnaître : « J’ai lu qu’on instaurait une fatwa contre ces profs. Je répondais à ça, mais je ne la visais pas particulièrement. » Même dénégation de Christian D., 58 ans, qui tente d’expliquer en quoi écrire « ton tour viendra » n’est pas une menace de mort. Pourquoi la phrase était-elle accompagnée par trois emojis « crotte » et trois emojis « flammes » ? « J’utilise l’emoji flamme pour tout, pour les anniversaires par exemple », tente-t-il avant de laisser sa place à Annick L. 

    Cette femme de 72 ans se déplace difficilement et dit avoir été « traumatisée » par sa garde à vue. « Depuis je suis sous antidépresseurs », confie-t-elle. « Y a rien à faire, je n’ai aucun souvenir de cette histoire. J’ai vu mon nom qui apparaissait sur Facebook mais je ne comprends pas. Je ne conteste pas l’avoir écrit mais je ne m’en souviens pas », poursuit-elle. Elle aurait donc oublié qu’elle voulait voir cette « traître », l’ex-directrice du laboratoire Pacte, clouée « au pilori » « le caillou rasé ». 

    Des sympathisants de Zemmour et Le Pen 

    Les quatre prévenus semblent aussi sincères que vulnérables et aucun d’entre eux ne veut laisser d’indice sur ses accointances politiques. Tant mieux puisque le président du tribunal ne souhaite pas en savoir plus et tient à rappeler qu’il « se fiche » de savoir ce « qu’ils pensent sur le fond ». Il faut attendre la plaidoirie de Raphaël Kempf, l’avocat d’Anne-Laure Amilhat Szary, pour avoir un profil politique un peu plus précis. 

    Lors de leur garde à vue en effet, la plupart ont confessé leur colère contre les « islamo-gauchistes », qu’ils définissent tantôt comme des « musulmans de gauche », tantôt comme des « gens de gauche pro-islam ». À la lecture de son audition, on découvre que Christian D « adore » Éric Zemmour et qu’il est, comme d’autres prévenus, membre du groupe « L’avenir France avec Éric Zemmour ». « Les gens de gauche sont des pro-islam et immigration qui organisent des réunions interdites aux gens de type caucasien et amènent des idées nauséabondes au sein des établissements publics français », déclare quant à lui Jean-Marie C, 60 ans et sous curatelle. 

    « Grâce à cette procédure, il devient évident que je voterai à tout jamais Marine Le Pen et que j’inciterai ma famille à faire de même », lâche de son côté Dominique V. aux enquêteurs. Annick L., enfin, a plus de mal à disserter sur ses opinions politiques. Lorsqu’on lui demande si elle connaît le groupe « Marion Maréchal-Le Pen, on t’aime » qu’elle suit sur Facebook, la réponse est évasive : « J’ai peut-être déjà mis un pouce, mais sans plus. »

    L’exploitation de son téléphone portable révèle pourtant de très nombreux commentaires virulents et des termes parfaitement explicites du type « nous les Français de souche ». « Ma belle-fille est chinoise, mon mari est d’origine polonaise. On n’est pas raciste », jure-t-elle. Elle affirme avoir répondu sans réfléchir et ne pas connaître Anne-Laure Amilhat Szary. Interrogée pour savoir ce qu’elle a contre les islamo-gauchistes , elle déroule les arguments déployés par certaines chaînes d’info en continu : « Y a cette histoire de Samuel Paty qui avait été égorgé, vous ne trouvez pas ça horrible ? Les gens qui sont poignardés pour rien, c’est affreux, c’est inhumain. Y a pas que ça. Tous les faits divers qu’on entend franchement c’est horrible, toutes ces jeunes femmes qui se font tuer. On ne vit plus dans un monde serein. »

    Une vie « bouleversée » pour Anne-Laure Amilhat Szary 

    Les avocats de la défense insistent sur l’âge des prévenus qui ne sauraient pas vraiment utiliser les réseaux sociaux et ne sauraient pas vraiment qu’un commentaire publié sur le réseau est lisible par tous dès lors que l’option privée n’est pas cochée. L’un des conseils, l’avocat de Jean-Marc C., tient tout de même à évoquer la responsabilité de certains journalistes dans cette affaire. « Les chaînes d’info en continu peuvent avoir une vraie influence tout comme certains journalistes, estime-t-il. Mon client a pu se dire que Caroline Fourest , qui elle, est journaliste , a recoupé ses sources avant de tweeter. Pour beaucoup de personnes et pour mon client, son tweet était une information. »

    Les prévenus, sorte de #fachosphère du troisième âge, ont en effet en commun de considérer les réseaux sociaux comme des sources à part entière et de ne rien vérifier. Ils confondent « article de presse » et « post-Facebook », et baignent dans des groupes qui s’affranchissent de toute réalité et qui partagent la même obsession que leurs journalistes préférés : la lutte contre des supposés islamo-gauchistes. 

    Lors de sa plaidoirie, Me Kempf livre sa déception de ne pas avoir eu « les explications » qu’il espérait. « Je regrette l’absence totale de prise en compte de ce que Anne-Laure Amilhat Szary a pu dire », enchaîne-t-il. Il rappelle donc les conséquences de ces mots sur la vie de sa cliente. Les quatre jours d’ITT, l’arrêt maladie, les troubles du sommeil et la dépression qui ont suivi. Il insiste aussi sur le « bouleversement professionnel » que cette victime collatérale de l’affaire de Sciences Po a dû subir.

    Peu de temps après ces attaques, l’ex-patronne du laboratoire rattaché au CNRS et renommé dans le milieu scientifique a préféré renoncer à son mandat. Si elle enseigne de nouveau depuis peu, elle dit ne plus pouvoir prendre un poste de direction. Il revient sur le rôle de Caroline Fourest qui a contribué à relayer « la légende » selon laquelle Anne-Laure Amilhat Szary aurait contribué à ce que deux professeurs de l’IEP soient pris pour cible. Il n’oublie pas non plus « la communauté d’intérêt politique » qui lie tous ces prévenus et demande qu’ils soient condamnés solidairement à une peine de 20 000 euros d’amende.

    La procureure, elle aussi déçue par la plupart des justifications, s’étonne que tous ces gens qui prétendent dénoncer ce qui est arrivé à Samuel Paty déploient la même mécanique « qui a tué Samuel Paty ». Pour les dix prévenus, elle a requis des peines avoisinant les mille euros d’amende à payer dans les 90 jours sous peine d’incarcération. La décision sera rendue le 13 janvier 2023.

    https://www.mediapart.fr/journal/france/021222/des-septuagenaires-juges-pour-avoir-menace-de-mort-une-enseignante-islamo-

    #affaire_de_Grenoble #justice #réseaux_sociaux

    –—

    ajouté à la métaliste atour de ce qu’on a surnommé l’#affaire_de_Grenoble :
    https://seenthis.net/messages/943294

    ping @_kg_ @karine4 @isskein

    • Cyberharcèlement d’une enseignante de l’IEP de Grenoble : « Ils critiquent le meurtre de Samuel Paty, mais appellent eux-mêmes au meurtre »

      Dix prévenus ont comparu vendredi à Paris pour des accusations de #harcèlement_en_ligne et des menaces de mort à l’encontre d’une enseignante, dans le cadre d’une polémique médiatique à Sciences-Po Grenoble en mars 2021.

      Des cyberharceleurs aux cheveux blancs. Dix personnes comparaissaient vendredi au #tribunal_correctionnel de Paris, accusées de harcèlement en ligne et de menace de mort à l’encontre d’Anne-Laure Amilhat Szary, professeure des universités, dans le cadre de la polémique sur l’Institut d’études politiques de Grenoble en mars 2021. Les cinq prévenus présents n’ont pourtant pas le profil attendu dans une affaire de ce type. Ils sont nés entre 1948 et 1964. L’une d’entre eux à du mal à se lever pour venir jusqu’à la barre.

      Alain B., Corrézien de 74 ans, a écrit sur son compte Facebook, à propos d’Amilhat Szary, « qu’elle crève le cul bourré de chiffons rouges et la gueule ouverte ». Une « connerie », reconnaît-il devant le tribunal. Mais pas une menace de mort pour autant, selon lui. « Oui, c’est violent », mais « « qu’elle crève », c’est différent de « Je vais la crever » », tente-t-il d’argumenter. Le président de la séance lui demande s’il regrette son acte. « Bien sûr, si j’avais su que cela allait m’amener des ennuis comme ça… » L’avocat de la plaignante, maître Raphaël Kempf, dira dans sa plaidoirie qu’il s’attendait à « des excuses » de la part des prévenus, mais qu’« à une ou deux exceptions près, cela n’a pas été pas le cas ».

      « Ce n’est pas dans mes habitudes »

      Le procès était celui des fausses informations et du mécanisme de meutes engendré par les réseaux sociaux. Anne-Laure Amilhat Szary, 52 ans, est l’ancienne directrice du laboratoire de sciences sociales de Grenoble. Son nom a été propulsé dans le débat public il y a un an et demi, après l’affichage sur les murs du campus de l’IEP de Grenoble par des étudiants du nom de deux professeurs taxés de fascisme et d’islamophobie. Une démarche irresponsable quelques mois seulement après l’assassinat de Samuel Paty, enseignant de géographie accusé à tort d’islamophobie sur les réseaux sociaux.

      L’un des deux enseignants grenoblois mis en cause, Klaus Kinzler, avait alors décidé de répondre médiatiquement et jeté en pâture, avec la complicité de Pascal Praud sur CNews, le nom d’Anne-Laure Amilhat Szary. Il lui reprochait de l’avoir recadré après un échange de mail dans lequel il remettait en cause la présence du mot « islamophobie » sur le même plan que « racisme » et « antisémitisme », dans l’intitulé d’un séminaire sur les discriminations. Klaus Kinzler a par la suite été suspendu en décembre 2021 pour avoir tenu « des propos diffamatoires dans plusieurs médias contre l’établissement d’enseignement supérieur dans lequel il est en poste ».

      De cette polémique à tiroirs, nos prévenus ne savent quasiment rien. Certains ont lu un simple message sur Facebook – que certains appellent « un article » –, selon lequel Anne-Laure Amilhat Szary aurait notamment lancé une fatwa contre deux professeurs et aurait diffusé leur photo. Rien de tout cela n’est vrai, mais le post déclenche une avalanche de commentaires haineux.

      Wilfried B., 65 ans, reconnaît avoir écrit « A l’échafaud » et « Regardez-moi la gueule de la bavure » sous la publication. « Ce n’est pas dans mes habitudes, assure-t-il. Mais après ce qui s’était passé avec l’assassinat de Samuel Paty… C’est pour ça que j’ai répondu ce genre de commentaire. » Il s’excuse maintenant auprès de sa victime. Reste une incohérence relevée par la procureure : « Ils critiquent le meurtre de Samuel Paty, mais ils appellent eux-mêmes au meurtre et à la violence », pointe-t-elle dans son réquisitoire. Elle réclame des amendes allant de 630 à 1 350 euros selon les prévenus.

      « Ce sont des gens qui ne connaissent rien à Facebook »

      L’audience faisait aussi office de révélateur sur l’effet d’entraînement dans le cyberharcèlement. Plusieurs prévenus disent avoir publié leur message pour aller dans le même sens d’autres commentaires lus auparavant, sans vraiment se renseigner sur le fond de l’affaire. « Ce sont des gens qui ne connaissent rien à Facebook », glisse un proche d’une prévenue dans la salle. De fait, le procès a parfois tourné à la leçon sur les réseaux sociaux. « Quand vous publiez sur Facebook, tout le monde ne fait pas attention que s’il y a une petite planète, le post est visible par tous », tente le président de la séance.

      Mais l’absence de maîtrise des outils numériques n’excuse pas la violence des propos. Quand Jacques L., 79 ans, absent mais excusé par lettre, écrit « Quand ils la violeront, elle comprendra », il n’a probablement pas conscience de raviver un souvenir traumatisant de la vie de sa victime. Il n’en reste pas moins qu’il a rouvert « un gouffre », « une blessure béante », déplore Anne-Laure Amilhat Szary.

      Si Dominique B., 74 ans, pull en laine vert et écharpe rose, affirme ne pas se souvenir d’avoir écrit « Il faut lui trancher la gorge » à la barre, les conséquences dans la vie de la plaignante n’en sont pas moins tragiques. Redevenue simple enseignante-chercheuse, Anne-Laure Amilhat Szary ne se sent plus capable de reprendre des responsabilités dans sa carrière après avoir quitté la direction du laboratoire de sciences sociale de l’IEP Grenoble, en octobre 2021. Elle « s’autocensure » si elle doit prendre la parole publiquement et même sa vie personnelle s’est « effondrée », d’après la procureure.

      « Le système judiciaire est capable de réagir »

      Malgré ce déversement de violence, Anne-Laure Amilhat Szary ne regrette « ni ses engagements ni ce procès ». Elle le fait « pour les autres enseignants et chercheurs victimes de harcèlement ». « Comme la philosophe Sophie Djigo, à qui on reproche de vouloir emmener ses étudiants voir des migrants », pointe-t-elle, en référence à cette enseignante valenciennoise dont la sortie scolaire à Calais a été annulée sous la pression de l’extrême droite. La parole scientifique dans le débat public est loin d’être simple. Et le combat est bien politique, selon elle.

      Si le président de la chambre n’a pas voulu s’aventurer sur ce terrain vendredi, les publications Facebook incriminées ont pourtant bien souvent été vues par les prévenus sur des groupes de soutien à Eric Zemmour ou Marion Maréchal-Le Pen. La critique sans mesure des universitaires a été lancée par Jean-Michel Blanquer et Frédérique Vidal (alors respectivement ministre de l’Education nationale et de l’Enseignement supérieur) quand ils sont partis en croisade contre un supposé #islamo-gauchisme à l’université. Elle a été largement reprise par Zemmour à la présidentielle 2022.

      Cette audience laisse donc un goût doux-amer. Dix prévenus sur les milliers de messages reçus, cela semble bien faible. « On a sélectionné les messages les plus outrageants », reconnaît maître Kempf. Mais le mieux est l’ennemi du bien. « Quand on porte plainte, je ne suis pas certain qu’elle aboutisse », nous glisse-t-il.

      « Cette audience montre que le système judiciaire est capable de réagir », positive aussi Anne-Laure Amilhat Szary, qui a remercié la cour de sa rapidité. Cette audience participe à faire reculer le sentiment d’impunité en ligne. Dominic V., un prévenu de 56 ans absent à l’audience, a revendiqué ses propos lors de sa garde à vue, croyant que « seuls des rappels à la loi sont prononcés » dans ce genre de cas. La procureure a enjoint la cour à « lui donner tort ». Réponse le 13 janvier.

      https://www.liberation.fr/societe/police-justice/cyberharcelement-dune-enseignante-de-liep-de-grenoble-ils-critiquent-le-m

    • C’est à cause de la #télévision :
      https://contre-attaque.net/2022/12/03/le-profil-des-trolls-dextreme-droite-enfin-devoile

      Au procès, ces personnes âgées disent qu’elles ne se souviennent plus. Pourtant, lors de leurs arrestations, plusieurs avaient déclaré leur haine contre les « islamo-gauchistes » et leur proximité avec Zemmour ou Le Pen. Annick, 73 ans, avait parlé des « gens poignardés pour rien » et des « faits divers » qu’elle voyait : « franchement c’est horrible, toutes ces jeunes femmes qui se font tuer ». Bref, les prévenus sont des seniors rivés devant leurs télés, intoxiqués par les horreurs et la désinformation quotidienne de chaînes en continu. D’ailleurs l’avocat d’un prévenu dénonce à l’audience la responsabilité des journalistes : « Mon client a pu se dire que Caroline Fourest, qui elle, est journaliste, a recoupé ses sources avant de tweeter. » Pourtant, ni Pascal Praud ni Fourest ni les patrons de ces médias semeurs de haine ne sont sur le banc des accusés. Impunité totale.

      Voilà donc le profil mystérieux de ces milliers de trolls fascistes. Des personnes vulnérables, séniles, parfois sous curatelle, qui se font pourrir le cerveau par les chaînes d’extrême droite. Ce pays bascule à cause d’une poignée de milliardaires qui ont fait main basse sur l’information. Nous sommes beaucoup à connaître un oncle, un grand-père, un ami d’ami âgé ou des parents retraités à avoir vrillé progressivement ces dernières années, à force de regarder ces chaînes. Parlons-leur, proposons-leur de sortir, aidons-les à se désintoxiquer. Et organisons-nous pour mettre hors d’état de nuire Bolloré et ses amis.

      Le #PAF en état d’insalubrité publique ?
      Petite histoire de la « régulation audiovisuelle » :
      https://www.csa.fr/Informer/Toutes-les-actualites/Actualites/Histoire-de-la-regulation-audiovisuelle

      Le saviez-vous ? Le « pendant » internet du PAF s’appelle le #PIF. Étonnant, non ?

    • Sciences Po Grenoble : dix personnes condamnées pour avoir menacé de mort une enseignante « islamo-gauchiste »

      Lors de la polémique qui visait Sciences Po Grenoble en mars 2021, certains journalistes, à l’instar de Pascal Praud et Caroline Fourest, avaient accusé à tort une enseignante qui avait ensuite subi une vague de cyberharcèlement. Dix personnes ont été condamnées ce vendredi. 

      Ils croyaient, à tort, pouvoir insulter et menacer en toute impunité. En pleine polémique sur Sciences Po Grenoble, accusée d’être un repaire d’« islamo-gauchistes », les journalistes Caroline Fourest et Pascal Praud avaient fait circuler plusieurs mensonges pour dénoncer le rôle d’Anne-Laure Amilhat Szary, directrice du laboratoire de sciences sociales Pacte, rattaché à l’institut d’études politiques (IEP) de Grenoble. L’animateur de CNews avait même révélé son identité dans son émission « L’heure des pros ». 

      Dans la foulée, la chercheuse avait reçu de nombreuses insultes et menaces de mort sur les réseaux sociaux et avait fini par porter plainte contre dix personnes. Ces dernières viennent d’être condamnées ce vendredi par le tribunal judiciaire de Paris pour « cyberharcèlement » à une amende de 3 000 euros avec sursis chacune et à une peine de un an d’inéligibilité. L’une d’entre elles a également été reconnue coupable d’« injures à caractère sexiste ». Les dix prévenus sont également condamnés solidairement à verser à la victime 4 000 euros en réparation de son préjudice moral, et 1 500 euros au titre de ses frais d’avocat.

      https://www.mediapart.fr/journal/france/130123/sciences-po-grenoble-dix-personnes-condamnees-pour-avoir-menace-de-mort-un

    • Cyberharcèlement d’une enseignante de l’IEP de Grenoble : les auteurs condamnés à une amende

      La sanction est tombée pour les seniors coupables de harcèlement à l’encontre d’#Anne-Laure_Amilhat_Szary. Ils écopent de 3 000 euros d’amende avec sursis et d’un an d’inéligibilité.

      La justice ne laisse plus le cyberharcèlement impuni, même quand ses auteurs sont des seniors jusqu’à présent sans histoire. Les 10 prévenus accusés de harcèlement en ligne et de menace de mort à l’encontre d’Anne-Laure Amilhat Szary, professeure des universités, dans le cadre de la polémique sur l’Institut d’études politiques de Grenoble en mars 2021, ont été reconnus coupable par le tribunal correctionnel de Paris ce vendredi 13 janvier. L’un d’entre eux est également condamné pour injure sexiste. Ils écopent tous de 3 000 euros d’amende avec sursis et d’un an d’inéligibilité. Ils doivent également collectivement verser à la victime 4 000 euros pour préjudice moral et 1 500 euros pour ses frais d’avocat.

      De quoi donner tort à l’un d’entre eux, Dominic V., 56 ans absent lors de l’audience le 2 décembre et qui avait déclaré lors de sa garde à vue que « seuls des rappels à la loi sont prononcés » dans ce genre de cas. Les condamnés se sont retrouvés acteurs d’une polémique à tiroir complexe dont ils ne savaient souvent rien, ou pas grand-chose. Pour rappel, leur victime, Anne-Laure Amilhat Szary, 52 ans, est l’ancienne directrice du laboratoire de sciences sociales de Grenoble. Son nom a été propulsé dans le débat public il y a un an et demi, après l’affichage sur les murs du campus de l’IEP de Grenoble par des étudiants du nom de deux professeurs taxés de fascisme et d’islamophobie. Une démarche irresponsable quelques mois seulement après l’assassinat de Samuel Paty, enseignant de géographie accusé à tort d’islamophobie sur les réseaux sociaux.

      L’un des deux enseignants grenoblois mis en cause, Klaus Kinzler, avait alors décidé de répondre médiatiquement et jeté en pâture, avec la complicité de Pascal Praud sur CNews, le nom d’Anne-Laure Amilhat Szary. Il lui reprochait de l’avoir recadré après un échange de mail dans lequel il remettait en cause la présence du mot « islamophobie » sur le même plan que « racisme » et « antisémitisme », dans l’intitulé d’un séminaire sur les discriminations. Klaus Kinzler a par la suite été suspendu en décembre 2021 pour avoir tenu « des propos diffamatoires dans plusieurs médias contre l’établissement d’enseignement supérieur dans lequel il est en poste ».

      Raphaël Kempf, l’avocat de la victime, rappelle à Libération que « l’enquête a démontré que ces enquêtes provenaient de l’extrême droite [beaucoup des messages incriminés ont été posté sur des groupes Facebook de soutien à Eric Zemmour ou Marion Maréchal Le Pen, ndlr]. Le danger de ce courant politique est tel aujourd’hui qu’il met en danger des universitaires et des enseignants ».

      https://www.liberation.fr/societe/police-justice/cyberharcelement-dune-enseignante-de-liep-de-grenoble-les-auteurs-condamn

  • L’écrivain Serge Livrozet, anarchiste et militant anti-carcéral, est mort à 83 ans
    https://www.francetvinfo.fr/culture/livres/l-ecrivain-serge-livrozet-anarchiste-et-militant-anti-carceral-est-mort

    Il était une figure des milieux anarchistes et anti-carcéraux, du Comité d’action des prisonniers de Michel Foucault à Mai-68 et il avait participé aux débuts du quotidien Libération. Serge Livrozet est mort dans la région de Nice à 83 ans, ont annoncé mercredi ses proches à l’AFP. L’intellectuel s’est éteint "des suites d’une longue maladie", ont-ils précisé, rappelant qu’il fut "l’un des meneurs des révoltes qui secouèrent les prisons françaises dans les années 1970"_.

    Plombier, perceur de coffres-forts, puis écrivain

    Né le 21 octobre 1939 à Toulon, issu d’un milieu modeste, Serge Livrozet racontait avoir commencé à travailler comme plombier à 13 ans, avant de percer des coffres-forts : "Le seul moyen de sortir de ma condition sociale, c’était (de) prendre de l’argent là où je considérais qu’il y en avait trop", déclarait-il dans un documentaire qui lui a été consacré en 2017, La Mort se mérite de Nicolas Drolc.

    Parmi ses combats, il a participé à Mai-1968 et cofondé avec le philosophe Michel Foucault le Comité d’action des prisonniers, militant pour l’abolition des prisons. Il a fait partie des tout premiers fondateurs du journal Libération, qu’il a quitté très rapidement. Serge Livrozet est l’auteur d’une quinzaine de romans et d’essais, dont De la prison à la révolte et Lettre d’amour à l’enfant que je n’aurai pas (réédité en 2022 par L’Esprit frappeur). Par ailleurs, il est apparu au cinéma chez Laurent Cantet (L’emploi du temps en 2001).

    Emprisonné dans une affaire de faux-monnayage, puis acquitté

    Dans les années 1980, Livrozet avait défrayé la chronique judiciaire, étant soupçonné d’avoir géré une imprimerie parisienne de faux billets, dans ce qui paraissait alors comme la plus grosse affaire de faux-monnayage de l’Histoire. Il avait été incarcéré préventivement dix mois dans cette affaire, le temps d’écrire L’empreinte, dénonçant l’acharnement à son encontre, et a finalement été acquitté.

    "Chaque fois que je me suis trouvé confronté à un pouvoir quelconque, carcéral, judiciaire, économique, hospitalier ou encore religieux, je me suis retrouvé confronté à des gens qui voulaient s’emparer de mon esprit", confiait-il dans La Mort se mérite. "La société a besoin d’avoir la mainmise sur les cerveaux... Un type comme moi, je suis gênant parce que je ne rentre dans aucun moule prédéfini."

    LA MORT SE MÉRITE, Nicolas Drolc - 2017 - 90 minutes
    https://vimeo.com/199226893


    L’écrivain français Serge Livrozet le 13 novembre 1989, lors de sa comparution devant la cour d’assises de Paris pour contrefaçon de billets, une affaire dans laquelle il fut acquitté. (JEAN-LOUP GAUTREAU / AFP)

    #Serge_Livrozet #film #prison #luttes_anticarcérales

    • Mort de Serge Livrozet : société, tu l’auras pas
      https://www.liberation.fr/societe/police-justice/serge-livrozet-societe-tu-ne-las-pas-eu-20221202_D4DXLGGCDZE7XNUQKMZVKI7CL4/?redirected=1

      Taulard, écrivain, militant, figure de la contestation des prisonniers dans les années 70, éphémère compagnon de route de « Libé », acteur chez Laurent Cantet… Serge Livrozet s’est refusé toute sa vie à la société, luttant contre l’injustice et le déterminisme social. Il est mort à 83 ans.

      Serge Livrozet est enfin mort. Taulard, écrivain, militant, figure de la contestation des prisonniers dans les années 70, dont la voix et la pensée se font entendre par-delà les murs des maisons d’arrêt, étendard des luttes contre l’administration pénitentiaire derrière « les barreaux du silence », l’homme représentait aussi la marge, l’exceptionnelle marge libertaire de celui qui se refuse à la société tout en refusant de la quitter pour mieux la combattre. Né en 1939 à Toulon (Var), issu d’un milieu modeste, marqué dans son enfance par la guerre, fréquentant des voyous quand sa mère, prostituée, travaillait la nuit, apprenti plombier à 13 ans, il est incarcéré dans les années 60 pour des séries de cambriolages. « Pour moi, le seul moyen de sortir de ma condition sociale, c’était d’ouvrir des coffres-forts et de prendre de l’argent là où je considérais qu’il y en avait trop », expliquait-il à la télévision dans les années 70. Vingt ans plus tard, devant Mireille Dumas, il précisait : « Pourquoi la société ne m’a pas donné, à cet âge-là, les mêmes chances qu’à tout le monde ? Je n’aurais jamais fait délinquant. C’est pour cela que je lui en ai voulu à la société, et que je lui en voudrai toujours, non pas pour moi car je m’en suis tiré, mais pour les autres. » Une guerre contre la structure et ses règles, contre l’injustice et le déterminisme social, au nom de tous mais avec des effets limités, qu’il aura longtemps menée. « Si je ne m’étais pas révolté, je n’aurais rien fait de ma vie. »

      « Faire savoir ce qu’est la prison »

      L’organisation de sa révolte commence derrière les barreaux, où les conditions de détention sont insupportables, et où Livrozet se forme intellectuellement, notamment à la prison de Lille-Loos, où il lit Marx et passera ensuite le bac et un diplôme de comptabilité, puis à la prison de Melun (Seine-et-Marne), où il fait valoir des droits pour les prisonniers, comme les congés payés. En 1971, Livrozet participe au Groupe d’information sur les prisons, lancé par Michel Foucault – avec qui Livrozet correspond –, Pierre Vidal-Naquet et Jean-Marie Domenach. Le GIP, en donnant la parole aux prisonniers, notamment via des formulaires passés aux familles, et aux acteurs du secteur pénitentiaire, veut faire connaître la réalité de l’univers carcéral, « l’une des régions cachées de notre système social. […] Nous nous proposons de faire savoir ce qu’est la prison : qui y va, pourquoi et comment on y va, ce qui s’y passe, […] comment on en sort et ce que c’est, dans notre société, d’en être sortis », écrivait Foucault dans un manifeste auquel souscrivent magistrats, avocats, médecins ou journalistes. En naissent des doléances, prison par prison, des documents sur les conditions intolérables que subissent les prisonniers.

      « La chose qui m’a le plus écœurée et le plus fait de peine, c’est d’avoir vu les gens attachés pendant une semaine et plus. Je puis affirmer sous la foi du serment qu’on ne les détachait pas pour manger », témoigne par exemple la psychiatre de la maison d’arrêt de Toul (Meurthe-et-Moselle) en septembre 1971. Ce même mois, aux Etats-Unis, les révoltes de la prison d’Attica font 39 morts. En France, Claude Buffet et Roger Bontems, après des violences exercées sur des détenus, prennent trois otages à la centrale de Clairvaux (Aube) avant d’en tuer deux. Les prisons sont des poudrières aveugles, qui exploseront quelques mois plus tard.

      Livrozet, libéré en 1972, adoubé par Foucault avec qui il noue une solide amitié, prend ensuite la relève du GIP, que l’auteur de Surveiller et Punir dissout la même année, en créant le Comité d’action des prisonniers, mouvement constitué de détenus qui demandent alors l’abolition de la prison – « la prison ne réhabilite pas le “taulard” mais l’entraîne dans un engrenage sans fin » – et avancent des motivations politiques qui se retrouvent ensuite dans le premier ouvrage de Livrozet, De la prison à la révolte. Sorti en 1973, le livre fait naître un auteur original, taulard au réalisme documenté autant qu’intellectuel de la condition de prisonnier, penseur d’une « philosophie du peuple », comme l’écrit Foucault dans sa préface.

      « On le croisait, il n’avait aucune place précise »

      A l’automne 1972, rue de Bretagne, à Paris, dans la salle enfumée au fond du couloir de l’Agence de presse Libération, Livrozet participe à certaines réunions préparatoires à la naissance du quotidien que vous lisez en ce moment même. « C’était un compagnon, dans le premier cercle du journal, se souvient un ancien directeur de la rédaction. On le croisait, il n’avait aucune place précise. Je ne crois pas qu’il ait jamais fait partie de l’équipe au sens strict. C’était une grande gueule, un très bon orateur, qui défendait beaucoup de choses. » Le journal relaie les luttes sociales ainsi que la situation catastrophique des prisons, et Livrozet, en militant, « appuyait ce projet qui pouvait être en mesure de défendre ses propres combats ». Des divergences de vues et une fibre anarchiste résolument contestataire le tiennent néanmoins à l’écart du noyau de l’équipe.

      En revanche, sa femme Annie, claviste, « une fille extrêmement amusante, blonde péroxydée, qui vibrait de passion pour lui et chantait Dans la vie faut pas s’en faire », comme la décrit une ancienne journaliste, travaille à Libé et participe notamment à la rubrique Taulards. C’est l’époque où les petites mains du journal achètent des carnets de timbres pour que les prisonniers puissent correspondre. « On cantinait, on était à fond là-dedans », sourit une autre, en évoquant le Comité d’action des prisonniers. Livrozet, ombre qui passe parfois discuter des prisons dans la rédaction, est, lui, décrit tantôt comme « un gars nonchalant, qui cultivait le look négligé – à cette époque, la matérialité n’était pas essentielle », tantôt comme « assez beau mec, grand, sec, plutôt élégant, parlant beaucoup, dragueur, charmeur, baratineur, hâbleur… mais un véritable bandit. Du grand banditisme, pas de la délinquance. Qui estimait toutefois qu’il y avait des choses anormales qui se passaient dans les prisons ».

      Neuf ans au total derrière les barreaux, un cigarillo entre les lèvres et voilà Livrozet devenu homme de lettres dans la mitterrandie des années 80. Il fonde sa maison d’édition, les Lettres libres, délivre des essais, des fictions… Et patatras, il est arrêté, « ainsi que trois autres personnes, le 29 août 1986 après la découverte, dans l’imprimerie parisienne de sa maison d’édition, de 70 millions de fausses coupures de 100 francs », nous apprend sèchement le Monde. Après une longue bataille judiciaire et quelques mois de détention, Livrozet est relâché, son associé ayant reconnu avoir fabriqué les faux billets à son insu.

      « Mieux vaut fumer, boire et baiser, tu meurs plus tard »

      Libre, Livrozet retourne alors dans le Sud, à Nice, ainsi qu’à l’écriture, une quinzaine d’ouvrages : plaidoyer contre la peine de mort, thriller policier en forme de variation sur l’affaire du sang contaminé, participation à la collection du « Poulpe » de Jean-Bernard Pouy… En promo, il n’oublie jamais un petit coup de pique à cette société honnie. « Je ne pense pas que l’homme naisse bon ou mauvais, criminel-né ou pas. Ce sont des recherches d’explications qui culpabilisent plus l’individu qu’elles ne cernent les causes sociales, économiques voire psychologiques de la délinquance, explique-t-il à France 3 en 1992 alors que la France découvrait les émeutes à Sartrouville ou Vaulx-en-Velin. Quand on voit les banlieues qui explosent, on cherche toujours à dire : oui, mais c’est des voyous. Ce ne sont pas des voyous-nés, ils sont nés là et ça les rend voyous. Pourquoi la société fait naître et vivre des gens dans des endroits pareils ? » « Cette société pourrie crée les conditions de la misère. Il ne faut pas pleurer, il faut s’indigner », complète-t-il sur Radio libertaire, où il a aussi animé l’émission Humeur noire.

      Au tournant des années 2000, Livrozet abandonne la plume et s’essaie au cinéma, cette usine à reconversion. Derrière la caméra comme conseiller technique dans le téléfilm Femme de voyou (1991) de Georges Birtschansky. Devant la caméra pour Laurent Cantet, qui le remarque lors d’une de ses interventions télé, et lui offre dans l’Emploi du temps (2001) le rôle d’un malfaiteur (lire ci-dessous). Il remet le couvert quinze ans plus tard aux côtés de Gilbert Melki dans Vendeur. Il participe aussi au documentaire de Nicolas Drolc, Sur les toits (2014), où au côté d’Henri Leclerc et d’anciens détenus, il ausculte la trentaine de mutineries dans les prisons françaises durant les années 1971-1972. Avant que le cinéaste ne le suive pour un formidable portrait en grand : La mort se mérite (2017). Dans ce film en noir et blanc, Serge Livrozet, vieilli mais toujours souriant, sorti d’une opération lourde, livre ses considérations libertaires sur la vie, la prison, la mort. Et la société. Avec une pointe d’amertume : « On pensait que la révolte allait arriver, elle n’est pas arrivée. Et elle n’est pas près d’arriver. » Ou d’humour : « Regardez le Christ, il fumait pas, il buvait pas, il baisait pas, il est mort à 33 ans, en étant fils de Dieu. Mieux vaut fumer, boire et baiser, tu meurs plus tard. »

      Il ressort aussi de ce parcours fracassé que cette vie, inégalitaire, injuste, Livrozet ne l’aime pas. « La vie est absurde, c’est éphémère, c’est rien du tout, explique-t-il, cigare en main. C’est très précaire, moi je n’en voulais pas de ça. C’est pourquoi j’ai écrit des livres qui incitaient à ne pas donner naissance à d’autres personnes en mesure de souffrir comme je souffre moi-même. » Mardi, Serge Livrozet a enfin quitté ce monde « où [il] n’aurait pas voulu naître » et qui l’aura détenu 83 ans.

      Laurent Cantet, cinéaste de « l’Emploi du temps » : « Un homme tellement singulier »

      « Ce qui le caractérisait, c’est le romanesque, qu’il incarnait de plain-pied. Sa vie a été romanesque, et il adorait la raconter, sans en tirer gloire, mais avec un plaisir de conteur gourmand. C’était un grand séducteur, et son œil souriait chaque fois qu’il sentait qu’une phrase faisait mouche. « Le personnage que j’ai imaginé s’est largement inspiré de lui. J’étais en train d’écrire quand je l’ai vu pour la première fois dans un talk-show. L’impression tout de suite d’être face à un homme tellement singulier que l’envie de lui proposer le rôle s’est imposée instantanément. Dès le lendemain, je l’ai contacté, et sans aucune hésitation, il a accepté la proposition. Il n’avait jamais joué dans un film mais je lui proposais une expérience de plus dans sa vie qui en comptait déjà tellement, et ça l’amusait je crois. « J’ai un souvenir très précis des journées de répétition où progressivement, il a endossé le personnage, ou plutôt donné corps au personnage, prêté sa voix au timbre chaleureux, à la rythmique très particulière, qui la rend reconnaissable entre toutes. Il corrigeait des dialogues, ajoutant un mot d’argot, qui était sa langue, et donc qui sonnait tout de suite très juste. Il rectifiait un rouage d’une arnaque qu’il ne trouvait pas à la hauteur. Je me félicite d’avoir compris tout de suite qu’il fallait le prendre d’un bloc, adapter le personnage à ce qu’il proposait et pas l’inverse. En assumer l’étrangeté aussi, qui faisait tout son charme. « Je crois qu’il aimait beaucoup le film, qu’il a présenté à de multiples reprises lors de la sortie, avec un plaisir et une chaleur qui me touchaient beaucoup. » Recueilli par Didier Péron

      #voyou #philosophe #comité_d'action_des_prisonniers #CAP

    • Un journal militant anti-carcéral : le comité d’Action des Prisonniers (CAP) de 1972 à 1980

      https://paris-luttes.info/un-journal-militant-anti-carceral-925

      Créé par d’anciens détenus, dont Serge Livrozet, Claude Vaudez, Michel Boraley, le C.A.P (Comité d’Action des Prisonniers), est une association lancée fin novembre 1972 qui publie un journal mensuel avec textes d’analyse, informations sur les prisons et lettres de prisonniers. Il y aura 67 numéros jusqu’en 1980.

      Sur les toits., film complet, précédemment référencé par @unagi et @rezo https://www.youtube.com/watch?v=rsHXdpCKBEM


      et dont @vanderling avait signalé la très bonne bande son https://seenthis.net/messages/827114

      #journal_des_prisonniers #prisonniers #révolte

    • En guise d’hommage, lundimatin republie cet article de Corinne Morel Darleux.
      https://lundi.am/De-luttes-de-taule-et-de-mots-Corinne-Morel-Darleux

      Sur le travail de Nicolas Drolc et sa rencontre avec Livrozet
      https://seenthis.net/messages/827114#message844813
      et la bande originale de son doc « Sur les toits » par King Automatic & Mr Verdun sur le label nantais Kizmiaz records
      https://kizmiazrecords.bandcamp.com/album/kz026-sur-les-toits

  • Face aux épidémies, la mollesse du gouvernement n’est pas sérieuse – l’édito de Ration double la gauche, les syndicats, les révolutionnaires
    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/editorial/face-aux-epidemies-la-mollesse-du-gouvernement-nest-pas-serieuse-20221130
    https://www.liberation.fr/resizer/F5cbVx28JWPAOrRS7k_BQvokTZg=/1200x0/filters:format(jpg):quality(70):focal(3565x2795:3575x2805)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/liberation/DEGQMU2H7FAMHJ467Y7WZI3BVY.jpg
    Les urgences de l’hôpital André-Grégoire à Montreuil (Seine-Saint-Denis), le 14 juin. (Marie Rouge/Libération)

    Confronté à une triple épidémie hivernale et fragilisé par les crises successives, le système hospitalier ne cesse d’envoyer des alertes. Les réponses que l’exécutif y apporte depuis des semaines sont d’une légèreté déconcertante.

    Cela fait plusieurs semaines qu’ici ou là, la sonnette d’alarme est tirée : le froid arrive, les fenêtres vont se refermer et les virus s’en donner à cœur joie. Une évidence comme le nez rougi au milieu de la figure. Nous sommes pour la plupart convaincus qu’il va falloir « vivre avec » le virus du #Covid, comme nous « vivons avec » celui de la grippe saisonnière depuis longtemps. Est-ce une raison pour rester les bras ballants et les sinus au vent ? Evidemment non, pour trois raisons. Nous savons aujourd’hui que certains gestes de base permettent de limiter la diffusion des virus, à commencer par le port du #masque et le lavage des mains [Pittet, sors de ce corps... ndc] . Cela ne coûte rien de les appliquer. Il existe désormais des vaccins dont le rappel diminue de 50 % le risque de transmission du virus (aux plus âgés et aux plus faibles notamment). Surtout, l’état des structures hospitalières est tel que l’on ne peut plus courir le risque d’engorger des hôpitaux déjà fragilisés par une épidémie de bronchiolite en plein boum.

    Dans ce contexte, la sagesse aurait été, de la part du gouvernement, d’imposer le port du masque dans les transports en commun [pour l’enlever au travail, à l’école, dans les salles d’attente de la Caf et d’ailleurs ? ndc ] dès la fin des beaux jours. Il suffit d’une ou deux personnes non masquées, malades du Covid ou de la grippe, dans une rame de métro ou de RER surchargée, pour contaminer plusieurs personnes alentour. C’est ce qui est en train de se passer avec ces deux épidémies qui progressent de concert. Il a fallu attendre cette semaine pour que le gouvernement appelle à porter le masque dans des zones de promiscuité et à se faire vacciner. Cette mollesse n’est pas sérieuse. De même, constater qu’aucun progrès réel n’a été fait sur la qualité de l’#air en intérieur dans les #écoles laisse songeur. Pendant ce temps-là, les structures hospitalières, où les conditions de travail se sont encore dégradées, peinent à surmonter une épidémie de bronchiolite. On n’ose imaginer l’impact sur les hôpitaux d’une flambée de la grippe combinée à l’arrivée d’une neuvième vague d’ampleur du Covid.

    edit avec pas mal de #confusion, ingrédient de base au pays des Lumières éteintes

    #hôpital #santé_publique #RDR #réduction_des_risques

    • A Londres et Paris, le même déni de l’effondrement du système de santé, Christian Lehmann
      https://www.liberation.fr/societe/sante/journal-depidemie-a-londres-et-paris-le-meme-deni-de-leffondrement-du-sys

      Le système de santé s’est effondré. Ces mots, qu’aucune autorité sanitaire ne veut entendre, ne devraient pas étonner ceux, dont je suis, qui depuis plus de vingt-cinq ans alertent en vain sur la situation, et bataillent au quotidien dans leurs cabinets et leurs services pour tenter de s’opposer aux décisions politiques et économiques qui nous ont collectivement amené à cette situation. Et pourtant, ces mots sont difficiles à intégrer, même pour nous, au cœur du système. (...) Même nous, qui tentions d’alerter sur les conséquences de directives prises par des tutelles à qui seule importait la maîtrise des dépenses d’un système social jugé trop dispendieux, même nous, qui observions l’eau monter dans les compartiments supposément étanches, qui assistions impuissants à l’absorption de la biologie médicale et des cliniques par les grands groupes privés, à la prise de pouvoir des assureurs à la Sécurité sociale et au ministère, n’arrivions à envisager pleinement ce qui se profilait, ni à quoi ressemblerait ce monde d’après.

      « Bon, faut pas déconner, ça coûte du pognon tout ça »

      Le Covid, dans ce contexte, fut la tempête parfaite. Les soignants, dans leur grande majorité, firent front, malgré le dénuement des débuts, malgré les mensonges. Dans ces premiers mois, face à des instances décisionnaires tétanisées qui pour la première fois depuis des décennies étaient confrontées au réel, les injonctions bureaucratiques, les vexations administratives, durent céder devant l’urgence. Cela eût un temps. Comme me l’avait dit Ohian, 34 ans, urgentiste à Toulouse, dès juillet 2020 : « On nous a filé des moyens temporaires pour passer la crise, qui en pratique correspondent aux moyens dont on aurait besoin pour bosser décemment en temps normal. Les trois quart de ces moyens ont été repris dès le bordel fini et on nous a gentiment expliqué que oui, mais bon, faut pas déconner non plus, hein, ça coûte du pognon tout ça. » Et au stade où nous en sommes, ce n’est même plus une question d’argent, c’est une question de survie. Le système de santé s’est effondré et nous évoluons, sans parfois en avoir bien conscience, dans des ruines.

      (...) les annonces ministérielles répétées selon lesquelles les médecins généralistes seront amenés à prendre en charge plus de patients chaque jour grâce aux réformes en cours, les injonctions à « soulager l’hôpital » en participant à la permanence des soins, alors que la durée moyenne de travail d’un généraliste est de 53 heures par semaine (DREES), sont d’autres symptômes de ce déni constant de l’effondrement du système.
      https://justpaste.it/caedr

  • Lanceurs d’alerte dans la police : « Je ne connais aucun agent qui est épanoui dans son travail »

    Pour la première fois, six fonctionnaires témoignent des dysfonctionnements de leur institution dans « Police, la loi de l’#omerta ». Les deux auteurs de cet ouvrage alarmant et salutaire, une capitaine et un ancien gardien de la paix, espèrent ainsi libérer la parole de leurs collègues et remédier aux maux qui les rongent.

    « #Violences_policières, #sexisme et #racisme ordinaires, #dissimulation_de_délits, abondance de #faux_en_écriture_publique, #corruption, #tyrannie_hiérarchique, #radicalisation médiatisée des syndicats ou encore politique du chiffre… » Voilà une liste (non exhaustive) des #maux_policiers que dénoncent #Agnès_Naudin et #Fabien_Bilheran dans le livre Police, la loi de l’omerta (éditions Le Cherche Midi), qui paraît ce jeudi. Elle est capitaine, passée par la police aux frontières et la brigade des mineurs, autrice de plusieurs livres et porte-parole de la FSU Intérieur. Avant de quitter « la boîte », lui était gardien de la paix, ayant officié jusqu’à la brigade des stups du 36, quai des Orfèvres, l’ancien siège de la prestigieuse police judiciaire parisienne.

    Dans cet ouvrage, leurs deux témoignages sont assortis de ceux de quatre autres policiers. Il y a #Serge_Supersac, #CRS en bagarre avec les syndicats et la compromission de collègues, qui vit mal les audits de l’Inspection générale de la police nationale sur son commandement, et se tourne vers la recherche autour du lien police-population. Il y a #Jean-Marc_Cantais, confronté au suicide d’un collègue, puis catapulté à la tête d’unités dont il dénonce les indigences et les violences, et qui se liguent contre lui jusque devant les tribunaux. Il y a #Stéphane_Lemercier, officier confronté, de la Somme à l’Hérault, à des hiérarchies erratiques et à l’inanité de la politique du chiffre, qui finit par se réfugier dans les études et l’écriture de livres sur la police. Ou encore #Christophe_Annunziata, lâché deux fois par son administration et les syndicats, d’abord quand il a souffert de #harcèlement_moral (après qu’un collègue a mimé sur lui deux égorgements), puis quand il a cherché à dénoncer un membre de sa brigade des mineurs, qu’il soupçonne… de corruption de mineurs (ce dernier est actuellement mis en examen).

    Ce livre dense ne résout pas les problèmes qu’il pose (ni, a fortiori, ceux qu’il élude). Mais ces six cas particuliers, mis bout à bout, montrent de l’intérieur une institution policière dysfonctionnelle, tiraillée entre un pouvoir politique passionné de chiffres, des syndicats omnipotents, une direction recroquevillée sur des principes éloignés de l’intérêt général, des individus aux comportements délétères qui ne sont pas sanctionnés et d’autres qui sont placardisés pour avoir alerté sur les dérives de leurs collègues. L’ouvrage résonne comme un coup de semonce. Assez pour ébranler la chappe de plomb recouvrant la police nationale ? Agnès Naudin, interviewée par Libé avec son coauteur Fabien Bilheran, ne se pose (presque) pas la question : « De toute façon, tant qu’on ne va pas dans les médias, on ne les fait pas chier. Et tant qu’on ne les fait pas chier, il n’y a rien qui change. »

    Quelle a été la genèse de ce livre ?

    Fabien Bilheran : A la fin de l’année 2021, alors que je demandais depuis un an la rupture conventionnelle [il l’a obtenue en juin 2022, ndlr], j’ai appris qu’Agnès s’intéressait au sujet, en tant que porte-parole de la Fédération syndicale unitaire [0,2 % des suffrages aux élections professionnelles du ministère de l’Intérieur en 2018]. On est entrés en contact, et après quelques heures de discussion on en est arrivés à parler de ce livre. Depuis mon engagement auprès des Policiers en colère en 2016, je gardais dans un coin de la tête la possibilité de porter ce genre de témoignages. Entre le réseau d’Agnès et le fait que je suis membre de l’association de prévention du suicide des policiers Peps-SOS, c’est presque les témoins qui venaient à nous. On a même dû faire un tri.

    Agnès Naudin : Ensuite, il a fallu franchir les barrières de la méfiance, répondre à la question que les témoins se posaient : « A quoi ça sert de parler publiquement, après tout ce que j’ai déjà fait pour dénoncer ce qui ne va pas ? » On s’est aussi interrogés sur la légalité, la loyauté, le devoir de réserve. On a fait un gros travail de collecte de preuves. On a écarté des témoignages qui risquaient d’être remis en question. Enfin, toutes les personnes qui parlent dans ce livre sont déléguées de la FSU. Ça faisait partie des conditions sine qua non, pour moi, dès le départ, afin qu’elles soient un minimum protégées de l’administration.

    Les élections professionnelles au ministère de l’Intérieur se tiennent du 1er au 8 décembre. Ce n’est pas un hasard de sortir le livre maintenant ?

    A.N. : Je botte en touche, et vous pouvez l’écrire.

    F.B. : Je n’ai pas d’engagements syndicaux, et je ne suis pas soumis à la réserve électorale. J’estime que les syndicats majoritaires font partie du problème. Ils exercent un électoralisme de court terme, car ils participent à l’obtention des grades et des mutations pour les agents. Quand on n’est pas dans un syndicat, il est beaucoup plus difficile d’obtenir son avancement, même si on le mérite ou qu’on a de l’ancienneté. Publier ce livre maintenant permet de faire réfléchir les policiers au syndicalisme dont ils ont envie. Est-ce qu’ils veulent un syndicalisme de clientèle, qui va juste surfer sur les faits divers ou la dernière polémique ? Ou, au contraire, est-ce qu’ils veulent un syndicalisme qui ait une vision à long terme, qui ait une vision du collectif, au-delà des intérêts particuliers ?
    Guerre des images
    Les syndicats, bras armé de la police pour la communication de crise
    Police / Justice
    26 sept. 2022abonnés

    Les syndicats ou les associations de policiers n’ont, selon vous, pas le pouvoir de faire bouger les lignes ?

    F.B. : J’ai été dans un syndicat, j’ai été dans les Policiers en colère. Si aujourd’hui j’ai quitté la police, c’est parce que j’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir, mais que ça n’a pas suffi pour changer les choses, notamment sur la question du suicide, qui me tient particulièrement à cœur. C’est la plus grande cause de mortalité des gardiens de la paix. Contrairement aux discours politiques, et des syndicats majoritaires, qui s’offusquent des refus d’obtempérer toutes les je ne sais pas combien de secondes, le principal danger pour un policier, quand il entre en école de police, c’est le suicide. Quand le ministre en parle, c’est pour dire que le suicide est dû à des problèmes personnels. En réalité, quand on est policier, on est soumis à des interventions qui peuvent être traumatisantes, à des accidents de la route, à la mort, à la violence…

    A.N. : … et à l’ambiance dans les services.

    F.B. : Oui, voilà, aussi à l’ambiance dans les services, à la hiérarchie… On ne peut pas dire que le suicide n’est pas lié au travail. Le travail joue forcément un rôle dans le suicide, et rien n’est fait à ce sujet. C’est pour cela qu’on en arrive à cette extrémité : écrire un bouquin, avec des policiers à visage découvert, c’est parce qu’on est démunis. On a grand espoir, avec ce livre, de porter une autre parole que ce qu’on peut entendre médiatiquement. De faire réfléchir à ce qu’on peut faire de la police, pour qu’elle fonctionne mieux, pour accompagner les agents vers une sérénité au travail. Cette sérénité est la condition essentielle d’une bonne relation avec la population.

    A lire votre livre, on a l’impression que tous les policiers ont l’air de vouloir changer de service, ou de ne pas être heureux là où ils sont…

    A.N. : Je ne dirais pas ça. J’ai croisé plein de fonctionnaires dans les mêmes services depuis des années, qui n’en bougeront plus jusqu’à la retraite. C’est d’ailleurs parfois une difficulté pour la hiérarchie de gérer ces dynamiques-là. C’est surtout vrai ailleurs qu’à Paris, où au contraire on trouve des jeunes en début de carrière, sortis d’école, donc ça bouge vite…

    F.B. : Je suis un peu plus dur. Je ne connais aucun policier qui soit épanoui dans son travail. Quel que soit le lieu, l’endroit, le service, son prestige, qu’il y ait ou non des moyens… Il y a toujours un problème qui vient le contraindre ou qui rend son quotidien compliqué. Que ce soit de manière structurelle ou à cause de difficultés interpersonnelles.

    A.N. : Ce n’est pas que tous les policiers sont malheureux dans ce qu’ils font. Mais il est vrai que je ne connais pas de policier qui trouve du sens à ce qu’il fait. Parce que la sanction administrative n’a pas de sens, la politique pénale n’a pas de sens… Et puis il y a une instrumentalisation des statistiques policières à des fins politiques. Il y a un vrai décalage entre les chiffres affichés et le quotidien vécu des agents. Par exemple, si on veut voir plus de policiers qui s’occupent du stup, on va demander à tous les policiers de faire des infractions à la législation sur les stupéfiants. En conséquence, on va davantage détecter cette délinquance, et donc demander plus de moyens. C’est une boucle infinie.

    Si pas grand-chose ne fonctionne dans la police, qu’espérez-vous de votre livre ?

    A.N. : Soyons fous : qu’il permette de changer la police ! Il faudrait que chaque fonctionnaire qui, à un moment, a la capacité de faire le choix de couvrir un collègue ou pas, se souvienne de ces témoignages, qu’il se souvienne que chaque action a une répercussion. Et c’est à la portée de tout le monde. Je ne sais pas combien de policiers doivent se mobiliser pour que les choses changent, mais ce nombre existe. Pas besoin que les 150 000 agents fassent la révolution. Mais si 500 ou 600 lisent le bouquin, se disent « j’ai déjà été dans ces situations-là, je ne m’en suis pas rendu compte », qu’ils ouvrent les yeux sur leur propre situation… rien que ça, ce serait énorme. Quant à ceux qui s’y retrouveront à l’avenir, même s’ils ne sont pas victimes, mais plutôt comme des moutons à suivre le troupeau, il faut qu’ils disent « non, je suivrai pas ». Peut-être que, dans un groupe de dix, il suffit que deux moutons arrêtent de suivre le troupeau pour que les choses s’améliorent.

    F.B. : Le bouquin révèle une multitude de témoignages, l’idée est qu’il libère la parole. Et ensuite qu’on s’entraide et qu’on s’accompagne face aux représailles de l’administration que l’on peut subir quand on dénonce les dysfonctionnements. On envisage de constituer un collectif structuré pour soutenir les lanceurs d’alerte [de la police] dans leurs démarches. Plus largement, et c’est sûrement utopiste, il faut arriver à toucher un public large. La solution ne viendra pas uniquement de la police, mais aussi de la mobilisation de la société, qui va permettre l’émergence d’une meilleure police. On veut enclencher la dynamique. La réflexion est sociétale, et elle se pose ainsi : qu’est-ce qu’on fait de la police ?

    A.N. : Oui et, quelle police veut-on ? C’est une question qu’on pourrait poser aux citoyens.

    F.B. : Et ce n’est pas à un ministre de l’Intérieur de répondre à ces questions.

    https://www.liberation.fr/societe/police-justice/lanceurs-dalerte-dans-la-police-je-ne-connais-aucun-agent-qui-est-epanoui

    #police #témoignage

    –—

    ajouté à la #métaliste de #témoignages de #forces_de_l'ordre, #CRS, #gardes-frontière, qui témoignent de leur métier. Pour dénoncer ce qu’ils/elles font et leurs collègues font, ou pas :
    https://seenthis.net/messages/723573

  • Compte rendu du Conseil des ministres du 29 novembre 2022 | Gouvernement.fr
    https://www.gouvernement.fr/conseil-des-ministres/compte-rendu-du-conseil-des-ministres-du-29-11-2022#6fc05f79-664d-4c6c-

    Le délestage est une mesure exceptionnelle, mise en oeuvre en dernier recours par les gestionnaires du réseau électrique, pour éviter un déséquilibre du système électrique national. Le 18 novembre, RTE a indiqué qu’il estimait que le risque était faible pour les mois de novembre et décembre, mais qu’il augmentait pour le mois de janvier. Le passage en « rouge » de l’indicateur EcoWatt, qui signifie la possibilité d’un recours à une coupure électrique programmée, fera l’objet d’une communication grand public. Si ces coupures devaient néanmoins intervenir, elles dureraient deux heures consécutives, en affectant alternativement des portions de départements. Les périodes de délestage concerneraient les pics de consommation électrique situés les jours ouvrés, sur des créneaux horaires indicatifs de 8 heures à 13 heures et de 18 heures à 20 heures.

  • Plus de 3 millions de bénéficiaires de l’aide alimentaire en France – Libération
    https://www.liberation.fr/societe/plus-de-3-millions-de-beneficiaires-de-laide-alimentaire-en-france-202211

    Alors que la France connaît une vague inflationniste, l’Insee a rendu publiques ses données sur les personnes ayant recours aux réseaux associatifs de distribution de nourriture. Quatre bénéficiaires sur cinq souffrent de « privations alimentaires ».

    C’est un « portrait social » dressé ce mercredi par l’Insee qui tombe à point nommé. Alors que le sujet de la précarité alimentaire est brûlant, face à la flambée vertigineuse du prix des denrées, l’institut vient de rendre public ses travaux annuels sur les évolutions économiques et sociales en France. Avec cette fois-ci un éclairage particulier sur les bénéficiaires de l’aide alimentaire. Entre novembre et décembre 2021, les statisticiens de l’Insee ont ainsi enquêté auprès de ces personnes, en grande difficulté financière, qui se rendent dans un ou des centres associatifs de distribution d’aide afin de recevoir ou acheter des produits alimentaires. En intégrant tous les individus composant le ménage de ces bénéficiaires, l’Insee estime qu’entre 3,2 et 3,5 millions de personnes ont reçu en 2021 des aides alimentaires (colis, achats en épiceries solidaires ou distribution de repas prêts à consommer) par le réseau associatif.

    #aide_alimentaire #pauvreté #caritatif

    • L’embrouille des millions, quelle honte.

      Si tu calcules bien, réduit à 3 personnes qui ont faim toute l’année, et avec un fond de 60€, ça fait 20€ par personne, sur 365 jours ça fait à peine 6 cents par jour par personne si tout l’argent leur est bein reversé. Bon appétit les amis, vous reprendrez bien un peu de papier journal trempé dans l’eau pour le midi mais seulement l’année prochaine hein.

      En intégrant tous les individus composant le ménage de ces bénéficiaires, l’Insee estime qu’ entre 3,2 et 3,5 millions de personnes ont reçu en 2021 des aides alimentaires (colis, achats en épiceries solidaires ou distribution de repas prêts à consommer) par le réseau associatif.

      Certes, les données datent de l’année dernière, mais elles se révèlent éclairantes à l’aune du contexte inflationniste de 2022. Contexte qui a convaincu le Conseil national de l’alimentation (CNA) de recommander, en octobre dernier, d’inscrire le droit à l’alimentation dans la législation française pour en « garantir l’accès à tous et toutes ». Contexte qui a également valu à la première ministre, Elisabeth Borne, d’annoncer en début de mois la création d’un « fonds pour une aide alimentaire durable »de 60 millions d’euros en 2023

      #Borne_lahonte

    • on se souvient qu’une loi contre le gaspillage alimentaire (2016) avait fini par imposer qu’une partie des commerces cèdent leurs invendus alimentaires en voie de péremption ou périmés à des assos lorsqu’elles en font la demande, sous certaines conditions, elles ont supposées être habilitées https://solidarites-sante.gouv.fr/affaires-sociales/lutte-contre-l-exclusion/lutte-contre-la-precarite-alimentaire/article/habilitations-a-l-aide-alimentaire?TSPD_101_R0=087dc22938ab20

      dès 2018, des start-up de la récup se sont monté pour monétiser les invendus de manière plus dividualisée et flexible que ce que permettent les entrepôts de la grande distribution déjà sur le créneau (introuvables en centre-villes). leurs clients passent d’abord, et pour le meilleur.

      Chaque jour, des aliments frais sont gaspillés dans des commerces, simplement parce qu’ils n’ont pas été vendus à temps. L’application Too Good To Go permet aux utilisateurs d’acheter des Paniers Surprise [sic] composés de produits invendus à petits prix.

      Tu peux sauver un repas [sic] en quelques clics, et ainsi contribuer à réduire un peu la quantité de gaspillage alimentaire ! Alors, es-tu un vrai Waste Warrior.

      Réveille l’aventurier qui est en toi, parce que le panier peut être composé de plein de produits différents !

      https://toogoodtogo.be/fr-be/blog/mon-premier-toogoodtogo

      #marchandisation

  • Suite à l’article du Canard enchaîné du 16/11, "Ciotti à lui aussi sa Penelope"
    le PNF a ouvert une enquête pour « détournement de fonds public, abus de confiance et recel ».
    https://www.liberation.fr/societe/police-justice/eric-ciotti-le-parquet-national-financier-ouvre-une-enquete-sur-les-emplo

    https://video.twimg.com/ext_tw_video/1595023604588199937/pu/vid/1280x720/TqhQDqHa9CP-neSC.mp4?tag=12


    Eric Ciotti, comme Fillon, s’explique sur les emplois fictifs de son ex épouse. #CiottiRendsLargent #Ciotti #ElectionLR2022 https://t.co/7xjd1yPLrC